Manuel Module Pauvreté - Enquête sur le secteur informel 2001

MANUEL D'ENQUETE

Module : Différentes dimensions de la pauvreté

Objectifs de ce module :

(voir schéma en annexe)

Le principal objectif de ce module est de recueillir la perception des ménages de leurs conditions de vie, et d'avoir leur point de vue global sur les politiques ou stratégies mises en oeuvre. Par rapport à l'approche classique qui consiste à demander le niveau de revenu ou de consommation des ménages, il s'agit ici de connaître leur propre appréciation (appréciation subjective) de leur niveau de bien-être.

On reconnaît aujourd'hui que la pauvreté est un phénomène à multiples dimensions (elle a de multiples facettes et se présente sous diverses formes). Les différentes dimensions possibles de la pauvreté sont ainsi explorées :

  • La perception générale (subjective) de ses conditions de vie (question P1)

  • A partir des biens (items) qui sont estimés par les ménages comme nécessaires (question P2) pour vivre convenablement, on mesure la satisfaction des besoins minimum vitaux (question P3),

  • La pauvreté relative : comment se situent les ménages en termes de niveau de vie par rapport à ceux qui les entourent (les autres ménages de la ville ) (question P4)

  • La pauvreté subjective en termes de difficultés financières.

    • Pour cela, on demande aux ménages de donner ce qu'ils considèrent comme seuil minimum (montant minimum : une estimation subjective) pour vivre dans des conditions décentes, convenables (question P5), un montant que l'on comparera par la suite avec leur revenu (ou consommation) effective.

    • On demande également leur appréciation (subjective) de leur situation financière (question P6)

  • Le degré de vulnérabilité des ménages mesuré par l'instabilité des revenus d'une part (question P7), et par l'évolution du revenu au cours de l'année d'autre part (question P8).

  • Le capital social : degré d'insertion/d'intégration ou d'exclusion de la société ; degré de participation ou de marginalisation dans la société (question P9, P10 et P11). Ainsi, on peut estimer que les personnes exclues/marginalisées socialement sont celles qui ne font pas partie d'association ou de réseaux, celles qui ne bénéficient pas de l'entraide, celles qui ne suivent pas les informations.

  • L'insécurité (question P12)

La dernière série de questions (P13 à P17) porte plus spécifiquement sur les stratégies de lutte contre la pauvreté. Il s'agit de savoir :

  • comment ils définissent principalement la pauvreté (question P13)

  • le caractère prioritaire ou non de la lutte contre la pauvreté (question P14)

  • le niveau d'information sur le processus d'élaboration de la stratégie de lutte contre la pauvreté (SLCP)

  • la participation ou non des ménages au processus

  • l'appréciation des ménages sur les politiques mises en oeuvre.

Instructions préalables :

  • Attention ! il ne faut pas oublier de noter en haut de la page qui est la personne dans le ménage qui a répondu à ce module (numéro identifiant à gauche : numéro d'ordre à deux positions en se référant à la fiche ménage ; nom ou prénom à droite).

  • Choix de la personne qui répond à ce module : Il faut que ce soit la personne qui gère ou qui connaît bien le budget du ménage. A priori, il s'agit du chef de ménage ou bien (ou à défaut) son conjoint.

  • De manière générale, les parties grisées ne doivent pas être remplies par les enquêteurs (sauf pour le numéro identifiant de la personne enquêtée et son nom en haut à la première ligne). Ces parties grisées (à droite des deux colonnes du questionnaire) sont réservées à la codification effectuée par les superviseurs après vérification. Les enquêteurs doivent :

    • entourer le chiffre devant la modalité correspondant à la réponse de l'enquêté (la modalité choisie) pour les questions à une seule réponse

    • noter dans chacune des cases correspondantes le chiffre correspondant à la réponse pour les questions où plusieurs réponses sont demandées (sur différents items).

  • Les questionnaires doivent être remplis au crayon de bois. L'enquêteur doit faire attention en remplissant les questionnaires :

    • Ecrire clairement et distinctement les chiffres ou mots

    • Entourer les chiffres en faisant attention de ne pas déborder sur les cases ou questions autour ni sur les parties grisées

  • Toujours insister pour avoir des réponses pour toutes les questions, même s'ils répondent "je ne sais pas". Il s'agit d'avoir leur perception, même si elle n'est pas juste. Ils doivent bien avoir un avis même si leur opinion est vague.

  • En dernier recours, si après avoir vraiment insisté, l'enquêté est incapable ou ne veut absolument pas donner de réponse, l'enquêteur doit écrire « Ne sait pas » ou « Ne veut pas répondre » à côté des questions ou cases (avec éventuellement une remarque ou explication) pour montrer qu'il a insisté (et rassuré, mis en confiance) la personne enquêtée. Ce sera au superviseur qui vérifie et corrige les questionnaires de codifier 9 ou 99 ou 999 (en fonction du nombre de cases) pour les « ne sait pas » ou « ne veut pas répondre » dans la partie grisée.

  • Remarque : un questionnaire qui comporte beaucoup de « Ne sait pas » ou un grand nombre de questionnaires pour un même enquêteur comportant de « Ne sait pas » pourrait vouloir dire que l'enquêteur n'a pas fait correctement son travail : soit il n'insiste pas assez, soit il passe trop rapidement sur les questions, soit il ne sait pas rassurer et mettre en confiance les personnes enquêtées. Le superviseur peut ainsi intervenir et faire une remarque à l'enquêteur pour mieux le sensibiliser ou lui donner un avertissement.

  • Lorsque l'enquêteur doit traduire et/ou expliquer les questions, il est dès fois nécessaire qu'il se réfère (et donne éventuellement des exemples/précisions) compte tenu des réalités locales.

Exemple : voir plus loin pour la question P15 sur le DSRP, donner le nom utilisé pour désigner ce document dans le pays.

Quelques précisions utiles sur certaines questions

En principe, les modalités de réponses à chaque question sont exposées explicitement (et de façon claire) dans le questionnaire. Nous donnons toutefois ici quelques précisions supplémentaires pour certaines questions où des explications semblent utiles.

Question P1 : Explication des quatre modalités de réponses (un peu différents de la simple notion de riche, moyen et pauvre un peu vague et réducteur) :

  1. Vous vivez bien : le ménage ne connaît pas de problèmes, n'a pas à se plaindre

  2. Ca va à peu près : ça va, mais ça peut être mieux, il y a des petits domaines d'insatisfaction mais qui sont d'une certaine manière mineurs (vie moyenne).

  3. Ca va mais il faut faire attention : il y a une notion de vulnérabilité. Le ménage échappe tout juste à des difficultés majeures (à la frontière) et peut basculer rapidement dans les difficultés suite à un petit changement (du contexte, de l'environnement socio-économique).

  4. Vous vivez difficilement : pas de doute, conditions de vie difficiles.

On demande la « perception » (subjective) de l'enquêté sur les conditions de vie de son ménage.

Question P2 : Bien préciser à la personne enquêtée qu'il s'agit de savoir, pour chaque item, s'il fait partie des besoins minimum (vitaux) pour avoir une condition de vie correcte (décente, convenable). Pour chaque item, remplir les cases soit par le chiffre 1 (si l'enquêté juge l'item vraiment indispensable), soit par le chiffre 2 (s'il l'estime plutôt nécessaire), soit par le chiffre 3 (s'il juge que cet item n'est pas vraiment nécessaire : on peut s'en passer tout en vivant dans des conditions décentes, convenables).

Item 1 : Prendre trois repas par jour tous les jours. Trois repas au moins : il s'agit en général du petit déjeuner, du déjeuner et du dîner. Mais le nom ou les horaires des repas (considérés comme de vrais repas) peuvent varier selon les habitudes du ménage.

Item 5 : Un bon repas les jours de fête ou jour/occasions exceptionnels. Il s'agit par exemple du dimanche ou du vendredi (ou le jour férié de la semaine selon les religions), ou lors des cérémonies, etc.

Item 21 : Pouvoir envoyer les enfants à l'école. Il faut préciser ici que la question est générale et ne concerne pas le contexte spécifique du ménage : Que le ménage ait ou n'ait pas d'enfants en âge d'aller à l'école, on leur demande de manière générale s'ils considèrent que « pouvoir envoyer les enfants à l'école quand ils sont en âge d'être scolarisés » fait partie des besoins minimum d'un ménage.

Item 26 : Ne pas avoir trop d'enfants (maîtrise de la fécondité) La question porte en fait ici sur la possibilité de maîtriser la fécondité (c'est-à-dire pouvoir limiter le nombre d'enfants si on le souhaite : Ne pas avoir trop d'enfants par rapport au nombre d'enfants que le couple souhaite avoir). En d'autres termes, est-ce que c'est nécessaire de pouvoir maîtriser la fécondité pour un ménage ?

Question P3 : Bien expliquer à la personne enquêtée que la question de la satisfaction ici ne se mesure pas dans l'absolu. Même des ménages riches peuvent souhaiter consommer toujours plus qu'il ne consomme. Il s'agit de savoir si par rapport à un niveau de référence (qui est le niveau de consommation minimum pour avoir une vie jugée décente, convenable), le ménage s'estime satisfait ou non.

Remarques : Si le ménage ne consomme pas un produit par choix (parce qu'ils ne veulent pas en consommer, ou ce n'est pas dans leurs habitudes), et non par contrainte (financière ou autre), le ménage peut dire qu'il est satisfait de sa consommation (nulle) de ce produit.

  • On peut prendre l'exemple d'un végétarien. Il ne consomme pas de viande. Mais comme il ne souhaite pas en consommer plus (il n'y a pas de manque), il peut être considéré comme « satisfait » de sa consommation de viande.

  • De même pour l'item 18 : aide aux parents en difficulté : si l'enquêté estime que ses parents ne sont pas en difficulté et/ou que ces derniers n'ont pas besoin d'être aidés, le « besoin minimum » n'existe pas (est donc nul), le ménage peut être considéré comme « satisfait » en la matière.

  • Pour l'item 16 : éducation des enfants : On parle ici de la scolarité allant du primaire aux études supérieures. Si le ménage n'a pas d'enfants ou n'a plus d'enfants à sa charge en âge d'être scolarisé depuis un certain temps (on peut dire depuis plus de deux ans), le ménage n'a plus de besoin en termes d'éducation des enfants. Comme il n'y a pas de besoin à satisfaire (il n'y a pas de manque), le ménage peut être considéré comme « satisfait » de l'éducation des enfants.

Question P4 : Les ménages doivent essayer de situer leur niveau de vie par rapport aux autres ménages de la ville. Bien sûr, cela peut-être difficile, ils ne connaissent pas le niveau de vie de tous les habitants de la ville, mais il s'agit de se situer par rapport à ce qu'ils connaissent ou ce qu'ils voient dans les rues. Il s'agit d'une opinion (perception) subjective. Une opinion (perception) peut être juste ou fausse dans la réalité (objectivement).

Question P5 : Ici encore, il s'agit d'avoir non pas le niveau de revenu souhaité par le ménage dans l'absolu, mais le montant minimum nécessaire pour que l'ensemble des membres du ménage ait une vie qu'il peut juger décente, convenable. Bien préciser que ce n'est pas un montant par tête mais total pour tout le ménage.

Question P7 : C'est aux enquêtés de juger de la stabilité ou non de leur revenu car ça dépend des montants. En principe, ils doivent pouvoir juger eux-mêmes (jugement subjectif). Mais à titre de repère, globalement, on peut juger très instables les revenus qui peuvent varier (baisser) de plus de 20% environ d'un mois à l'autre. Ils sont à peu près stables si les revenus ne varient pas beaucoup (dans une fourchette raisonnable, de plus ou moins 20% au maximum). Les revenus sont jugés stables lorsque les variations sont très faibles et quasiment imperceptibles par le ménage (pas de répercussions majeures sur le niveau habituel de la consommation). Les revenus des fonctionnaires ou des personnes qui travaillent dans le secteur privé formel (avec un contrat) sont des revenus stables par exemple.

Question P8 : Ne pas oublier de répondre pour les deux cas : pour le ménage lui-même d'une part (A), et en général pour les ménages de la ville (B). L'objectif est de savoir si, dans le cas d'une dégradation (ou d'une amélioration), si cela résulte d'une conjoncture défavorable (ou favorable) affectant tout le monde, ou si l'évolution est spécifique au ménage enquêté.

Questions P9 et P10 : Il faut avoir des réponses pour chaque type d'associations ou de relations (pas de cases vides)

Question P11 : Cette question, sur le fait de suivre ou non les informations, concerne la personne enquêtée uniquement (et non l'ensemble des membres du ménage).

Question P12 : il s'agit de mesurer le niveau de l'insécurité au cours de l'année écoulée. L'objectif est d'apprécier le contexte actuel, et non celui d'il y a trois ou quatre ans.

Ne pas oublier de répondre aux trois questions : A personnellement ; B un membre du ménage ; C une personne du quartier, du voisinage.

Question P13 : Il faut avoir des réponses pour chaque proposition : oui ou non (pas de cases vides).

Question P14 : La lutte contre la pauvreté est aujourd'hui considérée comme une priorité par les gouvernements et les bailleurs de fonds (organismes internationaux), et est placée au centre des stratégies de développement. Il s'agit ici de demander l'opinion de l'enquêté : est-ce qu'il estime que ça doit être ou non une priorité pour le pays ? Ou est-ce qu'il considère que c'est un axe (un objectif) secondaire et que d'autres questions doivent être réglées de façon plus urgente.

Question P15 : Le Document de Stratégies de Réduction de la Pauvreté ou DSRP est le nom générique au niveau international du document-cadre qui définit les objectifs précis, les axes et les mesures à mettre en oeuvre dans le cadre de la lutte contre la pauvreté. Les stratégies ont différents noms selon les pays : Stratégies de Lutte Contre la Pauvreté (SLCP) ; ou « cadre stratégique de lutte contre la pauvreté (CSLP) ; ou autres.

Le processus d'élaboration de cette stratégie et du document suppose un approfondissement des connaissances sur la situation du pays en matière de pauvreté, la définition d'objectifs précis et de mesures précises pour les atteindre. Dans ce cadre, on insiste aujourd'hui sur la nécessité d'impliquer et notamment d'informer la population (notion de transparence) sur les différentes étapes du processus. On demande ainsi à l'enquêté s'il est au courant de ce processus en cours dans le pays et si en même temps, il estime que les informations qu'il a sur ce processus sont suffisantes.

Question P16 : Toujours dans le cadre du processus d'élaboration des Stratégies de Lutte Contre la Pauvreté (ou SLCP), on insiste également aujourd'hui sur la nécessité de faire participer la population (notion de processus participatif). La participation peut prendre plusieurs formes :

  • consultation de l'avis de la population ou de certains acteurs-clés de la société (sous forme d'enquête spécifique sur le thème de la pauvreté ou d'interview de groupe)

  • information-débat pour définir les politiques : objectifs, mesures précises, etc. (atelier, séminaire, conférence-débat, réunions)

On demande à l'enquêté s'il a participé d'une manière ou d'une autre à ce processus (s'il a été consulté, enquêté au cours des dernières années sur le thème de la pauvreté ; s'il a été invité à des ateliers / séminaires ou réunions sur ce thème).

Question P17 : On demande la perception globale de la personne enquêtée (qui n'a pas besoin forcément de connaître très précisément le contenu des politiques). S'il estime que les politiques mises en oeuvre actuellement (au cours des deux dernières années par exemple) contribuent à réduire la pauvreté, avec des objectifs et des mesures claires et bien adaptées, entourer 1. S'il estime qu'elles contribuent un peu, mais avec des mesures et des résultats qui ne sont pas très convaincants, entourer 2.

Si non (ou s'il pense que rien n'a été fait), entourer 3.

SCHEMA SUR LES OBJECTIFS DES MODULES QUALITATIFS

Différentes dimensions de la pauvreté

Gouvernance

Démocratie

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Source : ROUBAUD (2001)

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