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Université de PARIS I / Panthéon-Sorbonne Sciences économiques Sciences humaines -... |
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Université de PARIS I / Panthéon-Sorbonne
Sciences économiques
Sciences humaines - Sciences juridiques et politiques
Analyse économique
de l’effet de serre
Thèse pour le Doctorat en Economie
(arrêté du 30 mars 1992)
présentée et soutenue par Sébastien Rouillon
Directeur de recherche : Professeur Duc Loï Phan
Jury :
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L’Université de PARIS I / Panthéon-Sorbonne n’entend donner aucune approbation ni
improbation aux opinions émises dans les thèses ; ces opinions doivent être considérées
comme propres à leurs auteurs.
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Je remercie le Professeur Duc Loï Phan pour ses conseils avisés, ses encouragements et
son soutien constant au cours de la préparation et de la rédaction de cette thèse. Je remercie
également le Professeur Nguyen Manh Hung et le Professeur Antoine d’Autume pour leurs
commentaires. Mes remerciements vont aussi aux membres du LAMIA et du MAD, plus
particulièrement à Olivier Marchand et Emmanuelle Taugourdeau.
Je remercie toutes les personnes qui m’ont aidé, directement ou indirectement, à achever ce
travail.
Toute ma reconnaissance à Magalie et Hugo, pour leur patience et leur soutien affectif !
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Introduction générale
Les limites de la croissance économique liées à l’environnement suscitent depuis bien
longtemps des inquiétudes, sans pour autant avoir toujours été une préoccupation de premier
plan ; cela est peut-être en train de changer. Au cours des trois dernières décennies, grâce
notamment à la conquête spatiale, qui permet d’ausculter notre planète en temps réel
(observation par satellites de l’atmosphère, du rythme de déforestation...), les preuves
scientifiques s’accumulent et ne cessent de confirmer les tensions écologiques naissantes. Les
informations rassemblées mettent à jour, tour à tour, des pollutions d’un genre nouveau : les
pluies acides, la raréfaction de l’ozone troposphérique 1, la disparition d’espèces animales et
végétales, les déchets nucléaires, l’accroissement de l’effet de serre... Ainsi, de locales, les
pollutions deviennent globales et la preuve est faite que l’activité humaine provoque des
problèmes écologiques majeurs, susceptibles de modifier durablement la biosphère 2.
Les craintes écologiques diffuses du passé ont donc mué en une prise de conscience générale
de plus en plus nette, à laquelle les décideurs politiques, les agents économiques et la
communauté scientifique sont parties prenantes. La Conférence de Stockholm sur
l’environnement et le développement, qui s’est tenue en 1972, marque le début d’un
mouvement tendanciel qui ne faiblit pas, symptomatique des préoccupations des dirigeants.
De très nombreuses rencontres internationales, générales ou sectorielles (couche d’ozone,
réserves halieutiques, biodiversité, pluies acides, pollutions atmosphériques, effet de serre)
ont ainsi été organisées ; des progrès ont été réalisés, dont le plus éclatant est le Protocole de
Montréal sur la couche d’ozone. Bien entendu, cette densification des négociations
internationales sur l’environnement répond, avant tout, aux attentes du public. Ce n’est
d’ailleurs pas un hasard si elle coïncide avec la montée en puissance des mouvements
écologiques, très nette à partir des années 70. Plus anecdoctique, mais tout de même un signe
1 - Troposphère : Couche atmosphérique la plus voisine de la Terre, dont l’épaisseur augmente du pôle (5 km) à
l’équateur (18 km).
2 - Biosphère : Réunion de tous les écosystèmes. S’entend au sens large (non limité à la matière vivante) et
global (l’échelle de la planète) (Faucheux & Noël, 1995).
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Introduction générale
des temps, l’imaginaire collectif s’imprègne peu à peu de ces risques écologiques : le cinéma
hollywoodien ne s’y est certainement pas trompé en s’emparant de ces craintes pour offrir aux
spectateurs des films-catastrophes à succès 3. Enfin, la communauté scientifique n’est pas à
l’écart de ces tendances sociologiques générales. Pour preuve, on pourrait mettre en avant la
prolifération des publications sur ces sujets ou la création de revues spécialisées.
Le sujet de cette thèse s’insère dans cette vague de fond. En amont, c’est avant tout
l’actualité de ce débat et l’effort scientifique mondial impulsé par la Convention-cadre sur les
changements climatiques (15 mai 1992) qui nous l’a inspiré. Ensuite, c’est la très grande
diversité des thèmes connexes qui rend cette réflexion passionnante : externalité, pollutions
cumulatives, épuisement des ressources fossiles, développement soutenable, catastrophes
écologiques et irréversibilité, incertitude, négociations internationales...
* *
*
L’économie de l’environnement, telle que l’a orientée Pigou (1920), décline à l’infini le
concept d’externalité. Selon Pigou, une externalité se rencontre chaque fois qu’un agent
économique modifie le bien-être d’un autre agent économique, sans que cette
interdépendance soit compensée par le jeu d’un échange. Plus précisément, pour le cas qui
nous intéresse, le premier, appelé le pollueur, réduit le bien-être du second, appelé le pollué,
en rejettant dans l’environnement un polluant. Pour Pigou et les économistes qui ont
poursuivi son raisonnement, cette situation n’est pas souhaitable car elle produit une
divergence entre le coût privé et le coût social de l’activité du pollueur. Les recommandations
de Pigou, en pareil cas, sont bien connues : l’écart entre les coûts privés et sociaux de la
pollution doit être comblé ; on parle alors d’internalisation des coûts externes. Pigou choisit la
solution d’une taxe frappant le pollueur, égale à la différence entre les coûts marginaux
sociaux et privés, appelée aujourd’hui taxe Pigovienne.
3 - Dans le film ‘‘Highlander II’’, le monde survit sous un bouclier protecteur construit pour remplacer l’écran
naturel de la couche d’ozone. Dans ‘‘WaterWorld’’, l’humanité disparaît après l’élévation du niveau des océans.
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Introduction générale
Coase (1960) propose une interprétation adverse. Il prouve que, en l’absence de coûts de
transaction et de comportements stratégiques, les externalités de pollution se règlent d’elles-
mêmes, grâce à une négociation bilatérale entre le pollueur et le pollué. Ce marchandage peut
avoir deux issues. Le pollueur peut convaincre le pollué de recevoir une indemnité pour
acquérir le droit de polluer. Le pollué peut proposer au pollueur de verser une somme
négociée pour qu’il cesse de polluer. En poussant le raisonnement plus loin, l’argument
Coasien conduit à nier l’existence des externalités : si une pollution existe, c’est que les coûts
de transaction excèdent les gains de la non-pollution ; sinon, les diverses parties impliquées
auraient trouvé un arrangement.
De fait, la plupart des pollutions peuvent être classées dans la catégorie des externalités
publiques 4, si bien que les négociations pollueurs-pollués échouent nécessairement, en raison
du nombre élevé des parties concernées : les coûts de transaction sont importants ; la
multitude génère des comportements stratégiques, comparables à ceux qui apparaissent dans
le financement des projets publics. Faut-il en conclure, comme le suggère Coase, que rien ne
doit être tenté pour combattre la pollution ? Cette question est sans réponse dans le cas
général puisque, comme l’indiquent Pearce & Turner (1990), la démonstration de Coase est
irréfutable. Toutefois, en ce qui concerne l’effet de serre, elle est irrecevable puisque les
pollueurs, la génération présente, ne rencontreront jamais les pollués, les générations futures :
il ne saurait donc être question de négocier !
Outre cet argument, d’autres raisons peuvent justifier une intervention publique pour lutter
contre la pollution. Certains économistes expliquent les externalités par l’absence de normes
sociales clairement définies : non-appropriabilité (Bator, 1958) ; marché manquant (Mäler,
1990) ; absence ou mauvaise définition des droits de propriétés (Dales, 1968). Ces carences
institutionnelles freinent ou empêchent les négociations volontaires entre pollueurs et pollués
(d’ailleurs, les différends se règlent souvent par tribunaux interposés). Le rôle institutionnel
des pouvoirs publics légitime alors son action. Ainsi, Dales suggère de résoudre certaines
externalités par une redéfinition autoritaire des droits de propriété. Il est l’instigateur de la
4 - Une externalité publique est une externalité telle que l’arrivée d’une nouvelle victime laisse inchangée la
perte de bien-être ressentie par les autres victimes.
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Introduction générale
notion de droits de polluer négociables et de la création d’un marché pour les échanger,
comparable au marché boursier. Dales suggère ici un moyen concurrent d’internalisation des
coûts externes d’une pollution.
Le renforcement de l’effet de serre s’analyse comme une externalité :
1. publique, car les changements climatiques lèsent tout le monde indifféremment ;
2. dynamique (Pearce, 1976), parce que les dommages climatiques dépendent de
l’accumulation des gaz à effet de serre dans l’atmosphère et parce que leur durée de vie
atmosphérique est longue ;
3. transfrontière globale, car chaque pays est à la fois source et victime de la pollution
(Mäler, 1990).
Plourde (1972) et Forster (1973) imaginent un cadre de réflexion approprié pour
analyser une pollution cumulative. Forster construit un modèle économique reliant les flux de
consommation à l’accumulation progressive d’un polluant quelconque. L’objectif social se
définit alors comme la recherche du sentier de consommation maximisant le bien-être
intertemporel du consommateur, sachant que son utilité dépend, bien évidemment, de sa
consommation mais, aussi, de la pollution. La résolution de ce programme d’optimisation
intertemporel utilise la théorie du contrôle optimal (Pontriagine & alli, 1961).
Le modèle de pollution cumulative s’interprète facilement à l’aide des concepts traditionnels
de l’économie de l’environnement. Pourtant, la notion de coût social de la pollution,
introduite par Pigou, s’identifie mal dans le cas d’une externalité dynamique, puisque les
conséquences de la pollution perdurent. En fait, le modèle de pollution cumulative la redéfinit
comme le coût marginal intertemporel de l’accumulation du polluant, i.e. comme la somme
actualisée des flux de dommages marginaux futurs 5. Partant de là, le concept d’externalité
s’applique facilement aux pollutions cumulatives : en l’absence d’intervention publique, le
producteur pollue jusqu’au point où la productivité marginale de l’émission est nulle ; ce coût
5 - Ce coût marginal intertemporel peut être vu comme une application de la règle d’aggrégation de Samuelson,
en considérant que le consommateur est un individu différent à chaque instant, auquel on attribue un coefficient
de pondération reflétant le mécanisme d’actualisation.
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Introduction générale
marginal privé est inférieur au coût social intertemporel ; il y a donc bien divergence entre le
coût social et le coût privé de l’activité polluante.
L’arbitrage intertemporel décrit par le modèle de pollution cumulative n’est pas différent de
celui du modèle de Ramsey (1928). Dans ce dernier, l’utilité de la dernière unité de
consommation est mise en balance avec l’utilité intertemporelle de la dernière unité
d’épargne. L’idée sous-jacente est que, au-delà d’une certaine limite, la consommation
présente n’est plus bénéfique, car le rendement futur de l’investissement lui est supérieur.
Arrow (1995) compare la lutte contre l’effet de serre (et, par extension, contre toute pollution
cumulative) à un investissement public ; elle produit un coût économique présent accepté en
vue de bénéfices, en terme de dommages climatiques évités, qui ne se réaliseront que dans un
avenir lointain. Techniquement, l’arbitrage intertemporel correspondant consiste à comparer
l’utilité de la dernière unité de consommation au coût intertemporel de la dernière unité de
gaz à effet de serre, qui définit le prix implicite de la pollution. Le comportement optimal
consiste à émettre le polluant jusqu’à ce que son utilité marginale égale cette valeur.
Une littérature relativement abondante a aménagé le modèle de pollution cumulative dans de
nombreuses directions spécifiquement pour décrire l’effet de serre. Les améliorations
apportées concernent (cette liste n’est pas exhaustive) :
1. le mécanisme de recyclage naturel du stock de pollution : strictement persistant dans Hoël
(1991b) ; recyclage constant dans Mäler (1991) ; taux de recyclage constant dans Cesar
(1994), Falk & Mendelsohn (1993), Gottinger (1991), Tahvonen(1994) et Ulph & Ulph
(1994) ; recyclage logistique dans Cesar (1994) ; fonction de recyclage complexe, faisant
apparaître des équilibres multiples, dans Barbier & Markandya (1990).
2. la prise en compte de l’interaction entre l’épuisement des ressources fossiles, principales
sources d’émission de gaz à effet de serre, et les changements climatiques : Sinclair
(1994), Farzin & Tahvonen (1996) et Ulph & Ulph (1994) ;
3. la prise en compte des menaces de catastrophes et des incertitudes scientifiques : Clark &
Reed (1994), Gottinger (1991), Pethig (1991b) et Roe & alli (1994).
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Introduction générale
A côté de cette réflexion théorique, une littérature économique encore plus fournie est
consacrée à la quantification des coûts et/ou des avantages de la réduction des émissions de
gaz à effet de serre. La première tentative est déjà ancienne et revient à Nordhaus (1977).
L’auteur suppose que l’accumulation du carbone atmosphérique ne doit pas dépasser, à long
terme, une valeur ‘‘raisonnable’’ 6. Sur la base d’une spécification linéaire des fonctions du
modèle, il calcule l’incitation fiscale nécessaire au respect de la contrainte, i.e. la taxe sur le
contenu en carbone, et le coût économique de la mesure. Les études ultérieures sont beaucoup
plus sophistiquées et réalistes. Parmi celles-ci, deux problématiques différentes doivent être
distinguées.
Les modèles d’équilibre général appliqué de Barns & alli (1993), Manne (1993), Oliveira-
Martins & alli (1993), Rutherford (1993) et Whalley & Wigle (1991) (cette énumération n’est
pas complète) déterminent le coût brut de la réduction des émissions de dioxyde de carbone,
indépendamment des avantages liés au ralentissement du réchauffement global. Ils sont
calibrés sur une trajectoire de référence exogène. Ils prévoient les modifications de l’équilibre
général, par rapport à ce référent, lorsqu’un quota d’émission exogène vient contraindre
l’activité économique. De même que Nordhaus (1977), ils calculent la taxe sur le carbone
requise pour respecter le quota et le coût économique de la norme environnementale. Les
ajustements décrits résultent de la rationalité des agents économiques, dans une économie de
concurrence pure et parfaite. Les spécifications retenues pour la production et l’utilité sont
non linéaires. Le cumul de l’évolution démographique, du progrès technologique, de
l’épuisement des ressources fossiles et de l’accumulation du capital fonde la dynamique de
ces modèles.
Les modèles de planification de Falk & Mendelsohn (1993), Manne & alli (1995), Nordhaus
(1992b) et (1993), Peck & Teisberg (1992) et Tahvonen (1994) intègrent, en plus, les
avantages de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. Outre l’analyse de scénarios,
ils offrent donc la possibilité de trouver la trajectoire optimale de la taxe sur les émissions de
carbone, selon une démarche rigoureusement identique à celle du modèle théorique de
6 - Arbitrairement, Nordhaus (1977) situe cette norme au doublement de la concentration de carbone
atmosphérique.
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Introduction générale
pollution cumulative. La décentralisation de cette politique internalise l’externalité climatique
en confrontant les agents économiques au coût véritable de leurs activités. La contrepartie de
cette capacité à déterminer la politique optimale du climat est une représentation
singulièrement plus dépouillée du système économique et un niveau d’agrégation plus grand.
Arrow (1995) apparente la lutte contre l’effet de serre à un investissement public de
long terme. Ce faisant, la politique du climat s’envisage aussi sous l’angle des transferts
intergénérationnels qu’elle produit et, par voie de conséquence, remet à l’ordre du jour les
problèmes récurrents du bien-fondé du principe d’actualisation, de l’équité
intergénérationnelle et du développement soutenable. Les prises de position contre le
mécanisme d’actualisation sont nombreuses (Partridge, 1981 ; Ramsey, 1928 ; Rawls, 1971 ;
Solow, 1974). L’argument des philosophes contre l’actualisation s’énonce schématiquement
de la façon suivante : la localisation dans le temps, de même que dans l’espace, ne peut pas
constituer, d’un point de vue éthique, un motif de différenciation entre deux individus.
En réponse à ce débat, certains économistes ont recherché des fonctions de bien-être social
moralement plus acceptables, selon une optique que l’on peut qualifier de contractuelle.
Freeman (1977) et Page (1977) explorent la possibilité de remplacer le critère ‘‘utilitariste’’
avec actualisation par un mécanisme de vote intergénérationnel. Par opposition à
l’actualisation, ce critère de décision investit toutes les générations d’un même pouvoir
d’expression et de décision : une voix chacune. Ces tentatives échouent dans la mesure où
elles ne dégagent pas une règle de choix immuable, applicable en toutes circonstances. Solow
(1974) utilise le critère Maxi-Min, inspiré de Rawls (1971), dans un modèle de croissance. Ce
programme économique revient, en fait, à garantir un flux de consommation constant le plus
grand possible. Solow détermine les conditions de sa faisabilité. L’inconvénient du critère
Maxi-Min est qu’il perpétue la pauvreté, si la dotation en capital est faible, mais qu’il
n’explique pas la constitution d’un stock initial suffisant pour soutenir un niveau de vie
décent à toutes les générations.
La faillite relative des propositions alternatives précédentes expliquent que le critère de
décision le plus appliqué reste la maximisation de la somme des flux d’utilité actualisés (nous
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Introduction générale
l’adopterons également). Le facteur d’actualisation dépend du taux de préférence pure pour le
présent et des perspectives de croissance économique (Arrow, 1995 ; Nordhaus, 1992b).
Rejetant l’argument du coût d’opportunité des investissements publics, les économistes
choisissent un taux d’actualisation compris entre 3 et 5 pour-cent, inférieur au taux de profit
de l’investissement privé.
Le concept de développement soutenable est apparu dans les années 80 et étend le débat sur
l’équité intergénérationnelle. Parmi la multitude de définitions de ce concept (Pezzey (1989)
en dénombre 20), Heyes & Liston-Heyes (1995) retiennent les plus représentatives. Le
développement soutenable implique :
• la satisfaction des « besoins du présent sans compromettre la faculté des générations
futures à satisfaire les leurs » (WCED, 1987) ;
• la préservation stricte du patrimoine naturel (Daly, 1990 ; Barbier & Markandya, 1990) ;
• l’entretien de la capacité productive de l’environnement (Pearce & alli, 1989) ;
• la non-décroissance de l’utilité d’un membre représentatif de la société (Pezzey, 1992).
La littérature sur le développement soutenable rompt avec la réflexion normative des années
70. La volonté de suivre un développement harmonieux s’exprime désormais directement
sous la forme d’une norme environnementale contraignante. La première définition est la plus
populaire. De fait, elle est suffisamment évasive pour englober les trois autres. Les trois
définitions suivantes reflètent différentes opinions concernant la place du patrimoine naturel
dans l’activité économique. Pour Daly, le capital naturel et le capital produit, ainsi que les
différentes composantes de l’environnement, sont essentiellement complémentaires. De ce
fait, toute destruction nette d’une composante quelconque de ce dernier réduit le bien-être
futur et doit être empêchée. Pour l’école de Londres (Pearce & alli), le patrimoine naturel et
le capital produit, ainsi que les différentes composantes du capital naturel, sont substituables
jusqu’à un certain point. Par contre, l’effondrement potentiel de la capacité d’adaptation de la
biosphère, susceptible de survenir en dessous de certains seuils de qualité de l’environnement,
justifie, selon eux, d’imposer des normes minimales de sauvegarde (Ciriacy-Wantrup, 1952).
La quatrième définition offre la possibilité de compenser les destructions du patrimoine
naturel par un investissement accru en capital produit.
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Introduction générale
Tous ces thèmes de réflexion découlent de la nature dynamique de l’externalité
climatique, elle-même liée à la lenteur de l’élimination des gaz à effet de serre
atmosphériques. Le regard ainsi porté ne suffit pas et néglige l’autre aspect essentiel du
problème, qui est que l’externalité climatique concerne tous les pays du monde sans
distinction, tant du point de vue des responsabilités que de celui du partage des conséquences.
Le renforcement de l’effet de serre doit donc être rangé dans la catégorie des pollutions
transfrontières globales (Mäler, 1990). Dans ce contexte, aucune raison n’autorise à croire
que les pays, vu comme des entités de décision souveraines exploitant légitimement
l’atmosphère, bien traditionnellement gratuit, accepteront de lutter contre l’effet de serre dans
le sens de l’intérêt commun. Il s’ensuit que l’accroissement de l’effet doit être analysé sous la
forme d’un jeu dynamique global.
Cette approche a été développée dans la littérature par Cesar (1994), Gottinger (1991), Hoël
(1991b), Mäler (1991) et van der Ploeg & de Zeeuw (1992). Elle conduit à définir différentes
stratégies d’action et à les comparer entre elles. La stratégie non coopérative consiste à
ignorer les effets transfrontières de la pollution. S’ils adoptent ce type de comportement, les
pays cessent d’émettre le polluant quand la productivité de la dernière unité émise est
compensée par les dommages domestiques futurs. La stratégie coopérative suppose, pour sa
part, que les pays acceptent de coordonner leurs actions, en vue de maximiser le bien-être
global. Dans ce cas, ils internalisent les dommages mondiaux de l’effet de serre, c’est-à-dire
aussi bien ceux qu’ils ressentiront sur leur territoire que ceux qui apparaîtront à l’étranger.
Cesar et van der Ploeg & de Zeeuw montrent que le comportement non coopératif conduit à
polluer de façon excessive. Ils prouvent également que l’excès de pollution par rapport à la
stratégie coopérative augmente si les pays ont la possibilité d’observer instantanément et sans
coût l’évolution du degré de pollution de l’environnement.
* *
*
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Introduction générale
Dans cette thèse, notre réflexion repose entièrement sur l’hypothèse selon laquelle toute
mesure de lutte contre l’effet de serre devrait être jugée à l’aune d’une analyse coût-bénéfice.
Plus précisément, nous considérons que la politique du climat doit maximiser la différence
entre les dommages climatiques évités et le coût des politiques à l’origine de ce bienfait. Bien
évidemment, il s’agit là d’un parti pris qui, par définition, déplaira à certains. Néanmoins, il
se défend très bien d’un point de vue économique. D’ailleurs, sans ce critère, il
deviendrait
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Introduction générale
difficile, sauf cas particuliers, de justifier une mesure de dépollution de l’environnement
plutôt qu’une autre.
Pour décrire qualitativement ce mécanisme de décision, nous construirons un modèle
économique formalisant les relations entre l’économie et le climat.
Formalisation des relations entre l’économie, l’atmosphère, la biosphère et le climat
Economie
Production / Consommation
Climat
Atmosphère
Réceptacle des
gaz à effet de serre
Emissions
Changements
climatologiques
Biosphère
Composante implicite
Cycles biogéochimiques
des gaz à effet de serre
Externalité
L’interaction entre l’économie et le climat articule quatre composantes liées, les unes aux
autres, par des relations fonctionnelles. L’économie, au travers des activités de production et
de consommation, est reliée à l’environnement par les émissions de gaz à effet de serre et par
les nuisances climatiques qu’elle subit en retour.
Les autres éléments du modèle décrivent la chaine intermédiaire entre les émissions
anthropogéniques de gaz à effet de serre et l’externalité climatique. Au commencement,
l’atmosphère reçoit les gaz à effet de serre. Ensuite, la biosphère, addition de la végétation et
des océans, élimine une partie des gaz accumulés dans l’atmosphère. Ce mécanisme fait que
la pollution n’est pas définitive, mais cette réversibilité est très longue à l’échelle humaine.
Pour finir, le climat dépend de la composition de l’atmosphère et d’interactions complexes
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Introduction générale
avec la biosphère. Ces composantes et les relations fonctionnelles qui les unissent seront
décrites dans un chapitre préliminaire.
Tandis que les relations précédentes sont objectives, la description, dans le modèle, du
fonctionnement de l’économie repose sur une axiomatique qui, bien qu’acceptée par la grande
majorité des économistes, doit être énoncée, d’autant plus qu’elle ne sera pas rappelée
ultérieurement.
L’individualisme méthodologique constitue le principe fondateur de notre analyse. En vertu
de celui-ci, le fonctionnement de l’économie découle des actions des agents économiques, qui
sont motivées par des objectifs personnels indépendants et qui sont entreprises en contexte
d’isolement décisionnel. Ce point de départ donne une importance primordiale à la
description du comportement des acteurs économiques. Il implique également que les
bienfaits de la préservation de l’environnement s’apprécient au travers des jugements
individuels uniquement.
L’axiome de rationalité substantielle implique que les décisions des agents économiques
résultent d’un calcul par lequel ils cherchent à améliorer leur situation. Le critère de décision
varie avec la fonction de l’agent économique :
• le producteur maximise son profit ;
• le consommateur maximise son utilité ;
• le gouvernement représente l’intérêt des générations présente et futures de consommateurs.
A chaque instant, il agrège les utilités des consommateurs en une fonction de bien-être
collective. Sur une période de planification donnée, il juge des décisions à prendre, dans
l’objectif de maximiser la somme des flux d’utilité des générations successives.
Les agents économiques élaborent des anticipations rationnelles sur l’avenir, dans un contexte
d’information parfaite. Ces conditions participent à la planification des décisions
économiques et, notamment, à l’arbitrage entre la consommation présente et les dommages
climatiques futurs, fondement de la politique du climat. Pratiquement, elles impliquent qu’il
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Introduction générale
est possible de prévoir le bien-être futur, donc d’anticiper les préférences, le progrès
technique et les dommages de l’effet de serre (ou leur espérance mathématique).
L’hypothèse de concurrence pure et parfaite est également posée. Elle élimine d’office du
champ de l’analyse les monopoles naturels, la présence d’externalités (en-dehors de l’effet de
serre additionnel) et les biens publics. Ces conséquences sous-tendent l’analyse des modèles
d’équilibre général appliqué du chapitre 2.
Les relations caractéristiques du modèle schématisé plus haut sont l’émission des gaz à
effet de serre et le dommage climatique. De ce fait, une formalisation dépouillée du système
économique suffit pour proposer une description qualitative de la politique du climat.
Notamment, le mécanisme d’accumulation du capital n’intervient que parallèlement à
l’interaction principale entre la production et le climat, sans en altérer la mécanique
intrinsèque, et peut donc être laissé de côté. Ces arguments, combinés au fait que la simplicité
facilite l’étude de cas de figure plus complexes (catastrophes climatiques irréversibles, jeu
différentiel de l’effet de serre, incertitude...), justifient la modélisation que nous retiendrons :
d’une part, le rejet de polluants sera l’unique intrant de la fonction de production et, d’autre
part, l’externalité climatique apparaitra comme argument de la fonction de production.
Notre modèle est donc amplement suffisant pour une caractérisation qualitative de la gestion
du climat. Cependant, il laisse de côté un certain nombre de mécanismes économiques
particulièrement intéressants à étudier. Conscients de cela, nous avons jugé bon, tout au long
de notre thèse, d’élargir la portée de nos discussions en analysant et en exploitant
systématiquement la littérature sur l’évaluation des politiques climatiques.
* *
*
Le modèle que nous venons de décrire brièvement sera exploité dans trois directions
différentes, qui définissent notre apport à la réflexion sur la relation entre le renforcement de
l’effet de serre et l’économie.
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Introduction générale
En premier lieu, nous avons pensé qu’il était nécessaire d’unifier la littérature économique sur
l’effet de serre, dans l’idée de proposer une analyse économique de l’effet de serre. Ce
dessein est ambitieux et, de toute évidence, nous n’y parviendrons que de façon incomplète,
tant la littérature est vaste et diverse. Malgré cela, nous proposerons un outil de réflexion
cohérent, regroupant les contributions les plus importantes de la littérature sur le sujet. Notre
modèle de pollution cumulative sera le moteur de cette présentation. Enrichi au fur et à
mesure des sujets abordés, il servira à identifier les éléments importants de la politique du
climat et indiquera comment les articuler entre eux.
Cette ‘‘visite guidée’’ de la littérature économique sera complétée par deux réflexions
personnelles.
Tout d’abord, nous avons constaté que la réflexion économique évince presque complètement
la question des catastrophes climatiques irréversibles 7. Ce parti pris est curieux, surtout si on
le met en parallèle avec les inquiétudes de la communauté scientifique, qui situe
potentiellement le principal danger de l’effet de serre dans ces événements. Ce paradoxe
justifie, à notre avis, de consacrer une partie non négligeable de notre thèse à ces questions.
Ensuite, nous prolongeons la littérature économique par une étude des négociations
internationales sur le climat, dans une optique qui se veut à la fois positive et normative. Dans
un premier temps, partant d’un bilan détaillé de la situation, nous isolons les sources de
bloquage des discussions, pour ensuite illustrer l’enjeu des débats menés. Dans un second
temps, nous proposons une lecture plus théorique du sujet, inspirée par la théorie des
coalitions, pour tenter de comprendre la forme actuelle de la Convention-cadre sur les
changements climatiques et les engagements de chacun.
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7 - Nous avons réuni seulement quatre références sur ce sujet. La vision qui ressort de leur analyse est
incomplète, voire parfois erronée.
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Introduction générale
La première partie de notre essai définit et caractérise la politique mondiale du climat.
Le chapitre 1 présente le modèle de pollution cumulative. Son exploitation conduit à une
description qualitative de la politique optimale du climat. Les deux chapitres suivants se
conçoivent comme un prolongement empirique du premier chapitre, selon une séquence coût /
avantage / politique optimale.
Le chapitre 2 synthétise les méthodes et les résultats des modèles d’équilibre général appliqué
conçus pour évaluer les coûts de la réduction des émissions de carbone. Nous mettons
l’accent sur l’interprétation des résultats, en nous dotant d’outils d’analyse simples.
Malheureusement (du point de vue de notre problématique), les estimations des modèles
d’équilibre général appliqué se désintéressent de l’aspect bénéfique des mesures de lutte
contre l’effet de serre. Par contre, leurs évaluations, reprises sous la forme d’une fonction de
coût de dépollution exogène, servent dans les modèles de planification étudiés dans le
chapitre 3.
Le chapitre 3 montre les deux étapes du calibrage d’une fonction de dommage climatique :
l’évaluation du coût économique du doublement de la concentration de carbone et le choix
d’une spécification ad hoc. Cette information et les fonctions de coût de dépollution, ajustées
sur les modèles d’équilibre général, sont associées par certains économistes pour construire
des modèles de contrôle optimal appliqué ; elles permettent ensuite d’évaluer la politique
optimale du climat. Nous conclurons la première partie de la thèse en présentant ces résultats
et en commentant les ‘‘prescriptions’’ qui en découlent.
La seconde partie remet partiellement en question l’approche précédente, qui peut être
vue comme représentative de l’opinion moyenne des économistes sur la meilleure réaction
internationale contre l’effet de serre. Nous y étudions dans le détail l’élaboration d’une
politique optimale du climat en face d’une catastrophe climatique irréversible. Dans le
chapitre 4, nous faisons l’hypothèse que la catastrophe est parfaitement anticipée, aussi bien
du point de vue de ses conséquences que de celui des conditions de son apparition. Nous
comparons deux stratégies d’action concurrentes, l’une consistant à refuser la catastrophe en
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Introduction générale
limitant l’émission du polluant de façon appropriée, l’autre consistant à choisir le moment
optimum pour la subir.
Dans le chapitre 5, nous rejetons l’hypothèse d’une connaissance parfaite des caractéristiques
de la catastrophe. Pour commencer, nous imaginons que l’incidence d’une catastrophe est
incertaine, mais que sa connaissance s’améliore avec le temps. Ce cas de figure nous amène à
définir une stratégie d’action consistant à attendre les éclaircissements scientifiques avant de
décider si l’on doit, ou non, provoquer cet événement. Nous nous interrogeons sur la
rationalité sous-jacente d’un tel comportement. Après cela, nous analysons la situation où
l’échéance de la catastrophe est incertaine.
Nous consacrons la troisième partie de notre thèse à la faisabilité de la politique
mondiale de l’effet de serre. Le chapitre 6 récrit le modèle de pollution cumulative sous la
forme d’un jeu différentiel de l’effet de serre. Contrairement à la première partie de la thèse,
où les pays sont supposés adhérer automatiquement à la politique du climat, cette décision
leur revient désormais de droit. Ceci conduit à définir et à comparer les stratégies non
coopérative de Nash et coopérative. De même que dans la première partie de la thèse, ces
discussions sont prolongées en utilisant les estimations de la littérature économique. Ce
chapitre s’achève par une réflexion théorique sur les chances d’apparition d’un comportement
coopératif.
Le chapitre 7 envisage la question des négociations internationales sur le climat d’une
manière plus positive. Après une description détaillée des engagements souscrits par les
signataires de la Convention-cadre sur les changements climatiques et de ses prolongements
potentiels, nous illustrons l’enjeu des débats actuels, au moyen d’une application numérique
calibrée sur les résultats des chapitres 2, 3 et 6. Divers aménagements de la Convention,
actuellement en pourparlers, sont étudiés : permis de polluer négociables et application
conjointe.
Dans le chapitre 8, nous quittons cette discussion pour nous intéresser à la formation de
coalitions de pays. Cette optique est très caractéristique, à notre avis, de l’équilibre actuel des
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Introduction générale
négociations, que l’on pourrait qualifier de bipartite. Grâce à un algorithme de résolution
simulé sur informatique, nous dépassons les configurations habituellement étudiées par la
littérature économique, qui considèrent soit une multitude de pays identiques, soit deux à trois
pays différents. Nous identifions le profil type d’un pays signataire d’une coalition auto-
réalisatrice (‘‘self-enforced’’ en anglais), dans l’hypothèse où les gains de l’entente ne sont
pas redistribués entre les participants et où l’entrée dans l’accord est libre. Nous abandonnons
ensuite cette hypothèse au profit d’une redistribution assise sur le ‘‘pouvoir’’ de Shapley des
membres, c’est-à-dire proportionnelle à ce qu’apporte chaque pays membre.
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L’effet de serre
Chapitre préliminaire
L’effet de serre
L’effet de serre est un phénomène méconnu. Pour preuve, il est souvent amalgamé avec
une autre menace environnementale majeure, la raréfaction de l’ozone troposphérique. Dans
ce climat d’incompréhension, l’attitude commune face aux mises en garde contre les risques
de bouleversements climatiques est soit incrédule, soit ironique, quand ce débat est perçu
comme un avatar des litanies populaires du type : « Ah ! Il n’y a plus de saisons ! » La
présentation scientifique qui va suivre devrait clarifier certaines choses ; mais là n’est pas son
utilité première, comme nous l’exposons ci-dessous.
Une analyse économique de l’effet de serre passe nécessairement par une bonne connaissance
des mécanismes climatiques. En effet, une représentation trop simpliste des ces phénomènes
n’offrirait pas une base de réflexion correcte. D’ailleurs, les modèles économiques récents ne
sauraient être compris sans ce détour. Une des questions importantes concerne, par exemple,
le devenir des molécules de gaz à effet de serre dans l’atmosphère ; d’un point de vue
climatique comme économique, la situation change radicalement entre le cas où ces
molécules sont persistantes et celui où elles sont recyclées par un mécanisme quelconque.
L’objet de ce chapitre préliminaire est donc de nous familiariser avec le corpus théorique de
la climatologie. Dans une première section, nous définirons l’effet de serre, en insistant sur le
caractère naturel de ce phénomène. Nous montrerons ensuite que l’activité économique le
renforce, en provoquant une accumulation notable de gaz à effet de serre dans l’atmosphère.
Nous verrons que les prévisions des modèles climatiques tablent sur un réchauffement
planétaire non négligeable pour le siècle à venir, conséquence des émissions
anthropogéniques de gaz à effet de serre. Dans une troisième section, nous concentrerons
notre attention sur les particularités de chaque gaz à effet de serre : Quelles en sont les
sources ? Comment s’accumulent-ils dans l’atmosphère ? A quel rythme en sont-ils éliminés ?
A quantités égales, certains gaz sont-ils plus néfastes pour le climat que d’autres ? Si oui,
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L’effet de serre
quelles implications pratiques cela a-t-il sur le traitement particulier que l’on doit leur
réserver ? Pour terminer cette présentation, nous examinerons plus dans le détail les
conséquences futures du réchauffement prévu, en distinguant les dommages graduels des
risques de catastrophes majeures.
1 - L’effet de serre naturel
Schématiquement, la température de la Terre dépend de sa capacité à piéger les
rayonnements infrarouges d’origine solaire. Si l’atmosphère était parfaitement transparente
aux flux infrarouges, la Terre réfléchirait la totalité de la chaleur reçue. La température
moyenne des basses couches atmosphériques avoisinerait alors -18 degrés Celsius et la Vie
n’aurait pas pu apparaître. Heureusement, l’atmosphère est partiellement opaque aux
infrarouges. Une partie de la chaleur captée est absorbée et la température moyenne à la
surface de la Terre s’élève de 33 degrés Celsius au-dessus de la valeur précédente, pour
atteindre 15 degrés Celsius.
Schéma 1 : Mécanisme de l’effet de serre
Atmosphère
Terre
Soleil
Radiations réfléchies
par l'amosphère
et la Terre
Radiations reçues
Radiations
absorbées
et renvoyées
Radiations émises
Source : Cesar (1994)
Définition 1 : « On entend par ‘‘gaz à effet de serre’’ les constituants gazeux de l’atmosphère,
tant naturels qu’anthropiques, qui absorbent et réémettent le rayonnement infrarouge. »
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L’effet de serre
Source : Article premier, définition 1, Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (15
mai 1992).
Les principaux gaz à effet de serre sont la vapeur d’eau, le gaz carbonique, le méthane,
l’oxyde d’azote et les chlorofluorocarbures, qui sont des gaz artificiels. Avant la révolution
industrielle, leur concentration atmosphérique était stable et l’effet de serre était équilibré à
son niveau naturel.
Définition 2 : « Le mécanisme par lequel les gaz à effet de serre réchauffent le climat est
appelé ‘‘effet de serre’’. »
Source : Thuillier (1992).
2 - L’effet de serre additionnel
Depuis la révolution industrielle, la teneur atmosphérique de tous les gaz à effet de serre
a augmenté sensiblement : de 25 pour-cent pour le gaz carbonique ; d’un facteur 2 pour le
méthane ; de 9 pour-cent pour l’oxyde d’azote. Les chlorofluorocarbures étant des gaz à effet
de serre artificiels, leur concentration atmosphérique était nulle avant l’ère industrielle.
La responsabilité des sociétés industrialisées dans cette tendance de long terme ne fait aucun
doute. Les sources d’émissions anthropogéniques sont clairement identifiées : le dioxyde de
carbone provient de la combustion massive des énergies fossiles et de la déforestation (le
carbone contenu dans l’humus du sol se dégage par combustion après la disparition de la
couverture forestière) ; le méthane provient de l’agriculture (principalement, l’élevage de
ruminants et la culture en rizières) et de l’exploitation du gaz naturel ; l’oxyde d’azote résulte
de la combustion des végétaux et de l’utilisation des engrais azotés.
L’accumulation des gaz à effet de serre dans l’atmosphère renforce l’effet de serre. En vertu
des mécanismes présentés dans la section 1, le réchauffement climatique est certain, toutes
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L’effet de serre
choses égales par ailleurs. Cependant, son amplitude n’est pas facilement prévisible, du fait
d’un nombre élevé de rétroactions positives et négatives, que nous présenterons plus loin 1.
Définition 3 : « On entend par ‘‘changements climatiques’’ des changements de climat qui
sont attribués directement ou indirectement à une activité humaine altérant la composition de
l’atmosphère mondiale et qui viennent s’ajouter à la variabilité naturelle du climat observée
au cours de périodes comparables. ».
Source : Article premier, définition 2, Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (15
mai 1992).
L’élévation de la température d’équilibre ΔT par rapport à sa valeur préindustrielle
dépend de l’accroissement du forçage radiatif F de l’atmosphère, qui mesure la quantité
d’énergie piégée par l’atmosphère en watts par mètre carré. Le forçage radiatif augmente avec
la teneur atmosphérique de gaz à effet de serre. Le réchauffement d’équilibre se calcule en
multipliant le forçage radiatif par deux constantes climatologiques. La première convertit
directement le forçage radiatif supplémentaire en réchauffement, sans tenir compte des
éventuelles rétroactions. Elle est égale à degré par watt au mètre carré. La seconde vient
corriger la première évaluation des rétroactions positives et négatives. Sa valeur se déduit des
simulations opérées à l’aide de modèles de circulation générale et est comprise entre 1,1 et 3,4
(sans unité), 1,9 étant sa réalisation la plus probable. On en vient donc à écrire la relation
suivante :
0 3,
Δ Α ΒT F= . . avec et Α = ° −0 3 2, / .C W m Β= 19, . Dans les chapitres ultérieurs, nous
écrirons ω = Α Β. pour simplifier les notations.
La méconnaissance des rétroactions et de leur amplitude explique l’essentiel des incertitudes
sur le réchauffement planétaire futur. La principale source d’erreur provient du rôle des
nuages. Le réchauffement planétaire s’accompagnera normalement d’une augmentation de
l’évaporation. Puisque la vapeur d’eau est aussi un gaz à effet de serre, ceci produira une
rétroaction positive. Mais, cette dernière sera compensée presque totalement si la vapeur
d’eau supplémentaire forme des nuages d’altitude (alors, Β= 11, ), alors qu’elle sera amplifiée
si elle se traduit par la formation de nuages bas (alors, Β= 3 4, ). Des tests de sensibilité,
1 - Les rétroactions rassemblent toutes les modifications secondaires du système climatique accompagnant le
réchauffement planétaire. Elles sont positives lorsqu’elles amplifient le réchauffement, négatives sinon.
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L’effet de serre
menés sur 18 modèles de circulation générale, ont montré que l’essentiel des divergences
entre les simulations provenait de ce problème (Le Treut & Kandel, 1992).
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L’effet de serre
3 - Les cycles biogéochimiques des gaz à effet de serre
Ainsi, les émissions de gaz à effet de serre anthropogéniques modifient l’atmosphère
terrestre. Les mesures directes faites depuis une trentaine d’années et les mesures indirectes
permettant de remonter plus loin dans le temps attestent largement ce fait. Dans le même
temps, ces observations ont montré que l’atmosphère éliminait partiellement les gaz à effet de
serre reçus. Les scientifiques se sont donc penchés sur les mécanismes régissant ces
recyclages. De fait, la connaissance de ces phénomènes est essentielle pour comprendre le
rôle des émissions présentes sur la composition de l’atmosphère et sur le climat futurs.
Définition 4 : « On entend par ‘‘réservoir’’ un ou plusieurs constituants du système
climatique qui retiennent un gaz à effet de serre ou un précurseur de gaz à effet de serre ».
Source : Article premier, définition 7, Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (15
mai 1992).
Définition 5 : « On entend par ‘‘puits’’ tout processus, toute activité ou tout mécanisme,
naturel ou artificiel, qui élimine de l’atmosphère un gaz à effet de serre, un aérosol ou un
précurseur de gaz à effet de serre ».
Source : Article premier, définition 8, Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (15
mai 1992).
Le cycle du carbone définit la relation entre les trois réservoirs de carbone que sont
l’atmosphère, la biosphère terrestre et les océans. L’atmosphère échange annuellement 90
GtC2 avec les océans et 113 GtC avec la biosphère continentale. Sans l’intervention humaine,
ces flux incessants s’équilibrent et le stock de carbone atmosphérique reste stable.
Comparativement, les émissions de carbone d’origine humaine sont modestes : en 1990, 5,4
GtC par combustion des énergies fossiles et 1,6 GtC (±1 GtC) du fait de la déforestation
(Cline, 1991). Bien que réduites par rapport aux échanges naturels, ces émissions entraînent
une accumulation nette de carbone de 3,4 GtC par an, ce qui correspond à un taux de
2 - 1 GtC = 1 milliard de tonnes de carbone = 12/44 milliard de tonnes de dioxyde de carbone.
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L’effet de serre
croissance annuel de la teneur atmosphérique en carbone de 0,5 pour-cent. La quantité
manquante est captée par les océans et la végétation.
A l’équilibre, la concentration de carbone dans les océans dépend de la teneur atmosphérique
en carbone. Les scientifiques estiment ainsi que les océans finiront, à terme, par dissoudre la
majeure partie du carbone atmosphérique excédentaire, au point qu’il n’en restera que 17
pour-cent dans l’atmosphère. Les océans sont donc un puits de carbone. Actuellement, ce
mécanisme explique l’élimination de 2 GtC (±0,8 GtC) par an sur les 7 GtC émises par
l’homme (Minster & Merlivat, 1992).
L’absorption réelle par les océans est donc nettement inférieure aux 83 pour-cent calculés par
les scientifiques. La raison est que l’accumulation du carbone dans l’atmosphère se fait à un
rythme trop rapide. Les courants marins de surface (Gulf Stream ; Kuroshio ; courant du
Labrador ; courant de la mer de Weddel...) captent le carbone atmosphérique jusqu’à en être
saturés, puis ils n’en acceptent plus tant qu’ils n’ont pas été régénérés par mélange avec les
eaux profondes. Ce cycle de régénération varie, selon les courants marins, de 30 à 1000 ans.
Le rythme du mélange des eaux de surface et des eaux profondes agit donc comme un facteur
limitatif à l’élimination du carbone atmosphérique par les océans.
La végétation devient également un puits de carbone lorsque la teneur atmosphérique en
dioxyde de carbone augmente. En effet, la présence de ce gaz en plus grande quantité stimule
la croissance des plantes, qui se mettent à emmagasiner une partie du carbone excédentaire.
Ce phénomène explique à son tour la disparition de 1,1 GtC (Goudriaan, 1992).
A ce stade, il reste 0,5 GtC sur les 7 GtC émises dont on ignore la destination finale. Selon
certains scientifiques, le reste pourrait être imputé aux politiques de reboisement menées dans
les zones tempérées du monde et, éventuellement, à une surestimation systématique du
rythme de dégagement du carbone du sol après la déforestation en zone tropicale (Goudriaan,
1992).
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L’effet de serre
Les modèles économiques formalisent généralement les échanges de carbone entre
l’atmosphère et les autres réservoirs de façon schématique : l’absorption par les océans est
supposée proportionnelle au stock de carbone atmosphérique ; l’accumulation du carbone par
la végétation réduit les émissions anthropogéniques d’une proportion fixée.
( )G tCO2 désignant le stock de carbone atmosphérique et les émissions
anthropogéniques à la date , l’accroissement du stock est donné par :
( )g tCO2
t
( ) ( ) ( ) ( )G t g t G tCO CO CO2 21 1+ = + − 2α β. . , (1)
où
α est le taux de rétention atmosphérique,
β est le taux de transfert du carbone entre la surface des océans et l’océan profond.
Nordhaus (1992a) et (1993) utilise les valeurs α = 0 64, (±0,15) et β = 1 120 (ce paramètre
est très variable dans la littérature économique, puisqu’il oscille entre 0,004 et 0,018). Le taux
de rétention atmosphérique est obtenu par régression, en se basant sur les émissions et
l’accumulation passées du carbone. Le taux de transfert est calculé par le Groupe
Intergouvernemental d’Experts sur le changement Climatique (G.I.E.C. ; I.P.C.C. en anglais).
L’inverse de ce paramètre mesure la durée de résidence du carbone dans l’atmosphère. Selon
le G.I.E.C., elle serait comprise entre 50 et 200 ans, 120 ans étant sa valeur la plus probable.
Comme nous le démontrerons dans la section prochaine, le dioxyde de carbone est le
principal responsable du renforcement de l’effet de serre. Il est donc légitime qu’il ait plus
retenu l’attention des économistes que les autres. Pour les mêmes raisons, nous passerons
outre la description des cycles biogéochimiques des autres gaz à effet de serre, de peur que
cette énumération devienne ennuyeuse. Par contre, nous présentons les informations
essentielles que l’on tirerait d’une telle étude dans le tableau 1.
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L’effet de serre
Tableau 1 : Caractéristiques principales des gaz à effet de serre
Gaz à
effet de
serre
Concentration en
1990 (ppmv)
Concentration en
1750/1800
(ppmv)
Croissance
depuis
1750/1800
Durée de
vie
(années)
Projection
(croissance
annuelle)
CO2 354 280 26% 120 0,50%
CH4 1,717 0,8 115% 10 0,90%
N2O 0,3097 0,288 8% 150 0,25%
HCFC-22 0,0001 nulle .. 15 ..
CFC-11 0,00028 nulle .. 65 4,00%
CFC-12 0,000484 nulle .. 130 4,00%
CFC-113 0,00005 nulle .. 70 ..
Note : ppmv signifie Parties Par Million en Volume.
Source : Houghton et alli (1990).
Le tableau 1 résume l’ensemble des informations rassemblées jusqu’à présent et en apporte de
nouvelles. La durée de vie des gaz à effet de serre dans l’atmosphère est très variable mais
généralement longue. Les émissions anthropogéniques présentes auront donc des
conséquences durables sur le climat. Comme nous le verrons dans la section prochaine, la
durée de vie des gaz à effet de serre influence énormément l’importance de leur contribution
au réchauffement global.
Les taux de croissance actuels donnés dans le tableau 1 sont évidemment à utiliser avec
précaution. Ils prolongent des tendances observées sur les dernières années mais ne se
réaliseront pas si la communauté internationale s’entend sur une politique de lutte contre
l’effet de serre. Même si les nations ne parvenaient pas à un tel accord, la ratification quasi
unanime du protocole de Montréal, acquise en 1990, dont l’objet est de protéger la couche
d’ozone, devrait avoir pour conséquence une réduction très importante des émissions de
chlorofluorocarbures, qui n’est pas prise en compte dans le tableau.
4 - Contributions individuelles aux changements climatiques
La capacité à retenir les rayonnements infrarouges diffère d’un gaz à l’autre. Par
exemple, l’émission d’une tonne de dioxyde de carbone déstabilise moins le climat que
l’émission de la même masse de chlorofluorocabures.
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L’effet de serre
La comparaison des gaz à effet de serre sur des critères scientifiques simplifie la modélisation
économique, soit en aidant à éliminer les gaz les moins importants, soit en construisant une
grille de conversion permettant d’exprimer tous les gaz dans la même unité, généralement
l’équivalent dioxyde de carbone.
La décomposition du forçage radiatif global isole, à un instant donné, la contribution
individuelle de chaque gaz à effet de serre au réchauffement global (Peck & Teisberg, 1992) :
F F F F FCO CH N O CFC= + + +2 4 2 , (2)
où
( )F GCO CO2 26 33 3565= −, . ,ln , F GCH CH4 4142 127= −, . , ,
F GN O N O2 22 76 148= −, . , , F GCFC CFC= 26316, . ,
Gi désignant la concentration atmosphérique en gaz (en ppmv). i
Graphique 1 : Contributions individuelles au forçage radiatif (1990)
CO2
63%
CH4
25%
N2O
2%
CFC
10%
Le graphique 1 est obtenu en utilisant la relation (2) et les concentrations atmosphériques du
tableau 1. D’après ces calculs, le forçage radiatif, en 1990, est supérieur de 2,4 watts par
mètre carré à sa valeur naturelle d’avant la révolution industrielle. Le dioxyde de carbone
contribue pour 63 pour-cent à cette augmentation, contre 25 pour-cent pour le méthane, 10
pour-cent pour les chlorofluorocarbures et 2 pour-cent pour l’oxyde d’azote.
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L’effet de serre
Ces résultats ont peu d’intérêt pour le décideur. Ils indiquent seulement que, en l’état
actuel des choses, compte tenu des émissions anthropogéniques des différents gaz à effet de
serre depuis deux siècles et des concentrations atmosphériques afférentes, tel gaz est
responsable d’une proportion donnée du réchauffement courant.
Une information plus utile serait de savoir comment les émissions d’aujourd’hui agissent sur
le climat. Elle s’obtient en calculant l’accroissement du forçage radiatif global imputable à
l’émission d’une unité de masse de chaque gaz à effet de serre, i.e. par la dérivée des relations
(2). Ce critère de comparaison a donné lieu au calcul du forçage radiatif relatif instantané
(G.I.E.C.), qui rapporte l’accroissement du forçage radiatif des différents gaz à celui du gaz
carbonique : voir le tableau 2.
La comparaison ainsi obtenue n’est pas pleinement satisfaisante car elle néglige la durée de
vie des gaz à effet de serre dans l’atmosphère. Pour comprendre cela, supposons qu’en
doublant la concentration de deux gaz à effet de serre, on double l'intensité radiative
instantanée du premier et on quadruple celle de l'autre. La comparaison de cette première
donnée impute principalement le réchauffement au second. Mais, si la durée de vie du premier
est le double de l’autre, le réchauffement qu’il produit, quoique deux fois moindre, se
prolonge sur une période deux fois plus longue. Ainsi, la comparaison des forçages radiatifs
instantanés est trompeuse. En réponse, le G.I.E.C. propose un indicateur plus satisfaisant,
appelé potentiel de réchauffement global, qui tient compte également de la durée de résidence
des gaz dans l’atmosphère : voir le tableau 2. Il comptabilise les effets climatiques futurs des
émissions de chaque gaz à effet de serre par rapport au dioxyde de carbone.
Tableau 2 : Comparaison des gaz à effet de serre
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L’effet de serre
Gaz à
effet de
serre
Forçage
radiatif relatif
instantané
Potentiel de
réchauffement
global
CO2 1 1
CH4 58 9
N2O 206 190
HCFC-22 5440 510
CFC-11 3970 1500
CFC-12 5750 4500
CFC-113 3710 2100
Source : Houghton & alli (1990).
Le potentiel de réchauffement global prouve que les émissions supplémentaires de dioxyde de
carbone sont plutôt moins dommageables que les émissions des autres gaz. A l’opposé, les
chlorofluorocarbures sont présentés comme les gaz les plus redoutables : comme l’indique
leur forçage radiatif relatif instantané, l’accumulation atmosphérique supplémentaire de ces
gaz renforce sensiblement l’effet de serre immédiat ; de plus, cet effet se prolonge longtemps
après l’émission (voir le tableau 1), si bien que leur potentiel de réchauffement globaux est
élevé.
Le potentiel de réchauffement global désigne clairement les sources de gaz à effet de serre qui
devront être visées prioritairement par la politique du climat. Le critère de comparaison
obtenu est très précieux pour les négociations internationales sur le climat. Toutefois, comme
nous le verrons dans le chapitre 3, il n’est pas pleinement satisfaisant d’un point de vue
économique.
Définition 6 : « On entend par ‘‘source’’ tout processus ou activité qui libère dans
l’atmosphère un gaz à effet de serre, un aérosol ou un précurseur de gaz à effet de serre. »
Source : Article premier, définition 8, Convention-cadre des Nations unies sur les changements climatiques (15
mai 1992).
Les économistes se sont surtout préoccupés du dioxyde de carbone, tandis que les autres
gaz ont nettement moins retenu leur attention. Mis en relation avec les résultats précédents,
cela pourrait sembler paradoxal. En fait, les gaz qui affichent le plus grand potentiel de
réchauffement sont émis en quantités très faibles, si bien que la réduction de leurs émissions
n’aurait qu’un effet limité sur l’évolution climatique future. Pour mieux se rendre compte de
cela, nous proposons une mesure des gisements de limitation de l’effet de serre en 1990, que
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L’effet de serre
nous répartissons entre les gaz à effet de serre : voir le graphique 2. Cet indicateur s’obtient
simplement en multipliant le potentiel de réchauffement global d’un gaz par les quantités
émises de ce gaz : le potentiel de réchauffement mesure le réchauffement intertemporel évité
si l’on réduit l’émission d’une unité ; en première approximation, le produit de cette valeur
par les émissions totales donne la réduction globale de l’effet de serre si l’on s’abstient
d’émettre le gaz.
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L’effet de serre
Graphique 2 : Répartition des gisements de limitation de l’effet de serre (1990)
CO2
72%
CH4
14%
N2O
7%
CFC
7%
Cet indicateur avalise bien le choix des économistes. Le ralentissement de l’effet de serre
passera avant tout par la limitation des émissions de dioxyde de carbone. La réduction des
émissions des autres gaz à effet de serre, quoique que conseillée en tant que mesure
d’accompagnement, n’agira que de manière limitée sur le climat.
5 - Résultats des modèles de circulation générale
Les modèles de circulation générale permettent de simuler les conséquences climatiques
du renforcement de l’effet de serre. Nous avons déjà présenté un résultat déduit de tels calculs
dans la section 2 (voir le paramètre de la relation de réchauffement). Β
L’évolution future de la concentration des gaz à effet de serre étant inconnue, la plupart
des simulations réalisées utilisent l’hypothèse du doublement de la concentration d’équivalent
dioxyde de carbone. Ce scénario correspond à un accroissement du forçage radiatif de 4,4
watts par mètre carré. Les modèles partent de ce choc exogène pour rechercher un nouvel
équilibre climatique. Les prévisions de réchauffement obtenues varient entre 1,5 et 4,5 degrés
Celsius, la valeur la plus probable étant 2,5 degrés Celsius, que l’on vérifie en utilisant la
relation de la section 2 : 0,3x1,9x4,4.
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L’effet de serre
Les différents modèles prédisent tous que : le réchauffement serait plus important aux
latitudes élevées qu’à l’équateur ; les précipitations et l’évaporation devraient croître de 3 à
15 pour-cent. Aucun consensus n’émerge réellement quant à la répartition géographique des
précipitations (ce qui est très problématique pour l’évaluation des dommages sur l’agriculture
et les écosystèmes) : les pluies sont généralement plus fortes toute l’année aux hautes
latitudes et en hiver seulement aux latitudes moyennes ; le signe de leur changement reste
incertain aux basses latitudes.
D’autres expériences numériques ont été menées pour étudier la dynamique transitoire
des changements climatiques. Elles utilisent quatre scénarios, proposés par le G.E.I.C., pour
l’évolution des concentrations de gaz à effet de serre. Le premier scénario n’envisage aucune
mesure de lutte contre l’effet de serre, en dehors des actions déjà entreprises pour limiter les
chlorofluorocarbures. Le forçage radiatif de 4,4 watts par mètre carré, correspondant au
doublement de la concentration atmosphérique en dioxyde de carbone, serait alors atteint en
2020. Les trois autres planifient des mesures de plus en plus dures ; avec la projection basse,
le forçage de 4,4 watts par mètre carré surviendrait en 2100 seulement.
L’élément nouveau, par rapport aux études statiques, est la mise en évidence d’une inertie du
climat due aux océans. Ce résultat explique qu’aucun réchauffement sensible n’ait été perçu à
ce jour, alors que le forçage radiatif actuel, d’environ 2,4 watts par mètre carré au-dessus de
son niveau naturel (voir la section 4), devrait se traduire par un accroissement de la
température d’équilibre de 1,3 degrés Celsius 3.
Les modèles économiques formalisent le délai de réchauffement de la façon suivante :
( ) ( ) ( ) ( )[ ]Δ Δ ΔT t T t r F t T t+ = + −1 . .ω , (3)
où
( )ΔT t est le réchauffement avéré,
( )ω .F t est la température d’équilibre pour le forçage radiatif courant,
r dépend de l’inertie climatique des océans.
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L’effet de serre
Nordhaus (1992a) et (1993), Manne & alli (1995) utilisent la valeur r = 1 20 (ce paramètre
est controversé : il varie entre 0,02 et 0,05 dans les modèles économiques). Le délai
d’ajustement retenu est de 20 ans et correspond au temps mis pour atteindre 1 1− e pour-cent
de la température d’équilibre, i.e. 63 pour-cent.
6 - Effets du réchauffement sur la planète
Nous distinguons deux types de dommages, ceux qui apparaissent de manière graduelle
et ceux qui surviennent brutalement.
6.1 - Des nuisances graduelles
Le premier risque auquel on pense concerne l’équilibre alimentaire du monde. Les
effets sur l’agriculture dépendront sensiblement de l’amplitude des variations climatiques. Le
réchauffement global risque d'atteindre ce secteur sur plusieurs fronts simultanément : la
température elle-même ; l'augmentation des précipitations (comprise entre 3 et 15 %) et de
l'évaporation (approximativement les mêmes taux), qui se compense au niveau global, mais
dont le solde variera sensiblement selon les régions ; l'humidité du sol ; les vertus fertilisantes
du carbone, qui sont asymptotiques et croissent faiblement au-delà du doublement de la
concentration en carbone... C'est le résultat de tous ces effets qui déterminera l'impact sur ce
secteur d'activité.
L'effet net attendu est globalement négatif, même si l'on intègre les adaptations prévisibles
des systèmes de production. Kane, Reilly & Tobey (1992) estiment l’évolution des
productions agricoles pour le cas d'un doublement du dioxyde de carbone. Selon leurs calculs,
les récoltes diminueraient de 20 pour-cent aux Etats-Unis et dans la Communauté européenne,
et de 18 pour-cent au Canada. L’accroissement de la production dans d’autres régions du
monde compenserait partiellement ces pertes : 15 pour-cent en Europe septentrionale et en
3 - Les observations actuelles font état d’un réchauffement de 0,5 degré Celsius depuis un siècle.
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L’effet de serre
Australie, 10 pour-cent en Ex-U.R.S.S. et 4 pour-cent au Japon. A plus long terme, soit pour
une hausse de la température moyenne de 10 degrés Celsius, les conséquences seraient
beaucoup plus graves (Cline, 1994).
A en croire la place que lui ont réservée les médias, l’élévation du niveau des océans
préoccupe particulièrement les gens. Le réchauffement lié à un doublement de la
concentration d’équivalent carbone produirait une élévation du niveau des océans de 0,66
mètre entre 1990 et 2100. Cette donnée s’apprécie mieux en lui associant l’information selon
laquelle une hausse de 1 mètre immergerait 3 % des terres. Pour des températures plus
importantes, l’Antarctique commencerait à fondre et l’élévation du niveau des mers serait
beaucoup plus conséquente. Cline (1991) estime qu’un accroissement de la température de 10
degrés Celsius l’augmenterait d’au moins 4 mètres.
A côté des deux conséquences précédentes, des effets très variés sont attendus. Les
ouragans tropicaux seraient beaucoup plus fréquents (ils apparaissent dans les zones où la
température des océans dépasse 27 degrés Celsius, qui seraient beaucoup plus étendues) et
gagneraient 40 à 50 % de puissance, dans l'hypothèse du doublement de la concentration.
Certains envisagent également des conséquences sur la santé : mortalité estivale des suites
d’une canicule plus importante et apparition de maladies tropicales sous nos latitudes
tempérées. Des problèmes d'approvisionnement en eau pourraient se poser et, en tout cas, sa
raréfaction rendrait les problèmes de pollution de l'eau plus sensibles...
6.2 - Des effets catastrophiques
La communauté scientifique estime que certaines conséquences des bouleversements
climatiques peuvent apparaître subitement, parce que la biosphère et les écosystèmes sont
souvent en équilibre instable. Jouzel, membre du G.I.E.C., affirme que « le ‘‘calme’’ apparent
du climat cache des capacités à basculer rapidement ... dans des régimes très différents. »
(Entretien à Libération, 8 aout 1997, p. 7).
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L’effet de serre
A l’échelle des continents et des océans, les simulations les plus récentes prédisent des
emballements climatiques dramatiques. Selon l’un de ces scénarios, le Gulf Stream serait
dévié de sa trajectoire et stoppé à Gibraltar, à un horizon de 50 à 100 ans. Cette modification
aurait des conséquences rapides et sensibles sur le climat de l’Europe occidentale, avec une
chute brutale des températures de l’ordre de 4 degrés Celsius.
Il est également possible que les modèles de circulation générale omettent de prendre en
compte certaines rétroactions positives. L'histoire de la planète montre que les écosystèmes
s'adaptent à des variations de température comparables à celle qui se prépare, mais qui
s’étalent sur plusieurs siècles. A contrario, sachant la rapidité probable du réchauffement
prévu, leur faculté d’adaptation risque d’être insuffisante. Par exemple, le doublement de la
concentration d’équivalent carbone déplacerait la ceinture sud des forêts de 600 à 700
kilomètres vers le nord, en moins d'un siècle, alors qu'une forêt migre au mieux de 100
kilomètres sur la période considérée. Outre les dommages directs que cela impliquerait (pertes
écologiques importantes : diversité biologique et désertification), une destruction massive des
forêts produirait une rétroaction positive. En effet, les forêts agissent comme des réservoirs de
carbone et leur disparition accélérerait l’accumulation du carbone dans l’atmosphère.
D’autres rétroactions positives pourraient aggraver très sérieusement l’effet de serre. La fonte
des glaces diminuerait l’albédo moyen de la Terre et augmenterait le réchauffement. Un
dégagement massif du méthane emprisonné dans les plateaux continentaux accélérerait le
réchauffement...
7 - Conclusion
Les activités économiques de production et de consommation rejettent des gaz à effet de
serre en quantités importantes et renforcent le phénomène naturel d’effet de serre. Ceci
devrait produire, à terme, un réchauffement général de la planète, de l’ordre de 2,5 degrés
Celsius en 2050, selon les prévisions moyennes. Un tel phénomène aurait évidemment des
conséquences sur l’environnement et sur l’économie : agriculture, élévation du niveau des
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L’effet de serre
mers, santé, destruction d’écosystèmes et perte de diversité biologique, effets
catastrophiques...
Le dioxyde de carbone, qui est un sous-produit de la combustion des énergies fossiles
(pétrole, gaz naturel et charbon), contribuerait pour une bonne part au réchauffement global
(72 pour-cent selon nos calculs). Quoique l’aptitude des autres gaz à effet de serre à
réchauffer la planète soit généralement plus forte (voir les forçages radiatifs instantanés) et
plus durable (voir les durées de vie atmosphériques) que celle du dioxyde de carbone, ils
restent émis en quantités suffisamment faibles pour ne pas peser trop durement sur le climat
futur. Ceci explique que le gaz carbonique soit la cible principale des politiques de lutte
contre l’effet de serre.
A plusieurs reprises, nous aurons l’occasion d’utiliser les relations (1), (2) et (3) de ce
chapitre dans les discussions à venir. Pour simplifier, nous recourrons souvent à la
linéarisation des forçages radiatifs (cette hypothèse est souvent faite dans la littérature :
Tahvonen, 1994 ; Farzin & Tahvonen, 1996). Les informations à retenir pour la suite sont
reprises dans l’encadré ci-dessous.
Encadré 1 : Modèle climatique de base
Nous considérons différents gaz à effet de serre, indicés par i N= 1,... :
• désigne la concentration atmosphérique du gaz ; Gi i
• est le flux d’émission d’origine anthropogénique du gaz ; gi i
• mesure le forçage radiatif instantané du gaz ; Fi i
• ΔT est l’élévation de la température par rapport à son niveau naturel.
Le modèle climatique de base s’écrit :
( ) ( ) ( ) ( )G t g t G ti i i i+ = + −1 1α β. . i ;
; ( ) ( )( )F t f G t Gi i i= −. ,0 i
( ) ( ) ( ) ( )Δ ΔT t r T t r F ti+ = − + ∑1 1 . . .ω .
Les paramètres utilisés sont :
• pour le gaz carbonique : α CO2 0 64= , ; β CO2 1 120= ; ; G fCO2 17910
2= −, . CO0 2 280, =
ppmv.
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L’effet de serre
• pour le méthane : α CH4 1= ; βCH4 1 10= ; fCH4 108= , ; G CH0 4 08, ,= ppmv.
• pour l’oxyde d’azote : α N O2 1= ; β = 1 150 ; f N O2 4 96= , ; G N O0 2 0 288, ,= ppmv.
• pour les CFC : α CFC =1 ; β CFC (voir le tableau 1) ; f CFC = 26316, ; ppmv. G CFC0 0, =
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Partie I
Politique mondiale du climat
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Pollution cumulative
Chapitre 1
Pollution cumulative
Il existe un lien de parenté évident entre le problème posé aujourd'hui par les pollutions
cumulatives (Plourde, 1972 ; Forster, 1973), dont l’effet de serre est un exemple, et les
questions plus anciennes, inspirées par les ressources épuisables (Hotelling, 1931) et les
ressources renouvelables (Gordon, 1954). Entre ces trois types de questions, la différence
principale provient de la dynamique du stock considéré, plus précisément de la présence ou de
l’absence d’un mécanisme assurant sa régénération. Ensuite, à quelques détails techniques
près, tous ces sujets s'articulent autour de la même problématique, à savoir le constat que la
consommation présente réduit le bien-être futur (dans le cas des ressources renouvelables et
des pollutions cumulatives, on doit dire ‘‘trop de consommation...’’, du fait de leur caractère
renouvelable).
On peut toutefois trouver une différence importante entre les pollutions cumulatives et les
autres thèmes. Dans le cas de l’effet de serre, l’atmosphère est un bien public pur dont chacun
use librement. A l'inverse, les ressources auxquelles nous faisions allusion dans le paragraphe
précédent sont, le plus souvent, appropriables parce que matérielles et divisibles. La plupart
du temps, elles appartiennent à une personne physique ou morale : cas des énergies fossiles,
des mines ou des forêts. Cette différence s'avère cruciale. Sous un certain nombre
d'hypothèses classiques (rationalité, concurrence pure et parfaite, information complète et
anticipation parfaite), la détention privée d'une ressource épuisable, renouvelable ou
environnementale garantit, à elle seule, son exploitation intertemporelle optimale. A
contrario, la surexploitation du ‘‘service’’ de recyclage des gaz à effet de serre, offert
gratuitement par l'atmosphère, découle immanquablement de son appropriation collective.
Pour corriger cette externalité, une autorité supérieure doit simuler le ‘‘marché manquant’’
(Mäler, 1990) en proposant les incitations adéquates.
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Pollution cumulative
Techniquement, cela n'empêche pas la méthode de détermination de l'exploitation
intertemporelle optimale d'une ressource d'être à peu près identique pour tous les cas.
Simplement, la différence tient en deux phrases : dans le cas des ressources privées, c'est
l'intérêt du propriétaire qui incite à suivre la trajectoire obtenue ; dans le cas de
l'accroissement de l'effet de serre, et plus généralement des ressources communes (‘‘La
tragédie des espaces communaux’’, Hardin, 1968), le profil optimal doit être imposé de
manière autoritaire aux usagers.
Dans ce chapitre, nous allons construire un modèle formalisant les interactions entre
l’économie et le climat. Sa logique s’énonce comme suit. Le système économique produit des
biens de consommation à l’aide d’un intrant polluant. Le gaz émis est rejeté dans
l’atmosphère et y reste un certain temps, avant d’être capté par les océans. Pour fermer la
boucle, le gaz accumulé réchauffe l’atmosphère, ce qui est néfaste pour l’activité productive.
Dans une première section, nous décrirons les propriétés qualitatives de la politique optimale
du climat. Nous insisterons particulièrement sur la notion de prix implicite de la pollution, car
elle est centrale dans toute l’analyse économique de l’effet de serre et donne lieu à la notion
de taxe optimale sur les émissions. En supposant que le stock de pollution initial est plus petit
que sa valeur stationnaire, hypothèse qui est a priori réaliste 1, nous montrerons que le prix
implicite de la pollution et le stock de pollution augmentent avec le temps, tandis que
l’émission diminue. L’économie rejoint un équilibre stationnaire, qui dépend fortement de la
valeur du taux d’actualisation de l’utilité.
Les énergies fossiles sont la cause principale de l’effet de serre additionnel. Ainsi, l’extraction
de ces ressources et l’émission des gaz à effet de serre découlent d’une seule et même
décision, qui s’étudie en aménageant le modèle de Hotelling (1931). C’est ce que nous nous
proposons de faire dans la seconde section de ce chapitre. Nous nous préoccuperons surtout
de l’évolution du prix implicite de la pollution dans ce nouveau contexte. A long terme, la
1 - Le G.I.E.C. estime que la stabilisation de la concentration atmosphérique de gaz carbonique au niveau actuel
requièrerait une réduction de 60 à 80 pour-cent de la consommation mondiale d’énergie fossile. Une telle
mesure est à coup sûr hors de portée.
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Pollution cumulative
ressource responsable de la pollution est épuisée ; le gaz à effet de serre excédentaire et
l’externalité climatique disparaissent. Il s’ensuit que le prix implicite de la pollution devient
nul et qu’il doit globalement décroître avec le temps. Ulph & Ulph (1994), Sinclair (1994) et
Farzin & Tahvonen (1996) tirent des implications pratiques de ce résultat et invitent les
décideurs à y réfléchir. En effet, jusqu’à présent, tous les projets de limitation des émissions
de dioxyde de carbone prévoient une taxe croissante avec le temps, en contradiction avec le
résultat énoncé.
Pour notre part, nous doutons de l’utilité pratique de cette analyse, et ce pour deux raisons.
D’abord, la dotation en ressources fossiles est suffisante pour multiplier par six le stock de
dioxyde de carbone atmosphérique, ce qui laisse présager une aggravation sensible de l’effet
de serre. Ensuite, lorsque la croissance est forte, les dommages subis peuvent continuer à
augmenter, malgré une baisse de la pollution. La taxe sur le carbone devrait donc croître
pendant un laps de temps assez long avant de décliner. Pour tester cette proposition, nous
conclurons notre discussion, dans une troisième section, par une application numérique et
nous montrerons que : la taxe optimale sur les émissions de gaz à effet de serre croît dans un
premier temps puis décroît ensuite ; la première phase est d’autant plus longue que la dotation
en ressources est grande, que le stock de pollution initial est petit et que le taux de croissance
de l’économie est fort.
1.1 - Production - Pollution cumulative
Nous présentons ici le modèle le plus élémentaire possible. Il est inspiré de Cesar
(1994), Gottinger (1991) et Nordhaus (1982). Bien que rudimentaire, il cerne bien les
propriétés les plus caractéristiques de la politique du climat. Il se présente sous la forme d’un
problème de commande optimale à horizon infini.
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Pollution cumulative
Problème n°1 :
( )( )max
g t
te u C t d
( )
. .−
∞
∫ δ0 t (1.1)
sous les contraintes
( ) ( ) ( )& .G t g t G t= − β , (1.1a)
, (1.1b) ( ) ( ) ( ) ( )( )C t Q t f g t G t≡ = ,
G G0 0bg= , (1.1c)
g tbg≥ 0 , . (1.1d)
∀t
Le programme économique que nous nous proposons de résoudre repose sur la recherche du
plus grand bien-être intertemporel, mesuré par l’intégrale (1.1). Les flux d’utilité successifs
de la consommation ( )C t sont actualisés au taux δ . La variable de contrôle est l’émission du
gaz à effet de serre, notée g . La variable d'état représente la concentration atmosphérique en
gaz à effet de serre, notée G .
Module Economie - Atmosphère
Ce module explicite la relation entre l’activité économique et la composition de l’atmosphère.
L’information correspondante est contenue dans l'équation différentielle (1.1a), qui régit la
dynamique de la variable d'état.
La pollution apparaît sous la forme d’un input dans la fonction de production. Cette
interprétation nous a semblé être la plus adaptée à la modélisation de l’effet de serre, puisque
l’émission dépend principalement de la combustion des énergies fossiles. Une formalisation
alternative aurait été de considérer que la pollution est un produit joint, i.e. directement
proportionnelle à l’output. Mais, cette hypothèse devient gênante dès qu’il y a plus d’un
facteur de production, car elle sous-entend que le ratio de pollution par unité produite est
invariable, donc qu’il est impossible de choisir une technique de production plus propre, en
substituant un facteur à la pollution.
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Pollution cumulative
L’activité économique dépend de l’émission du gaz polluant. Comme nous l’avons déjà
souligné, l’effet de serre additionnel est une pollution cumulative. Dans la relation (1.1a),
cette propriété implique que toute quantité g de gaz à effet de serre émise est accumulée dans
l’atmosphère.
L’évolution de la concentration atmosphérique dépend également de la régénération naturelle
de l’atmosphère. Ce mécanisme est assez mal connu (grossièrement, on sait seulement que 50
pour-cent des émissions sont, in fine, stockées dans l’atmosphère actuellement). Faute de
mieux, les chercheurs formulent des hypothèses ad hoc. Celle que nous avons retenue est de
loin la plus courante. Dans la relation (1.1a), nous supposons que la régénération naturelle par
la biosphère est une fonction linéaire du stock de pollution ; le taux de recyclage β est donc
constant. Certains auteurs choisissent un recyclage fixe quelle que soit la pollution, d’autres
une fonction de recyclage logistique.
L'existence de la fonction de recyclage a des implications importantes. Du fait de la présence
d’un tel mécanisme de régénération, il est possible d'émettre le gaz à effet de serre en
quantités positives, tout en maintenant constante sa concentration atmosphérique. Cette
propriété apparente l'atmosphère, et le climat par la même occasion, à une ressource naturelle
renouvelable, par opposition aux ressources épuisables.
Module Atmosphère - Climat
Ce module fait le lien entre la pollution de l’atmosphère et le climat de la planète. Cette
relation a été présentée dans le chapitre préliminaire. Nous la simplifions de la manière
suivante. Le réchauffement avéré à la date est une fonction croissante, à taux croissant, de
la concentration de gaz à effet de serre à cette date :
t
( ) ( )( )ΔT t G t= ξ 2.
On a : ( )′ >ξ G 0 , ( )′′ >ξ G 0 .
2 - L’inertie climatique n’est pas introduite.
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Pollution cumulative
Module Climat - Economie
Dans ce module, nous traduisons les bouleversements climatiques en termes économiques.
Pour commencer, nous supposons qu’ils auront des conséquences négatives sur le bien-être.
Pezzey (1989) distingue deux types d’effets d’une pollution sur le bien-être : les pertes de
valeurs d’agrément interviennent lorsque la qualité de l’environnement est un argument de la
fonction d’utilité ; des effets contre-productifs surviennent lorsque la qualité de
l’environnement apparaît dans la fonction de production. Dans notre formalisation, nous
avons retenu l’hypothèse d’une externalité de production uniquement. L’effet contre-
productif de l’effet de serre est incontestable (agriculture, santé...), ce qui explique notre
choix. Nous décidons de ne pas tenir compte de la valeur d’agrément pour des raisons
essentiellement pratiques : d’abord, mieux vaut éviter de trop compliquer le modèle ; de plus,
autant l’externalité sur la production est clairement identifiable et mesurable, autant il paraît
plus délicat de chercher à recenser, puis à mesurer, les pertes en bien-être directes résultant
d’une modification climatique.
La production du bien de consommation composite dépend de l’émission du gaz à effet de
serre et de l’état du climat. On utilise la fonction de production ( )F g T,Δ . Elle est supposée
croissante, à taux décroissant, en g et décroissante, à taux décroissant, en ΔT .
On a : ( ) ( )F g T F g Tg gg, ,Δ Δ> >0 , ( )F g TTΔ Δ, < 0 , ( )F g TT TΔ Δ Δ, < 0 et . ( )F g Tg TΔ Δ, < 0
En outre, est supposée concave, i.e. (F g T,Δ ) ( ) ( ) ( )[ ]F g T F g T F g Tgg T T g T, . , ,Δ Δ ΔΔ Δ− ≥2 0 .
Pour simplifier, nous utilisons une fonction de production déduite de celle-ci, qui permet
d'éliminer la variable superflue ΔT : ( ) ( )( )f g G F g G, ,= ξ . On démontre que cette fonction
est strictement concave (voir l’annexe 1.1).
On a : ( ) ( )f g G f g Gg gg, ,> >0 , ( )f g GG , < 0, ( )f g GGG , < 0 et ( )f g GgG , < 0.
Puisqu’il n'y a pas d'investissement, Q mesure à la fois la quantité de biens produits ( )f g G,
et la consommation C . La consommation procure une utilité ( )u C . On a : ( ) ( )′ > > ′′u C u C0 .
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Pollution cumulative
Pour garantir l'existence d'une solution intérieure, nous posons les hypothèses suivantes
(Cesar, 1994) :
( )lim
Q
u C
→
′ = ∞
0
, (H1)
( )lim
g g
f g G
→
= ∞
0
, , quelle que soit G , tant que ( )f g G, > 0 , (H2)
( )lim
G G
f g G
→
=
0
0, . (H3)
1.1.1 - Résolution 3
La méthode de résolution utilisée fut énoncée par Pontriagine et alli (1961), sous le nom
de ‘‘Principe du Maximum’’. De très bons manuels d'application de cette théorie à l'économie
et à la gestion sont disponibles (Arrow & Kurz, 1970 ; Kamien & Schwartz, 1981 ; Seierstad
& sydsaeter, 1987 ; Lacaze, 1990 ; Léonard & Long, 1992).
Dans un premier temps, on forme la fonction Hamiltonienne courante, désignant la
variable adjointe à la variable d’état
( )p t
4 :
( ) ( )( ) ( )~ , , , . .H G g p u f g G p g G= − − β . (1.2)
Soit ( ) ( )G t g t* , * la solution du problème n°1. Alors, il existe ( )p t continue et dérivable
par morceaux et la solution optimale respecte les conditions suivantes :
g * maximise . (~ *, ,H G g p)
(1.3)
3 - Voir l’appendice 1.
4 - Le Hamiltonien courant ne dépend pas du temps puisque, ( )H G g p t, , , étant le Hamiltonien et la
variable adjointe exprimée en valeur présente, alors
e pt−δ . .
( ) ( ) ( )( )~ , , . , , , . , . . &. .H HG g p e G g p t e u f g G e p Gt t− −= = −δ δ .t−δ .
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Pollution cumulative
Pour une solution intérieure, le contrôle optimal satisfait les relations :
( ) ( ) ( )( )~ *, * , * , * . * , *H g gG g p f g G u f g G p= ′ − = 0, (1.3a)
. (1.3b)
( )~ *, * ,H gg G g p < 0
L'équation différentielle suivante régit l'évolution de la variable adjointe :
( ) ( ) ( ) ( )( )& ~ *, * , . . * , * . * , *p G g p p p f g G u f g GG G= H + = + + ′δ δ β . (1.4)
L' ‘‘état terminal’’ du système vérifie la condition de transversalité suivante :
( ) ( )lim
t
te p t G t
→∞
− =δ . . * . * 0 . (1.5)
Nous montrons, dans l’annexe 1.2, que les conditions nécessaires (1.3) à (1.5) sont également
conditions suffisantes d'optimalité.
1.1.1.1 - La demande d'émission
La condition (1.3a) détermine implicitement l’émission optimale en fonction de l’état
du climat et du prix implicite de l’accumulation du polluant. Elle définit donc la demande
d’émission de gaz à effet de serre :
(g g G p* ,= ) . (1.6)
Lemme 1.1 : La demande d’émission décroît avec le prix implicite du polluant (voir la
propriété 1.1). Si l’utilité marginale de l’émission décroît avec la pollution ou,
réciproquement, si les dommages climatiques augmentent avec la production, i.e. si
( )∂ ∂f u Gg . ′ ≤ 0 , la demande d’émission décroît avec la pollution.
Preuve : voir l'annexe 1.3.
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Pollution cumulative
Remarque 1.1 : Cesar (1994) montre que la condition ( )∂ ∂f u Gg . ′ ≤ 0 est satisfaite si la
fonction de production est de la forme ( ) ( ) ( )f g G Y g D G, .= et si l’élasticité de l’utilité
marginale par rapport à la consommation est inférieure à l’unité, i.e. si
( ) ( ) ( )σ C u C C u C= − ′′ ′ <. 1.
1.1.1.2 - Synthèse et interprétations
En remplaçant g par la fonction de demande d'émission (1.6) dans (1.1a) et (1.4), on
obtient un système de deux équations différentielles à deux inconnues :
( ) ( )( ) ( )( )( )
( )
& . * , , * . * , ,
& * , . *
p p f g G p G u f g G p G
G g G p G
G= + + ′
= −
⎧
⎨
⎪
⎩⎪
δ β
β
*
(1.7)
Sachant la dotation initiale (1.1c) et la condition transversale (1.5), ce système est déterminé.
Propriété 1.1 : La variable adjointe agrège tous les coûts externes futurs imputables à la
dernière unité de polluant accumulée. Toutes choses égales par ailleurs, ces flux de dommage
disparaissent, au cours du temps, au taux δ β+ , en raison du mécanisme d’actualisation et de
la régénération de l’atmosphère. La variable d’état mesure donc le coût marginal d’usage du
polluant, ce qui justifie de l’interpréter comme son prix implicite.
Preuve : voir l'annexe 1.4 où il est démontré que :
( ) ( ) ( ) ( ) ( )( )p t e f g G u f g G dt Gt= − ′
− + −∞∫ δ β τ τ. . , . , . (1.8)
Si le dommage climatique est constant, quelle que soit la pollution, i.e. si ( )f g GG , = 0 ,
alors le prix implicite de la pollution est nul. Il est alors optimal que l’émission soit gratuite.
Dans le cas contraire, si , le prix implicite est positif. ( )f g GG , < 0
Remarque 1.2 : Au cours des commentaires subséquents, l’hypothèse d’un taux
d’actualisation nul est utilisée de façon abusive. En effet, si tel est le cas, l’intégrale (1.1)
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Pollution cumulative
devient divergente et le problème n°1 ne peut plus être résolu. Néanmoins, sortie de ce
contexte, nous utilisons l’hypothèse d’une actualisation nulle uniquement à des fins
pédagogiques.
La relation (1.4) nous renseigne sur l’évolution du prix implicite de la pollution à travers le
temps. Si le polluant est persistant (β = 0 ) et si le facteur d’actualisation est nul (δ = 0), le
prix implicite est maximum à l’instant initial et décroît ensuite, puisque . Lorsque
l’actualisation est nulle, les consommations présentes et futures contribuent également au
bien-être intertemporel, mesuré par l’intégrale (1.1) ; le prix implicite devrait donc être
constant. Mais, si le polluant est persistant, l’émission présente est plus dommageable que les
émissions futures ; il est donc préférable de retarder la pollution, ce qui justifie que le prix
implicite de la pollution soit décroissant.
f uG . ′ < 0
La présence d’un taux de régénération atmosphérique β positif fait que le prix implicite de la
pollution peut croître avec le temps. Dans ce cas, l’émission présente accroît le recyclage
futur du stock de pollution. Elle élargit l’ensemble des possibilités de production, puisqu’il
devient possible de polluer plus sans dommages supplémentaires. Cette contrepartie positive à
l’accumulation du gaz à effet de serre incite à choisir un prix implicite plus faible au départ,
puis croissant ensuite, à mesure que le renforcement du dommage climatique compense l’effet
bénéfique dont nous venons de parler.
Le facteur d’actualisation joue dans le même sens que le taux de recyclage. Lorsqu’il est
positif, le consommateur attribue une pondération plus grande aux flux d’utilité présents.
Ainsi, il préfère polluer plus aujourd’hui, quitte à subir des conséquences climatiques futures
plus dures, mais dont l’évaluation est amoindrie par le mécanisme d’actualisation. Ceci incite
logiquement à adopter un prix implicite faible au départ et croissant avec le temps.
L’internalisation des effets externes, imputables à l’émission du gaz à effet de serre,
nécessite d’égaliser l’utilité marginale et le coût marginal indirect de la pollution. Cette
propriété est remplie par le contrôle optimal du problème n°1. La dernière unité émise génère
unités de bien-être. En contrepartie, une unité de gaz à effet de serre est accumulée f ug . ′
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Pollution cumulative
dans l'atmosphère, ce qui coûte p unités de bien-être. L’optimum est atteint quand les deux
s’équilibrent, ce que garantit la condition (1.3a).
Propriété 1.2 : Le Hamiltonien courant mesure le produit net de l'économie, exprimé en
termes d’utilité 5.
Le Hamiltonien somme l'utilité de la consommation et le produit du coût marginal de la
pollution par l'accroissement du stock de polluants (voir la relation (1.2)). Le premier élément
évalue la richesse créée pendant l'exercice courant. Le second terme calcule sa contrepartie
future, i.e. la perte d’utilité due à l’accumulation du polluant (à condition que le prix implicite
soit correctement évalué). Le solde définit le bien-être net produit, envisagé d’un point de vue
intertemporel.
Le Hamiltonien suggère donc un agrégat économique qui pourrait s’avérer utile à la
planification : plus il est grand, plus le revenu net du coût écologique de l’activité
économique est grand. En se reportant à la condition (1.3), on constate d’ailleurs que
l’émission optimale est justement celle qui maximise le Hamiltonien. Ceci justifie que nous
nous intéressions, à partir de maintenant, plus particulièrement au Hamiltonien maximum, qui
est la valeur prise par le Hamiltonien lorsque le contrôle optimal est appliqué :
. ( ) (~H , ~H , ,0 G p G g p
g
= max )
Soit le bien-être intertemporel optimal du programme
débutant à l’instant avec un stock de polluants
( )( ) ( )V G t t e u C d
g t
* , ..= −
∞
∫max δ τ τ
t ( )G t* 6. Par un simple changement de
variables, i.e. en posant s = − tτ , on démontre facilement que :
5 - On déduit une mesure du produit net en terme monétaire par approximation linéaire de l’utilité (Hung, 1991)
:
( ) ( )
PN =
′
= +
′
~
H
. &
u C
C
p
u C
G .
6 - Egalement appelé ‘‘fonction de valeur optimale’’.
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Pollution cumulative
( )( ) ( ) ( )( )V G t t e e u C ds e V G t
g
t s t* , . . . * ,. . .= =− −
∞ −∫max δ δ δ0 0 . (1.9)
La relation (1.9) prouve que le bien-être intertemporel du programme débutant à l’instant
avec une dotation initiale est la valeur présente du gain associé au même problème,
lorsque la date initiale est l’origine des temps. Ce résultat est caractéristique des problèmes
autonomes à horizon infini (Léonard & Long, 1992, pp. 292 et 293).
t ( )G t*
L’égalité (1.9) et l’équation Hamilton-Jacobi-Bellman, appliquée à notre problème,
permettent de déduire la relation suivante :
( ) ( )( ) ( )(~H * , * . * ,0 0G t p t V G t=δ ) . (1.10)
Preuve : Voir l’annexe 1.5.
La relation (1.10) signifie que le produit net maximum s’apparente à un intérêt perçu
sur le bien-être total maximum. A condition que le stock de pollution soit stationnaire
( &G = 0), le Hamiltonien reste constant à travers le temps. Le flux de bien-être correspondant
est donc un revenu au sens de Hicks, c’est-à-dire une rente obtenue sans réduction de la
capacité future de l’économie à produire la même quantité de bien-être. Si la pollution varie,
le produit net varie et la reproduction du système ne se fait plus à l’identique.
La recherche d’une trajectoire de développement soutenable et équitable entre les générations
nécessite donc une accumulation nette de gaz à effet de serre nulle ou négative. Ce résultat
n’est pas très pertinent car le présent modèle n’a pas les qualités requises pour traiter ces
sujets. Notamment, il faudrait l’aménager en introduisant la possibilité d’accumuler du capital
et/ou en faisant intervenir le progrès technique. Ce faisant, l’accumulation de capital à un
rythme au minimum capable de compenser la dégradation de l’environnement, c’est-à-dire
laissant intacte la capacité productive de l’économie, telle que le produit net la mesure,
donnerait une approche plus satisfaisante de la notion de développement soutenable. Ceci ne
sera pas fait parce que cette préoccupation échappe à notre problématique. En revanche, une
synthèse rapide des différentes définitions de ce concept est proposée dans l’encadré 1.1.
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Pollution cumulative
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Pollution cumulative
Encadré 1.1 : Le développement soutenable
La conception Hicksienne du revenu constitue un bon point de départ pour caractériser le
développement soutenable : à l’échelle macro-économique, le revenu est la quantité
maximale de bien-être qui peut être obtenue au cours d’une période sans diminution du
potentiel économique futur, i.e. de la faculté à reproduire le même flux de bien-être. Dans
cette lignée, la plupart des définitions du développement soutenable requièrent un flux
d’utilité sociale non décroissant à travers le temps. En caricaturant, il existe deux moyens
pour que ce souhait soit exaucé.
Le premier consiste, pour le moins, à maintenir en l’état chaque composante de
l’environnement économique et naturel, prise individuellement. Faucheux & Noël (1995)
classent les tenants de ce principe de gestion dans la catégorie des partisans d’une
soutenabilité forte. Ceux-ci défendent leur position :
1. en avançant l’argument d’une forte complémentarité entre le patrimoine naturel et le
capital produit ;
2. en jugeant immoral le processus d’actualisation, qui revient implicitement à donner une
importance différente à deux individus sur le motif qu’ils naissent à des moments
différents.
L’autre moyen serait, pour le moins, de maintenir la capacité productive de
l’environnement économique et naturel dans son ensemble. Cette règle relève, pour
Faucheux & Noël, d’une soutenabilité faible, car elle tend à reconnaître la possibilité de
compenser la destruction nette de certaines composantes, principalement le patrimoine
naturel, par les autres, essentiellement le capital produit et le progrès technologique. Le
principe de compensation invoqué découle de Hartwick (1977). Celle-ci prouve qu’un
investissement égal à la rente de rareté d’une ressource environnementale quelconque
rétablit exactement la capacité productive de l’économie.
La position intermédiaire est plus raisonnable. D’un côté, elle tolère la destruction de
certaines composantes du patrimoine naturel, à condition qu’elle soit compensée par
l’accumulation de capital et le progrès technologique : recherche de technologies de
remplacement dans le cas des ressources épuisables ; destruction d’écosystèmes locaux en
vue d’aménagements soutenables. Dans le même temps, elle reconnaît les particularités du
patrimoine naturel, lorsqu’il est vu comme le vecteur de la vie, comme une source
d’agréments esthétiques et culturels, comme la base de découvertes scientifiques et
médicales (biodiversité)... Elle suggère :
1. d’accepter les principes de la soutenabilité faible, lorsque les composantes du
patrimoine naturel qui sont menacées peuvent être remplacées à coup sûr ;
2. de respecter un certain nombre de normes environnementales, définies précisément
pour préserver les fonctions de l’environnement essentielles à la vie et non
substituables par des biens artificiels.
Cette approche du développement soutenable est défendue par ceux qui appartiennent à
l’école de Londres (Barbier & Markandya, 1990 ; Pearce, 1988 ; Pearce & alli, 1989),
selon la terminologie de Faucheux & Noël.
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Pollution cumulative
Jusqu’ici, nous nous sommes attachés à faire le point sur la signification et l’implication
économiques des variables et des relations utilisées pour résoudre le problème n°1. Cette
discussion n’éclaire en rien la nature de la mesure à mettre en place : Comment évolue-t-elle ?
A quoi conduit-elle ? Pour répondre à ces questions, nous énonçons, dans la section
subséquente, les propriétés qualitatives de la politique optimale de l'effet de serre.
1.1.2 - Propriétés qualitatives de la dynamique optimale
1.1.2.1 - Le diagramme des phases
Constatons avant de commencer l'exposé qui va suivre que le temps n'apparaît pas
explicitement dans le système (1.7). Cette propriété caractérise un problème dit autonome.
Elle nous permet de recourir à la méthode graphique que nous débutons maintenant.
Nous voulons obtenir une représentation graphique de la trajectoire optimale dans le
diagramme des phases ( . Quel que soit le point de ce plan, les équations différentielles
du système (1.7) expriment la direction et la vitesse de déplacement du système.
)G p,
Pour analyser les propriétés du système dans le diagramme des phases, nous commençons par
rechercher les lieux des points où &p et s'annulent. Nous définissons donc les ensembles
et respectivement, avec :
&G P
G
( ){ }P = = ≥G p p p G, / & ;0 0, 0≥ et ( ){ }G= = ≥G p G p G, / & ;0 0, 0≥ .
Lemme 1.2 : Les isoclines et possèdent les propriétés suivantes : P G
• La courbe représentant a une pente non décroissante ; P
• La courbe représentant est de pente non croissante ; G
• Tout point au-dessus de l'isocline a une vitesse P &p positive, et inversement ;
• Tout point au-dessus de l'isocline a une vitesse négative, et inversement. G &G
Preuve : Voir l'annexe 1.6.
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Pollution cumulative
Proposition 1.1 : Un point élément des isoclines et simultanément définit l'état
stationnaire du système. Si ce point existe, compte tenu du lemme 1.2, il est unique. Nous
supposons son existence et nous le notons
P G
( )I G p∞ ∞* , * ∈ ∩P G .
Nous proposons une représentation du diagramme des phases dans le graphique 1.1. Y
figurent les isoclines et et trois trajectoires faisables, dont une converge vers le point
stationnaire
P G
I . Lorsque le point initial est un point quelconque de ce plan, l’économie dirigée
par le système (1.7) décrit une trajectoire faisable non admissible. La trajectoire est
admissible si elle respecte les contraintes du modèle : dans le cas présent, toute trajectoire
admissible part de la pollution d'origine . La trajectoire optimale est une trajectoire
admissible et faisable (voir le glossaire), vérifiant en plus la condition de transversalité (1.5).
G0
Remarque 1.3 : Les résultats et les commentaires subséquents s’appliquent dans le cas où le
stock de pollution d’origine est inférieur au stock de pollution stationnaire, i.e. G G .
Cette hypothèse réduit le degré de généralité de la discussion, mais s’applique
raisonnablement bien à l’effet de serre, puisque les projections prévoient une élévation
importante des concentrations atmosphériques en gaz à effet de serre.
0 < ∞ *
Graphique 1.1 : Diagramme des phases
G P
↑→
←
↓
←↑
→↓
G
p
I
G 0 G∞ *
p∞ *
p*(0)
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Pollution cumulative
1.1.2.2 - Dynamique optimale
Théorème 1.1 : La dynamique optimale conduit l'économie de l'état initial donné à l'état
stationnaire.
Preuve : Le point stationnaire a pour coordonnées ( )G p∞ ∞* , * . Puisque le stock de gaz à effet
de serre et le prix implicite de l’accumulation du gaz à effet de serre sont finis,
et on vérifie la condition (1.5). lim
t
te p G
→∞
−
∞ ∞ =
δ . . * . * 0
Propriété 1.3 : Lorsque , la concentration atmosphérique de gaz à effet de serre et le
prix implicite du polluant, i.e. le coût marginal intertemporel d'une unité de gaz à effet de
serre dans l'atmosphère, croissent avec le temps.
G G∞ >* 0
Preuve : Léonard & Long (1992), théorème 9.5.1., pp. 294-295.
Propriété 1.4 : Lorsque , l’émission du gaz à effet de serre et la consommation
diminuent avec le temps. Elles tendent asymptotiquement vers leurs valeurs stationnaires,
fonction des valeurs d'équilibre de la pollution et du coût marginal intertemporel de l'effet de
serre.
G G∞ >* 0
Preuve : Nous avons démontré précédemment que l’émission est une fonction décroissante de
G et de p . Du fait des trajectoires optimales de ces deux variables (voir la propriété 1.3),
décroît avec le temps. Comme la consommation
g*
( )C f g G= , est une fonction croissante de
et décroissante de
g
G , elle diminue avec le temps.
1.1.2.3 - L'état stationnaire
Compte tenu des résultats de la section précédente, il n'est pas besoin de justifier de
l'utilité d'une analyse détaillée des propriétés de l'équilibre stationnaire.
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Pollution cumulative
Théorème 1.2 : L'état stationnaire du système respecte les propriétés suivantes :
( )& * .G g∞ = ⇔ =∞0 β *G∞ , (1.11)
( )
( ) ( )( )
& *
* , * . * , *
p p
f g G u f g GG∞ = ⇔ = −
′
+∞
∞ ∞ ∞ ∞0
δ β
, (1.12)
. (1.13)
( ) ( )( )f g G u f g G pg ∞ ∞ ∞ ∞ ∞′ =* , * . * , * *
Preuve : Ces propriétés s'obtiennent directement à partir des conditions (1.1a), (1.4) et (1.3a).
L'état stationnaire préserve l'équilibre de l'écosystème (voir la relation (1.11)). L’émission du
polluant est entièrement recyclée par la biosphère et il se produit une stabilisation du climat.
La politique optimale du climat est donc en conformité avec la Convention-cadre sur les
changements climatiques (Rio de Janeiro, 1992), puisque celle-ci se fixe pour « objectif
ultime ... de stabiliser ... les concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère ».
Le prix implicite de l’émission est égal à la valeur présente des flux de dommages marginaux
futurs (voir l’expression (1.12)). On l'obtient en agrégeant, sur une durée infinie, le dommage
marginal constant du réchauffement planétaire, en tenant compte du taux de recyclage du
polluant par l'écosystème et du taux de préférence pour le présent :
( )
( )
p e d e∞ ∞
− +∞
∞
− + ∞
∞= =
+
⎡
⎣
⎢
⎤
⎦
⎥ = +∫* * . * .
*. .Dm Dm
Dmδ β τ δ β ττ
δ β δ β0
0
,
où ( ) ( )( )Dm∞ ∞ ∞ ∞= − ′* * , * . * , *f g G u f g GG ∞ est le flux de dommage marginal à
l'équilibre.
L’allocation intertemporelle optimale des ressources est assurée puisque l'utilité marginale de
l’émission s'égalise à son coût marginal intertemporel (voir la relation (1.13)).
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Pollution cumulative
En combinant les relations (1.11) à (1.13), on détermine une expression qui synthétise
l’ensemble des propriétés de l’équilibre stationnaire :
ρ
β δ
= −
+
eG
β
, (1.14)
où ρ et e sont les élasticités de la production par rapport aux émissions et à la
pollution respectivement.
G
Une hausse des émissions de un pour-cent accroît immédiatement la production de ρ pour-
cent. Mais, l’accroissement consécutif du stock de gaz à effet de serre permet également de
polluer plus à l’avenir, sans alourdir le dommage de l’effet de serre. D’un point de vue
intertemporel, le supplément d’émissions considéré permet donc d’accéder à une croissance
de ρ β pour-cent de la production.
Le même raisonnement permet de comprendre le terme de droite de (1.14). A court terme,
toute élévation de la pollution de un pour-cent réduit la production de pour-cent. En
tenant compte des conséquences futures, c’est une baisse de
−eG
( )− +eG δ β pour-cent de la
production qui doit être comptabilisée.
Propriété 1.5 : La concentration et l’émission stationnaire augmentent avec le taux
d'actualisation. La consommation stationnaire diminue lorsque le taux d'actualisation
augmente.
Preuve : Voir l'annexe 1.7.
Remarque 1.4 : L’état stationnaire montre que l’approche utilitariste de la politique
climatique garantit, à long terme, un bien-être constant à toutes les générations. Cette qualité
reste toutefois insuffisante pour remplir les objectifs du développement soutenable. En
premier lieu, avant d’atteindre cet équilibre, les flux d’utilité décroissent, si bien que les
générations éloignées sont lésées. En second lieu, comme le montre la propriété 1.5, cette
asymétrie entre les générations dépend du taux d’actualisation, dont la valeur est très
controversée (voir l’encadré 1.2).
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Pollution cumulative
Encadré 1.2 : Valeur du taux d’actualisation social
Argumentation basée sur le coût d’opportunité des investissements publics :
Les investissements publics détournent une partie de l’épargne des placements privés.
Leur coût d’opportunité est donc égal au taux d’intérêt du marché, justifiant d’égaliser le
taux d’actualisation social au taux de rendement privé (Baumol, 1968). Pour Arrow
(1995), ce raisonnement est incomplet, voire « fallacieux », pour deux raisons.
Premièrement, les deux placements ne sont pas homogènes. Alors que l’investissement
privé est risqué, l’investissement public peut être vu comme certain (loi des grands
nombres, diversification de portefeuille, pas de risque d’insolvabilité). La prime de risque
incorporée au taux d’intérêt du marché n’a donc pas lieu d’apparaître dans le taux
d’actualisation social.
Intérêt
U
til
ité
iδ
U
u
U
r R
Dans le graphique ci-dessus, un investisseur quelconque choisit de placer une somme
d’argent soit en bons du trésor, qui rapportent un intérêt δ , soit sur le marché boursier,
qui rapporte un intérêt r avec une probabilité p et R avec une probabilité 1− p . Il tire
une utilité U du revenu obtenu (la fonction d’utilité est supposée concave, traduisant une
aversion pour le risque). Le taux d’intérêt du marché est égal à . On observe facilement i
que le taux de rendement non risqué δ de l’investissement public est suffisant pour attirer
les investisseurs. Il est égal au taux du marché moins la prime de risque.
Deuxièmement, l’argument du coût d’opportunité ne fonctionne que si le taux d’éviction
de la politique publique est de 100 pour-cent. Or, dans le cas d’une mesure de lutte contre
l’effet de serre, consistant à taxer les énergies fossiles sur la base de leur contenu en
carbone, l’effet d’éviction est faible. Ainsi, imaginons que le coût de la politique soit de 1
pour-cent du P.I.B. Avec un taux d’épargne fixe de 20 pour-cent, l’argument du coût
d’opportunité ne joue que sur les 0,01 x 0,2 = 0,2 pour-cent du P.I.B. détourné de
l’investissement privé.
Argumentation basée sur la valorisation du futur :
Deux raisons incitent les individus à privilégier la consommation présente. En premier
lieu, les taux d’épargne observés suggèrent que les agents économiques ressentent une
préférence pure pour le présent (Arrow, 1995). En second lieu, la poursuite de la
croissance économique, combinée à l’hypothèse raisonnable de la décroissance de l’utilité
marginale de la consommation, suggère que les unités de consommation présentes ont plus
de valeurs que celles qui suivront. Evidemment, cette seconde composante intervient
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Pollution cumulative
seulement dans l’actualisation entre unités de consommation, pas entre unités d’utilité
(Nordhaus, 1992b).
1.1.3 - Décentralisation
En suivant Cesar (1994), considérons un consommateur représentatif, un producteur
représentatif et un gouvernement. Supposons que le gouvernement mette en oeuvre une
politique de lutte contre l'effet de serre en levant une taxe γ sur chaque unité de gaz à effet de
serre émise.
Le producteur représentatif détermine son émission de gaz à effet de serre en tenant compte
de la politique d’environnement menée. Son profit est ( )Π = −f g G g, .γ , où le prix de
marché du bien composite produit est supposé unitaire. Il est maximum lorsque ( )f g Gg , = γ ,
sachant que l'état du système est donné (il s'agit bien d'un maximum puisque ( )f g Ggg , < 0
par hypothèse).
Le consommateur représentatif maximise son utilité intertemporelle. Sa contrainte de budget
est donnée par C g= +Π γ . . A chaque instant, sa consommation est égale à ses revenus,
somme des profits réalisés par l'économie et de la redistribution du produit de la taxe.
Dans cette économie, il suffit que le gouvernement choisisse ( )γ = ′p u C pour que l’on soit à
l’optimum. On vérifie en effet que, dans ce cas, l’optimum du producteur implique que
, ce qui correspond à la relation (1.3a). Il s’ensuit que la taxe pigovienne
est égale au rapport du prix implicite de la pollution sur l’utilité marginale de la
consommation (Pigou, 1920).
( ) ( )f g G u C pg , . ′ =
1.2 - Production - Pollution cumulative - Ressource épuisable
L’accroissement de l’effet de serre et l’épuisement des réserves d’énergies fossiles sont
indissociables. L’émission mondiale de dioxyde de carbone résulte essentiellement de la
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Pollution cumulative
combustion du pétrole, du gaz naturel et du charbon. Leur épuisement laisse donc entrevoir
une issue forcée aux problèmes climatiques, même si l’échéance reste assez
lointaine.
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Pollution cumulative
Contrairement à l’hypothèse de Cesar (1994), qui souligne que celle-ci est suffisamment
éloignée pour être négligée, certains auteurs affirment que cette limite est active et influence
la politique du climat.
Lorsque cette contrainte n’est pas prise en compte, situation qui est décrite dans la section
précédente, l’économie rejoint un équilibre stationnaire, caractérisé par un flux d’émission
positif et un stock de gaz à effet de serre stabilisé ; les émissions cumulées de polluants sont
infinies. Cette trajectoire ne peut donc pas être suivie, si l’on tient compte de l’épuisement des
ressources nécessaires à ces émissions.
Les interactions entre l’accroissement de l’effet de serre et l’épuisement des ressources
fossiles ont été étudiées par Farzin & Tahvonen (1996), Sinclair (1994) et Ulph & Ulph
(1994). Leur préoccupation commune est de déterminer le rôle de la contrainte d’épuisement
dans l’évolution temporelle de la taxe optimale sur le carbone 7. Ulph & Ulph (1994) utilisent
une application numérique simple pour le cas où le taux de recyclage du stock de polluants est
constant. Ils concluent que la taxe sur les émissions croît dans un premier temps, si le stock
initial de polluants est faible, puis diminue jusqu’à l’épuisement complet de la ressource.
Farzin & Tahvonen (1996) insistent sur le fait que le recyclage exponentiel du stock de
polluants est la cause de ce profil temporel. De fait, si le polluant est persistant (recyclage
nul), il est aisé de montrer que la taxe croît de façon monotone. S’appuyant sur une
formalisation plus complexe du cycle du carbone, combinant un stock persistant et un stock
régénéré à un taux constant, ils montrent, par simulation numérique, que la taxe peut avoir
d’autres profils que ceux déterminés sous les hypothèses standards.
L’inconvénient commun à tous ces travaux vient du postulat selon lequel le dommage ne
dépendrait pas du niveau de production. Cette hypothèse n’est pas défendable si l’effet de
serre réduit la capacité productive des économies, comme le supposent toutes les évaluations
des dommages.
7 - Cette terminologie est abusive. En effet, ces articles assimilent taxe optimale et prix implicite.
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Pollution cumulative
Dans cette section, nous aménagerons donc le problème n°1 pour étudier l’interaction entre
l’externalité climatique et l’épuisement des ressources fossiles (la variable d’état S désigne la
dotation en ressources et définit l’extraction), en évitant l’hypothèse critiquée ci-
dessus. Dans la section suivante, nous montrerons, à l’aide d’une simulation numérique, que
les résultats de Ulph & Ulph (1994), Sinclair (1994) et Farzin & Tahvonen (1996) résistent à
cette configuration, mais perdent leur utilité pratique si la croissance économique est forte.
&S = −g
Problème n°2 :
( )( )max
g t
te u C t d
( )
. .−
∞
∫ δ0 t (1.15)
sous les contraintes
( ) ( ) ( )& .G t g t G t= − β , (1.15a)
, (1.15b)
, (1.15c)
, (1.15d)
( ) ( )&S t g t= −
( ) ( )S t S g d
t
= − ≥∫0 0 0τ τ
( ) ( ) ( ) ( )(C t Q t f g t G t≡ = , )
GG 0 0bg= , (1.15e)
, (1.15f)
, . (1.15g)
( )S 0 0= S
( )g t ≥ 0 ∀t
1.2.1 - Résolution 8
La Hamiltonien courant a pour expression :
( ) ( )( ) ( )~ , , , , , . . .H G S g p q u f g G p g G q g= − − β − . (1.16a)
Le Lagrangien, associé à la contrainte de non-négativité du stock de ressources S , s’écrit :
( ) ( )~ , , , , , ~ , , , , .L HG S g p q G S g p q Sλ = + λ . (1.16b)
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Pollution cumulative
( ) ( ) ( )G t S t g t* , * , * étant la solution du problème n°2, p et q étant les variables adjointes
associées aux variables d’état et G S respectivement, et λ étant le multiplicateur de
Lagrange associé à la contrainte d’épuisement (1.15c), les conditions d’optimalité s’écrivent 9
:
( ) ( )( )f g G u f g G p qg * , * . * , *′ = + , (1.17)
( ) ( ) ( )( )& . * , * . * , *p p f g G u f gG= δ β+ + ′ G , (1.18)
& .q q= −δ λ , (1.19)
avec S ≥ 0, λ ≥ 0 et λ.S = 0.
En outre, la trajectoire optimale vérifie les deux conditions de transversalité suivantes :
( ) ( )lim
t
te p t G t
→∞
− =δ . . * . * 0 , (1.20)
( ) ( )lim
t
te q t S t
→∞
− =δ . . * . * 0 . (1.21)
La condition (1.17) implique que la productivité marginale de la ressource doit être égale à
son prix. Ce dernier est la somme de la rente de rareté 10 et du prix implicite attribué à
l’accumulation marginale du gaz à effet de serre. Tant que la ressource n’est pas épuisée, la
relation (1.19) signifie que la rente de rareté croît au rythme du taux d’actualisation
(Hotteling, 1931). Elle est donc constante en valeur présente. Ainsi, chaque unité de ressource
extraite contribue de la même façon au bien-être intertemporel mesuré par l’intégrale (1.15).
Si tel n’était pas le cas, il serait possible d’accroître le bien-être, en réduisant l’extraction aux
dates où l’utilité marginale de la ressource est plus faible, pour l’augmenter aux autres
moments, et ce jusqu’à égalisation à toute date.
1.2.2 - Trajectoires d’épuisement et rente de rareté
8 - Voir l’appendice 1.
9 - Voir l’annexe 1.8 pour les conditions suffisantes d’optimalité.
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Pollution cumulative
Nous consacrons cette section à la description du devenir du stock de ressource en
fonction des conditions économiques régissant son exploitation. On distingue deux situations.
Avec la première, la ressource n’est jamais épuisée car elle devient inutile à l’activité
économique à partir d’une date donnée 11. Du fait des relations (1.19) et (1.19a), on a alors
, ( )S t > 0 ( )λ t = 0 et à toute date. La condition transversale (1.21) devient
et la rente de rareté est nulle. Dès lors, du fait de (1.17), il s’ensuit que ce
scénario se réalise si le prix implicite de la pollution est suffisant pour que l’extraction de la
ressource cesse, c’est-à-dire si l’externalité climatique est forte au point d’obliger à adopter
l’objectif de long terme d’une pollution nulle.
( )q t q e t= 0 . .δ
( )lim
t
q S t
→∞
=0 0. q0
Ceci se produit éventuellement lorsque l’équilibre stationnaire du problème n°1 appartient à
l’axe des ordonnées (voir le graphique 1.1). Alors, quelle que soit la pollution initiale,
l’émission et le stock de polluants décroissent continûment jusqu’à être nuls. Si l’extraction
cumulée, le long de cette trajectoire, satisfait la contrainte (1.15c), l’épuisement de la
ressource n’est pas saturant, on a effectivement ( )q t = 0 , ∀t , et la solution du problème n°1
est aussi solution du problème présent. Remarquons que, dans ce cas, le prix implicite de la
pollution décroît avec le temps, puisque le stock de polluants stationnaire est plus petit que le
stock initial.
Cette première situation est un cas particulier. Elle se produit à condition que
( ) ( ) ( )f fg G0 0 0 0, ,≤ − +δ β (voir les relations (1.11) à (1.13)). Deux conditions doivent donc
être remplies : d’une part, le dommage marginal de l’effet de serre doit être positif lorsque le
stock de gaz est nul et, d’autre part, le dommage marginal d’une pollution nulle doit être
suffisant pour décourager l’extraction de la ressource.
L’autre cas de figure est celui où la ressource est épuisée. Il se subdivise en deux, selon
que la date d’épuisement est finie ou infinie.
q
10 - La rente de rareté est la différence entre le prix et le coût marginal d’extraction de la ressource. Dans le cas
présent, puisque le coût d’extraction est supposé nul, elle est égale à .
11 - L’inutilité doit être entendue dans le sens de non-créateur de bien-être.
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Pollution cumulative
L’extraction de la totalité du stock de ressource prendra une durée infinie si l’utilité marginale
de cet input est infinie quand il est utilisé en quantités infinitésimales, i.e. si ( )f g Gg , → ∞
et/ou quand ( )f g G, → 0 g → 0 . Dans ce cas, on vérifie en effet que, lorsque l’extraction
tend vers zéro, l’égalité (1.17) ne peut pas être satisfaite puisque ( )p t et sont finis. Les
deux propriétés limites impliquent donc que
( )q t
( )g t > 0 pour tout (Dasgupta & Heal,
1974). Le long de la trajectoire optimale, on a alors
t ≥ 0
( )S t > 0 , ( )λ t = 0 et . Dans
ce cas, la condition transversale (1.21) s’écrit
( )q t q e t= 0 . .δ
( )lim
t
q S t
→∞
=0 0. et la ressource est épuisée
asymptotiquement : et q0 0> ( )lim t S t→∞ = 0 .
L’épuisement se produit à une date finie T si l’utilité marginale de la ressource est finie
quand elle est utilisée en quantités infinitésimales, i.e. si ( )f g Gg , et sont finies
quand
(f g G, )
g → 0 . Jusqu’à cette date, on a ( )S t > 0 , ( )λ t = 0 et ( )q t q e t= 0 . .δ . A l’instant T ,
, ( )S T = 0 ( )λ T ≥ 0 et ( ) ( )( ) ( )( )( )p T q e f G T u f G TT g+ = ′0 0 0. , . ,.δ .
Ayant décrit tous les cas de figure possibles, nous adoptons à nouveau la condition (H2)
posée au début de ce chapitre. Nous retenons donc l’hypothèse d’un épuisement
asymptotique.
1.2.3 - Prix implicite de la pollution
Dans cette section, nous essayons de décrire la trajectoire du prix implicite des
émissions analytiquement. En fait, comme le lecteur s’en apercevra vite, il s’avère difficile
d’analyser ce modèle et les résultats donnés ici seront surtout utiles pour l’analyse numérique
qui suit.
Puisque l’extraction cumulée de la ressource est bornée, l’émission et le stock de gaz à effet
de serre tendent vers zéro à l’infini. L’externalité climatique finit donc par disparaître. En
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Pollution cumulative
appliquant la relation (1.8), on trouve que le prix implicite de la pollution tend vers la valeur
( ) ( )( ) ( )− ′ +f u fG 0 0 0 0, . , δ β . Si le dommage marginal d’une pollution nulle est non nul, i.e. si
, , alors le prix implicite de la pollution est strictement positif à l’infini.
L’hypothèse contraire , qui est systématiquement posée (Cesar, 1994 ; Farzin et
Tahvonen, 1996 ; Nordhaus, 1992a, 1993 et 1996 ; Clarke & Reed, 1994) et que nous
retenons également (voir la condition (H3) en début de chapitre), implique que le prix
implicite tend vers zéro à l’infini. Cette propriété est nécessaire pour respecter la condition de
transversalité (1.20). En effet, pour grand, puisque le dommage marginal est quasi nul,
l’équation différentielle (1.18) peut être approximée par
( )f gG ,0 0≠ ∀g
( )f gG ,0 0=
t
( )& .p = pδ β+ . Dès lors, si le prix
implicite n’est pas nul, il croît au taux δ β+ et ( )e p tt−δ . . ne converge pas.
Ainsi, si nous retenons l’hypothèse d’un dommage marginal nul quand la pollution est nulle,
le prix implicite de la pollution est strictement positif à l’instant initial et devient nul à
l’infini. Ceci confirme les conclusions de Ulph & Ulph (1994), Sinclair (1994) et Farzin &
Tahvonen (1996). L’épuisement des ressources fossiles modifie donc radicalement le profil
de la taxe optimale. Son intensité, qui était croissante dans le problème n°1, devient
décroissante avec le nouveau jeu d’hypothèses. Il reste maintenant deux points à préciser.
Premièrement, l’épuisement de la ressource a-t-il pour effet de réduire le prix implicite ?
Deuxièmement, le prix de la pollution décroît-il uniformément, ou bien existe-t-il des
périodes de hausse et de baisse ?
La comparaison de deux situations extrêmes, l’une où la dotation initiale en ressources
est nulle, l’autre où elle est infinie, répond partiellement à la première question. Lorsque le
stock de ressources est épuisé à l’instant initial, les émissions sont nulles à toute date, si bien
que la dynamique du stock de polluants se limite au recyclage exponentiel du stock initial :
. On en déduit la trajectoire du prix implicite de la pollution ( )G t G e t= −0 . .β
( ) ( ) ( ) ( ) ( )( )p t e f G e u f G e dt Gt= − ′− + − − −
∞
∫ δ β τ β τ β τ τ. .. , . . , .0 00 0 . . La taxe est alors une fonction
monotone décroissante du temps.
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Pollution cumulative
Preuve : On démontre, dans un premier temps, que le dommage marginal décroît avec le
temps, i.e. ( ) ( )( )[ ] ( )− ′ = ′ + ′′ <− − −∂ ∂ ββ β βf G e u f G e t G e f u f uG t t t GG G0 00 0 0 2, . . , . . . . . .. . . 0 . Il
s’ensuit que le prix implicite est inférieur à ( )p t ( ) ( )( ) ( )− ′ +− −f G e u f G eG t t0 00 0, . . , .. .β β δ β à
toute date. D’où, ( ) ( ) ( ) ( ) ( )( )& . , . . , ..p t p t f G e u f G eG t= δ β β+ + ′ <− −0 00 0 .tβ 0 quelle soit . t
Lorsque le stock est infini, la ressource n’est pas épuisable et la rente de rareté est nulle. Ceci
redéfinit le problème n°1. Si G G , le stock de polluants croît avec le temps. Le prix
implicite de la pollution est égal à et
augmente continûment. Il tend vers une valeur stationnaire, définie par
0 < ∞ *
( ) ( ) ( ) ( ) ( )( )p t e f g G u f g G dt Gt= − ′
− + −∞∫ δ β τ τ. . * , * . * , *
( ) ( )( ) ( )p f g G u f g GG∞ ∞ ∞ ∞ ∞= − ′ +* * , * . * , * δ β .
Les prix implicites des deux cas extrêmes peuvent être comparés à toute date. Puisque
et , , le dommage marginal subi par l’économie disposant
d’une quantité infinie de ressources dépasse celui dont souffre l’économie qui ne pollue
jamais :
( )g t* > 0 ( )G t G e t* . .> −0 β ∀t
( ) ( )( ) ( ) ( )( )( ) ( ) (( )− ′ > − ′− −f g G u f g G f G e u f G eG G* , * . * , * , . . , .. .τ τ τ τ β τ β τ0 00 0 ) , ∀t .
Du fait de la relation (1.8), on conclut sans détour que le prix implicite est plus grand lorsque
la ressource n’est pas épuisable.
Intuitivement, ce résultat se comprend très bien. On imagine même sans peine qu’il reste
valable dans le cas général. La contrainte d’épuisement limite les émissions et réduit les
dommages climatiques. Il semble donc normal que la taxe sur les émissions diminue.
Malheureusement, alors que ceci se démontre facilement pour les deux cas de figure vus à
l’instant, nous ne sommes pas parvenus à le démontrer pour le cas général. Pour pallier cette
lacune, une analyse numérique sera proposée plus loin.
De même, nous n’avons pas été capables de décrire l’évolution du prix implicite de
l’accumulation du gaz à effet de serre dans le cas général. Nous pouvons, par contre,
emprunter la démonstration de Farzin & Tahvonen (1996), pour l’appliquer au cas particulier
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Pollution cumulative
défini par l’hypothèse ( )∂ ∂f u gG . ′ = 0 . Cette hypothèse signifie à la fois que le dommage
marginal en termes d’utilité dépend uniquement du niveau de pollution et que la productivité
marginale de la ressource n’est pas modifiée par la pollution. Dans ce contexte, imaginons
que le prix implicite du polluant décroisse jusqu’à une date , croisse entre et , puis
décroisse indéfiniment jusqu’à sa valeur limite.
T1 T1 T2
En calculant les différentielles totales de (1.17) et (1.18), on montre que :
&
& .
~g
H
=
+p
gg
qδ , (1.22)
. (1.23)
( )&& . & ~ . &p p GG= Hδ β+ + G
Tableau 1.1 : Tableau de variation découlant du sentier supposé de p
T1 $T T2
p ↓ ↑ ↓
&p − 0 + 0 −
&&p + −
&G − 0 +
G ( )G T1 ↓ ( )G T$ ↑ ( )G T2
Note : pour construire ce tableau, on part de l’hypothèse sur
l’évolution du prix implicite de la pollution, puis on utilise les
relations (1.22) et (1.23) pour déduire les autres informations
A la date , T1 &p = 0 et &&p > 0 puisque le prix augmente entre et . Compte tenu de (1.23),
on en déduit que le stock de polluants est décroissant à l’instant . De même, on démontre
que le stock est croissant à la date . Il existe donc une date telle que .
Il s’ensuit que
T1 T2
T1
T2 ]$ ,T T T∈ 1 2[ ( )& $G T = 0
( ) ( ) ( ) ( )g T G T G T g T$ . $ .= < <β β 2 2 . Sachant que, par hypothèse, le prix
implicite p augmente entre et et compte tenu de (1.22), on devrait observer le
contraire, i.e. . Ce résultat démontre, par l’absurde, qu’une période pendant
T1 T2
( ) ( )g T g T$ > 2
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Pollution cumulative
laquelle le prix implicite décroît ne peut pas précéder une période pendant laquelle il croît. En
conséquence, la trajectoire de p est soit monotone décroissante, soit possède la forme d’un U
renversé.
Ce résultat étant démontré, revenons à l’hypothèse que nous avons dû poser pour
l’établir. Farzin & Tahvonen (1996) supposent que l’utilité est une fonction directe de
l’extraction de la ressource, i.e. , et que le dommage dépend uniquement du stock de
pollution, i.e. . Le bien-être net s’écrit donc
( )u g
( )D G ( ) ( )u g D G− et la restriction est
implicitement contenue dans leur spécification. Il se pose la question de savoir si cela ne
modifie pas la nature des résultats.
Dans le cas de l’effet de serre, le dommage croît avec la production ; toutes les études
quantitatives partent de cette hypothèse. La spécification de Farzin & Tahvonen (1996) ne
reflète pas cette propriété. Cela n’est pas gênant si la production varie peu, car la fonction de
dommage continue à refléter correctement les nuisances subies. Par contre, si l’on introduit le
progrès technique, le dommage physique croît au rythme du taux de croissance, même si le
niveau de pollution ne varie pas. Ceci affecte nécessairement la taxe optimale. On peut alors
penser que les résultats de Farzin & Tahvonen (1996) ne s’appliquent plus aussi bien. Nous
essayerons de tester cette hypothèse dans la simulation numérique que nous débutons
maintenant.
1.3 - Application numérique
A plusieurs reprises, on a déploré notre incapacité à établir certains résultats importants
soulevés par le problème n°2, au moins sans avoir recours à des hypothèses simplificatrices.
En pareille situation, pratique qui devient de plus en plus courante dans la littérature, la
spécification du modèle et le recours à une simulation numérique permettent de progresser et
éclairent certains points laissés en suspens. C’est ce que nous nous proposons de faire
maintenant.
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Pollution cumulative
1.3.1 - Spécification du modèle
Nous considérons la spécification suivante des fonctions :
( ) ( )f g G g a G, . .= −ρ 1 2 , (1.24)
( )u C C=
−
−1
1
1
σ
σ. . (1.25)
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Pollution cumulative
ρ définit l’élasticité de la production par rapport à la ressource. Par hypothèse, la production
est croissante, à taux décroissant, en g . On doit donc avoir 0 1< <ρ . Posons ρ = 0 05, .
Le dommage climatique est quadratique et proportionnel à la production. Il est égal à
. Le paramètre mesure la part de la production perdue lorsque le stock de gaz à
effet de serre vaut 1. On pose .
g a Gρ . . 2 a
a = −510 4.
σ est l’élasticité de l’utilité marginale par rapport à la consommation. Ce paramètre
représente l’aversion des agents économiques pour l’inégalité. Lorsqu’il vaut zéro : l’utilité
de la consommation est linéaire ; toutes les unités de consommation sont considérées
identiques, du point de vue de l’utilité qu’elles procurent ; les agents économiques sont aussi
sensibles à la baisse de l’utilité des générations nanties qu’à la baisse de l’utilité des
générations pauvres. Si σ est supérieure à zéro : les premières unités de consommation
procurent une utilité plus grande que les dernières ; les agents économiques ont plus de regret
à réduire l’utilité des générations pauvres que celle des générations favorisées. Nous
utiliserons la valeur σ = 0 75, .
Pour compléter notre spécification, nous proposons les valeurs suivantes pour le taux de
recyclage du polluant et le taux d’actualisation respectivement : β = 1 120 et δ = 0 03, .
Remarque 1.5 : il aurait été plus simple d’utiliser une fonction d’utilité logarithmique.
Toutefois, dans ce cas, le dommage de l’effet de serre et la production deviendraient
indépendants, puisque ( )( ) ( ) ( )u f g G g a G, .ln ln .= + −ρ 1 2 . Ce faisant, on adopterait
implicitement l’hypothèse de Farzin & Tahvonen (1996) et de Ulph & Ulph (1994), chose que
l’on souhaite éviter.
Remarque 1.6 : le progrès technique peut facilement être introduit. Supposons que la frontière
des possibilités de production s’élargisse, d’une période à l’autre, de pour-cent. La fonction
de production s’écrit alors
n
( ) ( )f g G t g a G en t, , . . . .= −ρ 1 2 . S’il n’y a pas d’investissement,
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Pollution cumulative
l’utilité croît au taux exogène (n. 1− )σ , puisque ( )
( )
( )[u C e g a G
n t
=
−
−
− −. .
. . .
1
2 1
1
1
σ
ρ σ
σ ] . Une fois
que l’on a constaté cela, la résolution consiste simplement à incorporer le facteur exogène au
taux d’actualisation, i.e. ( )′ = − −δ δ σn. 1 , et à suivre la même démarche que pour le cas
général.
1.3.2 - Résolution
Les conditions d’optimalité (1.17), (1.18) et (1.19) s’écrivent 12 :
( ) ( )ρ ρ σ σ. . ..g a G1 1 2 11− − −− = p q+ , (1.26)
( )
( )
( )& . . .
.
. .p p a G
a G
g= + −
−
−δ β σ
ρ σ2
1 2
1 , (1.27)
& .q = qδ . (1.28)
En transformant la relation (1.26), on détermine la demande de ressources épuisables :
( )
( )
( )
g G p q p q
a G
,
. .
.
+ =
+
−
⎡
⎣
⎢
⎢
⎤
⎦
⎥
⎥−
− −
ρ
σ
ρ σ
1 2
1
1
1 1
. (1.29)
Elle dépend de son prix, d’une part, qui est la somme de la rente de rareté et de la taxe sur les
émissions, et du niveau de pollution avéré, d’autre part. Elle vérifie le lemme 1.1.
De la même façon que pour construire le système (1.7), nous remplaçons g par la
fonction de demande (1.29) dans (1.27), (1.15a) et (1.15b). Nous écrivons ainsi un système
d’équations différentielles qui, en fonction des dotations initiales, va nous servir à déterminer
les trajectoires suivies par l’économie.
12 - Pour simplifier, le multiplicateur de Lagrange associé à la contrainte d’épuisement est éliminé. Nous savons
en effet que, du fait des propriétés de la fonction de production et de la fonction d’utilité, l’épuisement du stock
de ressource est asymptotique et le multiplicateur est toujours nul.
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Pollution cumulative
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Pollution cumulative
Ce système est :
( )
( )
( ) ( )
( )
( )
& . . .
.
. ,
& , .
& .
& ,
.p p a G
a G
g G p q
G g G p q G
q q
S g G p q
= + −
−
+
= + −
=
= − +
⎧
⎨
⎪
⎪
⎪
⎩
⎪
⎪
⎪
−δ β
β
δ
σ
ρ σ2
1 2
1
(1.30)
Les trajectoires sont calculées en utilisant le module de résolution de systèmes d’équations
différentielles de MathCad 6.0. Au moyen d’une itération, nous corrigeons les conditions
initiales jusqu’à ce que les trajectoires déterminées vérifient les conditions de transversalité.
En l’absence de contrainte d’épuisement, l’état terminal visé est l’état stationnaire, à
l’intersection des isoclines &p = 0 et &G = 0 . Avec contrainte d’épuisement, puisque la
productivité marginale de la ressource tend vers l’infini lorsqu’elle est utilisée en quantités
infinitésimales, la trajectoire solution produit un épuisement asymptotique de la ressource.
D’autre part, puisque le dommage marginal finit par disparaître, le prix implicite de la
pollution converge vers zéro à l’infini.
1.3.3 - Trajectoire sans contrainte d’épuisement
Si la ressource est disponible en quantités infinies, le système rejoint un équilibre
stationnaire tel que l’émission et le stock de gaz à effet de serre sont constants. La relation
(1.14) permet de trouver cet équilibre de long terme. Pour le cas présent, l’élasticité de la
production par rapport à la ressource est égale à ρ . L’élasticité de la production par rapport à
la pollution s’écrit :
e a G
a GG
= −
−
2
1
2
2
. .
.
. (1.31)
Suivant (1.14), l’équilibre stationnaire vérifie la propriété la propriété suivante :
ρ
β δ β
=
+ −
1 2
1
2
2.
. .
.
a G
a G
. (1.32)
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Pollution cumulative
La valeur stationnaire du stock de gaz à effet de serre s’écrit donc :
( )
G a∞
−
= +
+
⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟
⎡
⎣
⎢
⎢
⎤
⎦
⎥
⎥
=* . .
.
,1 2 14 362
1
2β
ρ δ β
. (1.33)
On en déduit les valeurs stationnaires de l’émission et du prix implicite de l’accumulation
d’une unité de gaz supplémentaire :
( )
g a∞
−
= +
+
⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟
⎡
⎣
⎢
⎢
⎤
⎦
⎥
⎥
=* . . .
.
,β β
ρ δ β
1 2 0119
1
2
, (1.34)
( ) ( )
( ) ( )p a G
a G
G∞
∞
∞
∞
−=
+ −
=* .
. . *
. *
. . * ,.1
2
1
0 396
2
1
δ β
βσ
ρ σ . (1.35)
Tableau 1.2 : Equilibres stationnaires pour différentes valeurs des paramètres
δ β Stock Prix implicite Consommation
0,01 0,005 11,812 0,817 0,808
0,01 0,010 9,759 0,498 0,848
0,01 0,020 8,502 0,288 0,882
0,03 0,005 17,259 0,562 0,753
0,03 0,010 13,484 0,362 0,822
0,03 0,020 10,847 0,226 0,872
0,05 0,005 20,770 0,468 0,700
0,05 0,010 16,151 0,303 0,794
0,05 0,020 12,685 0,194 0,859
Le tableau 1.2 confirme la proposition 1.5. Il montre en effet que, plus le taux
d’actualisation est élevé, plus la pollution stationnaire est importante et plus la consommation
d’équilibre est faible. Bien entendu, le corollaire de ce résultat est que le prix implicite de la
pollution décroît avec le taux d’actualisation.
L’influence du taux de recyclage du stock de gaz à effet de serre peut désormais être isolée
(analytiquement, cet effet était ambigu). Lorsque le rythme de régénération de la pollution
atmosphérique augmente, le stock de gaz à effet de serre stationnaire diminue et la
consommation d’équilibre augmente. Ce résultat était prévisible. Si le taux de recyclage
augmente, le même flux d’émission stabilise l’accumulation du polluant à un niveau plus
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Pollution cumulative
faible. En contrepartie, le dommage marginal et, par voie de conséquence, le prix implicite de
la pollution diminuent. Il devient donc rentable d’augmenter le flux d’émission. L’équilibre
est trouvé à un niveau intermédiaire garantissant une consommation plus importante.
Nous supposons que le stock de gaz à effet de serre d’origine est égal à 10 unités, i.e.
. La trajectoire optimale du système rejoint l’équilibre stationnaire calculé à l’instant
(voir les relations (1.33) à (1.35)). Nous la représentons dans le graphique 1.2.
G0 10=
Graphique 1.2 : Trajectoire optimale sans contrainte d’épuisement
10 12 14 16 18 20
0.3
0.35
0.4
0.45
0.5
Stock de gaz à effet de serre
Pr
ix
im
pl
ic
ite
Le graphique 1.2 est le pendant du graphique 1.1 pour l’application numérique présente. On
confirme les propriétés qualitatives de la trajectoire optimale : le prix implicite du polluant
atmosphérique et le stock de gaz à effet de serre augmentent le long de cette trajectoire.
Remarque 1.7 : Avec progrès technique, l’équilibre stationnaire est en fait un sentier de
croissance optimale. Le long de ce sentier, la production et le prix implicite de la pollution
croissent au taux ; l’émission et le stock de polluants sont constants. n
68
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81 81 |
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Pollution cumulative
1.3.4 - Prix implicite et contrainte d’épuisement
Ayant déterminé la trajectoire témoin, considérons maintenant l’effet de la contrainte
d’épuisement sur la politique optimale du climat. La résolution repose sur les conditions
terminales mises en évidence dans la section précédente. Premièrement, la rente de rareté
est choisie de manière à produire un épuisement asymptotique de la ressource.
Deuxièmement, le prix implicite du polluant doit tendre vers zéro à l’infini. La combinaison
de ces deux propriétés détermine la trajectoire solution. Cette trajectoire est optimale
puisqu’elle vérifie les conditions de transversalité (1.20) et (1.21).
q0
Graphique 1.3 : Prix implicite et dotation en ressources
0 100 200 300 400
0
0.2
0.4
Périodes
Pr
ix
im
pl
ic
ite
ο : S0 = ∞ × : S0 10= + : S 0 7 5= ,
: S ◊ :0 5= S0 2 5= ,
Cette illustration numérique prouve que le prix implicite du polluant diminue lorsque la
dotation en ressources diminue. Nous voyons deux explications à ce résultat. En premier lieu,
puisque les émissions cumulées sont bornées supérieurement, les dommages encourus sont
également limités et, surtout, inférieurs à ce qu’ils seraient sans contrainte d’épuisement. En
second lieu, la diminution progressive de l’extraction réduit le niveau de production et,
corrélativement, le dommage climatique, qui lui est proportionnel. Le graphique 1.3 permet
de faire un autre constat. Si la ressource est abondante, la taxe optimale sur les émissions croît
provisoirement avant de décroître jusqu’à zéro. Dans le cas contraire, le prix implicite du
polluant est une fonction monotone décroissante du temps. Ces profils temporels sont à mettre
69
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Pollution cumulative
en perspective avec la trajectoire obtenue quand la ressource est disponible en quantités
infinies, où le prix implicite croît de façon monotone.
Graphique 1.4 : Prix implicite et pollution d’origine
0 100 200 300 400
0
0.2
0.4
Périodes
Pr
ix
im
pl
ic
ite
ο : S0 = ∞ et G0 10= × : G0 10=
+ : G0 7 5= , : G0 5= ◊ : G0 2 5= ,
Dans le graphique 1.4, nous représentons les trajectoires du prix implicite pour différentes
valeurs de G (dans tous les cas, on a 0 S0 10= , sauf pour la trajectoire témoin marquée d’un
rond, pour laquelle S0 = ∞ ). Il confirme la proposition de Farzin & Tahvonen (1996) et Ulph
& Ulph (1994) selon laquelle, lorsque le taux de recyclage du polluant est constant, la taxe est
provisoirement croissante si la pollution initiale est faible.
1.3.5 - Prix implicite et progrès technique exogène
En conclusion de la section 1.2, nous mettions en doute la pertinence d’une
spécification où le dommage de la pollution ne serait pas proportionnel à la production. Une
telle hypothèse implique que le dommage décroît irrémédiablement lorsque la pollution
diminue, ce qui conditionne entièrement le profil du prix implicite de la pollution. Avec notre
spécification, le dommage croît avec l’output ; la relation entre l’évolution de la pollution et
celle de la taxe devient moins directe. Ainsi, une croissance forte de la production peut
amplifier les dommages, même lorsque la pollution diminue. Pensant que ceci pourrait
70
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Pollution cumulative
remettre en question les résultats de Farzin & Tahvonen (1996), Sinclair (1994) et Ulph &
Ulph (1994), un facteur exogène de progrès technique est incorporé à notre modèle.
Graphiques 1.5 : Prix implicite et progrès technique
0 100 200 300 400
0
0.2
0.4
0.6
Périodes
Pr
ix
im
pl
ic
ite
: 3 % + : 2 % × : 1% ◊ : 0 %
Dans le graphique 1.5, la trajectoire marquée d'un losange est celle que l’on déterminait, dans
les graphiques précédents, lorsque la dotation en ressources et le stock de polluants d’origine
étaient égaux à 10 unités chacun. Les autres correspondent à la même situation de départ,
avec différents taux de croissance exogènes.
On constate d’abord que le prix implicite de la pollution est plus élevé quand la croissance est
forte. Cette influence de la croissance sur le prix implicite découle du fait que l’effet de serre
est une pollution cumulative : si la pollution disparaissait immédiatement après son émission,
le dommage de la dernière unité serait inchangé, qu’il y ait ou non croissance de la
production.
Le profil temporel de la taxe sur les émissions reste qualitativement identique avec ou sans
croissance. Le prix implicite croît provisoirement avant de diminuer jusqu’à zéro à l’infini. La
croissance économique ne remet donc pas totalement en cause les propositions énoncées par
Farzin & Tahvonen, Sinclair et Ulph & Ulph. Par contre, la croissance retarde sensiblement le
point de retournement du prix implicite de la pollution : il se produit au bout de 20 périodes
71
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Pollution cumulative
lorsque la croissance est nulle, après 150 périodes lorsque le taux de croissance est égal à 3
pour-cent.
Ainsi, plusieurs raisons poussent à prétendre que, à l’horizon de planification débattu
dans les rencontres internationales s’occupant de l’effet de serre, la taxe sur les émissions
devrait croître progressivement avec le temps. En premier lieu, comme nous venons de le
voir, il y a la croissance économique, qui amplifie les dommages futurs. En second lieu, les
réserves d’énergies fossiles, principalement le charbon, sont suffisantes pour sextupler la
concentration atmosphérique de gaz carbonique. Ceci fait que l’on se trouve plutôt dans le cas
d’un stock de pollution réduit et d’une dotation en énergie relativement abondante. Or, nos
résultats suggèrent que le prix implicite croît initialement précisément dans cette situation.
Tous ces éléments incitent à penser que les résultats obtenus par Farzin & Tahvonen, Sinclair
et Ulph & Ulph n’ont pas d’implications pratiques pour la préparation d’une politique
internationale du climat.
1.4 - Conclusion
La théorie du contrôle optimal forme un cadre théorique approprié pour analyser le
problème des pollutions cumulatives, telles que l’effet de serre. Deux raisons obligent à
recourir à cette méthode. D’une part, contrairement aux pollutions classiques, où l’externalité
est proportionnelle au flux d’émissions du polluant, les dommages climatiques dépendent du
stock atmosphérique de gaz à effet de serre. D’autre part, le rythme de régénération de ce
stock est lent, si bien que les émissions contemporaines modifieront le climat pendant une
durée assez longue. Outre ces considérations techniques, le modèle de pollution cumulative,
basé sur la théorie du contrôle optimal, a l’avantage de s’interpréter à partir des concepts
habituels de l’économie de l’environnement. Ainsi, le multiplicateur associé à la contrainte
d’accumulation, appelé variable adjointe, s’analyse comme un prix implicite ou un coût
d’usage de la pollution. Il synthétise l’incidence future de l’accumulation des gaz à effet de
serre.
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Pollution cumulative
Evidemment, comme dans les exemples de pollutions statiques, le fait que le ‘‘bien climat’’
soit un bien public pousse les agents économiques à lui attribuer une valeur nulle et, par voie
de conséquence, à polluer de manière excessive. L’optimum social n’est donc rejoint que si le
prix implicite de la pollution est imposé de manière autoritaire aux ‘‘usagers’’. Un moyen
pour parvenir à ce résultat consiste à lever une taxe pigovienne, calquée sur le prix implicite
de la pollution. Les décisions décentralisées des agents économiques suivent alors les
recommandations du modèle intertemporel et l’accumulation des gaz à effet de serre se fait à
un rythme optimum.
Dans l’environnement économique convexe de ce chapitre, la dynamique optimale de la
pollution rejoint un état stationnaire unique. L’émission est alors égale au recyclage naturel
des gaz à effet de serre accumulés dans l’atmosphère et il se produit une stabilisation du
climat. Ce niveau de pollution égalise la productivité marginale de l’émission au dommage
marginal intertemporel de l’effet de serre. L’équilibre de long terme est très sensible à
plusieurs paramètres du modèle. Notamment, un facteur d’actualisation élevé accroît la
pollution stationnaire et réduit la consommation stationnaire. Un taux de recyclage élevé des
gaz à effet de serre accumulés produit une baisse de la pollution stationnaire et un
accroissement de la consommation stationnaire.
La dynamique transitoire optimale consiste à rejoindre asymptotiquement l’équilibre
stationnaire. En partant d’un stock d’origine plus faible que son niveau d’équilibre, l’émission
et la consommation diminuent le long du sentier optimal, pendant que la concentration
atmosphérique de gaz à effet de serre et le prix implicite de la pollution augmentent.
La combustion des énergies fossiles est la principale source d’émission de gaz à effet de
serre. Ce constat amène à penser que le problème du renforcement de l’effet de serre se
réglera naturellement, par suite de l’épuisement de ces ressources. Ce raisonnement est en fait
simpliste. Malgré cela, l’interaction entre ces deux dynamiques entremêlées mérite d’être
analysée.
73
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Pollution cumulative
Les travaux consacrés à cette question concluent que la trajectoire optimale du prix implicite
de la pollution devrait décroître, ce qui contredit le modèle de pollution cumulative simple.
Ce résultat s’explique fort simplement par la décroissance inévitable du stock de gaz à effet
de serre, consécutif au renchérissement progressif des énergies fossiles.
Les simulations numériques de ce chapitre contredisent partiellement cette proposition.
Plusieurs facteurs suggèrent, au contraire, que le prix implicite de la pollution doit croître
pendant une période assez longue avant de diminuer progressivement. La persistance des gaz
à effet de serre fait que l’épuisement des énergies fossiles ne réduira les tensions climatiques
que tardivement. De plus, le rapport des quantités de carbone accumulé dans l’atmosphère et
stocké sous forme de combustibles fossiles reste assez faible. Enfin, si l’effet de serre est une
externalité contre-productive, la baisse tendancielle des dommages, consécutive à la réduction
du stock de gaz à effet de serre, est contrecarrée par la croissance économique.
Les études appliquées conçues pour quantifier les coûts et les avantages d’une politique
climatique, auxquelles nous allons consacrer les deux prochains chapitres, s’appuient sur des
notions qui n’ont pas été abordées ici. En guise de conclusion du présent chapitre, nous
corrigeons cette lacune et présentons une méthode d’évaluation basée sur le problème n°1. Le
point de départ consiste à définir une trajectoire de référence pour étalonner les évaluations.
Le scénario de politique inchangée, consistant à ne jamais rien entreprendre pour lutter contre
l’effet de serre, est le candidat naturel pour tenir ce rôle. Il s’obtient en posant que le prix de
l’émission des gaz à effet de serre est nul à toute date. Il produit une trajectoire d’émission
, telle que , et une trajectoire d’accumulation des gaz à
effet de serre correspondante . Partant de là, les gains de la lutte contre l’effet de serre
se mesurent facilement, par comparaison de la trajectoire optimale à la
trajectoire de politique inchangée , en utilisant l’intégrale (1.1).
( )g tpi ( ) ( )( )f g G u f g G tg pi pi, . ,′ = ∀0,
( )G tpi
( ) ( )( )G t g t* , *
( ) ( )(G t g tpi pi, )
)
La méthodologie du paragraphe précédent néglige les difficultés posées, dans la pratique, par
la recherche de la fonction . Pour simplifier, la littérature économique sur le sujet a
décomposé le problème.
(f g G,
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Pollution cumulative
Dans le chapitre 2, nous verrons que les modèles d’équilibre général appliqué ne tiennent pas
compte des dommages climatiques. Leur rôle se limite à déterminer l’effet sur l’économie de
mesures exogènes de restriction des émissions de gaz à effet de serre. Ainsi, si définit la
trajectoire d’émission imposée, ces modèles déterminent :
( )g t
1. le coût économique du quota d’émission ( )( )( ) ( )( )( )u f g t u f g tpi , ,0 0− ;
2. la mesure fiscale nécessaire pour contraindre les agents économiques à le
respecter.
( )(f g tg ,0)
Dans le chapitre 3, nous passerons en revue les études traitant de l’évaluation des dommages
climatiques. Elles se réfèrent également à la trajectoire de politique inchangée et comparent la
situation idéale, où le stock de gaz à effet de serre serait à son niveau naturel tout le temps, à
la situation réelle, où le stock de gaz à effet de serre est à son niveau projeté. Elles
déterminent :
1. les dommages climatiques ( ) ( )( )( ) ( )( )( )u f g t G t u f g tpi pi pi, ,− 0 ;
2. le dommage marginal de l’effet de serre ( ) ( )( )f g t G tG pi pi, .
75
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Annexes / Chapitre 1
Annexe 1.1 : Concavité de la fonction de production
La fonction de production s’écrit ( ) ( )( )f g G F g G, ,= ξ . Sa matrice hessienne est :
( )
( ) ( ) ( )h
F G F
G F G F G F
gg gG
Gg GG
gg g T
Tg T T T
=
⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟ =
′
′ ′′ + ′
⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟
f f
f f
ξ
ξ ξ ξ
.
. . .
Δ
Δ Δ
2
Δ Δ
)
≥
(f g G, est concave si sa matrice hessienne est semi-définie négative, i.e. si et si
. La première condition est remplie puisque
fgg ≤ 0
( )f f fgg GG gG. − 2 0 fgg ggF= < 0 . De plus,
( ) ( ) ( )( ) ( )f f fgg GG gG gg T T Tg gg TG F F F G F F. . . .− = ′ − + ′′ >2 2 2 0ξ ξΔ Δ Δ Δ.
≥
,
puisque et puisque ( )F F Fgg T T Tg. Δ Δ Δ− 2 0 ( )′′ >ξ G F Fgg T. . Δ 0 . ( )f g G, est donc strictement
concave.
Annexe 1.2 : Conditions suffisantes d’optimalité
Par application du théorème 2 et de son corollaire (voir l’appendice 1), les conditions
nécessaires d’optimalité sont suffisantes si le hamiltonien est concave, autrement dit, puisque
l’équation différentielle (1.1a) est linéaire, si la fonction ( )( )u f g G, est concave. La matrice
hessienne de s’écrit : (~H , , ,G g p t)
h
f u f u f u f f u
f u f f u f u f u
gg gG
Gg GG
gg g gG g G
Gg G g GG G
=
⎛
⎝
⎜⎜
⎞
⎠
⎟⎟ =
′ + ′′ ′ + ′′
′ + ′′ ′ + ′′
⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟
~ ~
~ ~
. . . . .
. . . . ² .
H H
H H
2
Le Hamiltonien et la fonction ( )(u f g G, ) sont concaves si la matrice hessienne est semi-
définie négative, i.e. si et si
~
H gg < 0 ( )~ .~ ~H H Hgg GG gG− ≥2 0 .
75
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89 89 |
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Annexes / Chapitre 1
La première condition est vérifiée d'emblée. Pour établir la seconde propriété, calculons le
déterminant de la matrice hessienne :
( ) ( ) ( )
( )
~
.
~ ~
. .
. . . . . .
H H Hgg GG gG gg GG gG
gg G g GG g G gG
f f f u
f f f f f f f u u
− = − ′
+ + − ′ ′′
2
2 2
2 2 2 .
Le premier terme est strictement positif puisque la fonction ( )f g G, est strictement concave.
Le dernier terme est strictement positif compte tenu des propriétés de ( )f g G, et de . On
en conclut que la deuxième condition est remplie et que la fonction hamiltonienne est
strictement concave.
( )u C
Remarque :
( ) ( ) ( )~
H
.
. .gG
g g
g
d f u
dG
d f
dG
u f
d u
dG
=
′
= ′ +
′
mesure la variation de la productivité
marginale de l’émission en terme d’utilité suite à une variation du stock de gaz à effet de
serre. Cette variation est l'addition de deux effets de sens opposés :
1. l'effet ( )d f dGg ≤ 0 résulte de la baisse mécanique de la productivité marginale physique
de l’émission lorsque l'effet de serre s'accroît ;
2. l'effet s'explique par l'accroissement de l'utilité marginale résultant de la chute
de la consommation lorsque l'effet de serre s'amplifie.
f uG . ′′ ≥ 0
Hypothèse : nous supposons que , i.e. que la productivité marginale du polluant,
exprimée en termes d’utilité, est une fonction décroissante de la pollution et, corollairement,
que le dommage marginal en termes d’utilité de l’effet de serre est une fonction croissante de
la production.
~
H gG ≤ 0
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Annexes / Chapitre 1
Annexe 1.3 : Démonstration du lemme 1.1
Puisque (1.3a) est vérifiée quels que soient G et p , on a :
d dg dG dpg gg gG
~ ~
.
~
.H H H= + − 0= .
On en déduit (se reporter à l'hypothèse de l'annexe 1.2 pour démontrer la première) :
( )dg G p
dG
gG
gg
,
~
~= − ≤
H
H
0,
( )dg G p
dp gg
,
~= <
1 0
H
.
Annexe 1.4 : Démonstration de la propriété 1.1.
Nous résolvons l'équation différentielle du système (1.4) :
( ) ( ) ( )( )
( )[ ] ( ) ( ) ( )( )
( ) ( ) ( ) ( ) ( )( )
& . , . ,
. . , .
. , . ,
. .
.
p p f g G u f g G
e p e f g G u f g G d
p t e f g G u f g G d
G
t Gt
t
Gt
− + = ′
⇔ = ′
⇔ = − ′
− + ∞ − +∞
− + −∞
∫
∫
δ β
τ
τ
δ β τ δ β τ
δ β τ
,
+
sachant que . ( )lim
t
te p t
→∞
− =δ . . 0
Annexe 1.5 : Démonstration de (1.10)
La première étape de la démonstration applique le principe d’optimalité de Bellman :
( )( )
( )
( )( ) ( )( )V G t t e u C d V G t t t t
g t t
t t
* , . * ,.= + +⎡
⎣⎢
⎤
⎦⎥
−+∫max δ τ τ τ
Δ
Δ Δ .
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Annexes / Chapitre 1
Si est suffisamment petit, on peut approximer la relation précédente par son
développement de Taylor :
Δt
( )( )
( )
( )( ) ( )( )[ ] ( )V G t t e u C t t V G t t t t t
g t
* , . . * ,.= + + +−max δ τ οΔ Δ Δ + Δ ,
où ( )lim
Δ
Δ
Δt
t
t→
=
0
0
ο
.
En supposant que la fonction V soit dérivable, on peut également calculer le développement
de Taylor de : ( )( )V G t t t t* , +Δ Δ+
( )( ) ( )( ) ( )( ) ( )( ) ( )V G t t t t V G t t V G t t G V G t t t tG t* , * , * , . * , .+ + = + + +Δ Δ Δ Δ Δο .
En introduisant ce résultat dans la relation précédente, on en déduit que :
( )
( )( ) ( )( ) ( )( )[ ] ( )0 = + +−max
g t G t
e u C t t V G t t G V G t t t tδ τ ο. . . * , . * , .Δ Δ Δ + Δ .
Il suffit maintenant de diviser par et de choisir Δt Δt → 0 pour obtenir l’équation Hamilton-
Jacobi-Bellman :
( )
( )( ) ( )( ) ( )( )[ ]0 = + +−max
g t G t
e u C t V G t t G V G t tδ τ. . * , . & * , .
La seconde partie de la démonstration utilise les deux résultats suivants :
( )( ) ( )(V G t t e V G tt t* , . . * ,.= − −δ δ 0) (voir la relation (1.9)) ;
( )( ) ( )V G t t e p tG t* , . *.= − −δ (voir l’appendice 2).
En remplaçant dans l’équation Hamilton-Jacobi-Bellman et en simplifiant, on obtient :
( )( )
( )
( )( ) ( )[ ]δ . * , * . &V G t u C t p t G
g t
0 = −max .
Le terme entre crochets n’est rien d’autre que le hamiltonien courant, ce qui prouve (1.10).
78
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92 92 |
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Annexes / Chapitre 1
Annexe 1.6 : Propriétés des isoclines.
Le long des isoclines, les propriétés suivantes sont vérifiées.
( )[ ] ( ) ( )[ ]dp f u f f u g dp f u f f u g f u f u dGGg G g p Gg G g G GG G& . . . . . . . . . . ². .= + + ′+ ′′ + ′+ ′′ + ′+ ′′ =δ β 0,
( )dG g dp g dGp G& . .= + − =β 0 ,
où est la dérivée partielle de la demande d’émission par rapport à i. gi
La courbe représentant P a une pente non décroissante (voir l’annexe 1.2) :
( )
( )
dp
dG
p
gg GG gG
gg gG
&
~
H .
~
H
~
H
.
~
H
~
H=
= −
−
+ +
≥0 0
2
δ β
.
La courbe représentant est de pente non croissante : G
dp
dG
G gg gG& .
~
H
~
H
=
= + ≤0 0β
.
En utilisant les différentielles totales ci-dessus, on constate que tout point au-dessus de P a
une vitesse &p positive (et inversement), puisque :
dp
dp
gG
gg
&
~
H
~
H
= + + ≥δ β 0 ,
et que tout point au-dessus de a une vitesse G &G négative (et inversement), puisque :
dG
dp
gg
&
~
H
= ≤
1 0 .
Annexe 1.7 : Démonstration de la propriété 1.5
En combinant les relations (1.11), (1.12) et (1.13), on définit la fonction :
( ) ( ) ( ) ( )A G f G G f G Gg G= + +δ β β β. . , . , .
79
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Annexes / Chapitre 1
On démontre que cette fonction décroît avec G :
( ) ( ) ( ) ( )′ = + + + + <A G f f f fgg gG Gg GGδ β β β. . . 0 .
L’équilibre stationnaire du système (1.7) est tel que ( )A G∞ =* 0 . Supposons que le taux
d’actualisation augmente de dδ . On a alors ( ) ( )A G f G G dg∞ ∞ ∞= >* . * , * .β 0δ
=δ
et la pollution
ne respecte plus les conditions de stationnarité. Une variation de telle que
permet alors de retrouver l’état stationnaire à partir
du point . Il s’ensuit que :
G∞ * dG∞ *
( ) ( )′ +∞ ∞ ∞ ∞A G dG f G G dg* . * . * , * .β 0
G∞ *
( )
( )
dG
d
f G G
A G
g∞ ∞ ∞
∞
= −
′
>
* . * , *
*δ
β
0,
( )
( )
dg
d
f G G
A G
g∞ ∞ ∞
∞
= −
′
>
* . . * , *
*δ
β β
0 .
Ceci démontre la première partie de la propriété.
Le niveau de production stationnaire dépend de la pollution uniquement, i.e.
. L’effet d’une variation infinitésimale de dépend du signe de
l’expression suivante :
(Q f G G∞ ∞=* . * ,β )∞ *
*
G∞ *
( )dQ f f dGg G∞ ∞= +* . .β .
Or, ( )δ β+ + =. f fg G 0 à l'équilibre stationnaire. Il s’ensuit que β δ. .f f fg G g+ = − < 0 . On
en déduit que la consommation stationnaire décroît avec la pollution stationnaire.
Ceci démontre la deuxième partie de la propriété.
80
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94 94 |
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Annexes / Chapitre 1
Annexe 1.8 : Conditions suffisantes d’optimalité du problème n°2
Puisque les équations différentielles (1.15a) et (1.15b) et la contrainte de non-négativité
de S sont linéaires, le hamiltonien est (strictement) concave si ( )( )u f g G, est (strictement)
concave (voir le corollaire du théorème 2 de l’appendice 1). Il a déjà été prouvé dans l’annexe
1.2 que la fonction possédait cette propriété. Du fait du théorème 2 de l’appendice
1, on en déduit que les conditions nécessaires (1.17) à (1.21) sont également conditions
suffisantes.
( )(u f g G, )
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95 95 |
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
Chapitre 2
Coût de la lutte contre l’effet de serre
Le coût d'une politique du climat se définit comme la quantité de bien-être que les
agents économiques doivent sacrifier pour ralentir le réchauffement planétaire,
indépendamment des avantages afférents. Les modèles mondiaux partent de cette définition
(Barns & alli, 1993 ; Manne, 1993 ; Oliveira-Martins & alli, 1993 ; Rutherford, 1993). Cette
définition est certes pratique, l’exercice d’évaluation des coûts étant suffisamment compliqué
en soi, mais elle est incomplète. L’idéal serait de mesurer le coût net de la politique, en
retranchant les dommages climatiques évités. Cela sera l’objet du prochain chapitre.
Une politique climatique réunit un éventail de mesures concrètes, comme par exemple la
gestion des forêts, la réduction de la consommation d’énergies fossiles, etc... Avant de nous
engager dans le débat de fond, nous consacrerons une première section à la présentation de
ces actions et nous exposerons les raisons qui conduisent à privilégier la réduction des
émissions de dioxyde de carbone.
La lutte contre l’effet de serre s’entend dans la durée. En général, les modèles mondiaux
planifient des scénarios de dépollution sur un horizon d’un siècle, ce qui complique
singulièrement les choses. Puisque la production et les émissions de gaz à effet de serre
futures sont des inconnues, il faut les prévoir pour obtenir une situation de référence qui
étalonnera l’évaluation du coût. Du fait de l’influence de cette trajectoire de politique
inchangée (‘‘business-as-usual’’ en anglais) sur le résultat final, nous avons jugé important
d’expliquer, dans les sections 2 et 3, comment les modèles mondiaux construisent leurs
prévisions des émissions de gaz à effet de serre. Dans un premier temps, nous dégagerons les
déterminants économiques principaux de la demande d’énergie, en nous appuyant sur les
tendances passées et sur une analyse économique de la production. Pour finir, nous
montrerons comment passer de la consommation d’énergie à une projection des émissions de
carbone.
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
Les projections, issues du scénario de politique inchangée, servent de base à l’évaluation des
coûts des politiques climatiques. Dans les modèles mondiaux, ces dernières prennent la forme
d’un quota d’émission ad hoc. Partant de là, les modèles d’équilibre général appliqué
calculent la trajectoire associée à cette contrainte exogène, puis le coût économique de la
politique, défini par comparaison avec le scénario de politique inchangée.
Dans la quatrième section, nous résumerons les résultats de deux modèles mondiaux pour
tirer les enseignements principaux qui s’en dégagent. L’initiative de l’O.C.D.E., invitant les
chercheurs à standardiser les hypothèses et les politiques testées, facilitera grandement la
comparaison des modèles.
2.1 - Des moyens d’action multiples
Pour infléchir un éventuel réchauffement climatique, il faut agir sur la concentration
atmosphérique de gaz à effet de serre, soit indirectement, en intervenant sur les
comportements responsables de leur accumulation, soit directement, en renforçant les
réservoirs naturels et les puits, pour éliminer les gaz à effet de serre accumulés.
La politique du climat peut avoir de multiples composantes ; les principales sont énumérées
dans l’encadré 2.1. En théorie, toutes devraient être utilisées dans des proportions telles que
leurs rendements marginaux s’égalisent.
Encadré 2.1 : Typologie des mesures de lutte contre l'effet de serre
1) Méthodes indirectes :
a) Réduire la consommation d'énergie ;
b) Limiter les émissions par unité de consommation ou de P.I.B. :
i) en favorisant les substitutions interénergétiques ;
ii) en filtrant les émissions ;
iii) en éliminant les Chlorofluorocarbones.
c) Empêcher la déforestation.
2) Méthodes directes :
a) Favoriser la reforestation ;
b) Recourir à l’« Ingénierie climatique ».
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
In d haus (1991a) spiré e Nord
La gestion des forêts intervient comme mesure directe et/ou indirecte. Le déboisement
es solutions techniques de l’ingénierie climatique ont, pour ainsi dire, été totalement laissées
es économistes ont également délaissé l’étude de la réduction des émissions des
es arguments précédents, combinés au fait que le gaz carbonique est le principal responsable
produit, chaque année, une émission de 1,6 ± 1 GtC. Cline (1994) estime qu’une politique de
ralentissement de la déforestation coûterait environ 6 dollars par tonne de carbone
économisée, ce qui est relativement faible par rapport aux mesures alternatives.
Malheureusement, une baisse du déboisement de 50 pour-cent réduirait les émissions
mondiales de dioxyde de carbone de seulement 10 pour-cent. Cette politique ne peut donc
être qu’une mesure d’accompagnement. Le reboisement est une action moins prometteuse. En
effet, outre le surcoût lié à la plantation des arbres, les usages concurrents du sol (agriculture
et habitation) rendent cette politique moins rentable. En comptabilisant ces facteurs, le coût
du reboisement atteint entre 15 et 20 dollars par tonne de carbone emprisonnée (Cline, 1994).
Une autre contrainte vient limiter l’intérêt du reboisement : la période pendant laquelle une
forêt emmagasine le dioxyde de carbone ne dépasse pas 30 ans.
L
de côté par la littérature économique. A notre connaissance, seul Nordhaus (1992a) et (1992b)
les étudie, en insistant toutefois sur le fait qu’elles ne sont pas encore opérationnelles. Au
passage, il convient de noter qu’elles pourraient être sources d’autres risques
environnementaux majeurs.
L
chlorofluorocarbures. Cette attitude s’explique simplement par la ratification, en 1992, du
protocole de Montréal, qui arrête un calendrier conduisant à leur disparition complète d’ici à
l’an 2000.
L
du renforcement de l’effet de serre, justifient que la littérature économique sur l’évaluation
des coûts de la politique du climat se soit intéressée, quasi exclusivement, à la réduction des
émissions de dioxyde de carbone. Comme les émissions de dioxyde de carbone sont
étroitement corrélées à la consommation des énergies fossiles, l’analyse du coût de la
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
politique du climat s’inscrit alors dans la continuité des questions plus anciennes traitant du
coût économique des économies d’énergie.
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
2.2 - La consommation d’énergie finale
Dans cette section, nous dégagerons les déterminants principaux de la demande
d’énergie. Cette discussion servira, plus loin, à comprendre comment les modèles mondiaux
obtiennent une projection des émissions de dioxyde de carbone sur le prochain siècle.
2.2.1 - Historique de la consommation d’énergie
Avant la révolution industrielle, l’énergie satisfaisait surtout des besoins domestiques
mais n’intervenait pas significativement dans l’activité de production. Avec le décollage
industriel, l’énergie devient un facteur de production, au même titre que le travail et le capital
; la consommation d’énergie par habitant augmente continûment depuis lors. Toutefois,
Percebois (1995) distingue deux phases caractéristiques, à partir de 1850, concernant les
énergies commerciales : voir le graphique 2.1.
Graphique 2.1 : Evolution de l’intensité énergétique du P.I.B.
0
0,2
0,4
0,6
0,8
1
1,2
1840 1880 1920 1960 2000 2040
Grande-
Bretagne
Etats-Unis
France
Japon Corée
Algérie
Brésil
Tep par 1000 dollars 1980 de
Intensité énergétique
Evolution des maxima
Source : Dessus (1996)
La première époque se définit par une hausse continue de l’intensité énergétique de la
production des pays occidentaux, c’est-à-dire de la quantité d’énergie nécessaire pour obtenir
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
un dollar de P.I.B. constant. Selon les pays, ce mouvement cesse entre 1880 et 1970. Il résulte
principalement d’un effet de structure, c’est-à-dire de l’accroissement du poids de l’industrie
lourde dans la production. Cette tendance est caractéristique du décollage industriel et mérite
d’être soulignée. Toutefois, selon certaines estimations, l’intensité énergétique du P.I.B.
diminuerait, en fait, pendant cette période si l’on tient compte des énergies non commerciales
(le bois et le charbon de bois).
La seconde période connaît une baisse constante de l’intensité énergétique de la production.
Cette nouvelle tendance aurait trois causes principales. L’évolution technologique, qui se
traduit par une amélioration du rendement énergétique réel (un progrès technique intensif en
énergie) et apparent (un progrès technique neutre), serait le facteur principal. Les
substitutions interénergétiques y auraient également contribué pour une large part
(principalement, le remplacement du charbon par l’électricité et le pétrole). Enfin, l’effet de
structure jouerait dans le sens inverse par rapport à la période précédente, avec la
‘‘tertiairisation’’ des économies développées.
On retient donc que « l’intensité énergétique du P.I.B. a décru de façon tendancielle depuis le
milieu du XIXème siècle dès lors que l’on tient compte de l’énergie non commerciale »
(Percebois, 1995). L’énergie est donc utilisée de plus en plus efficacement par les sociétés à
mesure que le temps passe. Souvenons-nous, également, que le schéma décrit caractérise la
situation des pays développés. Ainsi, à condition que les pays en développement suivent un
schéma semblable, il faut s’attendre à ce que leur développement s’accompagne d’une
élévation sensible de l’intensité énergétique de leur P.I.B., donc d’une aggravation sensible de
l’effet de serre.
2.2.2 - Les déterminants de la demande d’énergie
Au niveau macro-économique, l’énergie joue un double rôle : en tant que bien de
consommation, elle satisfait des besoins comme le chauffage et le transport ; en tant que
facteur de production, elle contribue à la production des autres biens de consommation.
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
Laissant de côté son premier emploi, la demande d’énergie se détermine comme la demande
des autres inputs ; elle est un sous-produit des fonctions de production (Percebois, 1995). A
l’instar de la plupart des modèles d’équilibre général, supposons qu’une fonction de
production C.E.S. est une bonne représentation du domaine des possibilités de production
agrégée de l’économie (ou d’une branche). Le bien est produit en combinant deux facteurs de
production, l’énergie finale E , d’une part, qui est offerte par la branche énergétique, et le
capital efficace K , d’autre part, qui est une combinaison optimale de capital et de travail :
( )Y a T E b K= +
⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟
− − −
. . .
ε
ε
ε
ε
ε
ε1 1 1
. (2.1)
où
a et b sont des paramètres de dimension,
T est un facteur de progrès technique intensif en énergie,
ε est l’élasticité de substitution entre les deux facteurs, avec 0< < ∞ε .
A l’optimum du producteur, l’énergie est rémunérée à sa productivité marginale. On en déduit
la fonction de demande d’énergie suivante :
E a p T Y= − −ε ε ε. . .1 . (2.2)
où p est le prix relatif de l’énergie (autrement dit, le bien produit est numéraire).
La relation (2.2) met en évidence quatre déterminants de la demande d’énergie. A en croire
cette expression, une projection fondée de la consommation énergétique future nécessite la
connaissance des évolutions temporelles de la production, du prix de l’énergie finale, du
progrès technique non neutre et de l’élasticité de substitution entre l’énergie et les autres
facteurs de production.
2.2.2.1 - Projection de la production
La croissance de la production dépend de deux tendances exogènes, la démographie et
le progrès technique neutre, et d’une composante endogène, l’accumulation du capital.
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
Pour faciliter la tâche des chercheurs et la compaison des résultats des diverses équipes,
l’E.M.F. n°12 (Groupe de travail sur la modélisation de l’énergie, commandité par l’O.C.D.E.
et l’A.I.E) propose des projections cibles concernant la population et la production de
plusieurs régions du monde. Ces données sont regroupées dans l’annexe 2.1.
2.2.2.2 - Le prix de l’énergie
L’énergie finale est offerte par la branche énergétique de l’économie. Sa production se
fait par transformation des énergies primaires, qui sont le pétrole, le gaz naturel, le charbon et
l’électricité primaire (principalement, hydraulique et nucléaire ; marginalement, éolienne et
solaire), en énergie utile. L’évolution du prix de l’énergie finale résultera d’une interaction
complexe entre les offres potentielles des énergies primaires et les possibilités de
substitutions interénergétiques.
L’offre des énergies fossiles (le pétrole, le gaz naturel et le charbon, dans une moindre
mesure) devrait diminuer au cours du prochain siècle. Si le rythme d’extraction de chacune de
ces ressources restait constant au cours des années à venir, les réserves prouvées de pétrole
seraient épuisées dans 43,1 ans, celles de gaz naturel dans 64,8 ans et celles de charbon dans
232 ans (Source : British Petroleum, 1993). Ces contraintes devraient créer des tensions à la
hausse sur le prix de l’énergie finale au cours des décennies prochaines.
Cette tendance devrait être partiellement atténuée par l’augmentation de l’offre
d’électricité primaire, d’une part, et par l’invention et la commercialisation de nouvelles
formes d’énergies primaires, d’autre part.
La substitution de l’électricité aux énergies fossiles risque d’être insuffisante pour
contrecarrer la progression du prix de l’énergie finale pour deux raisons. La première est que
l’offre d’électricité primaire est elle-même limitée : le cas de la France mis à part, les
programmes de production d’électricité nucléaire sont stoppés dans de nombreux pays ; les
sites capables de recevoir des centrales hydrauliques sont évidemment en nombre limité ; les
énergies éolienne et solaire sont coûteuses. L’autre raison est que les énergies fossiles et
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
l’électricité sont imparfaitement substituables (principalement à cause du transport : le moteur
électrique reste nettement moins performant que le moteur à explosion : autonomie, vitesse
...).
L’autre issue à l’inflation prévisible du prix de l’énergie finale réside dans le développement
de technologies de rechange (technologies ‘‘back-stop’’ en anglais). Trois propriétés les
définissent :
1. elles proposent un substitut parfait à une technologie existante ;
2. leur coût de production marginal est constant ;
3. leur offre est infiniment élastique à ce prix.
Dans le cas des énergies fossiles, il existe deux technologies de rechange principales. L’une
est à base de carbone ; il s’agit des combustibles synthétiques. L’autre, l’hydrogène liquide
obtenu par électrolyse, ne contient pas de carbone.
L’E.M.F. n°12 recommande aux concepteurs des modèles globaux de modéliser explicitement
ces substituts. Ceux qui le font partent des mêmes hypothèses concernant leur date
d’apparition et leur coût de production. Les propriétés des technologies de rechange, i.e. une
offre potentiellement très grande, au-delà d’un prix plancher, et une substituabilité infinie
avec les énergies fossiles, impliquent que le prix de l’énergie finale ne peut pas dépasser une
certaine valeur.
Toutefois, puisque ces technologies seront opérationnelles dans quelques décennies
seulement, à un coût de production deux à quatre fois plus grand que celui des technologies
traditionnelles, elles n’empêcheront pas la hausse du prix de l’énergie dans un premier temps
(à moins d’un effort de recherche accélérant leur commercialisation et réduisant leur coût de
production).
2.2.2.3 - Amélioration du rendement énergétique
Le progrès technique intensif en énergie est un déterminant très important de
l’évolution de la consommation énergétique à l’échelle séculaire. Compte tenu de la relation
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
(2.2), si l’élasticité de substitution entre l’énergie et les autres facteurs est inférieure à l’unité
(ce que supposent tous les modèles d’équilibre général appliqué), la présence d’un progrès
intensif en énergie réduit la consommation future d’énergie finale.
Dans les modèles mondiaux, l’amélioration de l’efficacité énergétique est déterminée par
prolongement des tendances de long terme. Dans notre présentation historique, nous
montrions que le P.I.B. a augmenté plus vite que la consommation d’énergie depuis 1850. Au
vu de la relation (2.2), ceci provient de l’évolution combinée du prix de l’énergie, du progrès
technique neutre et du progrès technique intensif en énergie sur la période.
Selon les estimations de Nordhaus (1974), les prix réels du pétrole et du charbon, mesurés en
termes de travail, auraient diminué au cours de notre siècle : indice 1034 en 1900, base 100 en
1970, pour le pétrole et indice 459 en 1900, base 100 en 1970, pour le charbon. Krutilla
(1968, p.777), en se basant sur plusieurs études consacrées à ce sujet, parvient à la même
conclusion : « Une étude systématique de l’évolution des prix des ressources naturelles n’a
révélé aucune interruption durable de leur déclin par rapport aux autres biens et services .» 1.
A condition que ces mesures reflètent, au moins en partie, l’évolution du prix réel de l’énergie
finale, on peut conclure que la baisse de l’intensité énergétique du P.I.B. observée provient de
l’amélioration des rendements uniquement, pas d’un effet prix.
Il reste à savoir si l’augmentation du rendement énergétique est apparente, réelle, ou bien les
deux à la fois. Les séries temporelles ne répondent pas à cette question, mais le bon sens
plaide en faveur de l’existence d’un progrès intensif en énergie. La liste des progrès réalisés
dans l’ensemble des équipements de la vie quotidienne est suffisamment longue pour s’en
convaincre. Contentons-nous simplement des quelques exemples parlants proposés par
Dessus (1996) : une Peugeot 203 consommait, en moyenne, 8 litres au cent kilomètres, contre
un peu plus de 5 litres pour une Peugeot 205, soit un gain de 40 pour-cent en 40 ans ; sur la
même période, la puissance d’un téléviseur a été divisée par 20 à 25 ; les lampes fluorescentes
compactes, mises récemment sur le marché, consomment 4 fois moins d’électricité que les
1 - « A systematic analysis of the trends in prices of natural resource commodies did not reveal any permanent
interruption in the decline relative to commodities and services in general .»
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
ampoules traditionnelles. Tout ceci prouve l’existence de gains d’efficacité dans le passé. Il
semble raisonnable de supposer que cette tendance devrait se poursuivre.
Historiquement, l’existence d’un progrès technique intensif en énergie est donc indubitable.
Mais, la prolongation de cette tendance est problématique, tant elle influence la trajectoire de
la consommation énergétique. Pour preuve, un taux d’amélioration du rendement énergétique
de 1,5 pour-cent l’an réduit la consommation d’énergie de 80 pour-cent, toutes choses égales
par ailleurs, par rapport à la situation où il n’y aurait aucun progrès (Manne & alli, 1995).
2.2.2.4 - Substitution entre l’énergie et les autres facteurs
Ce paramètre n’a qu’une influence indirecte sur la demande d’énergie. Selon sa valeur,
l’effet du prix de l’énergie finale et du progrès technique est amplifié ou atténué.
Selon la valeur de l’élasticité de substitution, la production par unité d’énergie finale est une
fonction : croissante à taux croissant (ε >1), constant (ε = 1) ou décroissant (ε <1) du prix
de l’énergie finale ; décroissante (ε >1), constante (ε = 1) ou décroissante (ε <1) de
l’efficacité énergétique.
2.2.2.5 - Effets de structure
Les discussions précédentes ont laissé de côté le rôle important de la structure de la
consommation dans l’évolution historique de la consommation énergétique. Dans les modèles
agrégés dont nous discuterons plus loin, ce déterminant est soit explicitement modélisé, soit
simplement simulé, sur la base d’une hypothèse ad hoc.
L’effet de structure de la consommation sur la demande d’énergie ne peut être modélisé qu’à
la condition de désagréger la consommation en plusieurs biens. Les déplacements de la
demande entre ces types de biens, produits selon des techniques plus ou moins intensives en
énergie, font alors apparaître des effets de structure susceptibles de modifier l’intensité
énergétique de la production globale.
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
Tous les modèles bâtis autour de l’hypothèse, classique dans les modèles de croissance, d’un
bien unique composite n’endogénéisent pas le rôle des choix de consommation. Pour
contourner cette difficulté, Manne & alli supposent une trajectoire prédéterminée du contenu
en énergie de la consommation et l’intègrent dans le progrès technique intensif en énergie :
« L’amélioration autonome de l’efficacité énergétique résume tous les moyens de réduction
de l’intensité énergétique de l’output » comme par exemple le « déplacement de la demande
des biens manufacturés vers les services » (1995, p. 22) 2.
2.3 - Les émissions de carbone
Dans cette section, nous montrons le rapport étroit entre la consommation d’énergie et
les émissions de carbone. Nous présentons ensuite les projections des émissions de carbone
déterminées par quelques modèles mondiaux.
2.3.1 - De la consommation d’énergie aux émissions de carbone
Les émissions de dioxyde de carbone se déduisent de la consommation de chaque
énergie fossile. La teneur en carbone du gaz naturel est de 13,7 kg / GJ, contre 19,9 kg / GJ
pour le pétrole, 24,1 kg / GJ pour le charbon et 40 kg / GJ pour les combustibles synthétiques
3. L’épuisement du pétrole et du gaz naturel et leur remplacement progressif par le charbon et
les combustibles synthétiques impliquent une élévation tendancielle de la teneur moyenne en
carbone de l’énergie finale sur le siècle prochain.
L’évolution du contenu en carbone de l’énergie finale pourrait être fortement modifiée par
l’application d’une politique climatique comme, par exemple, une taxe sur le contenu en
2 - « AEEI summarizes all sources of reductions in the economy-wide energy intensity per unit of output » ...
« shifts in the basic economy mix away from manufactured goods and toward more services ».
3 - Le joule mesure le pouvoir calorifique des énergies : 1 GJ = 1 milliard de joules.
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
carbone. En effet, avant toute réduction de la quantité d’énergie finale consommée, les
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
substitutions interénergétiques constituent sûrement la méthode la moins coûteuse pour
parvenir à une réduction donnée des émissions de dioxyde de carbone.
Remarque 2.1 : Pour ce qui est des autres gaz à effet de serre, ou bien ils ne sont pas
modélisés (cas des modèles qui ne tiennent pas compte des dommages de l’effet de serre), ou
bien leur trajectoire est supposée exogène.
2.3.2 - Projections des modèles mondiaux
Pour clore cette discussion, nous présentons les résultats des modèles globaux suivants :
Carbon Rights Trade Model (Rutherford, 1993 : modèle ‘‘CRTM’’) ; Edmonds-Reilly Model
(Barns & alli, 1993 : modèle ‘‘ERM’’) ; Manne-Richels Global 2100 Model (Manne, 1993 :
modèle ‘‘MR’’) (voir l’encadré 2.2) ; O.E.C.D. Model (Oliveira-Martins & alli, 1993 :
modèle ‘‘GREEN’’) (voir l’encadré 2.3).
Grâce à l’initiative de standardisation de l’O.C.D.E., les modèles globaux construits
pour évaluer les coûts des politiques climatiques utilisent la même base de données. Les
projections démographiques et du P.I.B. par tête utilisées sont celles de l’E.M.F. n°12. La
population mondiale atteint un état stationnaire, au milieu du vingt-deuxième siècle, de onze
milliards d’habitants.
Graphique 2.2 : Projection démographique
4
5
6
7
8
9
10
11
19
90
20
00
20
25
20
50
20
75
21
00
Po
pu
la
tio
n
(e
n
m
ill
ia
rd
s
d'
ha
bi
ta
nt
s)
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
Source : O.C.D.E. (1993)
Les modèles GREEN et MR tiennent compte des technologies de rechange et utilisent des
hypothèses très proches. Les combustibles synthétiques et l’hydrogène liquide produit par
électrolyse sont disponibles, à partir de 2010, au prix de 8,33 et 16,67 dollars par GJ
respectivement (sachant que le prix du pétrole de référence dans MR est de 3,7 dollars par GJ
en 1990).
La standardisation des hypothèses s’arrête là. Les particularités de chaque modèle,
comme le niveau de désagrégation sectorielle, le rôle du commerce international, la
modélisation de la production, imposent des choix différents pour les autres paramètres.
Tableau 2.1 : Paramètres des modèles globaux
CRTM ERM GREEN MR
T (% / an) 0,5 1 1 0,5
ε 0,4 .. 0,8 0,3 ou 0,4
Source : O.C.D.E. (1993)
Les modèles globaux supposent tous une substituabilité imparfaite entre l’énergie et les autres
facteurs (le modèle de Whalley & Wigle (1993), qui n’est pas étudié ici, est celui qui propose
la plus forte valeur pour ce paramètre, égale à 0,7) 4. Le taux d’amélioration autonome de
l’efficience énergétique est compris entre 0,5 et 1 pour-cent par an.
Le graphique 2.3 montre clairement que les projections diffèrent sensiblement d’un
modèle à l’autre, variant du simple au double en 2100 5. Les différences entre les projections
de MR et de ERM proviennent, pour l’essentiel, d’un choix différent pour le taux
4 - Il convient de noter une particularité du modèle GREEN de l’O.C.D.E. qui, par le choix d’un emboîtement
des fonctions de production différent des autres, postule que les élasticités de substitution entre l’énergie et le
capital et entre l’énergie et le travail sont différentes.
5 - Dans une synthèse portant sur 10 modèles appliqués aux Etats-Unis, Gaskins & Weyant (1993) trouvent un
intervalle encore plus grand : les projections font état d’une augmentation des émissions en 2100, par rapport à
1990, allant de 20 pour-cent à 200 pour-cent.
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
d’amélioration de l’efficacité énergétique ; les deux trajectoires sont voisines si le même taux
est utilisé (résultat des tests de sensibilité). La proximité entre les projections de MR et de
CTRM s’explique par le fait que les deux modèles sont construits autour de la même
architecture centrale, i.e. le modèle Global 2100 de Manne.
Graphique 2.3 : Projections des émissions de dioxyde de carbone
0
5
10
15
20
25
30
35
40
2000 2025 2050 2075 2100
Em
is
si
on
s
de
c
ar
bo
ne
(e
n
G
tC
)
ο : MR × :ERM + :CRTM :GREEN ◊ :AN
Source : O.C.D.E. (1993)
La cinquième trajectoire du graphique 2.3, notée AN pour ‘‘application numérique’’, est
construite à partir de la fonction de demande (2.2). Les paramètres utilisés reflètent
l’hypothèse moyenne des modèles globaux : la projection du P.I.B. mondial est celle de
l’E.M.F. n°12 ; le taux d’amélioration du rendement énergétique est fixé à 0,75 pour-cent par
an ; l’élasticité de substitution entre l’énergie et les autres inputs est égale à 0,5 ; le prix de
l’énergie finale est supposé augmenter de cinquante pour-cent d’ici à 2050, puis se stabiliser
ensuite ; le contenu en carbone de l’énergie finale est supposé constant jusqu’en 2050,
croissant ensuite, pour tenir compte de l’utilisation croissante des combustibles synthétiques.
Les deux dernières hypothèses sont évidemment arbitraires mais tiennent compte des
éléments suivants : l’EMF n°12 projette que le prix du pétrole devrait être multiplié par deux
d’ici à 2050 ; au-delà de cette date, les combustibles synthétiques prennent le relais, donc la
hausse du prix des énergies fossiles cesse et le contenu en carbone de l’énergie finale
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
augmente ; la substitution de l’électricité aux énergies fossiles limite partiellement l’élévation
du prix de l’énergie finale. La projection obtenue coïncide correctement avec les résultats des
modèles mondiaux et nous incite à penser que notre analyse des déterminants économiques
des émissions de carbone est pertinente.
Encadré 2.2 : Global 2100 (Manne, 1993)
Global 2100 étudie les coûts régionaux de la réduction des émissions de carbone sur la période
1990-2100. Il comporte 5 régions. Il offre une description détaillée de la branche énergétique, avec
9 technologies pour l’énergie électrique et 9 technologies pour l’énergie non électrique. Par contre,
il considère un unique bien de consommation composite. Le commerce mondial se limite au
pétrole brut.
La dynamique de Global 2100 provient de :
1. l’évolution démographique, qui crée l’offre de travail, supposée proportionnelle à la population
;
2. l’accumulation du capital ;
3. l’évolution des réserves d’énergies fossiles, par combinaison de l’extraction et de la découverte
de nouveaux gisements. L’offre des énergies fossiles résulte d’un arbitrage intertemporel du
type Hotelling ;
4. l’amélioration autonome de l’efficience énergétique, qui incorpore des progrès technologiques
et des effets de structure, liés au déplacement de la demande vers des biens moins intensifs en
énergie ;
5. l’apparition de technologies de rechange à des dates et des prix exogènes.
Le consommateur représentatif maximise son utilité intertemporelle (fonction d’utilité
logarithmique). Il anticipe parfaitement l’avenir et établit son programme d’épargne en
conséquence (de la même façon que dans le modèle de Ramsey).
La production globale est représentée par une fonction CES, à rendements constants d’échelle, de
deux inputs composites .
Production Brute
CES [(K,L),(E,N)]
(0,4)
K L
Cobb-Douglas (K,L)
(1)
E N
Cobb-Douglas (E,N)
(1)
Notes :
L=travail K=capital E=énergie électriques N=énergie non électique ;
Les valeurs entre parenthèses désignent les élasticités de substitution.
Encadré 2.3 : GeneRal Equilibrium EnviroNmental model (Burniaux & alli, 1992a)
96
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112 112 |
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
GREEN est conçu pour étudier les coûts régionaux de la réduction des émissions de carbone sur la
période 1990-2050. Il comporte 12 régions et 11 branches d’activité, dont 8 pour l’énergie et 3
pour les autres biens de consommation. Le commerce mondial concerne tous les biens.
Encadré 2.3 (suite)
La dynamique de GREEN intègre 5 composantes :
1. l’évolution démographique influence la demande de consommation et l’offre de travail, qui est
proportionnelle à la population ;
2. l’accumulation du capital ;
3. es résulte de l’extraction et de la découverte de nouveaux l’épuisement des énergies fossil
gisements. Le rythme de conversion des réserves supposées (à découvrir) en réserves prouvées
(en exploitation) est sensible aux prix courants. L’offre potentielle, quantité maximale que les
producteurs sont disposés à offrir, dépend des réserves totales et borne l’offre effective des
énergies fossiles ;
4. l’amélioration autonome de l’efficience énergétique ;
5. k-stops à des dates et des prix exogènes. l’apparition de bac
Le consommateur représentatif maximise son utilité intertemporelle et répartit son revenu entre les
4 types de biens. L’arbitrage entre la consommation et l’épargne est statique, le prix du capital
étant supposé égal au prix moyen des biens de consommation. GREEN utilise un système de
dépense linéaire élargi (Lluch, 1973).
Revenu disponible
ELES
Alimentation
(0,5 à 0,7)
Energie
(0,5 à 0,8)
Transport
(0,8 à 1,2)
Autres
(1,1 à 1,5)
Epargne
Note : L’in es régions. tervalle entre parenthèse désigne l’élasticité-revenu du bien dans les différent
La urs production de chaque branche est à rendements constants d’échelle. Les producte
minimisent leurs coûts de production. GREEN distingue entre le ‘‘vieux’’ et le ‘‘nouveau’’
capital, la différence entre les deux provenant des possibilités de substitution avec les autres
facteurs.
Production Brute
Leontieff
Notes :
L=travail K=capital E=é nergie finale.
Les valeurs entre parenthè ses
dé signent l'é lasticité de substitu-
tion entre le ''vieux'' et le ''nouveau''
capital et les autres facteurs res-
pectivement.
Consommations intermédiaires
L
K E
CES (K,E)
(0;0,8)
CES [L,(K,E)]
(0,12;1)
L’énergie finale est produite à partir des énergies conventionnelles et des back-stops :
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
CES (10)
Conventionnelle Combustible synthé tique
à base de carbone
Combustible synthé tique
sans carbone
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
2.4 - Résultats des modèles mondiaux
Afin de donner une grille de lecture des résultats des modèles globaux, nous
énumérerons, au cours d’une première sous-section, les déterminants du coût de la réduction
des émissions de carbone, en nous appuyant sur des raisonnements d’équilibre partiel. Nous
insisterons sur le rôle dominant des possibilités de substitution entre facteurs. Nous
montrerons également l’importance des innovations technologiques, principalement dans leur
faculté à élargir les opportunités de substitutions interénergétiques.
Dans la sous-section suivante, nous commenterons les résultats des modèles globaux à l’aide
de l’analyse qui les précède.
2.4.1 - Les déterminants du coût de la dépollution
Commençons notre exposé par une lapalissade : plus l’économie est dépendante de
l’énergie, plus il lui sera difficile de s’en passer. La dépendance d’une économie vis-à-vis de
l’énergie peut être mesurée à l’aide des deux indicateurs que sont la part de l’énergie dans le
P.I.B. et l’élasticité de substitution entre l’énergie et les autres facteurs de production.
Montrons maintenant de quelle manière ces deux indicateurs nous renseignent sur le coût de
la réduction de la consommation d’énergie.
Quelle que soit la spécification choisie, si les facteurs de production sont rémunérés à leur
productivité marginale, le coefficient budgétaire de l’énergie, w p E Y= . , est égal à
l’élasticité de la production par rapport à ce facteur, ρ ∂ ∂= log logY E . Il permet donc une
évaluation du coût des économies d’énergie : toutes choses égales par ailleurs, plus la part de
l’énergie dans le coût de production est grande, plus il est coûteux d’en réduire la
consommation d’un pourcentage donné.
98
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
Ainsi, Cline (1994), notant que l'énergie représente 8 pour-cent du P.I.B. des Etats-Unis,
déduit qu’une mesure visant l’objectif d’une baisse de 10 pour-cent de la consommation
d'énergie provoquerait une baisse de 0,8 pour-cent du P.I.B.
La mesure du coût des économies d’énergie par la méthode précédente reste correcte,
dans la durée, à condition que le coefficient budgétaire demeure constant. Or, Percebois
(1995, p. 91) indique que « l’élasticité de la production par rapport à l’énergie est tantôt
nettement supérieure à l’unité, tantôt nettement inférieure à l’unité ». La perte de production,
en pourcentage, suite à une limitation de la consommation énergétique d’un certain
pourcentage va donc varier à travers le temps. Pour illustrer ce point, revenons à l’exemple de
la fonction de production agrégée C.E.S. A l’optimum, le coefficient budgétaire est égal à :
w a
p
T
= ⎛
⎝⎜
⎞
⎠⎟
−
ε
ε
.
1
. (2.3)
Dans le cas particulier où l’élasticité de substitution entre les facteurs est unitaire, la fonction
de production est de type Cobb-Douglas et l’élasticité de la production par rapport à l’énergie
ne varie pas. Alors, toute limitation supplémentaire de 1 pour-cent de la consommation
d’énergie réduit la production globale de pour-cent. a
Dans le cas contraire, le coefficient budgétaire évolue sous l’impulsion du prix de l’énergie et
du progrès technique non neutre. Supposons, dans un premier temps, que le prix de l’énergie
augmente plus rapidement que l’efficience énergétique : si l’élasticité de substitution est
comprise entre zéro et un, la dépendance de l’économie vis-à-vis de l’énergie a tendance à
augmenter et il devient de plus en plus coûteux de réduire la consommation énergétique ; si
elle est supérieure à un, la part de l’énergie dans le coût total de production diminue et le coût
des économies d’énergie diminue. Supposons maintenant que le prix réel de l’énergie
diminue, i.e. que le prix de l’énergie augmente moins vite que l’efficacité énergétique, on
aboutit à la conclusion symétrique : si l’élasticité de substitution est comprise entre zéro et un,
il devient de moins en moins coûteux de réduire la consommation énergétique ; si elle est
supérieure à un, le coût augmente.
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
La relation (2.3) donne une idée du coût des économies d’énergie le long de la
trajectoire de politique inchangée. Cependant, une appréciation plus correcte de celui-ci doit
incorporer le renchérissement de l’énergie finale lié à la contrainte d’émission étudiée. Dans
l’annexe 2.2, nous montrons, à partir d’une relation empruntée à Oliveira-Martins & alli
(1993), que le coefficient budgétaire de l’énergie dépend du quota d’émission imposé :
( ) ( )w R w R= − −. 1 1 1 ε . (2.4)
où
w définit le coefficient budgétaire sans contrainte d’émission (voir la relation (2.3)),
R mesure le taux de réduction des émissions relativement à la trajectoire de
politique inchangée.
Du fait de (2.4), si l’élasticité de substitution entre l’énergie et les autres facteurs est
inférieure à l’unité, le coefficient budgétaire de l’énergie augmente également avec le quota
d’émission. Il s’ensuit que chaque pour-cent supplémentaire de réduction des émissions
s’obtient plus difficilement que le précédent.
Pour déduire le coût de la réduction des émissions de carbone du coût des économies
d’énergie, Cline utilise l’ « élasticité de la disponibilité d’énergie finale par rapport à la
quantité de carbone » (1994, p. 101). Elle est égale à la diminution, en pour-cent, de la
production de la branche énergétique nécessaire pour réduire les émissions de carbone de un
pour-cent. Les calculs de Cline indiquent qu’elle serait proche de 0,5 en 1990. Pour reprendre
son exemple, le coût économique de la réduction de 10 pour-cent des émissions de carbone
correspondrait alors à 0,4 pour-cent du P.I.B. (0,08 x 0,5 x 10 = 0,4).
L’élasticité de la production de la branche énergétique par rapport aux émissions de carbone
dépend des possibilités de substitutions interénergétiques et, plus particulièrement, de la
facilité avec laquelle la branche énergétique peut remplacer les énergies primaires à base de
carbone (pétrole, gaz naturel, charbon et combustibles synthétiques) par les énergies sans
carbone (électricité et hydrogène liquide).
100
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
Comme l’électricité est un substitut imparfait des énergies fossiles, la première ne pourra
jamais remplacer intégralement les dernières. Donc, sans l’intervention de la technologie de
remplacement sans carbone, une limitation drastique des émissions de carbone nécessiterait
une réduction très importante de la production énergétique.
Toutefois, au-delà d’un certain seuil de réduction des émissions de carbone, la technologie de
remplacement sans carbone devient rentable. A l’instant où elle supplante toutes les énergies
à base de carbone, la réduction des émissions se fait sans perte de production énergétique
supplémentaire, en remplaçant les énergies fossiles par la back-stop. Comme cette dernière
est produite à un coût marginal constant en quantités potentiellement très grandes, le coût de
la contrainte d’émission, mesuré par rapport à la situation de politique inchangée, devient
linéaire.
La question qui se pose alors est de savoir quand cette situation pourrait se produire.
Deux conditions doivent être remplies. Premièrement, la technologie en question doit être
opérationnelle (à partir de 2010 selon l’E.M.F. n°12). Deuxièmement, la taxe sur les
émissions de carbone doit être suffisante pour justifier d’abandonner les énergies fossiles.
Dans le tableau 2.2, nous évaluons le seuil d’abandon des énergies à base de carbone aux prix
de 1990.
Tableau 2.2 : Seuils d’abandon des énergies à base de carbone
Charbon Pétrole Gaz naturel Combustibles synthétiques
Prix ($/GJ) (a) 2 3,7 2,75 8,33
Teneur en carbone (tC/GJ) (a) 0,0241 0,0199 0,0137 0,04
Taxe maximale ($/tC) 608,7 651,8 1016,1 208,5
Note : le prix de la technologie de remplacement sans carbone est de 16,67 $/GJ. La taxe maximale
s’obtient en convertissant le différentiel de prix avec l’énergie carbonée en $/tC. Dans le cas du
charbon, le calcul s’écrit : ( )16 67 2 0 0241, ,− .
(a) : Source : Manne & alli (1995).
101
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
Le tableau suggère qu’il faudra des taxes très importantes pour inciter à abandonner les
énergies carbonées. Nous rappelons, toutefois, que les prix de ces ressources sont amenés à
augmenter, réduisant d’autant la taxe maximale nécessaire.
Cette discussion résume l’essentiel de la dynamique du coût économique de la réduction des
émissions de carbone. Nous passons maintenant à la présentation des résultats des modèles
d’équilibre général calculables.
2.4.2 - Evaluations par les modèles mondiaux
Les modèles globaux, participant au projet d’étude comparative de l’O.C.D.E. et de
l’E.M.F., testent quatre scénarios de réduction des émissions de dioxyde de carbone. La
stabilisation aux niveaux de 1990 fait écho aux tractations internationales de la conférence de
Rio (1992) 6. Cette première hypothèse pénalise plus fortement les pays à forte croissance
potentielle. Les autres scénarios prévoient une réduction de respectivement 1, 2 et 3 pour-cent
des taux de croissance régionaux des émissions, le long des trajectoires de politique
inchangée (nous les appellerons scénarios 1%, 2% et 3% respectivement). A contrario du
scénario de stabilisation, ces trois propositions répartissent l’effort de dépollution plus
équitablement entre les régions et semblent plus acceptables. Les modèles mondiaux
considèrent au moins cinq régions : les Etats-Unis, le reste de l’O.C.D.E., l’Ex-U.R.S.S., la
Chine et le reste du Monde.
Vu les scénarios de dépollution retenus par les auteurs des modèles mondiaux, on saisit mieux
l’importance des projections des émissions de carbone prévues par les modèles. Or, comme
on a déjà eu l’occasion de le souligner, les trajectoires du scénario de politique inchangée
diffèrent sensiblement d’un modèle à l’autre, ce qui complique singulièrement toute tentative
de comparaison. Pour contourner cette difficulté, nous convertirons les réductions
d’émissions en pourcentage par rapport à la trajectoire de référence de chaque modèle. Ceci
revient à supposer que l’effort demandé à l’économie pour atteindre l’objectif de dépollution
est plus proportionnel à la réduction relative qu’à la réduction absolue des émissions.
6 - En fait, dans le traité, cette objectif ne concerne que les pays de l’O.C.D.E.
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
Notre discussion porte sur les deux variables que sont le coût économique, mesuré en
pourcentage du P.I.B. de référence, et la taxe sur le contenu en carbone nécessaire pour
respecter le quota d’émission imposé. Nous avons restreint notre étude à deux modèles
mondiaux seulement, celui de Manne (1993) et celui de Oliveira-Martins & alli (1993).
L’élimination du modèle de Rutherford (1993) s’explique par des raisons pratiques (nous
n’avons pas trouvé toutes les valeurs). Il n’est pas tenu compte du modèle de Edmonds &
Reilly (1993), car il ne modélise pas les technologies de remplacement et produit, de ce fait,
des résultats atypiques (des taxes et des coûts très élevés pour des niveaux de dépollution
importants). Nous présenterons les résultats sous forme graphique. Les données utilisées pour
les construire sont tirées du document de synthèse de l’O.C.D.E. « Les coûts de la réduction
des émissions de carbone : Résultats tirés des modèles mondiaux » (1993).
2.4.2.1 - Coût de la réduction des émissions de carbone
Le graphique 2.4 montre le coût des scénarios 1%, 2% et 3%, exprimé en pourcentage
du P.I.B. de politique inchangée, pour quatre régions du monde, aux dates successives 2000,
2020 et 2050. Chaque courbe se compose de trois points, un par scénario. Suivant les
recommandations de Dean & Hoeller (1993), nous laissons de côté la région ‘‘reste du
monde’’, considérant qu’elle est trop hétérogène pour être analysée correctement.
Winters (1992) constate que les modèles (ceux que nous étudions et d’autres) s’accordent sur
un coût allant de 1 à 4 pour-cent du P.I.B. mondial, pour une réduction de 40 à 50 pour-cent
des émissions de dioxyde de carbone à long terme. L’observation du graphique 2.4 confirme
ce constat.
Les disparités régionales autour de cette valeur centrale sont grandes. Ainsi, les
estimations de MR montrent qu’une réduction des émissions de moitié en 2050 diminuerait
d’environ 2,5 pour-cent le P.I.B. de la Chine et de l’Ex-U.R.S.S., contre 1,5 pour-cent pour
les Etats-Unis et 1 pour-cent pour le reste de l’O.C.D.E. Manne explique le coût élevé des
réductions de carbone en Chine par : son fort potentiel de croissance ; ses très importantes
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
réserves de charbon convertibles en combustibles synthétiques et en électricité ; ses réserves
réduites de gaz naturel et de pétrole.
Graphique 2.4 : Coûts de la réduction des émissions de carbone
O.C.D.E. (hors Etats-Unis)
0,0
0,5
1,0
1,5
2,0
2,5
0 25 50 75 10
Réduction des émissions (en %)
C
oû
t (
en
%
d
u
PI
B
)
0
Etats-Unis
0,0
0,5
1,0
1,5
2,0
2,5
3,0
3,5
4,0
4,5
0 25 50 75 100
Réduction des émissions (en %)
C
oû
t (
en
%
d
u
PI
B
)
Ex-U.R.S.S.
0,0
1,0
2,0
3,0
4,0
5,0
6,0
7,0
8,0
9,0
0 25 50 75 100
Chine
0,0
1,0
2,0
3,0
4,0
5,0
6,0
0 25 50 75 100
Réduction des émissions (en %)
C
oû
t (
en
%
d
u
PI
B
)
Réduction des émissions (en %)
C
oû
t (
en
%
d
u
PI
B
)
2000 ◊ : MR
2020 : GREEN
2050
Sauf pour le cas de l’O.C.D.E., où les résultats sont très proches, le modèle MR surestime
systématiquement le coût, par rapport au modèle GREEN. La raison de cette différence
pourrait provenir des prix de référence utilisés dans les deux modèles pour les énergies
primaires. GREEN maintient, tout au long de la période de simulation, des différentiels de
prix régionaux très importants (liés à de fortes subventions énergétiques appliquées en Chine
et en Ex-U.R.S.S.). MR fait l’hypothèse inverse d’un rééquilibrage des prix régionaux aux
cours mondiaux, par élimination rapide des subventions énergétiques. Ainsi, les énergies
fossiles en Chine et en Ex-U.R.S.S. sont meilleur marché dans GREEN. Ceci fait que ces
104
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
régions gardent, par rapport au scénario de référence, d’importantes potentialités d’économies
d’énergie par substitution et qu’il leur est moins coûteux de limiter leurs émissions de
carbone.
L’autre résultat important qui ressort des simulations est que le coût économique d’une
même réduction décroît avec le temps. Ce mouvement s’observe très nettement sur les deux
premiers graphiques, moins sur les deux autres. La raison de cette translation réside dans
l’introduction progressive des énergies de remplacement sans carbone, qui élargit les
possibilités de substitutions interénergétiques et permet une offre d’énergie finale plus
grande, à émission de carbone identique. A terme, le coût devient linéaire, alors qu’il était
croissant à taux croissant initialement, car la technologie sans carbone supplante les énergies
conventionnelles et le coût marginal de la dépollution devient constant 7.
2.4.2.2 - Taxe sur le contenu en carbone
Les taxes sur le carbone, calculées par les modèles mondiaux, correspondent au
renchérissement nécessaire de chaque énergie pour atteindre le niveau cible de réduction des
émissions de carbone. Elles évaluent donc le coût marginal du quota d’émission considéré.
Oliveira-Martins & alli (1993) déterminent une formule simple de la taxe sur le carbone en
équilibre partiel :
( )γ
α
ε= − −⎡
⎣⎢
⎤
⎦⎥
−p R. 1 1
1
(2.5)
où
α mesure la teneur moyenne de l’énergie finale en carbone,
R est le taux de dépollution cible, en pourcentage de la pollution de référence.
7 - Ce phénomène s’observe moins franchement en ex-U.R.S.S. et en Chine car ces pays, du fait d’un prix des
énergies fossiles plus réduit, adoptent plus tardivement les technologies de remplacement sans carbone (voir le
tableau 2.2).
105
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
La taxe sur le carbone est directement proportionnelle au prix de l’énergie finale et
inversement proportionnelle à son contenu en carbone. Elle croît à taux croissant avec l’effort
de dépollution.
Il est intéressant de noter que le rapport p α représente, en fait, le prix moyen de l’émission
de carbone. Compte tenu de (2.5), plus l’émission de carbone est chère le long de la
trajectoire de politique inchangée, plus la taxe nécessaire pour réduire l’émission d’une valeur
donnée est élevée. La comparaison internationale de la tarification implicite du carbone
délivre donc une première indication sur la disparité des coûts marginaux de réduction des
émissions.
Graphique 2.5 : Prix de l’énergie finale en $/tC (données de 1985)
155
249
203
148
139
63
30
63
72
164
167
167
Etats-Unis
Japon
C.E.
Autres OCDE
Xeurs de pétrole
Chine
Ex-URSS
Inde
PECO
EDA
Brésil
Reste du monde
Source : Coppel (1994)
Le graphique 2.5, basé sur les travaux de Coppel (1994), indique une forte dispersion du
prix du carbone entre les régions du monde. La dichotomie entre certains pays de l’O.C.D.E.
et la Chine, l’ex-U.R.S.S., l’Inde et les pays d’Europe de l’est résulte essentiellement des
fiscalités de part et d’autre : de fortes taxes sur l’énergie en Europe et au Japon, contre des
mesures de subvention de la consommation énergétique dans les autres pays. Les
conséquences de ces différences sont, compte tenu de (2.5), un coût marginal de dépollution
élevé en Europe et au Japon, faible en Chine, en ex-U.R.S.S., en Inde et dans les pays
106
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123 123 |
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
d’Europe de l’est, et intermédiaire dans les autres régions du monde. Bien que cette typologie
se retrouve clairement dans les résultats des modèles mondiaux, l’utilisation de la relation
(2.5) doit être nuancée car elle néglige un certain nombre d’ajustements importants, comme la
baisse de la teneur en carbone de l’énergie finale par substitutions interénergétiques. Sur ce
point, les résultats des modèles d’équilibre général apportent plus d’informations.
Graphique 2.6 : Coûts marginaux de limitation des émissions
O.C.D.E. (hors Etats-Unis)
0
100
200
300
400
500
600
0 25 50 75 100
Réduction des émissions (en %)
Ta
xe
(e
n
$/
tC
)
Etats-Unis
0
100
200
300
400
500
600
700
0 25 50 75 100
Réduction des émissions (en %)
Ta
xe
(e
n
$/
tC
)
Ex-U.R.S.S.
0
200
400
600
800
1000
0 25 50 75 100
Réduction des émissions (en %)
Ta
xe
(e
n
$/
tC
)
Chine
0
100
200
300
400
500
600
0 25 50 75 1
Réduction des émissions (en %)
Ta
xe
(e
n
$/
tC
)
00
2000 ◊ : MR
2020 : GREEN
2050
L’observation du graphique 2.6 appelle les commentaires suivants. Le modèle GREEN
suggère que le coût marginal de la dépollution est plus faible dans les pays hors O.C.D.E. La
Chine réduit à faible coût ses émissions de dioxyde de carbone parce que ses réserves de
charbon sont abondantes : prix faible de l’énergie et fort contenu en carbone. Dans le cas de
l’Ex-U.R.S.S., le coût marginal est faible car le prix de l’énergie est réduit et les réserves de
gaz naturel y sont abondantes.
107
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124 124 |
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
Le modèle MR ne partage pas cette analyse. Il propose des évaluations du coût marginal de la
réduction des émissions, pour l’Ex-U.R.S.S. et la Chine, sensiblement plus grandes que
GREEN. La raison est une fois de plus à chercher dans le choix des prix de référence
régionaux pour les énergies fossiles.
La forme générale des courbes suggère que chaque pour-cent de dépollution supplémentaire
s’obtient plus difficilement que le précédent : il y a saturation progressive des possibilités de
substitution. Le rendement de la taxe est donc décroissant. A court terme, ce phénomène se
vérifie surtout dans les régions où le prix de l’énergie est déjà élevé : les courbes de coût
marginal des pays de l’O.C.D.E. sont beaucoup plus pentues (année 2000). Cette différence
régionale s’estompe ensuite, car les technologies de remplacement sont introduites plus tôt et
plus massivement dans ces régions ; les pays industrialisés inventent, de cette manière, de
nouvelles possibilités de substitution. Avec le modèle MR, cette modification conduit au cas
extrême pour la zone O.C.D.E. d’un coût marginal constant, quelle que soit la dépollution, en
2050. Le modèle GREEN n’aboutit pas au même résultat. Ceci résulte peut-être du fait qu’il
postule une élasticité de substitution finie entre les énergies conventionnelles et la technologie
de rechange sans carbone.
L’utilisation des technologies de rechange sans carbone impulse également une translation
des courbes de coût marginal au cours du temps. Le rendement de la taxe, en termes de
dépollution, augmente donc. Ce mouvement reste vrai avec MR pour tous les pays. Par
contre, GREEN ne prédit aucune déformation des systèmes productifs de la Chine et de l’Ex-
U.R.S.S., qui restent en effet sur la même courbe de coût marginal à toute date (la réunion des
trois courbes forme une courbe presque continue). Là encore, le prix très faible de l’énergie
dans ces deux pays retarde l’introduction des technologies de remplacement et explique ce
résultat.
2.4.3 - Critiques des modèles mondiaux
Parmi les chercheurs qui étudient le coût économique de la réduction des émissions de
carbone, certains sont pessimistes et d’autres sont optimistes. Les concepteurs des modèles
108
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125 125 |
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
globaux se classent plutôt dans la première catégorie. Ils considèrent que l’économie ne
souffre d’aucune distorsion et que toute intervention pour la dévier de son état d’équilibre est
source de coût. Ainsi, Manne (1993, p. 59) écrit-il : « si le système présent fonctionne
efficacement, les limitations des émissions de carbone impulsées par les gouvernements
conduisent nécessairement à une réduction du P.I.B. » 8.
Les optimistes, membres de l’ ‘‘école sans regret’’, croient, pour leur part, qu’une partie de la
dépollution peut être obtenue sans coût. Ils justifient leur position par l’existence supposée de
distorsions qui écartent l’économie de l’optimum. La nature de ces imperfections est tantôt
d’ordre fiscal, tantôt d’ordre informationnel. Leurs arguments peuvent être convaincants et
méritent d’être exposés.
2.4.3.1 - Distorsions fiscales
Les marchés régionaux des énergies fossiles sont très variés. Selon les régions, la
consommation énergétique peut être lourdement taxée ou subventionnée. Burniaux & alli
(1992b) ont consacré une étude à ces questions. Ils observent que les pays non-membres de
l’O.C.D.E. recourent massivement aux subventions énergétiques. Le prix des énergies fossiles
y serait ainsi abaissé de 25 pour-cent, en moyenne, par rapport au cours mondial, ce qui
équivaudrait à une subvention implicite de 48 dollars par tonne de carbone émise. En se
basant sur les calculs de GREEN (des mêmes auteurs), la suppression de ces subventions,
d’ici à l’an 2000, réduirait de plus de 20 pour-cent les émissions de carbone dans ces régions
(voir le graphique 2.6).
L’élimination des subventions énergétiques peut donc réduire sensiblement les émissions de
carbone. Seulement, avant d’en conclure que cette action doit être engagée, il faut s’interroger
sur le bien-fondé ou, au contraire, l’inutilité des subventions incriminées. C’est sur la réponse
apportée à cette question que porte le désaccord entre les tenants de l’approche sans regret et
8 - « If the current system is operating optimally, government mandated limitations on carbon emissions can
only lead to a reduction in conventionally measured GDP ».
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
les autres. La position de Oliveira-Martins & alli, dans le modèle GREEN, est très claire,
puisqu’ils maintiennent la structure des prix régionaux au niveau de 1990 dans leurs
simulations (cela ne reflète pas nécessairement le sentiment réel des concepteurs du modèle
GREEN sur le sujet mais peut s’expliquer par le caractère arbitraire de toute autre hypothèse).
L’opinion opposée, consistant à affirmer que toutes les subventions doivent être supprimées,
n’est pas raisonnable, mais on peut penser qu’une partie de ces incitations n’a pas de réelle
justification économique. Cette question devrait donc être approfondie.
Outre le problème de la tarification de l’énergie, certains chercheurs pensent que la
perspective d’une politique de réduction des émissions de carbone et les recettes fiscales qui
l’accompagnent sont l’occasion de réformer en profondeur les régimes fiscaux existants. Une
taxe sur les émissions de carbone dégagerait une recette fiscale importante, qui pourrait se
substituer à d’autres formes d’imposition reconnues désincitatives. Ainsi, dans une étude
économétrique, « Jorgenson et Yun (1990) estiment que, pour un dollar de recettes fiscales
collecté aux Etats-Unis, ces effets secondaires néfastes sont la cause d’une perte économique
d’environ 38 cents » (Cline, 1994). Pearce (1991) parle de ‘‘double dividende’’ de la taxe sur
le carbone : d’une part, elle corrige l’externalité climatique ; d’autre part, elle trouve un autre
emploi bénéfique dans sa réaffectation ou par sa simple existence.
L’idée de double dividende a trouvé de nombreux emplois dans la littérature. Zagamé (1994)
analyse les modalités d’une affectation de l’écotaxe européenne (taxe mixte 50/50 sur le
carbone et l’énergie) à la baisse des charges patronales. Les résultats de plusieurs modèles
économétriques indiquent qu’une telle taxe améliorerait la situation de l’emploi et la
croissance économique en Europe (sauf dans les pays producteurs d’énergie) à moyen terme.
Par contre, cet effet bénéfique serait compensé, à long terme, par des tensions inflationnistes.
Brinner & alli (1991) réalisent une étude semblable pour le cas des Etats-Unis. Ils montrent
que la redistribution des recettes fiscales dégagées par une taxe sur les carburants en faveur
d’une baisse des charges patronales limite fortement le coût économique de la mesure à court
terme, avant de produire un effet favorable à long terme.
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
Martin (1994) suggère qu’une taxe sur le carbone aurait pour effet de rééquilibrer la
concurrence entre le transport routier et les autres moyens de transport. Il affirme que
l’automobile en milieu urbain et le transport routier de marchandises sont implicitement
subventionnés, si l’on fait la somme de tous les effets externes qu’ils engendrent :
infrastructures, congestion, accidents, atteintes à l’environnement (bruit et pollutions)....
En dépassant le simple cadre des transports, l’énergie est la principale cause d’un bon nombre
des problèmes environnementaux dont souffrent les sociétés modernes : les pluies acides, qui
détruisent les forêts continentales européennes et américaines ; l’oxyde de carbone, l’oxyde
d’azote, certains composés organiques volatiles et le plomb, dangereux pour la santé. Toutes
ces externalités laissent à penser que la taxation du carbone, donc des énergies fossiles,
s’accompagne d’un double dividende. Boyd & alli (1995) en donnent une excellente
illustration. Ils construisent un modèle d’équilibre général statique (14 secteurs, 6 agents
économiques représentatifs différenciés par leur revenu, 3 facteurs de production) calibré sur
l’économie américaine. Ils évaluent les dommages environnementaux liés à l’usage de
l’énergie, à l’exclusion de l’accroissement de l’effet de serre : plomb, particules en
suspension, oxyde de souffre, ozone et perte de visibilité. Partant de là, ils déterminent la taxe
sur le carbone qui permet de maximiser le bien-être global, solde entre les avantages et les
coûts de la dépollution. Selon leurs calculs, la réduction des émissions de carbone
correspondante serait comprise entre 5 et 38 pour-cent (plusieurs hypothèses sont testées
concernant l’évaluation des dommages et les possibilités de substitutions interénergétiques).
Une acception plus restrictive du concept de double dividende est la notion de ‘‘politique sans
regret’’. Une décision est qualifiée de sans regret lorsqu’elle procure à l’économie un
avantage net positif ou nul, tout en réduisant les émissions de gaz à effet de serre (Treadwell
& alli, 1994), les avantages en termes de climat n’étant pas comptabilisés. Boyd & alli (1995)
(voir ci-dessus) suggèrent donc de prolonger la politique d’environnement jusqu’au point où
les coûts de la dépollution sont juste compensés par les avantages présents, indépendamment
de l’effet de serre. Si une telle politique était menée, les taux de réduction des émissions de
carbone atteindraient, selon leurs évaluations, entre 8 et 64 pour-cent. Ce faisant, on mènerait
une politique non coûteuse tout en réduisant l’effet de serre.
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
2.4.3.2 - Problèmes d’information et approche technico-économique
De nombreuses études, rapportées par Williams (1990), Swisher & Johnson (1992) et
Cline (1994), font état de la possibilité de réduire sensiblement la consommation énergétique
sans perte de P.I.B. Williams (1987) montre que l’économie américaine pourrait, dans le
même temps, réduire sa consommation d’énergie primaire de 30 pour-cent entre 1980 et 2020
et multiplier tout de même son P.I.B. par 2,7 (ce qui correspond à un taux de croissance
moyen de 2,5 pour-cent sur la période). Certaines études technico-économiques appliquées au
coût de la réduction des émissions de carbone (Swisher, 1992 ; Jackson, 1991 ; Block, 1991)
concluent que les pays industriels pourraient réduire leurs émissions de gaz carbonique de 15
à 25 %, par rapport au niveau de 1990, pour un coût nul ou faible (Johansson & Swisher,
1994). Dans le même ordre d’idée, la National Academy of Science (1991) a déclaré possible
une baisse de « 10 à 40 % des émissions de gaz à effet de serre aux Etats-Unis par rapport à
1990 à faibles coûts, voire en réalisant des économies nettes » (Cline, 1994 , p. 103). La liste
pourrait être rallongée mais cela deviendrait fastidieux.
Les analyses technico-économiques mettent au point des scénarios de planification
énergétique. Les étapes nécessaires à cette prospective sont les suivantes (Johansson &
Swisher, 1994) : la demande présente et future de services énergétiques (chauffage, éclairage,
transport...) est d’abord évaluée ; puis il faut dresser l’inventaire de toutes les technologies
disponibles capables de satisfaire ses besoins ; les conditions d’offre des différentes
technologies sont ensuite étudiées ; pour finir, l’étude technico-économique recherche le
meilleur scénario, alliant faisabilité économique et politique, et garantissant un coût
environnemental le plus faible possible, grâce à l’application des technologies ayant le
meilleur rendement. Elle planifie les mesures d’accompagnement rendant possible sa
réalisation : des réglementations, des programmes d’information et des modification de la
fiscalité...
L’idée d’une limitation gratuite des émissions de carbone peut séduire ; mais, comment peut-
on justifier que le marché ne s’oriente pas automatiquement vers la solution technico-
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
économique ? Les problèmes d’information et les coûts de transaction, liés à l’inertie des
comportements, sont peut-être la cause de cette apparente inefficacité du marché. A coup sûr,
les agents économiques ne disposent pas des mêmes informations que les ingénieurs à
l’origine des études mentionnées. Même s’ils souhaitaient réunir ces données pour prendre la
décision la plus sage, il est fort probable que le temps perdu et les coûts engagés les
dissuaderaient de le faire. Tout ceci explique l’apparente incohérence des choix individuels et
incite à accréditer l’approche technico-économique jusqu’à un certain point seulement.
2.5 - Conclusion
Les modèles mondiaux n’étudient pas le rapport coût / avantage des politiques
climatiques. Leur objectif se limite à l’évaluation du coût ‘‘brut’’ des mesures de limitation
des émissions de carbone, indépendamment des effets bénéfiques en termes de climat.
Pourtant, puisqu’il ne saurait être question d’engager le bien-être présent sans contreparties
futures, ils n’aideront à planifier une politique climatique qu’à la condition d’être couplés à
une évaluation des dommages évités. Dans une nouvelle version du modèle MR, Manne &
alli (1995) vont d’ailleurs dans ce sens en mesurant le coût net de la politique climatique.
Grâce à cette démarche, il devient possible d’apprécier quelles réductions des émissions de
carbone rechercher pour équilibrer les coûts et les avantages.
Peut-être parce que cela exige une résolution ‘‘forward’’ techniquement plus coûteuse, liée à
l’hypothèse indispensable d’anticipation parfaite des dommages climatiques, peut-être pour
d’autres raisons, en tout cas, aucun modèle d’équilibre général appliqué n’explore la question
de la politique optimale du climat. Seules des études beaucoup plus agrégées l’ont traitée
(Cline, 1992 ; Falk & Mendelsohn, 1993 ; Nordhaus, 1992a, 1993 et 1996 ; Peck et Teisberg,
1992 ; Tahvonen, 1994 ; Williams, 1995). Malheureusement, en contrepartie, ces modèles
offrent une description nettement moins fouillée de la formation du coût de dépollution.
La littérature économique pose donc un dilemme puisqu’elle privilégie, en termes de
qualité de la représentation des mécanismes économiques, soit le coût de la réduction de
émissions, soit les avantages de la lutte contre l’effet de serre. Les concepteurs des modèles
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
destinés à évaluer la politique optimale du climat résolvent ce problème par un palliatif :
puisqu’une description détaillée de la formation du coût de dépollution est difficilement
conciliable avec le calcul du dommage marginal de l’effet de serre, ils enrichissent leur
analyse des enseignements des modèles d’équilibre général appliqué en ajustant des fonctions
de coût à partir des résultats de ces derniers. La présentation de leurs propositions construit la
conclusion de ce chapitre. D’une part, elle rappelle les propriétés caractéristiques du coût de
la réduction des émissions de carbone. D’autre part, elle montre de quelle manière certains
auteurs réconcilient les évaluations agrégées et technico-économiques.
Graphique 2.7 :Exemples de fonctions de coût ajustées
0,0
0,5
1,0
1,5
0 10 20 30 40 50 6
Réduction des émissions (en %)
C
oû
t (
en
%
d
u
P.
I.B
.)
0
2000 : Nordhaus
2020 Δ : Tahvonen
2050
Les fonctions de coût employées par Cline (1994), Nordhaus (1992a) et (1993),
Nordhaus & Yang (1996) et Tahvonen (1994) sont de la forme . Les
paramètres et
( ) ( ) ( ) ( ) ( )CT t Y t a t R t b t= . .
( )a t ( )b t sont ajustés à partir des résultats des modèles d’équilibre général
appliqué. Leur évolution exogène rend compte implicitement des modifications de la
technique de production sans qu’il soit besoin de les modéliser : les substitutions entre
l’énergie et les autres facteurs, les substitutions interénergétiques et l’introduction des
technologies de remplacement sans carbone.
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
La fonction de coût de Tahvonen, représentée dans le graphique 2.7, est construite à partir des
simulations du modèle de Manne (1993) pour la région O.C.D.E. (hors Etats-Unis). Elle
figure bien les propriétés caractéristiques des évaluations des modèles. A court et moyen
termes, le coût croît à taux croissant avec la réduction des émissions, du fait d’une offre
d’énergies ‘‘propres’’ bornée (l’électricité et les énergies fossiles à faible teneur en carbone)
et de la substituabilité imparfaite entre l’énergie finale et les autres facteurs. Ensuite, à mesure
que la technologie de substitution sans carbone devient opérationnelle et rentable, le coût
d’une même contrainte d’émission diminue (graphiquement, on constate une translation vers
le bas des courbes de coût). Alors, le coût croît quasi linéairement avec la baisse des
émissions car la back-stop est produite en quantités potentiellement très grandes à un coût
marginal constant.
En opposition avec Tahvonen, Nordhaus postule que les paramètres et de la
fonction de coût ne varient pas au cours du temps. Dans le graphique 2.7, ce parti pris
implique que la courbe reste identique à toute date. Il revient en fait à supposer qu’il n’y aura
aucune modification notable des techniques de production.
( )a t ( )b t
L’opposition méthodologique susdite dévoile les limites du paramétrage des fonctions
de coût à partir des modèles d’équilibre général. Implicitement, cette opération revient à
supposer que les choix technologiques sont autonomes : ils apparaissent aux dates
déterminées par les modèles d’équilibre général, quel que soit le scénario testé. Or, dans les
faits, ces décisions résultent de la réunion d’un ensemble de circonstances (le quota
d’émission imposé, le prix des énergies fossiles...) et n’auraient pas lieu autrement. Ceci
suggère l’existence d’un domaine de validité des fonctions ajustées : elles sont une
approximation acceptable à la condition que les situations décrites soient proches des
scénarios des modèles d’équilibre général.
Un exemple concret permet d’éclaircir ce point. Tahvonen indique que le coût devient quasi
linéaire à partir de 2060, date à laquelle la technologie de remplacement sans carbone est soi-
disant rentable. Cette situation caractérise effectivement le modèle MR lorsque la dépollution
cible dépasse 50 pour-cent. Cependant, il ne s’applique certainement pas pour les premières
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Coût de la lutte contre l’effet de serre
unités de dépollution, i.e. lorsque le coût marginal de la dépollution par les autres méthodes
est inférieur au prix seuil d’utilisation de la back-stop. De fait, Tahvonen calcule une chute
brutale des émissions dans certaines régions du monde, à partir de 2070, alors que les taux de
dépollution antérieurs sont inférieurs à 10 pour-cent, donc insuffisants pour justifier le recours
à la technologie de remplacement.
Sachant que, selon ses calculs, la politique optimale nécessite, au plus, un taux de dépollution
de 15 pour-cent, l’hypothèse de Nordhaus paraît donc plus appropriée. Par contre, à l’inverse,
elle est déconseillée pour étudier des mesures plus contraignantes. En effet, dans ces cas, des
taux de dépollution plus grands impulseraient des ajustements économiques qui ne sont pas
pris en compte par la fonction de coût ‘‘figée’’ de Nordhaus.
Les deux fonctions précédentes laissent de côté la controverse opposant les partisans
d’une évaluation agrégée à ceux qui lui préfèrent une approche technico-économique. Cline
construit une ‘‘équation de coût synthétique’’, qui combine à la fois les deux méthodes. Il
suppose que les coûts de la réduction des émissions de carbone sont nuls tant que le taux de
dépollution reste inférieur à 22 pour-cent du scénario de politique inchangée. Selon lui, la
taxe nécessaire pour rejoindre ce niveau libérerait les agents économiques des coûts de
transaction pesant sur leurs choix technologiques et énergétiques, et permettrait des gains
d’efficience importants. Par contre, toute réduction supplémentaire des émissions serait
coûteuse, mais ce coût diminuerait avec le temps à partir de 2025, date de la mise sur le
marché des technologies de remplacement. Pour toute réduction de plus de 22 pour-cent, on
aurait ainsi :
• jusqu’en 2025 ; CT Y R= 0 0678, . .
• après. ( )CT t Y R= −0 0678 0 00039, , . . .
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Annexes / Chapitre 2
Annexe 2.1 - Base de données des modèles mondiaux
Nous résumons dans les tableaux suivants les données utilisées pour calibrer les modèles.
Tableau 1 : Hypothèses retenues pour la population (en millions d’habitants)
Pays 1990 2000 2025 2050 2075 2100
Etats-Unis 250 267 289 285 283 284
OCDE (hors EU) 582 617 649 643 640 643
Ex-URSS 289 306 337 351 361 367
Chine 1116 1285 1576 1703 1750 1817
Reste du monde 3024 3701 5339 6546 7143 7310
Total 5261 6176 8190 9528 10177 10421
Souce : EMF n°12
Tableau 2 : Hypothèses retenues pour la croissance économique
PIB 1990 Taux de croissance moyens
Pays milliards de $ 1990-2000 2000-2025 2025-2050 2050-2075 2050-2100 1990-2100
Etats-Unis 5600 2,50 2,00 1,50 1,25 1,00 1,53
OCDE (hors EU) 10200 2,70 2,00 1,50 1,25 1,00 1,55
Ex-URSS 2680 3,60 3,10 2,35 2,10 1,85 2,46
Chine 1100 4,50 4,00 3,50 3,25 3,00 3,53
Reste du monde 3340 3,75 3,30 2,80 2,55 2,30 2,83
Total 22920 3,01 2,50 2,08 1,96 1,85 2,18
Souce : EMF n°12
Annexe 2.2 - Démonstration de (2.4)
Nous partons de la relation de Oliveira-Martins & alli (1993), qui définit la taxe γ
prélevée par tonne de carbone nécessaire pour baisser les émissions de pour-cent: R
( )γ
α
ε= − −⎡
⎣⎢
⎤
⎦⎥
−p R. 1 1
1
où α mesure la teneur moyenne de l’énergie finale en
carbone.
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Annexes / Chapitre 2
L’expression précédente implique qu’il faut augmenter le prix de l’énergie finale de α γ.
unités pour respecter le quota d’émission. Le prix de l’énergie vaut donc
( )p p R+ = − −α γ ε. . 1 1 . En introduisant cette valeur dans (2.3), on établit la relation (2.4).
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Dommages climatiques
Chapitre 3
Dommages climatiques
Le coût économique engagé pour préserver le climat varie très fortement avec l’objectif
environnemental fixé. A court terme, la dépendance des systèmes de production vis-à-vis des
énergies fossiles rend la réduction des émissions de gaz à effet de serre rapidement très
coûteuse. Les gouvernements ne s’engageront pas dans cette voie tant qu’ils ne connaîtront
pas, d’une part, la nature et l’ampleur des dommages physiques auxquels leur attentisme les
expose et, d’autre part, l’évaluation monétaire de ces conséquences. A moins que des critères
extra-économiques n’interfèrent dans leur jugement, ils voudront, au pire, équilibrer les
avantages et les coûts des actions entreprises pour ralentir l’effet de serre. L’évaluation des
avantages d’une politique du climat, c’est-à-dire la quantification des dommages
environnementaux qu’elle permet d’éviter, répond à cette attente.
Dans ce chapitre, nous exposerons les méthodes d’évaluation des dommages climatiques.
Dans la première section, nous détaillerons les deux étapes de l’élaboration d’une fonction de
dommage climatique. La première consiste à estimer les conséquences d’un doublement de la
concentration atmosphérique d’équivalent dioxyde de carbone. Les résultats de cinq études,
menées par Nordhaus (1991a), Cline (1992), Fankhauser (1992), Titus (1992) et Tol (1994),
seront présentés. Au cours de l’étape suivante, une fonction de dommage, spécifiée
arbitrairement, est calibrée sur les estimations précédentes. Sans remettre en question l’utilité
des fonctions déterminées, nous nous permettrons, malgré tout, d’énoncer un certain nombre
de critiques.
Laissant de côté ce débat, nous avancerons en deux étapes vers la quantification de la
politique optimale du climat. Nous étudierons d’abord la notion de dommage par tonne
d’équivalent carbone. Celle-ci ne nécessite pas la construction d’un modèle compliqué et
donne une idée approximative de la taxe optimale sur les émissions. Ensuite, nous
analyserons les modèles de contrôle optimal appliqués de Nordhaus (1992a) et (1993), Peck
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Dommages climatiques
& Teisberg (1992), Falk & Mendelsohn (1993) et Tahvonen (1994). Nous ferons le parallèle
avec les chapitres précédents, pour tester la cohérence des résultats obtenus et pour mettre un
point final à la question de l’interaction entre l’épuisement des énergies fossiles et le climat,
soulevée dans le chapitre 1.
3.1 - Construction d’une fonction de dommage climatique
Les dommages physiques dépendent de l’état du climat. A priori, plus le climat se
réchauffe, plus l’environnement se dégrade. Toutefois, cette relation n’est pas nécessairement
continue et les scientifiques insistent bien sur ce point. L’ampleur des dommages peut croître
par paliers, avec des effets de seuil dus à la destruction brutale de certains écosystèmes et au
‘‘dérèglement’’ du climat. Pourtant conscients de cette éventualité, mais confrontés à
l’absence de prédiction des risques réels et des échéances d’événements majeurs de ce type,
les économistes font l’hypothèse d’une relation continue entre le réchauffement et les
dommages physiques.
Les dommages économiques seraient donc proportionnels aux modifications climatiques. Ils
dépendent aussi de quantités d’autres facteurs. Si le réchauffement réduit la production, les
pertes subies dépendent des perspectives de croissance économique. Si le secteur primaire est
plus touché que les autres secteurs, son importance présente et future influence les dommages
subis. Si les individus sont plus sensibles à la détérioration de l’environnement quand leurs
besoins vitaux sont satisfaits, les dommages climatiques perçus augmentent avec leur niveau
de vie. La liste est certainement beaucoup plus longue et montre la difficulté de l’évaluation
des dommages climatiques.
Pour contourner ces problèmes, les économistes énoncent implicitement deux hypothèses
simplificatrices : pour un niveau de réchauffement donné, le dommage est une fonction
linéaire du P.I.B. ; pour un niveau de P.I.B. donné, le dommage est une fonction linéaire,
quadratique ou cubique de l’élévation de la température moyenne au-dessus de sa valeur
naturelle.
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Dommages climatiques
La méthode finalement retenue s’avère alors très simple. Il suffit de connaître le dommage en
un point unique, pour des niveaux de P.I.B. et de température choisis convenablement, pour
extrapoler une fonction de dommage applicable à toute date.
3.1.1 - Dommages du doublement de la concentration d’équivalent CO2
Faisant écho au scénario scientifique du doublement de la concentration atmosphérique
d’équivalent carbone 1, les économistes étudient généralement un accroissement de la
température variant de 1,5 à 4,5 °C. Les projections moyennes prédisent que cette situation
devrait être rejointe au milieu du vingt-deuxième siècle.
3.1.1.1 - Méthode
Nordhaus (1991a) est le premier à proposer une quantification complète des effets d’un
doublement de la concentration d’équivalent carbone. Bien que très imparfaite, cette première
tentative est notable et a inspiré toutes les études ultérieures. La méthode que Nordhaus utilise
est dite ‘‘méthode par recensement’’. Elle consiste à comptabiliser, poste après poste, les
effets économiques attendus, pour une amplitude donnée du réchauffement global, en
distinguant les secteurs sensibles de l’économie.
Manne & alli (1995) formalisent la méthode initiée par Nordhaus sous la forme d’un schéma,
que nous reprenons ici (voir le schéma 1.1). Ils distinguent les dommages climatiques
représentés sur un marché de ceux qui ne font pas l’objet d’un échange marchand. Cette
typologie découle, d’une part, de l’effet contre-productif du réchauffement, qui implique une
baisse du bien-être économique par diminution de la consommation, et, d’autre part, de la
perte directe de bien-être ressentie par les agents économiques suite à toute dégradation de
l’environnement. Elle s’explique également par des raisons techniques. Alors que les
nuisances représentées sur un marché sont facilement évaluées, grâce aux informations
contenues dans le prix, les autres ne sont pas directement observables. Ces dernières se
1 - Voir le chapitre préliminaire.
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Dommages climatiques
mesurent par des méthodes d’évaluation indirectes (marchés de substitution, prix hédonistes
et évaluation contingente : voir Cropper & Oates (1992), Desaigues & Point (1990a) et
Faucheux & Noël (1995)).
Schéma 3.1 : Recensement et classification des dommages de l’effet de serre
Dommages
climatiques
Agriculture
Forêts
Pêche
Secteur
primaire
Energie
Eau
Construction
Transport
Tourisme
Autres
secteurs
Pertes de
capital
Pertes de
terres arides
Pertes de
proprié té s
Tempête
Sécheresse
Ouragan
Catastrophes
naturelles
Dommages
repré senté s
sur un marché
Pertes de
terres humides
Pertes d'autres
espè ces
Biodiversité
Mortalité
Pollution de l'air
Migration
Bien-ê tre
Tempête
Sécheresse
Ouragan
Catastrophes
naturelles
Dommages
non représentés
sur un marché
Source : Manne et alli (1995)
3.1.1.2 - Extrapolations à partir de l'économie américaine
Les premières études (Nordhaus, 1991a ; Cline, 1992 ; Fankhauser, 1992 ; Titus, 1992)
portent sur l'économie américaine uniquement. Dans ces travaux, les auteurs se demandent
quelles pertes subiraient l’économie américaine, dans sa taille et sa structure actuelles, si la
température s’élevait instantanément de 2,5 degrés Celsius. Cette base leur permet ensuite
d’extrapoler le coût économique du réchauffement au moment où il se produira.
Cette méthode exige quelques commentaires. Chaque poste est mesuré en fonction des
échelles de valeurs présentes, en dollars de l’année de référence. L’évaluation obtenue,
ramenée en pourcentage du P.I.B., définit un taux de dommage qui permet de déduire le
dommage imputable à ce même poste pour le niveau de production futur. Cette extrapolation
est valable à deux conditions 2 : la structure sectorielle de l’économie ne doit pas varier ; le
2 - Une autre condition serait que les prix relatifs des différents biens produits restent constants. Elle est
satisfaite si la première condition est remplie et si les préférences ne changent pas.
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Dommages climatiques
dommage subi par une branche doit être proportionnel à sa production. Ces deux hypothèses
ne seront pas forcément vérifiées :
• historiquement, la structure sectorielle des économies ne se perpétue pas ;
• il y a lieu de croire que quelques dommages non représentés sur un marché ne sont pas
linéairement proportionnels à la production (biodiversité, valeurs d’agrément) ;
• les lois d’Engel conduisent à imaginer que les dépenses de santé et de loisir augmenteront
plus rapidement que les revenus, au détriment des dépenses d’alimentation. Comme tous
ces secteurs sont très sensibles à la qualité de l’environnement, il est difficile de savoir si
la poursuite de la croissance réduira la vulnérabilité des économies à l’effet de serre.
Ces critiques amènent à conclure que ces estimations ne sont pas fiables. Conscient de
ce problème, Nordhaus (1991a) suggère de considérer les résultats obtenus sur l’économie
américaine comme représentatifs des dommages mondiaux à l’instant du doublement de la
concentration en carbone. Il étaye son argumentation sur la croyance selon laquelle la
structure sectorielle actuelle de l’économie américaine préfigure l'économie mondiale à
l’instant considéré. Si l’on accepte cette hypothèse spéculative, le dommage par unité de
P.I.B. que subiraient aujourd'hui les Etats-Unis, si la température moyenne était supérieure de
2,5 degrés Celsius, permet d’extrapoler les pertes mondiales futures par unité de P.I.B.
Cette proposition appelle une seconde remarque. L’extrapolation à partir de l’économie
américaine du coût mondial du réchauffement suppose implicitement que l’exposition du
territoire américain au réchauffement est représentative du dommage mondial moyen
(puisqu’on sait que les dommages physiques ne sont pas géographiquement uniformes). Rien
ne permet de l’affirmer.
Bien que pratique, car elle permet d’échapper à une analyse désagrégée de l’économie et des
dommages, l’idée de Nordhaus repose sur un ensemble de suppositions plutôt hasardeuses.
Nous présentons malgré cela les résultats obtenus par Cline (1992), Fankhauser (1992) et
Titus (1992). Nous rappelons qu’ils reflètent, avant tout, le coût que les Etats-Unis auraient à
subir si la température s’élevait brusquement dans les proportions indiquées dans le tableau
3.1.
122
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140 140 |
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Dommages climatiques
Tableau 3.1 : Dommages encourus par les Etats-Unis (Milliards de $ et % du P.I.B.)
Doublement de la concentration de
carbone équivalent
A très long
terme
Auteur
Poste
Cline
(2,5°C)
Fankhauser
(2,5°C)
Titus
(4°C)
Cline
(10°C)
Agriculture 17,5 7,4 1,2 95,0
Recul des forêts 3,3 - 1,8 43,6 7,0
Disparition d'espèces 4,0 + A 6,4 16 + B
Elévation du niveau des mers 7,0 10,7 5,7 35,0
Electricité 11,2 6,8 5,6 64,1
Chauffage non électrique - 1,3 -4,0
Qualité de la vie + C + D
Mortalité 5,8 16,6 9,4 33,0
Morbidité + E + F
Migrations 0,5 0,5 2,8
Ouragans 0,8 0,2 6,4
Secteur de la construction +/- G +/- H
Activités de loisirs 1,7 4,0
Eau : approvisionnement et pollution. 7,0 13,7 11,4 56,0
Infrastructures urbaines 0,1 0,6
Pollution atmosphérique 3,5 + K 6,4 27,2 19,8 + L
Climatisation des véhicules 2,5
Total 61,1+A+C+
E+G+K
66,9 139,2 335,7+B+D+
F+H+L
Pourcentage du P.I.B. 1,1 1,4 2,5 6,1
Année de référence 1990 1988 1990 1990
Source : Cline (1994)
Les principaux postes sont l’agriculture, l’électricité, l’eau, l’élévation du niveau des océans,
la mortalité et la disparition d’espèces. Les comptes marqués d’une lettre sont potentiellement
sous-estimés. Ils appartiennent systématiquement à la catégorie des dommages non
représentés sur un marché.
Même si les ordres de grandeurs sont finalement comparables d’une étude à l’autre,
d’importantes différences par postes peuvent être déplorées, notamment pour l’agriculture, les
forêts, la mortalité, l’eau et la pollution atmosphérique. Cline (1994) affirme que Fankhauser
et Titus sous-estiment les dommages agricoles en accordant trop d’importance à l’effet
fertilisant du carbone. Il avance deux arguments : d’une part, il rappelle que les estimations
123
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Dommages climatiques
sont basées sur l’hypothèse d’un doublement de la concentration d’équivalent dioxyde de
carbone, les autres gaz à effet de serre étant exprimés dans une unité commune ; d’autre part,
la fertilisation par le dioxyde de carbone serait moins importante à ciel ouvert qu’en
laboratoire.
Dans son estimation, Titus tient compte de la valeur récréative des forêts, pas les autres. Cette
différence, qui montre encore l’importance des dommages touchant les biens non marchands,
explique l’écart très important des estimations des nuisances forestières.
La variabilité des estimations concernant le poste mortalité provient des évaluations utilisées
pour la valeur d’une vie statistique : 0,6 million de dollars pour Cline ; 1,5 millions de dollars
pour Fankhauser. Une simple règle de trois suffit alors pour se rendre compte de la proximité
des deux estimations, après harmonisation.
L’observation de ces divergences prouve que des progrès importants restent à faire. Pearce et
Fankhauser (1994) expliquent qu’elles sont autant imputables aux incertitudes qui entachent
les connaissances scientifiques qu’aux difficultés de l'évaluation monétaire (valeur d’une
espèce animale, valeur d'une vie statistique, valeur récréative d’un environnement préservé...)
et insistent sur le fait que des recherches supplémentaires dans les deux disciplines sont
primordiales.
Cline (1991) met en garde contre l’utilisation systématique du scénario du doublement de la
concentration. Il rappelle qu'il ne constitue pas un équilibre stationnaire de l'effet de serre
puisque la projection des tendances présentes et les réserves d'énergies fossiles connues
laissent penser que cet ordre de grandeur sera largement dépassé. Pour ces raisons, il réalise
une estimation des dommages pour un réchauffement de 10 degrés Celsius (dernière colonne
du tableau), où 6 pour-cent du P.I.B. seraient perdus (environ 20 pour-cent pour l'hypothèse
forte).
124
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Dommages climatiques
3.1.1.3 - Evaluations régionales
L’extrapolation au monde des évaluations basées sur l'économie américaine a très vite
été rejetée par de nombreux auteurs. La mesure du dommage obtenue rend éventuellement
compte du dommage mondial moyen, pas des inégalités régionales qui pourraient exister. Les
évaluations régionales ont une double utilité pour l’analyse économique de l’effet de serre.
D’abord, elles sont indispensables à la construction des modèles désagrégés, comme ceux de
Manne & alli (1995), Nordhaus & Yang (1996) et Tahvonen (1994). Ensuite, elles permettent
de se forger une opinion sur les motivations des pays à agir contre l’effet de serre. Elles
pourront donc nous servir ultérieurement pour évaluer les chances de coopération et les
conditions d’adhésion des pays à une politique internationale du climat.
La plupart des chercheurs ont d’emblée défendu l’idée d’une inégalité des pays devant les
dommages climatiques. D’une part, le réchauffement n’est pas uniforme et croît à mesure que
l’on s’éloigne de l’équateur. D’autre part, les économies sont plus ou moins sensibles aux
variations climatiques. L’exemple ci-dessous est assez convaincant.
Dans une économie, considérons un secteur n°1, très sensible au réchauffement (le secteur
primaire, par exemple), et un secteur n°2, moins vulnérable (agrégat regroupant les autres
secteurs). Soit w et 1−w leurs coefficients budgétaires respectifs. Soit a et les parts de
l’output perdues par le secteur n°1 et n°2, respectivement, par suite des bouleversements
climatiques ; on suppose que . On montre aisément que le dommage global par unité
de P.I.B. est égal à . Puisque a , il croît avec le coefficient
budgétaire du secteur n°1. Ainsi, deux pays voisins, soumis aux mêmes changements
climatiques, subiront un dommage monétaire différent si la structure sectorielle de leurs
économies diffère. Le pays le plus spécialisé dans le secteur sensible souffrira plus durement.
Dans le tableau 3.1, Cline estime la perte du secteur agricole américain à 10 pour-cent de sa
valeur ajoutée ; comme il représente seulement 3 % de la production domestique, il produit un
dommage correspondant à 0,3 pour-cent du P.I.B. Or, dans de nombreux pays en
développement, ce secteur représente environ 40 pour-cent de la production ; si l’on applique
1 a2
a a1 > 2
2( )a a a a w= + −2 1 2 . a1 >
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Dommages climatiques
le même taux de dommage que pour les Etats-Unis, une perte de 4 pour-cent du P.I.B. est
subie.
D’autres arguments, en plus du précédent, incitent à anticiper des nuisances seront plus
conséquentes dans les pays en développement (Grubb, 1992). Principalement, les problèmes
sanitaires, l’approvisionnement en eau et la perte de terres humides expliqueraient ces
différences. Fankhauser (1992) réalise une évaluation pour différentes régions. Cette étude est
soumise aux mêmes critiques que les précédentes, puisqu’elle utilise le dommage par unité de
P.I.B. d’aujourd’hui pour déduire l’incidence future.
Tableau 3.2 : Dommages régionaux (Milliards de $ et % du P.I.B.)
Région
Poste
C.E. E.-U. Ex-
URSS
Chine NON-
OCDE
OCDE Monde
Défense des côtes 0,1 0,2 0,0 0,0 0,9 0,5 1,4
Pertes en terres sèches 0,3 2,1 1,2 0,0 5,9 8,1 14,0
Pertes en terres humides 4,9 5,6 1,2 0,6 15,7 15,9 31,6
Pertes d'espèces biologiques 7,1 6,4 2,6 1,5 10,9 17,3 28,2
Agriculture 9,7 7,4 6,2 7,8 16,0 23,1 39,1
Sylviculture -4,1 c -1,8 -2,9 1,1 -0,8 -10,0 -10,8
Pêcherie a
Energie
Eau 14,1 13,7 3,0 1,6 11,9 34,8 46,7
Autres secteurs ? ? ? ? ? ? ?
Aménités 7,0 6,8 -0,7 0,7 3,0 20,1 23,1
Mortalité 22,0 16,6 3,9 7,3 32,0 57,3 89,3
Pollution atmosphérique 3,5 6,4 2,1 0,2 3,5 11,9 15,4
Migration 1,0 0,5 0,2 0,6 2,3 2,0 4,3
Risques naturels b 0,0 0,2 0,0 0,2 2,1 1,1 3,2
Total 65,6 64,1 16,8 21,6 103,1 182,1 285,2
% du P.I.B. 1,5 1,3 0,7 6,1 1,8 1,4 1,5
Notes :
a) La perte pêcherie est comprise dans la perte de terres humides.
b) Ouragans seulement.
c) Les nombres négatifs indiquent des avantages.
Source : Fankhauser (1992)
Avant de commenter les particularités régionales, notons que les résultats de Fankhauser ne
permettent pas de rejeter la proposition de Nordhaus. Il s’avère effectivement que les Etats-
Unis peuvent être vus, approximativement, comme représentatifs de la sensibilité mondiale au
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Dommages climatiques
réchauffement global. Ce pays est supposé subir une perte égale à 1,3 pour-cent de son P.I.B.,
proche du dommage total, évalué à 1,5 pour-cent du P.I.B. mondial.
En valeur absolue, du fait de l’écart de développement entre les deux régions, la zone
O.C.D.E. subirait le plus gros dommage : 182,1 milliards de dollars, contre 103,1 milliards de
dollars pour le reste du monde. Par contre, en pourcentage du P.I.B., le classement est
renversé et les pays hors O.C.D.E. perdent le plus. Si l’on exclut l'ex-U.R.S.S., qui est
relativement épargnée, les nuisances atteignent 2,8 pour-cent du P.I.B. des pays non-membres
de l'O.C.D.E. restants.
D’autres études traitent de l’évaluation des dommages régionaux. Tol (1994) utilise une
ventilation géographique plus précise. Il confirme globalement les résultats de Fankhauser
mais son découpage géographique met en évidence de très fortes disparités régionales.
Nordhaus & Yang (1996) utilisent une répartition relativement plus égalitaire des dommages.
L’ensemble de ces informations est réuni dans le graphique 3.1. Il prouve que l’étude des
dommages climatiques est loin d’être un thème de recherche stabilisé et que des progrès
restent à faire.
Graphique 3.1 : Evaluations des dommages régionaux : Comparaison
4,1%
4,3%
8,7%
8,6%
5,2%
-0,3%
2,8%
1,3%
1,5%
2,8%
2,8%
2,8%
2,8%
6,1%
0,7%
1,4%
1,5%
1,3%
2,1%
2,1%
2,1%
2,1%
1,5%
0,9%
1,2%
1,2%
1,1%
Moyen-Orient
Amérique latine
Afrique
Asie sud / sud-est
Asie éco. planifiée
Eur. orient. / Ex-
URSS
OCDE Pacifique
OCDE Europe
OCDE Amér. Nord Nordhaus (a)
Fankhauser (b)
Tol
127
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Dommages climatiques
(a) : Nordhaus & Yang considèrent six régions : E.-U. ; C.E. ; Japon ; Ex-URSS ; Chine ; Reste du monde.
(b) : Fankhauser considère cinq régions : voir le tableau 3.2.
Remarque : lorsque les données désagrégées ne sont pas disponibles, c’est la valeur régionale moyenne qui est
utilisée.
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Dommages climatiques
3.1.2 - Fonctions de dommage climatique
La fonction de dommage détermine les coûts économiques subis pour différents
niveaux de réchauffement. L’unique information disponible pour la construire est la valeur du
dommage pour une augmentation de la température de 2,5 degrés Celsius. Il est donc
nécessaire, pour la compléter, de formuler une hypothèse sur son allure générale. Ce choix est
en grande partie arbitraire, mais il n’y a pas d’autre possibilité en l’état actuel des
connaissances. Quelques intuitions peuvent, par contre, le guider. De toute évidence, il existe
une corrélation positive entre le dommage et la température. En outre, il y a de grandes
chances pour que les dommages augmentent plus vite que la température, au moins au-delà de
certaines valeurs. L’argument qui étaye cette intuition est cynique : la Vie disparaît si la
température est trop élevée.
Les modèles économiques conçus pour déterminer la politique optimale du climat prévoient
une fonction de dommage linéaire (Peck et Teisberg, 1992 ; Tahvonen, 1994), quadratique
(Nordhaus, 1992a, 1993, 1996 ; Manne et alli, 1995) ou cubique (Peck et Teisberg, 1992).
Ces fonctions sont calibrées de manière à coïncider avec le dommage du doublement de la
concentration d’équivalent carbone. Ce dernier diffère selon les auteurs, comme le rappelle le
tableau 3.3.
Tableau 3.3 : Calibrages des fonctions de dommage
Auteur
Température
(en °C)
Dommage (en
% du P.I.B.)
Cline 2,5 1,1
Nordhaus 3 1,33
Peck&Teisberg 3 2
Le graphique 3.1 contient deux informations. Les marques (losange, carré et triangle)
indiquent les points retenus par les auteurs pour calibrer leur fonction de dommage. Les
courbes montrent l’allure de la fonction (linéaire, quadratique ou cubique) 3.
3 - A l’exception de Cline, qui évalue le dommage en deux points, pour un réchauffement de 2,5 et 10 °C.
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Dommages climatiques
129
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Dommages climatiques
Graphique 3.2 : Fonctions de dommage utilisées dans la littérature
0
2
4
6
0 2 4 6 8
Elévation de la température (en °C)
D
om
m
ag
e
cl
im
at
iq
ue
p
ar
un
ité
d
e
P.
I.B
. (
en
%
)
10
Cline P&T Nordhaus
3.1.3 -Critiques
Les évaluations des dommages du doublement de la concentration d’équivalent carbone
souffrent de nombreuses insuffisances. Certaines ont déjà été notées au cours de notre
présentation. Avant de nous intéresser à l’exploitation qui peut être faite des fonctions de
dommage obtenues, et donc de les accepter malgré leurs défauts, il y a d’autres limites que
nous aimerions souligner. La première concerne l’exploitation qui est faite par les
économistes des prédictions des modèles de circulation générale et la prise en compte de
l’incertitude. La seconde critique revient sur les hypothèses simplificatrices sur lesquelles
reposent les évaluations. Elle conduit à proposer une approche certes plus complexe de la
question mais, à coup sûr, beaucoup plus précise.
3.1.3.1 - Prise en compte de l’incertitude
Les modèles de circulation générale prévoient le réchauffement sous la forme d’un
encadrement. Pour le cas du doublement de la concentration d’équivalent carbone, la
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Dommages climatiques
température s’accroît d’une valeur comprise entre 1,5 °C et 4,5 °C. Le mode de cette
distribution représente la réalisation la plus probable ; il est égal à 2,5 °C.
L’amplitude de cet intervalle a des conséquences importantes sur l’évaluation des dommages.
Il est évident qu’un accroissement de 4,5 degrés Celsius est sans comparaison, du point de
vue des effets sur la planète, avec un accroissement de 1,5 degrés Celsius. Il est donc
regrettable que la littérature économique ait délaissé ces questions. A part une tentative de
Fankhauser & Pearce (1994), ayant pour objet de déterminer les conséquences de l’incertitude
sur l’évaluation économique des dommages, les économistes se sont le plus souvent contentés
de proposer une évaluation de meilleure conjecture, autrement dit pour la valeur la plus
probable de l’intervalle.
Fankhauser & Pearce expliquent qu’une telle évaluation sous-estime le dommage réel pour
deux raisons. D’une part, la distribution de probabilité des températures pour le doublement
du carbone est asymétrique et biaisée vers la droite. D’autre part, le dommage croît à taux
croissant avec la température. Le graphique 3.3 permet de comprendre le raisonnement de
Fankhauser & Pearce (les données de cette illustration numérique fictive figurent dans
l’annexe 3.1).
Graphique 3.3 : Espérance mathématique du dommage climatique
0,0
0,1
0,2
0,3
[1
,2
5;
1,
75
[
[1
,7
5;
2,
25
[
[2
,2
5;
2,
75
[
[2
,7
5;
3,
25
[
[3
,2
5;
3,
75
[
[3
,7
5;
4,
25
[
[4
,2
5;
4,
75
[
Elévation de la température (en °C)
Pr
ob
ab
ili
té
0
1
2
3
4
5
D
om
m
age clim
atique
(en %
du P.I.B
.)
Mode
131
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150 150 |
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Dommages climatiques
Le graphique 3.3 superpose deux informations. L’histogramme représente la distribution de
probabilité de l’élévation de la température, consécutive à un doublement de la concentration
d’équivalent carbone (le mode est égal à 2,5 degrés Celsius environ). Il est important de
constater qu’elle est dissymétrique. La courbe indique le dommage subi pour chaque classe
(la fonction de dommage utilisée est celle de Nordhaus).
Sur la base de cet exemple, il est aisé de démontrer la proposition de Fankhauser & Pearce.
Le dommage de meilleure conjecture s’obtient en considérant que la température modale se
réalisera effectivement ; il est égal à 1,33 pour-cent du P.I.B. La valeur espérée du dommage
climatique est égale à la somme des dommages pour toutes les températures possibles,
pondérés par leurs probabilités de réalisation. En utilisant les données du graphique 3.3, on
l’évalue à 1,84 % du P.I.B.
Fankhauser & Pearce critiquent également la non prise en compte, dans les estimations, des
risques de catastrophes majeures. Ceux-ci accroissent l’espérance du dommage sous la forme
d’un risque faible, mais non nul, associé à un coût très important. Des descriptions
scientifiques de scénarios catastrophiques (fonte des glaces polaires, dégagement massif de
méthane, déviation du Gulf Stream...) ont été développées mais cette approche reçoit, pour
l'instant, relativement peu d'écho dans la recherche économique. Pourtant, Howarth &
Manahan (1992) pensent que les catastrophes naturelles imprévisibles représentent la
principale source d’inquiétude en matière de variation climatique. Dans ces conditions et
compte tenu de la fiabilité réduite des évaluations des dommages prévisibles, ils estiment que
toute politique du climat devrait être jugée par référence à l’idée d’assurance contre la
catastrophe.
3.1.3.2 - Equilibre partiel contre équilibre général
Une autre critique qui peut être adressée aux estimations présentées plus haut est
qu'elles sont le fruit d'un raisonnement en équilibre partiel. Les pertes sont évaluées
aujourd’hui et appliquées au futur. Avec cette méthode, tout se passe comme si la date à
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Dommages climatiques
laquelle ce réchauffement sera subi et le temps qui nous en sépare n’influençaient pas le
résultat, ce qui est faux.
En fait, cette méthode est valable à condition que l'économie prise comme référent soit un
reflet acceptable de l'économie future, sur laquelle s'appliqueront réellement les nuisances
énumérées. Or, ceci ne sera pas le cas. Une analyse d'équilibre générale doit être menée pour
prévoir les ajustements économiques consécutifs aux bouleversements climatiques progressifs
(Scheraga & alli, 1993) : un recul du secteur agricole, une réattribution des dépenses
publiques, une modification des habitudes de consommation et des rapports de prix entre les
différentes catégories de biens...
Reilly & Hohmann (1993) illustrent bien les risques d’erreurs dus à l’utilisation des analyses
d’équilibre partiel. En opposition avec la plupart des évaluations des dommages agricoles, qui
isolent l’effet sur un pays donné, leur modèle simule le marché mondial des denrées agricoles.
Sachant que le réchauffement global aura des effets positifs ou négatifs, suivant les régions du
globe, cette approche s’avère beaucoup plus pertinente, car elle tient compte de la
transmission par le marché mondial de tous les effets régionaux. Les évaluations obtenues par
cette méthode suggèrent que les études locales surestiment fortement les dommages agricoles.
3.2 - Dommage par tonne et taxation optimale
Depuis le chapitre 1, on sait que, à l’optimum, la dernière unité de gaz à effet de serre
émise laisse le bien-être inchangé : l’émission marginale égalise l’utilité tirée d’une plus
grande consommation au dommage supplémentaire subi. Or, jusqu’à présent, l’émission de
gaz carbonique était gratuite, ce qui fait que, en principe, son utilité marginale était nulle. En
conséquence, si le dommage marginal de l’effet de serre est positif, le comportement
d’émission actuel est sous-optimal. Il reste à déterminer la valeur du dommage marginal pour
mesurer de combien il faudrait réduire les rejets de carbone.
Une application numérique très simple permet d’en obtenir une mesure approximative. Nous
utilisons les projections du P.I.B. mondial et des émissions de carbone jusqu’en 2100
obtenues par les modèles d’équilibre général du chapitre 2. Ensuite, nous appliquons les
133
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Dommages climatiques
relations (1), (2) et (3) du chapitre préliminaire pour déduire l’évolution du climat pour le
siècle à venir 4 ; l’accroissement de la température serait de l’ordre de 3,1 degrés Celsius en
2100. A l’aide de la fonction de dommage de Nordhaus (par exemple), on calcule alors la
somme actualisée des dommages sur la période considérée. On répète ensuite les opérations
précédentes en incrémentant l’émission de 1990 d’une tonne. La différence entre les deux
estimations donne une évaluation du dommage de la dernière unité de carbone émise. Le
dommage marginal en 1990 serait donc de l’ordre de 3, 6 ou 16 dollars par tonne, selon que
l’on utilise un taux d’actualisation de 7, 5 et 3 pour-cent respectivement.
Les émissions de carbone en 1990 seraient donc trop importantes puisque l’utilité de la
dernière unité est nulle, alors que le dommage de cette même unité est positif. Cependant, ce
dernier est modéré et laisse à penser que la lutte contre l’effet de serre ne nécessite pas une
mesure drastique : l’imposition d’une taxe de l’ordre de 3 à 16 dollars par tonne impliquerait
une hausse du prix du pétrole brut de 1 à 6 pour-cent seulement (au cours de 20 dollars par
baril) ; l’augmentation du prix de l’énergie dans ces proportions réduirait les émissions de
carbone de 5 à 10 pour-cent (voir le chapitre 2).
La méthode ci-dessus a l’avantage d’être simple mais elle ne permet pas de calculer la
taxe optimale sur les émissions. Pour parvenir à l’évaluer, il faut construire un modèle de
contrôle optimal et le calibrer. Nordhaus (1992a) et (1993) fait encore figure de pionnier dans
ce domaine. D’autres études ont prolongé son analyse mais elles restent peu nombreuses
(Falk & Mendelsohn, 1993 ; Nordhaus & Yang, 1996 ; Peck & Teisberg, 1992 ; Tahvonen,
1994 ; Williams, 1995). Les politiques optimales qu’elles proposent sont assez proches et un
consensus semble émerger. Nous ferons le bilan de ces résultats dans une première sous-
section.
Pour des raisons que nous avons déjà discutées, les recherches se sont essentiellement
focalisées sur le dioxyde de carbone. Mais, la politique du climat n’est pas complète si elle
n’agit pas simultanément sur les autres gaz à effet de serre. L’idée est donc apparue de se
4 - Nous tenons compte des autres gaz à effet de serre sous la forme d’une émission supplémentaire en 1990 de 2
Gt d’équivalent carbone, croissant de 0,5 pour-cent par an ensuite.
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Dommages climatiques
servir du dioxyde de carbone comme étalon de mesure, puis d’exprimer les autres gaz par
rapport à ce dernier. Le facteur de conversion dépend, essentiellement, des caractéristiques
physiques du gaz : sa durée de vie atmosphérique et son forçage radiatif. Les scientifiques
construisent un index de comparaison des gaz à effet de serre basé sur ces caractéristiques.
Nous verrons dans une seconde sous-section que celui-ci n’est pas opérationnel pour calculer
les taxes applicables aux autres gaz à partir de celle du carbone.
3.2.1 - Taxe optimale sur le carbone
3.2.1.1 - Description des modèles de contrôle optimal appliqués
Les données de base nécessaires à la construction d’un modèle de contrôle optimal des
émissions de carbone sont réunies dans les graphiques 2.7 et 3.2. Les fonctions de coût,
ajustées à partir des modèles d’équilibre général appliqués, permettent de déduire la réaction
optimale des économies à l’élévation du prix des émissions. Les fonctions de dommage
rendent possible l’évaluation de la taxe optimale sur le carbone.
Les modèles de Nordhaus (1992a) et (1993), de Falk & Mendelsohn (1993) et de Tahvonen
(1994) utilisent ces informations. Toutefois, ils différent sur plusieurs points. Les deux
derniers s’appuient sur une trajectoire de référence exogène pour la production et les
émissions futures. Les coûts de la politique et les dommages climatiques sont calculés à partir
de cette projection, définie comme l’évolution qu’aurait suivie l’économie sans aucune
modification climatique.
Les différentes versions du modèle DICE de Nordhaus (1992a) et (1993) vont plus loin dans
la modélisation de l’économie. La production dépend du progrès technique et de deux
facteurs, à savoir le travail et le capital. Le premier intrant est une proportion fixe de la
population et résulte uniquement des projections démographiques. Par contre, l’accumulation
du capital est traitée comme dans le modèle de Ramsey. Bien que les émissions de carbone
soient vues comme un sous-produit, Nordhaus rend compte de la baisse tendancielle de
l’intensité énergétique de manière exogène. Les effets des réductions des émissions de
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Dommages climatiques
carbone et du réchauffement réduisent la production ainsi définie, de la même façon que dans
les deux modèles susdits.
La représentation du système productif par Nordhaus est plus performante car elle fait
dépendre la trajectoire potentielle de l’ampleur de la politique climatique, via le
comportement d’accumulation. A l’inverse, les deux autres modèles ont le défaut de supposer
implicitement que le sentier de croissance reste inchangé, quelles que soient les actions
entreprises aujourd’hui pour limiter les émissions de carbone.
Le modèle de Peck & Teisberg (1992) diffère sensiblement des autres. Il s’inspire du modèle
Global 2100 de Manne (1990), ce qui fait qu’il endogénéise non seulement la production,
mais également la formation du coût économique de la réduction des émissions de carbone.
La production dépend du travail, du capital et de l’énergie finale. Une description détaillée de
la branche énergétique permet de décrire les substitutions interénergétiques et l’apparition des
technologies de remplacement. Peck & Teisberg adjoignent à Global 2100 un module
climatique précis qui prend en compte quatre gaz à effet de serre (les autres modèles
convertissent les autres gaz en équivalent carbone, ce qui est moins satisfaisant). L’ensemble
de ces éléments laisse à penser qu’il s’agit du travail le plus performant des quatre.
3.2.1.2 - Résultats des modèles de contrôle optimal
Comme nous allons le montrer, les insuffisances de certains des modèles ne
transparaissent pas dans les résultats. Nous pensons que cela provient du fait que la politique
du climat n’exige pas une réduction substantielle des émissions de carbone.
Tous les modèles s’accordent pour dire qu’il n’est pas optimal de réduire fortement les
émissions de carbone. Selon les calculs de Nordhaus (1992a), le taux de dépollution, i.e. la
baisse des émissions en pourcentage par rapport au scénario de référence, partirait de 10 pour-
cent, en 1995, pour atteindre 15 pour-cent, en 2100. Tahvonen (1994) propose des valeurs
légèrement inférieures, avec une dépollution passant de 6 à 12 pour-cent sur la même période.
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Dommages climatiques
Les résultats de Peck & Teisberg (1992) encadrent ces valeurs 5 : lorsque la fonction de
dommage est linéaire, le taux de contrôle des émissions est très faible et inférieur à 5 pour-
cent ; lorsque le dommage est cubique (hypothèse extrême), la réduction des émissions atteint
50 pour-cent environ en 2100 ; dans tous les cas, les émissions ne divergent pas réellement de
la trajectoire de politique inchangée avant 2030 (autrement dit, il ne serait pas nécessaire
d’agir avant cette date).
L’effort de dépollution le long de la trajectoire optimale étant faible, on doit s’attendre à ce
que la taxe sur les émissions ne soit pas très élevée. Sur ce sujet également, on constate un
relatif consensus. Nordhaus (1992a) obtient une taxe optimale variant de 5 à 20 dollars par
tonne de carbone entre 1995 et 2100. Falk & Mendelsohn (1993) testent de nombreuses
hypothèses sur les valeurs des paramètres de leur modèle. Il est donc difficile de choisir
laquelle comparer aux résultats des autres modèles. On note toutefois que la taxe est comprise
entre : 0,69 et 5,56 dollars par tonne en 1990 ; 1 et 170 dollars par tonne en 2100. La taxe
optimale déterminée par Peck & Teisberg varie fortement selon la spécification de la fonction
de dommage : de 5 dollars par tonne, en 1990, à 20 dollars par tonne, en 2100, avec un
dommage linéaire ; de 5 dollars par tonne, en 1990, à 208 dollars par tonne, en 2100, lorsque
la fonction de dommage est cubique (mais cette hypothèse est exagérée : voir le graphique
3.2)6.
Remarque 3.1 : Le modèle de Peck & Teisberg (1992) formalise explicitement l’épuisement
des énergies fossiles. Il nous permet de mettre un point final au débat que nous soulevions, au
cours du chapitre 1, sur l’évolution temporelle de la taxe optimale sur les émissions de
carbone. La raréfaction des énergies fossiles implique que l’émission de carbone décroît
fortement à partir du vingt-deuxièm!mpce siècle, mais la taxe continue à augmenter pour
plusieurs raisons : l’inertie climatique des océans fait que la baisse de la pollution n’est pas
5 - Rappelons que la fonction de dommage de Nordhaus est quadratique, celle de Tahvonen est linéaire.
6 - Une taxe de 208 dollars par tonne correspond au seuil de rentabilité de la technologie de remplacement sans
carbone du modèle MR. A partir de cette valeur, chaque unité de dépollution supplémentaire est obtenue à un
prix constant, par substitution des combustibles synthétiques par cette technologie.
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Dommages climatiques
ressentie immédiatement dans l’évolution de la température ; la croissance économique
maintient les dommages à un niveau élevé.
Remarque 3.2 : Le modèle de Williams (1995) est un peu à part. Williams se désintéresse de
la réduction des émissions et calcule la taxe optimale sur les émissions le long de la
trajectoire de politique inchangée. Il justifie cette démarche en avançant l’argument des coûts
de transaction associés à la gestion d’un système de taxe sur le carbone, qu’il estime entre 22
et 50 dollars par tonne de carbone pour les Etats-Unis. Donc, la limitation des émissions
s’impose seulement si la taxe optimale sur le carbone dépasse ce seuil de rentabilité, ce qui
n’est pas le cas dans son analyse. De même que Falk & Mendelsohn (1993), Williams explore
un grand nombre de configurations, en faisant varier les paramètres de la fonction de
dommage climatique et le taux d’actualisation. Il détermine un intervalle assez large pour la
taxe optimale : 0,11 à 2,48 dollars par tonne de carbone en 1990 ; 0,53 à 94,07 dollars par
tonne en 2200. A en croire son évaluation des coûts de transaction, ces valeurs sont
effectivement insuffisantes pour justifier une politique de réduction des émissions, au moins
initialement.
Les estimations des différents modèles se marient plutôt bien. Cette homogénéité
s’explique surtout par la faible intensité de la politique optimale. Si les dommages climatiques
avaient requis une restriction plus forte des émissions, on peut penser que les écarts se
seraient creusés, reflétant la capacité de chaque modèle à représenter les ajustements
économiques successifs. Le paramétrage du coût de dépollution définit le domaine de validité
du modèle : le modèle de Nordhaus ne peut pas étudier des réductions fortes des émissions,
car sa fonction de coût ne tient pas compte des nouvelles technologies énergétiques ; par
opposition, la fonction de Tahvonen s’applique mal à une dépollution faible, car elle
incorpore, de manière autonome, des modifications qui n’apparaissent, en principe, qu’à
partir d’un certain niveau.
3.2.2 - Comparaison des gaz à effet de serre
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Dommages climatiques
Une définition des facteurs de conversion entre les différents gaz à effet de serre est
indispensable aux négociations internationales sur le climat. Elle trouverait un premier emploi
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Dommages climatiques
dans la comptabilité des contributions nationales à l’effet de serre et aiderait ainsi à définir les
objectifs de dépollution nationaux. Elle fournirait une grille de conversion pour déduire les
taxes à appliquer aux autres gaz à partir de la taxe sur le carbone. Dans le cadre d’un marché
des droits de pollution, elle établirait les termes d’échange entre les permis de polluer.
La Convention-cadre sur les changements climatiques (15 mai 1992) pose très clairement le
problème. Les signataires du traité voudraient que « le calcul ... des quantités de gaz à effet de
serre émises ... s’effectue sur la base des meilleures connaissances scientifiques disponibles,
notamment en ce qui concerne ... la contribution effective de chacun de ces gaz aux
changements climatiques ».
La définition des facteurs de conversion doit reposer sur des critères objectifs. La logique
défendue par les rédacteurs de la Convention est la recherche de la plus grande efficacité en
termes de dommages évités. Par contre, il n’est pas précisé si la notion de dommage doit être
entendue en termes physiques ou en termes de bien-être. Bien sûr, c’est cette seconde option
que nous allons défendre.
Les scientifiques proposent de se baser sur le potentiel de réchauffement global pour
déterminer les poids relatifs des gaz à effet de serre. Ils se mesurent en faisant le rapport du
réchauffement intertemporel résultant de l’accumulation d’une tonne de chaque gaz sur la
même mesure dans le cas du dioxyde de carbone (Eckaus, 1992) :
( ) ( )
( ) ( )
w
x t F t dt
x t F t d
i
i i
CO CO
=
′
′
∞
∞
∫
∫
.
.
0
0 2 2
t
, (3.1)
où
( )x ti est la proportion du gaz i restant à la date t,
( )′F ti est le forçage radiatif instantané du gaz i.
138
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Dommages climatiques
Si le forçage radiatif et le recyclage des gaz accumulés sont des fonctions linéaires des
concentrations atmosphériques, alors :
w
f
fi
i
CO
CO
i
=
2
2.
β
β
, (3.2)
où f fi CO2 mesure le forçage radiatif relatif instantané du gaz i par rapport au
dioxyde de carbone.
Preuve : voir l’annexe 3.2.
La définition scientifique des coefficients de conversion ne coïncide pas avec l’efficience
économique. En premier lieu, selon celle-ci, il est équivalent d’accroître la température de 1
degré Celsius aujourd’hui ou plus tard ; ceci est en contradiction avec le principe
d’actualisation. En second lieu, elle ne prend en considération que les dommages physiques
(le réchauffement subi) et néglige la question de l’évaluation monétaire du dommage.
L’efficacité économique requière de traiter chaque gaz à effet de serre en fonction de
son incidence future sur le bien-être. Ainsi, si l’émission de z tonnes d’un gaz à effet de serre
quelconque a les mêmes conséquences sur le bien-être futur que l’émission d’une tonne de
dioxyde de carbone, chaque tonne de ce gaz émise devrait donner lieu au paiement d’une taxe
égale à z fois la taxe sur les émissions de gaz carbonique.
Pour faire simple, supposons que : l’utilité est une fonction linéaire de la consommation ;
toute la production est consommée ; le dommage climatique augmente de façon linéaire avec
la température et avec la production.
En utilisant le modèle climatique de base (voir l’encadré 1 du chapitre préliminaire), on
obtient un modèle de contrôle optimal simple, semblable à celui du chapitre 1. Nous
reléguons la présentation complète et la résolution de ce modèle à l’annexe 3.3, pour ne pas
surcharger notre discussion.
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Dommages climatiques
La taxe optimale sur les émissions du gaz est égale à : i
( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( ) ( )p t a r F Y s e ds e di i r s tt
i* . . . . . .. .= ′ ⎡
⎣⎢
⎤
⎦⎥
− + −∞ − + −∞ ∫∫ω τ δ ττ
δ β τ τ . (3.3)
où
( )Y t est le P.I.B. à la date t ,
δ est le facteur d’actualisation,
a est le dommage, en pourcentage du P.I.B., quand la température est supérieure de
1 degré Celsius à son niveau préindustriel,
Les autres données sont des paramètres climatologiques (voir l’encadré 1).
Preuve : voir l’annexe 3.3.
La taxe optimale dépend des paramètres climatologiques (les paramètres r Fi i, , ,ω β′ ), de la
sensibilité de l’économie aux variations climatiques (le taux de dommage a ), du niveau de
développement et des perspectives de croissance (la projection du P.I.B. ). En faisant les
mêmes hypothèses que pour établir la relation (3.2) et en supposant en plus que ,
on démontre que la taxe optimale sur le gaz i est :
( )Y t
( )Y t en t= .
( )p t r f
n
a
r n
ei i
i
n t* . . . .=
+ − + −
.ω
δ β δ
. (3.4)
Preuve : voir l’annexe 3.3.
En faisant le rapport de la taxe de chaque gaz à effet de serre et de celle du carbone, on
obtient une définition économique des poids relatifs des gaz à effet de serre:
w
f
f
n
ni
i
CO
CO
i
=
+ −
+ −
2
2.
δ β
δ β
. (3.5)
Ces coefficients dépendent donc également de variables économiques. Le facteur
d’actualisation attribue un poids relatif plus important aux gaz ayant une durée de vie courte.
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Dommages climatiques
A l’inverse, la croissance démographique et économique accroît le poids relatif des gaz à
longue espérance de vie, qui réduisent proportionnellement un bien-être futur plus grand 7.
Tableau 3.4 : Poids relatifs des gaz à effet de serre
Gaz à
effet de
serre
Durée de
vie (a)
Forçage
radiatif relatif
instantané (a)
Potentiel de
réchauffement
global (b)
Poids relatif
(c)
Poids relatif
(c)
CO2 120 1 1 1 1
CH4 10 58 5 10 14
N2O 150 206 258 227 219
HCFC-22 15 5440 680 1301 1778
CFC-11 65 3970 2150 2867 3179
CFC-12 130 5750 6229 5958 5883
CFC-113 70 3710 2164 2801 3066
δ − =n 0 01, δ − =n 0 02,
(a) : Source : Houghton & alli (1990) (b) : Calculé à partir de (3.2)
(c) : Calculé à partir de la relation (3.5).
Il ressort du tableau 3.4 que l’actualisation nette, i.e. la différence entre le taux d’actualisation
et le taux de croissance, accroît le poids relatif des gaz dont la durée de vie est plus courte que
le dioxyde de carbone, et inversement.
La comparaison des gaz à effet de serre est analysée plus complètement par Hoel & Isaksen
(1993) et par Reilly & Richards (1993). Hoel & Isaksen utilisent notamment les vraies
fonctions de forçage radiatif pour le dioxyde de carbone, le méthane et l’oxyde d’azote (nous
utilisons des approximations linéaires de ces fonctions). Il s’ensuit que le forçage radiatif
relatif instantané de ces gaz par rapport aux autres, et de ces gaz entre eux, n’est pas constant,
mais dépend de l’évolution de leur concentration atmosphérique, donc des émissions
anthropogéniques. Plus précisément, puisque leur forçage radiatif instantané est
décroissant et que leur concentration devrait continuer à augmenter, leur poids relatif par
rapport aux autres gaz est surestimé par nos calculs.
( )′F Gi
7 Notons au passage que les pays évaluent différemment les poids relatifs des gaz à effet de serre dès lors qu’ils
n’anticipent pas le futur de la même façon (les perspectives de croissance). De ce fait, la définition des
équivalences entre les gaz à effet de serre donnera forcément lieu à une négociation internationale.
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Dommages climatiques
D’autre part, il est probable que la fonction de dommage de l’effet de serre soit croissante à
taux croissant (quadratique par exemple). Si tel est le cas, les gaz ayant une durée de vie
longue deviennent relativement plus dommageables que les autres ; leur poids relatif devrait
donc augmenter par rapport à nos estimations. Ceci est confirmé par les calculs de Hoel &
Isaksen (1993) et de Reilly & Richards (1993).
3.3 - Conclusion
L’évaluation des dommages climatiques pose de nombreux problèmes. En amont, la
première difficulté provient des incertitudes scientifiques. Les modèles de circulation
générale prédisent l’ampleur du réchauffement moyen avec une marge d’erreur importante ;
l’intervalle d’erreur est encore plus important lorsqu’il s’agit de fournir des informations sur
les conséquences régionales du réchauffement. Partant de cette base de données peu fiable, de
laquelle elle ne retient que les réalisations les plus probables, l’évaluation économique ajoute
son lot d’approximations et d’incertitudes. Notamment, l’hypothèse simplificatrice, selon
laquelle les dommages estimés aujourd’hui donnent une bonne idée des dommages futurs, à
un facteur d’échelle près, mériterait d’être abandonnée au profit d’une approche d’équilibre
général. Malgré leurs insuffisances, signe que beaucoup reste à faire, les premières
estimations du dommage climatique apportent une aide précieuse à la décision.
Selon les estimations disponibles à ce jour, le coût d’un doublement de la concentration
atmosphérique en équivalent carbone varierait de 1 à 2,5 pour-cent du P.I.B. mondial. De
fortes disparités régionales existeraient. Schématiquement, les pays en développement
seraient les plus vulnérables et subiraient un dommage double par rapport aux pays de
l’O.C.D.E. La vulnérabilité des pays en développement proviendrait surtout de leur plus forte
dépendance vis-à-vis du secteur agricole, de problèmes d’approvisionnement en eau et des
terres cédées à la mer du fait de l’élévation du niveau des océans.
L’évaluation des dommages climatiques pour le doublement de la concentration
atmosphérique en carbone sert ensuite de point de calibrage d’une fonction de dommage
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Dommages climatiques
climatique. Selon les chercheurs, celle-ci est généralement supposée linéaire, quadratique ou
cubique ; la seconde hypothèse est la plus fréquente. La fonction obtenue, introduite dans un
modèle de croissance, permet de trouver la taxe optimale sur les émissions de carbone. Tous
les auteurs s’accordent à dire qu’elle devrait être faible. Elle augmenterait continûment,
partant de 5 dollars par tonne, environ, en 1995, pour atteindre 20 dollars par tonne, environ,
en 2100. Le taux de dépollution, par rapport à la trajectoire de politique inchangée, ne
dépasserait pas 15 pour-cent. En conclusion, les résultats des modèles suggèrent d’agir
modérément, voire pas du tout si, comme le suggère Williams (1995), la gestion
bureaucratique de la politique du climat est trop coûteuse (entre 22 et 50 dollars par tonne de
carbone aux Etats-Unis selon ses calculs).
Cet optimisme n’est pas partagé par tous. Notamment, Cline (1992) détermine une
politique optimale beaucoup plus drastique, principalement en raison de la valeur qu’il retient
pour le taux d’actualisation. Bien que son choix soit explicitement critiqué dans la littérature
(Nordhaus, 1993), son étude a l’avantage de rappeler la forte sensibilité de la politique du
climat vis-à-vis de ce paramètre. A ce titre, l’application numérique proposée au début de la
section 3.2 est parlante : le dommage par tonne émise en 1990 vaut environ 3 dollars lorsque
le taux d’actualisation est de 7 pour-cent, contre environ 16 dollars lorsqu’il est égal à 3 pour-
cent. Ceci invite à la prudence, mais ne constitue pas en soi une raison valable pour mettre en
doute les conclusions de la littérature.
Pearce & Fankhauser (1994) critiquent le consensus qui ressort des modèles de croissance
optimale de façon plus convaincante. Selon eux, le traitement de l’incertitude et des risques
de catastrophes majeures dans ces études, qui consiste à éliminer ces deux dimensions en
supposant que la réalisation de meilleure conjecture est celle qui surviendra effectivement,
introduit un biais dans le sens d’une sous-estimation des dommages. Leur argumentation
repose sur : la forme de la distribution de probabilité des dommages, « asymétrique et biaisée
vers la droite » ; la forme de la fonction de dommage, croissante à taux croissant ; les risques
de catastrophes majeures. Ils illustrent leur propos en évaluant les dommages climatiques par
tonne d’émission dans plusieurs scénarios plus ou moins probables. Leurs résultats suggèrent
que « la prise en compte de la possibilité de catastrophes climatiques dans l’avenir accroît ces
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Dommages climatiques
valeurs [les dommages par tonne d’émission] dans une proportion considérable qui, dans le
pire des cas, atteint 50 pour-cent. » (Pearce & Fankhauser, 1994, page 89).
La deuxième partie de notre thèse reprend ce débat mais l’envisage de façon théorique.
Elle décrit la réaction optimale de l’économie face à la crainte d’une catastrophe climatique.
Dans le chapitre 4, le problème de l’incertitude sera laissé de côté : l’échéance de la
catastrophe, définie par un seuil critique de pollution, ainsi que son incidence seront
supposées connues. Bien que peu réaliste dans le contexte scientifique présent, ce scénario a
plusieurs qualités. Premièrement, il anticipe les progrès scientifiques dans la connaissance du
système climatique et dégage les conditions économiques d’acceptation d’une catastrophe
prévue. Deuxièmement, il redéfinit la politique du climat comme une stratégie visant non
seulement à limiter les dommages d’une évolution graduelle de l’équilibre climatique, mais
aussi à repousser ou éviter les effets catastrophiques. Nous montrerons que : lorsque la
catastrophe n’est pas trop dommageable, l’optimalité économique requiert seulement de
retarder la catastrophe, pour atténuer la perception présente du dommage encouru, en vertu du
facteur d’actualisation, mais de la provoquer tout de même ; dans le cas contraire, il peut être
indiqué d’imposer une norme de pollution maximale, égale au seuil critique. Le chapitre 5
introduira en plus le problème de l’incertitude. Deux cas de figure seront étudiés, selon que
l’incertitude portera sur la gravité de la catastrophe ou sur son échéance. A condition que les
risques de catastrophes soient réels (et ressentis tels), nous montrerons que cette approche
modifie potentiellement les conclusions de la littérature.
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Annexes / Chapitre 3
Annexe 3.1 - Données du graphique 3.3
Température [1,25;1,75[ [1,75;2,25[ [2,25;2,75[ [2,75;3,25[ [3,25;3,75[ [3,75;4,25[ [4,25;4,75[ Sommes
Probabilité 0,10 0,16 0,25 0,18 0,16 0,09 0,06 1,00
Dommage 0,48 0,85 1,33 1,92 2,61 3,40 4,31
Dom. espéré 0,048 0,136 0,333 0,345 0,417 0,306 0,259 1,84
Annexe 3.2 - Potentiel de réchauffement global
Partons de la relation d’Eckaus (1992) et supposons que le forçage radiatif des gaz à
effet de serre est de la forme ( ) ( )F t f G ti i i= . et qu’ils sont recyclés de façon exponentielle, i.e.
. Le ratio du potentiel de réchauffement global du gaz i par rapport à celui du gaz
carbonique devient :
( )x t ei ti= −β .
w
f e
f e
f
fi
i
t
CO
t
i i
CO CO
i
CO
= =
−∞
−∞
∫
∫
.
.
.
.
β
β
β
β
0
02
2
2 2
.
Annexe 3.3 - Résolution du modèle
Le problème se pose de la manière suivante :
( ) ( )( ) ( )max
g t
t
i i
i
N
e Y t C g t a T t d
( )
. . . .−
=
∞
− −
⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟∑∫ δ 1
1
0
Δ t
sous les contraintes
( ) ( ) ( )& . .G t g t G ti i i i i= −α β , i N1,..., , =
( ) ( )( ) ( )Δ Δ& . .T t r F G t T ti i
i
N
= −
⎡
⎣
⎢
⎤
⎦
⎥
=
∑ω
1
,
( )G Gi i0 0= , ,
( )Δ ΔT T0 0= ,
( )Y t est une projection du P.I.B. donnée (trajectoire de politique inchangée sans
dommages climatiques).
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Annexes / Chapitre 3
Remarque :
• N désigne le nombre de gaz à effet de serre considérés ;
• représente le coût de la réduction des émissions du gaz , en pour-cent du P.I.B. ( )(C g ti i )
−
i
i
Le Hamiltonien s’écrit :
( ) ( ) ( ) ( )~ . . . . . . . .H = − −⎡
⎣
⎢
⎤
⎦
⎥ − − −
⎡
⎣
⎢
⎤
⎦
⎥
=
∑ ∑ ∑Y t C g a T p g G q r F G Ti i
i
N
i i i i i
i
i i
i
1
1
Δ Δα β ω .
Les conditions d’optimalité sont :
( )′ =C g Y pi i i. .α , avec i N= 1,..., ,
( ) ( )& . . . .p p r Fi i i i i= + − ′δ β ω G q , avec i N= 1,..., ,
( )& . .q r q a= + − Yδ .
On en déduit :
( ) ( ) ( ) ( )q t a Y e dr t
t
* . . .= − + −
∞
∫ τ τδ τ ,
( ) ( )( ) ( ) ( ) ( )p t r F G q e di i i tt
i* . . . * . .= ′ − + −
∞
∫ω τ τ δ β τ τ .
Si le forçage radiatif est linéaire, i.e. ( )( )′ =F G t fi i i , et si la production est donnée par
, alors on a : ( )Y t en t= .
( )q t a e
r n
n t
* .
.
=
+ −δ
,
( ) ( ) ( )p t e a r f
r n
e d r f
n
a
r n
ei it i n
t
i
i
n t* . . . . . . . . .. . .=
+ −
=
+ − + −
+ − + −∞∫δ β δ β τ
ω
δ
τ ω
δ β δ
.
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Partie II
Discontinuités, irréversibilités
et incertitudes
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Catastrophes climatiques irréversibles
Chapitre 4
Catastrophes climatiques irréversibles
Dans la présentation scientifique de l’effet de serre, nous avons insisté sur le fait que les
dommages climatiques pourraient prendre deux formes :
1. des dommages qui augmentent graduellement avec le réchauffement ;
2. des catastrophes majeures qui apparaissent brutalement.
La plupart des scientifiques et quelques économistes estiment que les conséquences brutales
d'un réchauffement global sont beaucoup plus à craindre que les dommages graduels : « Bien
que le changement climatique soit un phénomène progressif et lent, certaines de ses
conséquences peuvent survenir brusquement ou sur une période de temps courte. » (Roe &
alli, 1994, p. 224) 1. Les connaissances scientifiques actuelles ne permettent pas d’affirmer si
des catastrophes majeures (déviation des courants marins, pertes biologiques, fonte des glaces
polaires...) ont des chances tangibles de survenir mais ces risques doivent, malgré tout, être
considérés avec sérieux.
Confrontée à ceux-ci, l’Humanité décidera implicitement de les provoquer ou de s’en
préserver en modifiant en conséquence son émission globale de gaz à effet de serre. Elle
devra tenir compte, dans son choix, du caractère irréversible de sa décision : une fois qu’elle
aura été appliquée, ses conséquences ne pourront plus être annulées (Arrow et Fisher, 1974).
Le problème des décisions irréversibles en matière d’aménagement de l’environnement
(construction d'un barrage, déforestation, extinction d'une espèce) est amplement traité dans la
littérature pour le cas où les conséquences sont incertaines (Arrow et Fisher, 1974 ; Henry,
1974 ; Fisher & Hanemann, 1987 ; pour une synthèse, voir Desaigues & Point, 1990a). Dans
1 - « Although climate change is a gradual and slow process, some of its impacts may occur abruptly or over a
short period of time ».
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Catastrophes climatiques irréversibles
le cas des pollutions cumulatives, l’irréversibilité provient de l’existence d’un seuil critique
de pollution dont le dépassement implique un brusque changement de la nature et/ou de
l'ampleur des dommages (Pethig, 1991b ; Mäler, 1991 ; Gottinger, 1991 ; Roe et al., 1994 ;
Clarke et Reed, 1994). Les analyses économiques s'occupant de ces questions restent rares.
De plus, les approches sont souvent très différentes.
Les écologistes préconisent le respect de ces seuils environnementaux et veulent qu'ils
soient érigés en norme. Mäler (1991, p. 73) objecte que « si le dommage physique est infini
dans le sens qu'il implique la destruction définitive d'un écosystème donné, il ne s'ensuit pas
nécessairement que le dommage social mesuré en termes économiques soit infini » 2.
Autrement dit, une option économique ayant des conséquences catastrophiques pour
l'environnement n'est pas nécessairement rejetée, mais soumise, comme tout projet, à un
arbitrage coût-avantage. L’objet de ce chapitre sera donc de trouver un cadre de réflexion
capable de guider les décideurs confrontés à de telles situations.
Roe & alli (1994) développent un modèle où le fait d'atteindre une concentration
atmosphérique critique de gaz à effet de serre incertaine produit une perte constante de bien-
être pour toutes les périodes subséquentes. En certitude, ils postulent que le système
économique doit maintenir la concentration atmosphérique en deçà de cette valeur afin de
préserver l’environnement. Ils montrent que cette norme environnementale est contraignante
si l’utilité marginale associée au fait de stabiliser indéfiniment la pollution à son niveau
critique est supérieure au dommage marginal intertemporel correspondant. Ce résultat leur
sert ensuite pour analyser le cas d’un seuil critique incertain. De notre point de vue, leur
analyse du cas certain est incomplète. Nous prouverons, d’ailleurs, qu’il peut être optimal,
dans certains cas, de transgresser la norme environnementale posée.
Pethig (1991b) analyse la même question dans le cas de polluants persistants, i.e. non recyclés
par l'environnement. Le scénario qu’il imagine décrit la situation où l’utilité de la
consommation serait réduite d’une valeur constante x à partir d’un seuil de pollution critique.
2 - « If the physical damage is infinite because a certain ecological system is irreversibly destroyed, it does not
follow that the social damage measured in economic terms is infinite. »
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Catastrophes climatiques irréversibles
Pethig compare l’attitude consistant à préserver l’environnement, donc à rejoindre la
pollution critique et à s’y maintenir indéfiniment, et celle consistant à passer le seuil critique.
Il montre que, si la destruction de l’environnement est préférable, « la trajectoire optimale
coïncidera avec celle obtenue pour x = 0 [i.e. sans conséquences catastrophiques] puisque la
translation de la fonction d’utilité laisse les propriétés marginales de la fonction d’utilité
inchangées » (Pethig, 1991b, p. 97) 3. Les conditions d’optimalité ne renseignent donc pas sur
l’option qui doit être choisie. Par contre, puisqu’elles ne changent pas, Pethig prétend que la
trajectoire suivie avant la catastrophe est la même quel que soit l’objectif.
Gottinger (1991) pose un problème similaire et parvient au même résultat. Il énonce une
condition supplémentaire à la décision de provoquer la catastrophe : cette option n’est jamais
désirable si le bien-être intertemporel obtenu en maintenant indéfiniment la pollution à sa
valeur critique est supérieur au bien-être postérieur à la catastrophe.
La solution présentée par Pethig et Gottinger n’est pas satisfaisante. Bien qu’il soit vrai que la
perspective d’une catastrophe écologique future ne modifie pas les conditions marginales
d’optimalité de la période qui la précède, il est erroné d’en déduire que la trajectoire de la
première phase est inchangée. La méthode de résolution utilisée dans ce chapitre montrera, en
effet, que la présence d’une catastrophe modifie les conditions de transversalité du problème,
donc le sentier d’approche du seuil critique de pollution.
Le découpage de l’horizon temporel en deux périodes, l’une avant et l’autre après la
catastrophe, est la principale nouveauté par rapport aux études précédentes. Partant de là, la
définition d’une valeur d’héritage, représentant les conséquences de la catastrophe, résume
toute l’information nécessaire pour résoudre le problème. La formalisation du problème est
décrite dans la première section du chapitre.
Passant outre le cas trivial d’un seuil critique non contraignant (supérieur à la pollution
stationnaire du problème n°1), nous chercherons, dans la seconde section, la réaction optimale
3 - « The optimal time path will coincide with that for x=0 because the parametric shift in the welfare function
leaves unaffected the marginal properties of the welfare function. »
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Catastrophes climatiques irréversibles
de l’économie face à la menace climatique. Naturellement, deux options antinomiques et
concurrentes scindent la question ; d’ailleurs, la résolution du modèle part de ce découpage.
La ‘‘stratégie de préservation’’, ou d'évitement de la catastrophe, consiste à imposer une
norme environnementale égale au seuil de pollution pour se préserver, à jamais, de la
catastrophe ; elle est donc conforme aux souhaits des écologistes. La stratégie de passage
consiste à franchir le seuil critique à une date finie, donc à subir la catastrophe. Notre
démarche, au cours de la section 2, sera la suivante : trouver la meilleure stratégie de
préservation ; trouver sa concurrente, c’est-à-dire la meilleure stratégie de passage ; les
comparer l’une à l’autre.
Dans la section suivante, nous prolongerons le raisonnement théorique par une interprétation
plus littéraire. Nous montrerons que la stratégie de préservation sera choisie dans le cas de
catastrophes majeures, tandis que sa concurrente est plus attractive pour des risques réduits.
Nous discuterons de la rationalité de la stratégie de passage qui consiste, en fait, à choisir le
délai optimum avant de subir la catastrophe. Ce résultat est, intuitivement, beaucoup plus
satisfaisant que ceux de Pethig et Gottinger.
Dans la troisième section, nous décrirons certains éléments du modèle. Nous donnerons une
signification plus précise à la fonction d’héritage, en montrant qu’elle résulte d’un second
programme économique, débutant à l’instant où la catastrophe est subie. Nous montrerons
également que le prix implicite de la pollution subit, à l’instant de passage, un saut de
discontinuité : juste avant, il est relativement élevé, car il faut retarder la catastrophe ; après,
cette motivation disparaît et le prix implicite décroît brutalement.
Nous conclurons ce chapitre par une application numérique conçue pour prouver la
supériorité de notre proposition, à savoir la stratégie de passage optimale, sur celle de
Gottinger.
4.1 - Production - Pollution - Catastrophe irréversible
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Catastrophes climatiques irréversibles
Pour étudier la réaction optimale de l’économie devant la menace d’une catastrophe
écologique irréversible, nous transformons le problème n°1 en introduisant un seuil critique
de réchauffement et de concentration atmosphérique, les deux étant synonymes dans notre
modèle, puisque ( ) ( )(ΔT t G t= ξ ) 4. Tant que la concentration atmosphérique reste inférieure
à cette valeur, le modèle est identique à celui du problème n°1. Dès que celui-ci est atteint,
une catastrophe non spécifiée est subie et réduit de manière irréversible le bien-être. Nous
supposerons que le planificateur anticipe parfaitement la catastrophe. Nous considérons donc
un problème de commande optimale avec horizon temporel libre (l'instant terminal T est
endogène), fonction d’héritage (la valeur ( )W G ) et contrainte sur la variable d'état (4.1e) :
Problème n°3 5:
( )( ) ( )max
g t T
tT Te u C t dt e W G
( ),
. .. .− −∫ +δ δ0 (4.1)
sous les contraintes
( ) ( ) ( )& .G t g t G t= − β , (4.1a)
, (4.1b) ( ) ( ) ( ) ( )( )C t Q t f g t G t≡ = ,
G 0 0Gbg= , (4.1c)
g tbg≥ 0 , , (4.1d) ∀t
( ) [G t G t T≤ ∀ ]∈, 0, , (4.1e)
. (4.1f)
[T ∈ ∞0, [
Les fonctions communes aux problèmes n°1 et n°3 gardent les mêmes propriétés que dans le
problème n°1.
4 - Nous rappelons que cette relation ne reflète pas fidèlement la réalité, puisque l’inertie climatique des océans
n’est pas introduite (voir le chapitre préliminaire pour obtenir des précisions).
5 - Le problème n°3 permet d'étudier toutes les hypothèses possibles. Nous reviendrons seulement à la fin du
chapitre sur la signification précise et sur la détermination de la fonction d’héritage.
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Catastrophes climatiques irréversibles
G est le seuil critique de la concentration atmosphérique en gaz à effet de serre. Nous
supposons bien entendu que G G0 < . A l’instant T , la catastrophe est subie et le bien-être
intertemporel total est augmenté de l’héritage ( )W G (en valeur courante). Sa valeur dépend
du seuil critique et des conséquences économiques de la catastrophe.
La trajectoire suivie après la catastrophe et la valeur d’héritage correspondante étant connues,
le planificateur se préoccupe uniquement de la première phase, avant l’instant de transition
T . Il en détermine la durée (de zéro à une infinité de périodes lorsque la catastrophe est jugée
trop préjudiciable et est donc repoussée indéfiniment) et choisit l'évolution temporelle de la
mesure de dépollution pendant cet intervalle.
4.2 - Résolution 6
On forme le Hamiltonien courant :
( ) ( )( ) ( ) (~ , , , . .H G g p u f g G p g G G G= − − +β λ )− . (4.2)
Soit ( ) ( )( G t g t T* , * , *) la solution du problème posé. Alors, il existe continue et
dérivable par morceaux, et la solution optimale respecte les conditions suivantes :
( )p t
( ) ( )( )f g G u f g G pg * , * . * , *′ = , (4.3)
( ) ( ) ( )( )& . * , * . * , *p p f g G u f g GG= δ β λ+ + ′ − , (4.4)
avec λ ≥ 0 , G G− ≥ 0 et ( )λ. G G− = 0 .
Proposition 4.1 : Compte tenu de la contrainte sur la variable d'état (4.1e), la dérivée (4.4)
peut ne pas exister en certains points dits de jonction. Les dates concernées sont en nombre
fini par hypothèse. Les instants initial et final peuvent en faire partie. Aux points de jonction
6 - Voir l’appendice 1.
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Catastrophes climatiques irréversibles
τ j , j n= 1,..., , la variable adjointe subit éventuellement un saut de discontinuité donné par
(Léonard & Long, 1992, théorème 10.3.1., pp. 334-335) :
( ) ( ) ( )p pj jτ τ η− +− = jτ , avec ( )η τ j ≥ 0 et ( ) ( )( )η τ τj jG G. − = 0 .
4.2.1 - Deux attitudes concurrentes
Nous notons ( ) ( )G t p t, toute trajectoire faisable et admissible à la fois (voir le
glossaire). Nous appelons trajectoire de préservation toute trajectoire faisable telle que T = ∞ .
Soit l'ensemble des trajectoires de préservation : ′D
( ) ( ) [ [ ( ) ( ){ }′ = =∈ ∞D , ;,G t p t G G G t Gt 0 00 ≤ .
Par opposition, est appelée trajectoire de passage toute trajectoire telle que T prend une
valeur finie. Soit l'ensemble des trajectoires de passage : ′′D
( ) ( ) [ ] ( ) ( ){ }′′ = = ≤∈D , ; ;,G t p t G G G t G T Mt T0 00 0≤ < .
Graphique 4.1 : Sous-ensembles de trajectoires faisables
G
G
P
D'
D''
G
0
I'
←↑
↑→
<G,p>
∧ ∧
p
G
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Catastrophes climatiques irréversibles
Dans le graphique 4.1, nous représentons les ensembles ′D et ′′D . Tant que G G< , la
contrainte (4.1a) et les conditions (4.3) et (4.4) sont identiques à leur homologue du problème
n°1. Les lemmes 1.1 et 1.2 s’appliquent donc et les isoclines et P ont les mêmes
propriétés que dans le problème n°1. Les ensembles
G
′D et ′′D sont séparés par la trajectoire
faisable $ , $G p (en pointillés dans le graphique).
A chacune des deux stratégies que nous avons définies peut être associée une infinité de
trajectoires faisables. Dans les sous-sections 4.2.2 et 4.2.3, nous sélectionnerons dans ces
deux ensembles la trajectoire qui est optimale parmi ses semblables. Nous définirons donc
une trajectoire de préservation et une trajectoire de passage optimales, chacune étant la
meilleure du point de vue du bien-être, compte tenu de sa problématique propre. Dans la
sous-section 4.2.4, la comparaison des bénéfices tirés de chacune d'elle nous indiquera
laquelle devrait être choisie.
4.2.2 - La meilleure stratégie de préservation
Soit ′ ′ ∈ ′G p, D la trajectoire optimale du programme restreint aux trajectoires de
préservation, i.e. aux éléments de ′D . Cette trajectoire de préservation optimale est solution
du sous-problème particulier défini par un horizon temporel infini.
Lemme 4.1 : La trajectoire de préservation optimale respecte la condition de transversalité
suivante (Léonard & Long, corollaire 10.3.1 du théorème 10.3.2) 7 :
( ) ( ) ( )[ ]lim
t
te p t G t G t
→∞
− ′ ′ − ≥δ . . . 0 , (4.5)
pour toute trajectoire faisable ( )G t .
7 - Nous rappelons ici que nous avons implicitement changé le signe de la variable adjointe du modèle pour
faciliter l’interprétation. Ceci a pour effet de modifier la condition de transversalité de la façon suivante :
, où ( ) ( ) ( )[ ]lim
t
te t G t G t
→∞
− ′ − ′ ≥δ π. . . 0 ( )π t est la variable adjointe avant le changement de signe, devient
, avec ( ) ( ) ( )[ ]lim
t
te p t G t G t
→∞
− ′ ′ − ≥δ . . . 0 ( ) ( )p t t= −π .
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Catastrophes climatiques irréversibles
Pour trouver la trajectoire ′ ′G p, , nous empruntons le raisonnement de Léonard & Long
(1992) pour un problème approchant (exemple 10.3.2., pp. 338-340). Appliqué à notre cas, il
nous amène à affirmer que la trajectoire optimale du problème n°3 limité à est la
trajectoire
′D
$ , $G p stoppée en ′I . Ce point est situé à l'intersection de la droite G G= et de
l'isocline . Léonard & Long (1992, p. 340) avancent l'explication suivante : « L'intuition
sous-jacente à cette supposition est que l'état stationnaire est hors de portée et qu'un substitut
doit être trouvé »
G
8.
Graphique 4.2 : Trajectoire de préservation optimale
G
p
Go
G
P
I' (G ;p'∞ )
G
<G',p'>
Théorème 4.1 : La trajectoire de préservation optimale conduit l'économie de l'état initial à
l'état stationnaire situé à l'intersection de la frontière de préservation G G= et de l'isocline
. Le point stationnaire est rejoint à une date finie G θ .
8 - « The intuition behind this guess is that the steady state is now out of bounds and a substitute must be
found ». L'état stationnaire auquel il est fait référence est pour nous celui du modèle du problème n°1, hors
d'atteinte à double titre dans notre cas : la contrainte (4.1e) et la problématique du seuil critique.
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Catastrophes climatiques irréversibles
Preuve : Puisque le point (′ ′∞I G; p ) est au-dessus de l'isocline P , on a &p > 0. Il n'est donc pas
stationnaire. Mais, lorsque le système atteint le point ′I , la contrainte (4.1e) est serrée et il
existe λ > 0 & tel que p = 0 (voir la relation (4.4)). A cette condition, ce point devient
l'équilibre stationnaire du problème restreint. On prouve ensuite l'optimalité de cette
trajectoire en prouvant qu’elle satisfait le lemme 4.1. Puisque toute les trajectoires faisables
sont bornées par 0 et G , on a en effet [ ( )]t G t
→∞
−
∞′
δ . . .lim
t
e p G − ≥ 0 .
4.2.3 - La meilleure stratégie de passage
Soit ′′ ′′ ∈ ′′G p, D et la solution optimale du problème restreint aux trajectoires de
passage, i.e. à l'ensemble .
′′T
′′D
Lemme 4.2 : La trajectoire de passage optimale satisfait les conditions de transversalité
(Léonard & Long, théorèmes 7.6.1 et 10.3.2) :
( ) ( )~H , .0 G p W GT′′ = δ , (4.6a)
. (4.6b)
′′ ≥pT 0
Preuve ‘‘heuristique’’ : Voir l'annexe 4.1.
Graphique 4.3 : Carte des iso-hamiltoniens
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Catastrophes climatiques irréversibles
C'
C''
C'''
G
I'
H G = 0
H p = 0
G
p
G
I''
La trajectoire de passage optimale est nécessairement sous la trajectoire ′ ′G p, strictement
(voir le graphique 4.1). Son état terminal ( )G pT, ′′ vérifie le lemme 4.2. Nous utilisons le
graphique 4.3 pour montrer que la condition (4.6a) du lemme 4.2 admet zéro, une ou deux
racines. Les courbes représentées sont le lieu des points où le Hamiltonien maximisé
est constant dans le plan ( (voir l’annexe 4.2). Dans la démonstration qui suit,
nous utilisons les ‘‘iso-hamiltoniens’’ qui prennent
(~H ,0 G p) )G p,
′C , ′′C et ′′′C pour valeurs. On démontre
que ′ > ′′ > ′′′C C C 9.
Cas n°1 : Si ( )′ =C W Gδ . , l'iso-hamiltonien ′C et la droite G G= ont deux points communs.
Leurs coordonnées vérifient le lemme 4.2. Celui situé au-dessus de l'isocline ne nous
intéresse pas car aucune trajectoire de passage ne peut l'atteindre (voir le graphique 4.1). Seul
le point
G
′′I doit être retenu.
9 - Sachant que et que tout point au-dessus de est tel que
~
H &p G
0 = − G &G < 0 , et inversement, il s’ensuit que
croît avec (~H ,0 G p) p au-dessus de , et inversement. Pour G G donné, prend donc sa valeur
minimum sur l’isocline . Ainsi, tout iso-hamiltonien ayant au moins un point qui ne soit pas à la verticale
d’un autre iso-hamiltonien a une valeur plus grande que ce dernier.
(~H ,0 G p)
G
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Catastrophes climatiques irréversibles
Cas n°2 : Si ( )′′ =C W Gδ . , l'iso-hamiltonien correspondant et la droite G G= ont un unique
point commun respectant le lemme 4.2 (dans le graphique, ce point est confondu avec ′I ,
c’est-à-dire le point terminal de la trajectoire ′ ′G p, ).
Cas n°3 : Si ( )′′′ =C W Gδ . , la condition de transversalité (4.6a) n'admet pas de solution.
Remarque 4.1 : Ces résultats restent valables quelle que soit la position de la contrainte
environnementale G G= .
Le lemme 4.2 détermine entièrement la trajectoire de passage optimale ′′ ′′G p, . Dans les
deux premiers cas, il définit l'état terminal ( )G pT, ′′ du système. Celui-ci engendre de manière
unique la trajectoire optimale. Elle conduit l'économie de l'état initial ( )( )G p0 0, ′′ à lui-même.
Le temps nécessaire pour transférer le système de l'un à l'autre est ′′T . Dans le troisième cas,
il n'existe pas de point de passage respectant la condition (4.6a) et on ne peut pas trouver de
solution au problème n°2 issue de l'ensemble ′′D .
Théorème 4.2 : La trajectoire de passage optimale, si elle existe, conduit l'économie de l'état
initial à l'état (G pT, ′′) , avec tel que ′′ ≥pT 0 ( ) ( )
~
H , .0 G p W GT′′ = δ . Ce point est rejoint à une
date optimale finie. ′′T
Graphique 4.4 : Trajectoire de passage optimale
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Catastrophes climatiques irréversibles
G
p
Go
G
P
I' (G ;p'∞ )
G
<G'',p''>
<G',p'>
H °= δ.W( G )
I'' (G ;p'' T)
4.2.4 - Laquelle choisir ?
Le graphique 4.4 représente les deux réponses possibles à la catastrophe. Pour savoir
celle qui doit être choisie, il faut comparer les bénéfices nets des deux politiques. Le théorème
4.3 détermine définitivement ce choix.
Théorème 4.3 : Si le bien-être intertemporel associé à l’action de maintenir indéfiniment une
pollution égale au seuil critique est plus grand que l’héritage, la politique de préservation
optimale est solution du problème n°3. Réciproquement, si cette valeur est plus petite que
l’héritage, la politique de passage optimale existe et est solution du problème n°3.
Preuve : pour G G= fixé, le Hamiltonien maximisé est minimum au point stationnaire ′I de
la politique de préservation optimale : quel que soit p , on a ( ) (~H , ~H ,0 0G p G p≥ ′∞ ) . Cet état
stationnaire procure un bien-être intertemporel courant égal à ( )u C′∞ δ , où est la
consommation stationnaire correspondante, et on a
′∞C
( ) ( )~H ,0 G p u C′ = ′∞ ∞ .
Si le bien-être stationnaire de la politique de préservation optimale est supérieur à l’héritage,
i.e. si ( ) ( )u C W G′ >∞ δ , il est préférable de rester en ′I indéfiniment. En outre, dans ce cas,
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Catastrophes climatiques irréversibles
on a ( ) ( )~H , .0 G p W G′ >∞ δ . Dès lors, puisque le Hamiltonien est minimum en ce point, il
n’existe pas de valeur de p vérifiant ( ) ( )~H , .0 G p W G= δ et la politique de passage optimale
n’existe pas (en fait, elle est confondue avec la trajectoire de passage optimale).
Si le bien-être stationnaire de la politique de préservation optimale est inférieur à l’héritage,
i.e. si ( ) ( )u C W G′ <∞ δ , il est préférable de franchir le seuil critique une fois que cet état est
atteint. Mais, la stratégie consistant à suivre la politique de préservation, puis à franchir le
seuil critique au dernier moment n’est pas solution puisque ( ) ( )~H , .0 G p W G′ <∞ δ 10. Elle est
donc dominée par la stratégie de passage optimale. De plus, cette dernière existe puisque
tel que ∃ ′′ < ′∞ p pT ( ) ( )
~
H , .0 G p W GT′′ = δ .
4.3 - Interprétations
Dans cette section, nous répondrons aux questions suivantes : Les catastrophes
naturelles provoquées par notre comportement sont-elles socialement acceptables ? Si oui,
dans quelles limites ? La durée de la phase précédant l'événement redouté est-elle
proportionnelle aux dommages prévus ? La propension à provoquer la catastrophe augmente-
t-elle quand le seuil critique devient plus contraignant ?
10 - Cette solution coïncide en fait avec celle proposée par Gottinger (1991).
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Catastrophes climatiques irréversibles
4.3.1 - Acceptabilité de la catastrophe
Le théorème 4.3 prouve que, dans certaines circonstances, il peut être préférable de
subir une catastrophe écologique plutôt que de supporter le coût économique de la
préservation de l’environnement.
De fait, la stratégie de préservation de l'équilibre écologique nécessite une mesure plus
contraignante. Le prix de la pollution doit être plus grand, la consommation et le bien-être
plus faibles pendant une période plus ou moins longue. Si le dommage évité grâce à cette
norme environnementale sévère ne couvre pas son coût, alors la catastrophe écologique est
jugée socialement acceptable.
Evidemment, l’acceptabilité de la catastrophe dépendra de l’ampleur des dommages qui
l’accompagnent. Le graphique 4.3 permet de montrer que les catastrophes majeures ont moins
de chances d’être subies que les autres.
Dans le cas n°1 (iso-hamiltonien ′C ), il est optimal de polluer au-delà du niveau critique
(puisqu’on accepte la catastrophe à une date T finie). Partant de là, si l'ampleur du dommage
irréversible croît suffisamment, autrement dit si le bénéfice ( )W G diminue au point de se
retrouver, par exemple, dans le cas n°3 (iso-hamiltonien ′′′C ), alors la préservation est
préférée puisqu’il devient préférable de chosir T = ∞ .
Ce résultat se comprend très bien et va de soi. Quelle que soit la gravité de la catastrophe, le
coût de la préservation ne change pas. En conséquence, si les dommages de la catastrophe
deviennent plus lourds, le rendement de la préservation coît, et ce, éventuellement, jusqu’à
couvrir la totalité de son coût.
Notre réflexion pourrait sembler cynique. Pour atténuer ce sentiment, notons que, dans le cas
extrême où le monde disparaît avec la catastrophe, la stratégie de préservation est toujours
choisie, même si elle génère un coût très important. En effet, si ( )W G est nul, quelle que soit
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Catastrophes climatiques irréversibles
la valeur du seuil critique, il n'existera jamais de point de passage satisfaisant le Lemme 4.2.
En extrapolant, on imagine bien que les catastrophes majeures, celles conduisant à une
réduction conséquente du bien-être, seront toujours évitées.
4.3.2 - Délai d’attente
Le délai d’attente optimal avant de subir la catastrophe croît avec la gravité de la
catastrophe. Au-delà d’un certain niveau, il devient infini car la stratégie de préservation
devient préférée. Pour démontrer cela, nous faisons varier l'ampleur de la catastrophe pour un
seuil critique donné, ce qui revient à modifier la valeur de l’héritage.
Le bénéfice obtenu en demeurant infiniment au point stationnaire de la trajectoire de
préservation est ( )u C ′∞ δ , étant le niveau de consommation stationnaire de la politique de
préservation optimale. Si l’héritage légué aux générations vivant après la catastrophe a une
valeur inférieure à
′∞C
( )u C ′∞ δ , la catastrophe ne sera jamais subie : le délai est infini.
Soit ( )V G l’héritage maximum que l’on obtiendrait si la catastrophe n’avait aucun effet sur le
bien-être. Il se détermine en suivant la trajectoire optimale du problème n°1 lorsque l'état
initial est G . Soit W une valeur plus grande encore du bénéfice. On a ( ) ( )u C V G W′ < <∞ δ
et, quel que soit l’héritage ( )W G à valeur dans l'intervalle ( )]u C W′∞ δ , ] , il est toujours
préférable de subir la catastrophe à une date finie.
Dans le graphique 4.5, nous représentons les trajectoires solutions du problème n°3
lorsque la fonction d’héritage prend les valeurs ( )u C dW′ +∞ δ ( dW ), → +0 ( )V G et W . A
valeur illustrative uniquement, les trajectoires portent des points équidistants en termes de
temps. La durée écoulée entre deux points consécutifs est la même pour toutes les trajectoires.
Graphiquement, l'éloignement de deux points dépend donc de la vitesse de déplacement du
système.
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Catastrophes climatiques irréversibles
Graphique 4.5 : Délais optimaux avant la catastrophe
G
P
p
GGo G
( )u C dW′ +∞ δ
( )V G
W
Remarque 4.2 : Le temps mis pour atteindre la catastrophe est d'autant plus long que la
trajectoire est proche de l'isocline G. Ceci tient au fait que est d'autant plus grand que le
prix implicite du polluant est petit.
&G
La trajectoire dont le point terminal appartient à l'iso-hamiltonien ( )V G est confondue avec
la trajectoire optimale du problème n°1 sur la portion considérée. Puisque ( )V G est le
bénéfice maximum du problème n°1 lorsque l'état initial est le seuil critique, la proposition
susdite découle directement de l'équation Hamilton-Jacobi-Bellman. Cette trajectoire nous
sert ci-dessous de point de comparaison. Elle est solution des problèmes n°1 et n°3 à la fois
lorsque la catastrophe est sans conséquence sur le bien-être. Nous supposons que dix périodes
sont nécessaires pour atteindre le seuil critique dans ce cas (voir le graphique 4.5).
Lorsque ( ) ( ) ( )]W G u C V G∈ ′∞ δ , ] , le franchissement du seuil critique est optimal mais
nuisible, comparé à la trajectoire de référence. Il semblerait donc naturel de chercher à
retarder cet événement. Prenons, par exemple, le cas limite ( ) ( )W G u C dW= ′ +∞ δ . La
trajectoire correspondante figure sur le graphique 4.5. Comme elle est plus proche de
l’isocline que la trajectoire précédente, on en déduit qu’elle met plus longtemps à rejoindre G
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Catastrophes climatiques irréversibles
la pollution critique. Cette durée est le délai maximum possible pour atteindre le seuil critique
(en dehors du cas où il n'est jamais atteint).
A l'opposé, lorsque ( ) ( )[W G V G W∈ , ] , le fait de franchir le seuil critique est non seulement
optimal mais il constitue, en plus, un bienfait par rapport au cas de référence. Cette trajectoire
se situe en dessous de la trajectoire de référence. Elle rejoint donc le seuil critique plus vite
que la trajectoire de référence.
4.3.3 - Variation du seuil critique
Pour des valeurs suffisamment petites du seuil critique, une baisse de celui-ci rend la
trajectoire de passage relativement plus intéressante. Pour des valeurs plus grandes, le même
phénomène a des conséquences ambiguës sur le choix optimal.
Si G diminue, la valeur d’héritage ( )W G augmente (on sait que ( ) ( )′ = − <W G p T 0 ). Toutes
choses égales par ailleurs, le lemme 4.2 a donc plus de chances d'être vérifié (voir le
graphique 4.3 et le raisonnement subséquent). Ce premier effet rend la trajectoire de passage
optimale relativement plus intéressante. Dans le même temps, le point ′I se déplace vers la
gauche (voir le graphique 4.3), si bien que le Hamiltonien maximisé calculé au point ′I
augmente (il est situé sur un iso-hamiltonien à gauche de l'ancien). Le lemme 4.2 a donc
moins de chances d'être vérifié. Ce second effet accroît l'attrait de la trajectoire de
préservation optimale. Il n'est donc pas possible de conclure.
L'ambiguïté de ce résultat disparaît lorsque l'on considère les iso-hamiltoniens situés à gauche
du point d'intersection des isoclines et du graphique 4.3. Dans ce cas, le
second effet joue dans le même sens que le premier puisque le Hamiltonien maximisé calculé
au point
~
H p = 0
~
H G = 0
′I diminue lorsque le point ′I se déplace vers la gauche. La trajectoire de passage
devient donc encore plus intéressante.
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Catastrophes climatiques irréversibles
Sans risque d’erreur, on peut dire que toute diminution du seuil critique rend plus
contraignant l'objectif de préservation environnementale. Pratiquement, il faut augmenter le
prix initial de la pollution pour y parvenir. Ceci a pour effet d'accroître le coût d'opportunité
de cette mesure (ceci est d'autant plus vrai que le seuil critique est déjà petit). Graphiquement,
ceci se traduit par un déplacement de la trajectoire de préservation vers le haut. Il s’ensuit
que, plus la catastrophe est imminente, plus la stratégie de passage est attractive.
4.4 - Fonction d’héritage
Jusqu’ici, nous nous sommes concentrés exclusivement sur la période précédant la
catastrophe écologique. Pour être plus général, nous ne posions aucune hypothèse particulière
la concernant, en nous contentant d’affirmer que l’ensemble des informations utiles était
contenu dans la valeur d’héritage. Il nous reste maintenant à montrer comment se détermine
cette valeur.
4.4.1 - Le bien-être après la catastrophe
A la date où la catastrophe se produit, l’Humanité hérite d’un système écologique
qu’elle va exploiter au mieux pour améliorer son propre bien-être. Le programme
intertemporel ainsi défini débute à l’instant T , avec un stock de pollution G . Il détermine la
fonction d’héritage ( )W G T, .
Si le problème est autonome, on pourra toujours prouver que ( ) ( )W G T e W GT, ..= −δ (voir la
relation (1.9)). Cette propriété pose simplement que la valeur courante du bénéfice après la
catastrophe dépend uniquement du seuil critique, pas de la date à laquelle il est rejoint. Cette
propriété est très intuitive. Cela étant dit, il devient facile de déterminer la valeur optimale de
l’héritage ( )W G et de retrouver une formulation identique au problème n°3.
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Catastrophes climatiques irréversibles
Exemple 4.1 : Supposons que la catastrophe provoque une perte de bien-être constante, égale
à x , jusqu'à la fin des temps. On détermine l’héritage en résolvant le programme suivant :
( )
( )
( )( )[ ]W G e u C t x dt
g t
t= −−
∞
∫max δ . .0
sous les contraintes
( ) ( ) ( )& .G t g t G t= − β ,
( ) ( ) ( ) ( )( )C t Q t f g t G t≡ = , ,
( )G G0 = ,
g tbg≥ 0 , . ∀t
Puisque le dommage imputable à la catastrophe est identique quelle que soit la trajectoire
empruntée, la solution optimale de ce problème est confondue avec celle du problème n°1 sur
l'intervalle considéré.
Preuve :
( )
( )( )[ ]
( )
( )( )
( )
( )( )max max max
g t
t
g t
t
g t
te u C t x dt e u C t dt x e u C t d−
∞ −∞ −∞− ⇔ − ⇔∫ ∫ ∫δ δ δ
. .. .
0 0 0
tδ . . .
4.4.2 - A l’instant de passage...
Nous nous intéressons, dans ce paragraphe, aux modifications que subit la politique
optimale à l’instant du franchissement du seuil critique. Avant la catastrophe, nous savons
qu’il est souhaitable de taxer fortement les émissions en vue de retarder son apparition. Par
contre, une fois qu’elle est subie, cette motivation disparaît et il devient inutile de taxer les
émissions à ce point (en tout cas, on peut le penser). Il est donc probable que la taxe optimale
avant la catastrophe soit plus élevée que son équivalent après cette dernière. C’est ce que
nous allons démontrer dans cette section, en utilisant l’exemple 4.1.
Lemme 4.3 : La condition de passage (4.6a) du lemme 4.2 est satisfaite lorsque les
Hamiltoniens maximisés juste avant et juste après l'événement sont égaux.
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Catastrophes climatiques irréversibles
Preuve : L'équation de Hamilton-Jacobi-Bellman implique que le hamiltonien maximisé du
nouveau programme d’optimisation débutant après la catastrophe vérifie la propriété suivante
: ( )( ) ( )~H , .0 G p T W G= δ . La comparaison des Hamiltoniens supplée donc l'utilisation de la
condition (4.6a).
Utilisons le lemme 4.3 pour le cas où la catastrophe réduit les flux de bien-être d’un montant
x constant. et ( ) ( )( )( )~H , , , . &0 G p u f g G p G p G= − ( ) ( )( )( )~H , , , . &0 G p u f g G p G x p G= − −
)
sont
les expressions des Hamiltoniens maximisés avant et après la catastrophe respectivement
( est la demande d’émission : voir la relation (1.6)). Dès lors, si le prix
immédiatement avant la catastrophe et le prix immédiatement après la catastrophe sont égaux,
la condition (4.6a) ne sera jamais remplie.
(g G p,
Preuve : Si ( ) ( )p T p T p= =− , on a : ( )( ) ( )( )~H , ~H ,0 0 0G p T G p T x− =− − < . On démontre
que le lemme 4.3 est vérifié si et seulement si ( ) ( )p T p T− > lorsque x > 0 .
La date T est donc un point de jonction et la variable adjointe est discontinue en ce point. La
possibilité d'une telle discontinuité avait été envisagée dans la proposition 4.1.
4.5 - Application numérique
L’objectif de l’application numérique présente est de prouver la supériorité de la
trajectoire de passage optimale (voir la sous-section 4.2.3) sur la proposition de Gottinger
(1991). La spécification utilisée a déjà été employée dans la section 1.3 du chapitre 1. Le
paramètrage des fonctions ne change pas, en dehors de la valeur de la constante . Celle-ci
est supposée nulle tant qu’un seuil critique de pollution, fixé à
a
G = 20, n’a pas été dépassé.
Ce scénario traduit donc le cas de figure d’une économie qui ne subirait aucun dommage
climatique avant G . Le niveau de pollution initial est fixé à G0 10= .
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Catastrophes climatiques irréversibles
Compte tenu de ce qui vient d’être dit, les fonctions du modèle s’écrivent :
( )f g G g, = ρ , (4.7)
( )u C C=
−
−1
1
1
σ
σ. . (4.8)
L’équilibre stationnaire de la politique de préservation optimale se caractérise par un stock de
pollution égal au seuil critique et une émission juste suffisante pour maintenir celui-ci à cette
valeur : ′ =∞G G et ′ =∞g Gβ . . Le bien-être intertemporel associé au fait de rester
indéfiniment en ce point est ( ) ( ) ( )[ ]u C G′ = −∞ −δ β σ δσ. .1 1 .
Pour s’assurer que la politique de passage soit préférable à la politique de préservation,
l’héritage, i.e. le bien-être qui est obtenu à l’instant du franchissement du seuil critique, est
supposé égal à ( )W u C= ′∞101, . δ .
Les conditions d’optimalité (4.3) et (4.4) et la condition de transversalité (4.6a)
s’écrivent :
( )ρ ρ σ. .g p1 1− − = , (4.9)
( )& .p p= + −δ β λ , (4.10)
avec λ ≥ 0 , G G− ≥ 0 et ( )λ. G G− = 0 ,
( ) ( ) ( ) ( )( )g T p T g T G W
ρ σ
σ
β δ
.
. .
1
1
−
−
− − = . . (4.11)
La fonction de demande d’émission se déduit de la relation (4.9) :
( )g p p
X
=
⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟
ρ
, (4.12)
où . ( )( )X = − − −ρ σ. 1 1 1
Tant que ( )G t G< , la trajectoire du prix implicite de la pollution se détermine aisément
en résolvant l’équation différentielle (4.10). Les autres trajectoires, celles de l’émission et du
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Catastrophes climatiques irréversibles
stock de gaz à effet de serre se déduisent sans difficulté de la première. On écrit donc les
relations suivantes :
( ) ( )p t p e t= +0 . .δ β , (4.13)
( ) ( )g t p eX= ⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟ +0
ρ
δ β. .
X
t. , (4.14)
( )
( )( )
( )
G t e G
p e
X
t
X t
= +
⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟
−
+ +
⎡
⎣
⎢
⎢
⎤
⎦
⎥
⎥
−
+ +
β
β δ β
ρ β δ β
.
. .
. .
.0
0 1
X
. (4.15)
Nous recherchons maintenant et p0 T tels que ( )G T G= et tels que la condition de
transversalité (4.11) soit satisfaite. En utilisant le module de résolution de systèmes
d’équations non linéaires de MathCad 6.0, nous avons déterminé que les valeurs et
vérifiaient ces conditions. Elles définissent la trajectoire de passage optimale.
′′ =p0 0 04,
′′ =T 11104,
Pour déterminer la trajectoire de préservation optimale, il faut trouver et p0 θ tels que
( )G Gθ = et tel que ( )g Gθ β= . . Les valeurs solutions ′ =p0 0 064, et θ = 3959, sont obtenues
par la même méthode que précédemment.
Notons le bien-être intertemporel obtenu lorsque l’économie met (V G T w0 , , ) T unités
de temps pour rejoindre le seuil critique G et lorsque le bien-être associé à cette trajectoire
est augmenté de . A partir des relations précédentes, on démontre que : e t−δ . .w
( )
( ) ( ) ( )( )
( ) ( )
V G T w
p e
X
e
X X T
T
0
0
1 11
1
1
1
, , . .
. . .
.
. . . . . .
.=
−
⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟
−
− + −
+
− − + −
−
σ ρ ρ σ δ β δ
ρ σ ρ σ δ β δ
δ w . (4.16)
( )(V G u C0 , ,θ ′∞ )δ
)
mesure alors le bien-être intertemporel associé à la politique de
préservation optimale et l’équivalent pour la politique de passage optimale. La
solution envisagée par Gottinger, réinterprétée dans le cadre du problème n°3, consisterait à
suivre la politique de préservation optimale jusqu’à atteindre
(V G T W0 , ,′′
G puis à accepter ensuite la
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Catastrophes climatiques irréversibles
catastrophe à condition que ( )W u C> ′∞ δ , ce qui est le cas par hypothèse. Le bien-être
correspondant est donc égal à . On obtient les résultats suivants : (V G W0 , ,θ )
• Stratégie de préservation : ( )( )V G u C0 131712, , ,θ δ′ =∞ ;
• Stratégie de passage selon Gottinger : ( )V G W0 131824, , ,θ = ;
• Stratégie de passage : . ( )V G T W0 132 167, , ,′′ =
L’application numérique confirme, d’une part, que l’évitement d’une catastrophe écologique
n’est pas nécessairement préférable et, d’autre part, que la trajectoire de passage optimale,
mise en évidence dans ce chapitre, est supérieure à la solution qui était proposée par
Gottinger.
4.6 - Conclusion
L’analyse des catastrophes climatiques irréversibles conduit à définir deux stratégies
d’action. L’une consiste à parer la catastrophe en imposant une norme environnementale,
définie par un niveau de pollution maximale ; nous l’avons baptisée ‘‘stratégie de
préservation’’. L’autre consiste seulement à retarder la catastrophe ; nous l’appelons
‘‘stratégie de passage’’. Nos résultats établissent que :
• la préservation est préférable dans le cas de catastrophes majeures. Par contre, pour des
dommages ponctuels d’amplitude plus réduite, le dommage évité ne couvre pas le coût de
la norme de pollution maximale requise pour prévenir la catastrophe, si bien que cette
mesure n’est pas justifiée ;
• lorsqu’elle est préférée, la stratégie de passage s’écarte de la trajectoire qui serait suivie en
l’absence de catastrophe, de manière à retarder l’instant où la catastrophe sera subie.
L’avantage procuré par ce délai provient du mécanisme d’actualisation.
Replacé dans un contexte plus général, les résultats obtenus ici ont plusieurs conséquences
importantes. En premier lieu, la prise en compte des dommages catastrophiques modifie
considérablement la forme de la politique optimale de lutte contre l’effet de serre. Dans le cas
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Catastrophes climatiques irréversibles
d’un dommage majeur, elle s’exprime sous la forme d’une norme environnementale, si bien
que le prix implicite de l’émission agrège deux composantes : la première exprime la valeur
présente des dommages marginaux futurs et l’autre provient de la contrainte
environnementale fixée. Ainsi, si les climatologues établissent avec plus de certitude le bien-
fondé de certaines des hypothèses catastrophiques, comme par exemple la déviation du Gulf
Stream, la politique de l’effet de serre prendra une toute autre tournure. Si les dégâts encourus
s’avéraient importants, il faudrait envisager de limiter les émissions de gaz à effet de serre
suffisamment pour se mettre à l’abri. La taxe optimale sur les émissions pourrait alors être
élevée.
En second lieu, ces résultats remettent cruellement en question la compatibilité entre le critère
utilitariste et le concept de développement soutenable. Si l’on accepte la définition du rapport
Brundtland (WCED, 1987), celle d’un développement qui garantit la satisfaction des besoins
présents sans hypothéquer la faculté des générations futures à satisfaire les leurs, il semble
que la stratégie de passage rentre en conflit avec les principes de soutenabilité. En effet, elle
conduit à la destruction d’une composante du patrimoine naturel, sans possibilité d’un retour
à la situation initiale. Ceci serait évidemment jugé inacceptable par les générations futures.
Dans ces conditions, un recours plus systématique à la stratégie de préservation n’est-il pas
indiqué ?
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Annexes / Chapitre 4
Annexe 4.1 : Démonstration des conditions transversales
Les conditions de transversalité des lemmes 4.1 et 4.2 découlent des théorèmes 10.3.2
(et son corollaire) et 7.6.1 de Léonard & Long (1992) respectivement. Néanmoins, la preuve
développée dans cette annexe, bien qu’elle ne soit pas générale car elle suppose que la
fonction de bien-être intertemporel est dérivable, a l’avantage de les présenter de façon
pédagogique.
Soit la fonction de valeur optimale définie pour une valeur donnée de T :
( )
( )
( )( )V G T e u C t dt
g t
tT
0 0
, ..= −∫max δ .
Dans le problème n°3, nous cherchons à maximiser ( ) ( )V G T e W GT0 , ..+ −δ , sous les
contraintes ( )G G T− ≥ 0 et T ≥ 0 . Posons donc le lagrangien associé à ce programme :
( ) ( ) ( )( )L , . ..= + + − +−V G T e W G G G T TT0 1δ λ λ .2
)
.
En supposant que est dérivable par (V G T0 , T et ( )G T , les conditions du premier ordre sont
les suivantes :
( ) ( ) ( )L , . . . &.T T TV G T e W G G T= − − +−0 1 0δ λδ ≥2λ (égalité pour une solution finie),
( ) ( ) ( )L ,G T G TV G T= −0 1 0λ = ,
avec
λ 1 0≥ , ( )G G T− ≥ 0 et ( )( )λ 1 0. G G T− = ,
λ 2 0≥ , T ≥ 0 et λ 2 0.T = .
Or, dans l’appendice 2, nous montrons, pour le cas général, que :
( ) ( ) ( )( )V G T e G T p TT T0 0, .
~
H ,.= −δ ,
( ) ( ) ( )V G T e p TG T T0 , ..= −δ .
172
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Annexes / Chapitre 4
On peut dresser le tableau des conditions de transversalité suivant :
Solution pour G
Solution pour T
( )G G T− > 0
(λ 1 0= )
( )G G T− = 0
(λ 1 0≥ )
T fini (λ 2 0= )
Aucun sens
dans
notre modèle
( ) ( )~H , .0 G p W G= δ
( )p T ≥ 0
T = ∞ (λ 2 0= ).
( ) ( )~H , .0 G p W G>δ
( )lim
t
te p t
→∞
− =δ . . 0
( ) ( )~H , .0 G p W G>δ
( )lim
t
te p t
→∞
− ≥δ . . 0
Les cases encadrés en gras sont celles qui nous intéressent pour retrouver les conditions de
transversalité des lemmes 4.1 et 4.2.
Annexe 4.2 : Carte des iso-profits
Nous cherchons à tracer dans le plan ( )G p, le lieu des points où . Le long
d'une de ces courbes, on a :
( )~H ,0 G p C=
( ) ( ) ( )d G p G p dG G p dpG p
~
H ,
~
H , .
~
H , .0 0 0 0= + = ,
avec et . ( )~H , &G G p p p0 = −δ ( )
~
H , &p G p G
0 = −
On a donc :
( )
( )
( )
dp
dG
G p C
G p
G p
p p
G
G
p
~
H ,
~
H ,
~
H ,
& .
&0
0
0=
= − =
−δ .
Nous pouvons utiliser les isoclines du plan des phases pour déduire la pente de la courbe
représentant le lieu des points où le hamiltonien maximisé est constant.
Nous connaissons déjà le lieu des points où . Tout point au-dessus de
cette isocline est tel que , et réciproquement.
( )~H , &p G p G0 0= − =
( )~H ,p G p0 0>
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195 195 |
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Annexes / Chapitre 4
Nous avons déjà mis en évidence l'isocline &p = 0 . Lorsque &p = 0 , on a .
Nous montrons de plus que la dérivée du hamiltonien par rapport à la variable d'état est une
fonction croissante de la variable adjointe :
( )~H , .G G p p0 0= − <δ
( ) ( )~H , . . . .Gp gG G g pG p f u f f u g0 0= + ′ + ′′ ≥β .
Pour G donné, il faut choisir une valeur de la variable adjointe supérieure à celle qui produit
le résultat &p = 0 pour avoir . L'isocline se situe donc au-dessus
de l'isocline . De plus, tout point du plan au-dessus de cette nouvelle isocline sera tel que
, et réciproquement. Sachant que
( )~H ,G G p0 0= ( )
~
H ,G G p
0 0=
P
( )~H ,G G p0 0> ( )
dp
dG
G
gg GG gG
gg gG
~
H
~
H .
~
H
~
H
.
~
H
~
H0
2
0
0
=
= −
−
+
≥
β
, le lieu des
points où est non décroissant. ( )~H ,G G p0 0=
Nous pouvons maintenant représenter la carte des ‘‘iso-hamiltoniens’’ :
~H G
0 0=
~H p
0 0=
p
G
Compte tenu des résultats obtenus, on peut affirmer que la pente de la courbe représentant
est positive dans les cadrans et , négative dans les cadrans et . ( )~H ,0 G p C=
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Incert i tudes
Chapitre 5
Incertitudes
L’incertitude intervient à toutes les étapes de l’élaboration d’une politique du climat. Ce
fait n’est plus à démontrer et apparaît avec trop de clarté dans le chapitre préliminaire sur le
phénomène de l’effet de serre et dans le chapitre 3 consacré à l’évaluation des dommages
climatiques.
L’étape de la prévision des changements climatiques introduit la première marge d’erreur. En
premier lieu, la relation entre la concentration atmosphérique de gaz à effet de serre et
l’accroissement de la température n’est pas fiable. Du fait d’un grand nombre de rétroactions
plus ou moins bien anticipées, les modèles de circulation générale prédisent, pour le
doublement de la concentration en dioxyde de carbone, que la température augmenterait
d’une valeur allant de 1,5 à 4,5 degrés Celsius, l’estimation médiane étant 2,5 degrés Celsius.
En second lieu, l’étape suivante, consistant à donner une signification géographique précise à
cette donnée moyenne, est mal gérée par les modèles de circulation générale. Les prévisions
de l’accroissement des températures et de l’évolution pluviométrique en différents points du
globe sont encadrées par des intervalles importants.
La marge d’erreur est accrue par l’étude des conséquences écologiques des changements
climatiques. Même s’ils disposaient de cartes climatiques précises pour décrire les
bouleversements à venir, les biologistes auraient beaucoup de difficultés à fournir des
prévisions fiables car, d’une part, les facultés d’adaptation des écosystèmes dépendent d’un
grand nombre de paramètres et, d’autre part, les équilibres écologiques sont souvent instables,
si bien qu’un écart faible des conditions climatiques peut engendrer des modifications très
grandes.
A cela, l’évaluation économique des dommages ajoute son lot d’approximations. Même dans
les meilleures conditions, les méthodes employées ne sont pas dénuées d’imperfection et sont
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Incert i tudes
sources d’erreurs : prix hédonistes, évaluation contingente et valeurs d’existence... Les
difficultés sont amplifiées par le fait que ces conditions sont loin d’être remplies. L’évaluation
économique des dommages climatiques exige de s’intéresser à l’incidence future de la
pollution et, donc, de formuler, implicitement ou explicitement, des hypothèses sur
l’évolution des préférences et des technologies. A l’évidence, ceci n’est pas possible sans
introduire à nouveau de nombreuses imperfections.
Bien que la liste puisse sembler déjà longue, l’essentiel du problème de l’incertitude est
peut-être ailleurs. Nous faisons ici allusion aux effets secondaires catastrophiques,
conjecturés par certains experts (climatologues et biologistes) mais qui, à ce jour, ne sont pas
modélisés ou modélisables. La communauté scientifique anticipe de tels risques mais reste
incapable d’en déterminer l’ampleur et les conditions d’apparitions.
La littérature économique consacrée à l’influence de tels risques sur la pollution optimale est
très limitée. Pethig (1991b) se penche sur les problèmes posés par une catastrophe dont la
gravité serait incertaine. Dans ces circonstances, le bien-être associé à la stratégie de passage
devient aléatoire, tandis que le bien-être attaché à la préservation de l’environnement reste
certain. Faute de mieux, le planificateur décide la politique à suivre en comparant ces deux
informations. Ce faisant, il s’expose à de mauvaises surprises si l’issue de la catastrophe est
très éloignée de ses prévisions.
Ce scénario est quelque peu simpliste. En réalité, selon toute évidence, la connaissance
des risques de catastrophe s’améliore avec le temps, grâce à des avancées scientifiques dans
la compréhension et la modélisation du climat. Le planificateur, s’il est conscient de cette
tendance, cherchera à exploiter ces opportunités d’apprentissage futures, dans l’idée de
réduire le risque de prendre la mauvaise décision. Pour étudier cela, nous supposerons, dans
une première section, que le planificateur devient pleinement informé de la gravité de la
catastrophe après un délai donné (les progrès scientifiques sont donc exogènes). Nous
définirons une stratégie de précaution, consistant à attendre les nouvelles informations avant
d’engager toute action irréversible. Nous la comparerons avec les deux attitudes définies dans
le chapitre 4. Deux résultats ressortiront de cette discussion. Premièrement, le bien-être de la
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Incert i tudes
stratégie de précaution est supérieur à celui de la préservation ; l’écart entre les deux définit
une valeur de quasi-option (Arrow et Fisher, 1974 ; Henry, 1974 ; Fisher & Hanemann,
1987), représentant la valeur attendue de l’information à venir. Le second résultat découle
directement du premier : ne pas tenir compte des progrès scientifiques, autrement dit persister
à choisir sa politique en comparant les gains de la préservation à ceux de la stratégie de
passage, n’est pas rationnel et introduit un biais systématique en faveur de la politique de
passage.
D’autres travaux ont porté sur la recherche de la réaction optimale devant une
catastrophe écologique dont l’échéance serait incertaine (Clarke & Reed, 1994 ; Gottinger,
1991 ; Roe & alli, 1994). Dans ce cas, c’est le seuil critique qui devient aléatoire. Sur ce sujet,
nous nous contenterons de proposer une synthèse rapide des résultats les plus importants et de
la méthode utilisée.
5.1 - Incertitude sur la gravité de la catastrophe et progrès scientifiques
Imaginons que la valeur de l’héritage ( )W G du problème n°3 soit une variable aléatoire
dont la distribution de probabilité est connue. Soit ( )h W la densité de probabilité de
l’héritage, avec ( ) [W G W W∈ min max, ] . Un tel scénario s’applique dans le cas d’une catastrophe
écologique dont l’échéance est prévue mais dont la gravité est mal connue.
5.1.1 - Aucun progrès scientifique
Confronté à la menace d’une catastrophe incertaine, il semble raisonnable que le
planificateur utilise l’espérance mathématique de la valeur d’héritage pour déterminer la
politique à suivre. S’il se comporte effectivement de cette manière, l’incertitude sur la gravité
de la catastrophe ne modifie le problème n°3 qu’en apparence et le théorème 4.3 s’applique. Il
implique que le choix optimal consiste à provoquer la catastrophe si l’état stationnaire de la
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Incert i tudes
politique de préservation optimale produit un bien-être intertemporel inférieur à l’héritage
attendu, i.e. si ( ) ( )[u C E W G′ <∞ δ ] (voir le chapitre 4).
Ce cas de figure est précisément celui que nous avons retenu pour construire le graphique 5.1.
Si cette configuration se présente, le gain certain ( )u C ′∞ δ est plus petit que l’espérance
mathématique de l’héritage. Le planificateur, s’il s’appuie sur cette dernière donnée pour
conduire sa politique, optera pour la trajectoire de passage optimale. Evidemment,
rétrospectivement, cette décision risque d’être regrettée si la catastrophe est plus grave que
prévu, autrement dit si l’héritage correspondant est plus petit que ( )u C ′∞ δ .
Graphique 5.1 : Distribution de probabilité de l’héritage
W( G )
h(W)
Wmin Wmax( )u C′ δ
Pour la suite, nous restreindrons l’analyse au cas de figure imaginé à l’instant, les autres ne
nous intéressant pas. Nous posons donc l’hypothèse :
( ) ( )[ ]u C E W G′ <∞ δ . (H1)
L’autre hypothèse importante sera que le gain certain de l’état stationnaire de la stratégie de
préservation est supérieur strictement au gain de la pire éventualité concernant la catastrophe :
( )W u Cmin < ′∞ δ . (H2)
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Incert i tudes
Cette seconde restriction s’impose puisque, dans le cas contraire, il n’y aurait aucune raison
de douter du bien-fondé de la politique de passage optimale. L’incertitude n’aurait alors
aucune conséquence sur la prise de décision.
5.1.2 - Progrès scientifiques dans la prévision de la catastrophe
Même si, en utilisant le calcul de l’espérance de l’héritage, le planificateur parvient à
décider de la trajectoire à suivre, il ne fait aucun doute qu’il préférerait obtenir d’autres
informations avant de prendre la décision irréversible de provoquer la catastrophe. Pour cela,
il pourrait même trouver justifié de financer des programmes de recherche pour favoriser les
progrès de la connaissance scientifique du climat.
Pour prendre en considération ce souhait, nous supposons, en nous inspirant de Pethig
(1991b), qu’une évaluation certaine de l’incidence de la catastrophe devient disponible à une
date τ donnée. A cet instant, la valeur de ( )W G devient donc connue avec certitude. Nous
supposons, de plus, que la date τ est postérieure au moment ′′T qu’aurait normalement
choisi le décideur pour provoquer la catastrophe :
τ > ′′T . (H3)
Compte tenu de l’hypothèse (H3), si le décideur souhaite utiliser les nouvelles informations
pour conduire sa politique, il doit renoncer à son choix initial (qui est de passer le seuil
critique à l’instant ′′T , par hypothèse) et différer la décision de provoquer la catastrophe
jusqu’en τ .
Cette stratégie renvoie, à notre avis, au principe de précaution, utilisé de plus en plus
fréquemment dans le droit international de l’environnement. Kiss (1993, p.72) nous dit qu’il
s’applique « dans des cas où des dommages ou une irréversibilité graves sont à craindre. ». La
Convention-cadre sur les changements climatiques (15 mai 1992) précise ce concept en
affirmant que, « quand il y a risque de perturbations graves ou irréversibles, l’absence de
certitude scientifique ne doit pas servir de prétexte pour différer l’adoption de ... mesures »
(Article 3, alinéa 3). Dans les discussions à venir, nous définirons la stratégie de précaution
comme une politique consistant à attendre les nouvelles données scientifiques avant de
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Incert i tudes
prendre toute mesure irréversible. La rationalité de cette stratégie sera prouvée en montrant
que le bien-être intertemporel attendu résultant est supérieur, dans certains cas, à celui de la
politique de passage optimale.
La stratégie de précaution consiste donc à fixer une norme de pollution maximale, égale au
seuil critique de concentration, jusqu’à la date τ . Le programme du planificateur se pose
alors sous la forme d’un problème de contrôle optimal avec horizon temporel fini (la date τ )
et contrainte sur la variable d’état (la condition (5.1e)) :
Problème n°4 :
( )( )max
g t
te u C t d
( )
. .−∫ δ
τ
0
t (5.1)
sous les contraintes
( ) ( ) ( )& .G t g t G t= − β , (5.1a)
, (5.1b) ( ) ( ) ( ) ( )( )C t Q t f g t G t≡ = ,
G G0 0bg= , (5.1c)
g tbg≥ 0 , , (5.1d) ∀t
( ) [G t G t≤ ∀ ]∈, 0,τ , (5.1e)
( )G Gτ = . (5.1f)
Les fonctions gardent les mêmes propriétés que dans le problème n°1.
5.1.2.1 - Résolution 1
La méthode de résolution est désormais habituelle. On forme le Hamiltonien généralisé
:
1 - Voir l’appendice 1.
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Incert i tudes
( ) ( )( ) ( ) (~ , , , . . .H =G g p u f g G p g G G G− − + −β λ ) . (5.2)
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Incert i tudes
Soit ( ) ( )′′′ ′′′G t g t, la solution du problème posé. Alors, il existe ( )p t continue et dérivable
par morceaux et la solution optimale respecte les conditions suivantes :
( ) ( )(f g G u f g G pg ′′′ ′′′ ′ ′′′ ′′′ =, . , ) , (5.3)
( ) ( ) ( )( )& . , . ,p p f g G u f g GG= δ β λ+ + ′′′ ′′′ ′ ′′′ ′′′ − , (5.4)
avec λ ≥ 0 , G G− ≥ 0 et ( )λ. G G− = 0 .
La solution optimale vérifie en outre la contrainte finale (5.1f). Cette contrainte se substitue
aux conditions de transversalité habituelles.
5.1.2.2 - La stratégie de précaution
Pour G G< , la contrainte (5.1a) et les conditions (5.3) et (5.4) sont identiques à celles
du problème n°1. Les isoclines et , i.e. le lieu des points où P G &p = 0 et &G = 0
respectivement, vérifient le lemme 1.2. Le diagramme des phases associé à ce problème est
donc identique à celui que l’on utilisait dans le chapitre 1, tant que la variable d’état reste
inférieure au seuil critique.
Graphique 5.2 : Trajectoire de précaution
G
p
G
G
P
I'
G
<G''',p'''>
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Incert i tudes
La trajectoire ′′′ ′′′G p, , représentée dans le graphique 5.2, décrit la politique de précaution.
Elle conduit l’économie de l’état initial G à l’état terminal 0 G en τ unités de temps. Plus le
délai d’attente avant d’obtenir les informations complémentaires est grand, plus la trajectoire
correspondante est élevée dans le diagramme des phases. Dans le cas où τ θ≥ , θ étant la
date à laquelle la trajectoire de préservation atteint G , la politique de précaution est
confondue avec cette dernière jusqu’en τ . Elle rejoint l’état stationnaire ′I de la politique de
préservation et y reste pendant l’intervalle [ ]θ τ, (voir le chapitre 4).
5.1.2.3 - Rationalité de la norme de précaution
Nous nous interrogeons maintenant sur les raisons qui poussent à choisir la stratégie de
précaution plutôt que la stratégie de passage optimale. En apparence, compte tenu des
hypothèses retenues, la politique de passage est préférable : elle maximise l’espérance
mathématique du bien-être intertemporel et la perspective d’une découverte future ne change
rien à ce résultat. A priori, la stratégie de précaution serait donc irrationnelle. En fait, nous
allons voir que la décision d’attendre les progrès scientifiques accroît l’espérance
mathématique des gains par élimination des issues les plus défavorables de la catastrophe.
Ceci pourrait justifier, dans certains cas, de préférer la stratégie de précaution.
Si le planificateur choisit d’emprunter la trajectoire de précaution, il acquière la possibilité de
choisir avec certitude entre la préservation et la catastrophe dans le futur. A l’instant τ ,
l’événement redouté est imminent puisque ( )G Gτ = . Il faut alors arbitrer entre la politique
de préservation optimale et la politique de passage optimale. Le critère rationnel pour prendre
cette décision est de comparer ( )u C ′∞ δ et l’héritage ( )W G , qui est maintenant connu avec
certitude. Si la première valeur est plus grande que la seconde, l’action consistant à rejoindre
instantanément l’état stationnaire ′I et à s’y maintenir indéfiniment pour préserver
l’environnement est préférable. Sinon, l’action de provoquer la catastrophe pour ‘‘toucher’’
l’héritage ( )W G doit être choisie. A l’instant τ , le bénéfice obtenu est donc égal à
( ) ( ){max ;u C W G′∞ δ } (en valeur courante).
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Incert i tudes
Vu de l’instant initial, puisqu’il ignore la valeur de ( )W G qui se réalisera
effectivement, le décideur doit se contenter d’évaluer l’espérance mathématique de
( ) ( ){max ;u C W G′∞ δ } . Sachant la densité de probabilité de l’héritage, elle est égale à :
( ) ( ){ }[ ] ( ) ( )( ) ( )( )E u C W G
u C
h w dw w h w dw
W
u C
u C
W
max ;′ =
′
+∞
∞ ′
′
∞
∞
∫ ∫δ δ
δ
δ
. .
min
max . (5.5)
L’avantage procuré par la stratégie de précaution apparaît clairement dans la relation (5.5).
Cette politique ‘‘soulage la conscience’’ du planificateur en lui offrant la possibilité
d’éliminer les réalisations les plus défavorables de la catastrophe, i.e. toutes celles telles que
( ) ( )W G u C< ′∞ δ . Mathématiquement, comme, par hypothèse, certaines réalisations possibles
de la catastrophe produisent un bien-être inférieur au bénéfice certain ( )u C ′∞ δ , l’espérance
mathématique du gain de la décision certaine à l’instant τ est strictement supérieure à
l’espérance mathématique de l’héritage.
Théorème 5.1 : Si l’hypothèse (H2) est satisfaite, alors
( ) ( ){ }[ ] ( )[ ]E u C W G E W max ;′ >∞ δ G .
La suite de nos discussions va donc consister à démontrer que cet avantage peut justifier
le choix de la stratégie de précaution. Adoptons les notations suivantes :
( )[ ]W E W G1 = ,
( ) ( ){ }[ ]W E u C W G2 = ′∞ max ;δ ,
( )
( )
( )( )V G T W e u C t dt e W
g t
tT T
0 0
, , . .. .= +− −∫max δ δ .
La fonction mesure l’espérance mathématique du bien-être intertemporel obtenu
lorsque est l’état initial du système, lorsque
(V G T W0 , , )
G0 T désigne la date à laquelle l’héritage est
reçu et lorsque W mesure la valeur attendue de l’héritage. Compte tenu de ces conventions,
mesure le bien-être intertemporel correspondant à la politique de passage ( )1V G T W0 , ,′′
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Incert i tudes
optimale, le bien-être associé à la stratégie de précaution et (V G W0 2, ,τ ) ( )( )V G u C0 , ,θ δ′∞ le
bien-être de la préservation.
Le cas particulier où l’on est à la veille de la catastrophe dès l’instant initial, c’est-à-dire
quand G G0 = , est riche d’enseignement. Dans cette hypothèse, le choix de provoquer la
catastrophe se pose dès l’origine et assure un gain ( )V G W W, ,0 1 = 1 . La stratégie de précaution
concurrente consiste, quant à elle, à limiter l’émission de gaz à effet de serre au niveau β .G
pour éviter la catastrophe jusqu’à l’instant τ . Graphiquement, le système reste au point
stationnaire ′I pendant τ unités de temps (voir le graphique 5.2). Le bien-être obtenu est
alors égal à ( ) ( ) ( )V G W e u C e W, , . .. .τ δδ τ δ τ2 21= − ′ +− ∞ − .
Si les progrès scientifiques dans la connaissance des effets de la catastrophe sont immédiats,
i.e. si τ = 0 , la stratégie de précaution sera toujours choisie si (H2) est vérifiée. En effet, en
vertu du théorème 5.1, on a alors ( ) ( )V G W W V G W W, , , ,0 02 2 1= > = 1 . Dans le cas où les
progrès scientifiques n’arrivent jamais, i.e. quand τ = ∞ , la décision de provoquer la
catastrophe est évidemment confirmée car ( ) ( ) ( )V G W u C V G W W, , , ,∞ = ′ <∞2 10δ = 1 du fait de
(H1). Pour des dates intermédiaires, soit lorsque 0< < ∞τ , on démontre qu’il existe un délai
limite τ tel que la stratégie de précaution est toujours choisie si τ τ< , et inversement.
Preuve :
On commence par prouver que le gain de la stratégie de précaution est une fonction monotone
décroissante de τ en trouvant que ( ) ( ){ }∂ τ ∂τ δ δδ τV G W e u C W, , . ..2 2 0= ′ − <− ∞ si (H1) et
(H2) sont satisfaites. Puisque ( ) ( )V G W V G W, , , ,τ = >0 02 1 et ( ) ( )V G W V G W, , , ,τ = ∞ <2 10 , il
existe nécessairement une date τ finie telle que ( ) ( )V G W V G W, , , ,τ 2 0= 1 . Toute valeur de τ
inférieure à τ sera telle que ( ) ( )V G W V G W, , , ,τ 2 0> 1 , et inversement. Ceci prouve le résultat
précédent.
La durée maximale d’apparition des nouvelles informations, au-delà de laquelle la politique
de passage sera automatiquement préférée, est égale à :
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Incert i tudes
( )
( )
τ
δ
δ
δ
= −
− ′
− ′
⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟∞
∞
1 1
2
.ln
W u C
W u C
. (5.6)
Ce délai limite s’interprète comme un indice d’ ‘‘impatience’’ du planificateur. Si les
avancées scientifiques attendues arrivent avant la date limite, le décideur trouve justifié
d’attendre avant de décider s’il doit ou non provoquer la catastrophe. Dans le cas contraire,
l’attente lui paraît exagérée et il préfère accepter le risque de provoquer la catastrophe avant
d’acquérir les informations complémentaires. La patience du planificateur est d’autant plus
limitée que le gain attendu de l’information scientifique est réduit et que le taux
d’actualisation est grand.
Il est plus difficile d’établir l’équivalent des résultats précédents dans le cas général où
G G0 < . Par définition, la politique de passage optimale détermine le délai optimal ′′T pour
provoquer la catastrophe. On a donc ( ) ( )V G T W V G T W0 1 0, , , ,′′ > 1 , quelle que soit la date T .
Il s’ensuit que l’action de retarder cette décision jusqu’en τ est nécessairement sous-optimale
pour cette évaluation de l’héritage.
Mais, ce raisonnement est erroné. Le fait d’accepter ce délai procure, en fait, un avantage
supplémentaire, égal à . Dès lors, alors que l’on peut affirmer, sans risque
d’erreur, que l’action de différer la catastrophe jusqu’en
( )W W e2 1− −. .δ τ
τ n’est pas rentable si elle n’est pas
assortie d’un avantage supplémentaire, i.e. ( ) ( )V G T W V G W0 1 0, , , ,′′ > τ 1 , on ne peut pas
exclure la possibilité que cette même décision devienne acceptable quand elle s’accompagne
d’une réévaluation de l’héritage de ( )W W e2 1− −. .δ τ unités, résultant de la réduction de
l’incertitude. Cela dépendra, comme dans le cas où G G0 = , de la rapidité des nouvelles
découvertes scientifiques et de la différence entre W et W . 1 2
Le graphique 5.3 présente plus clairement les discussions précédentes. Nous y
représentons deux courbes. La première correspond au gain intertemporel obtenu lorsque
l’héritage est W . Par définition, il est maximum lorsque la date de passage de la catastrophe
est
1
′′T . L’autre courbe donne le bien-être intertemporel quand l’héritage est W . Puisqu’elle 2
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Incert i tudes
n’a pas de sens avant l’instant τ des nouvelles découvertes scientifiques sur l’ampleur de la
catastrophe, elle n’est dessinée qu’à partir de cette date. Si le décideur ignore les avantages
procurées par ces nouvelles informations, il refuse de retarder l’instant de franchissement du
seuil critique, puisque la première courbe est décroissante, ce qui traduit une perte de bien-
être. Mais, dans la configuration représentée par ce graphique, on voit bien que ce
comportement serait en fait une erreur puisque le gain obtenu à l’instant τ est supérieur au
précédent.
Graphique 5.3 : Evolution du bien-être espéré en fonction du temps
mis pour atteindre le seuil critique
T
V(
G
o,
T,
W
)
( )V G T W0 1, ,
( )V G T W0 2, ,
τT''
5.1.3 - Valeur de quasi-option
Une valeur de quasi-option intervient dans l’évaluation d’un projet public ou privé à
chaque fois que la réalisation dudit projet est irréversible et que les bénéfices correspondants
sont incertains, mais susceptibles d’apprentissage au cours du temps (Arrow & Fisher, 1974 ;
Henry, 1974 ; pour une synthèse, voir Desaigues & Point, 1990). Hanemann (1988) interprète
ce concept comme la valeur attendue de l’information, conditionnelle au choix de ne pas
prendre la décision irréversible avant qu’elle n’apparaisse.
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Incert i tudes
Dans le scénario étudié précédemment, l’amélioration de la connaissance modifie le
rendement de la stratégie de préservation d’une valeur égale à la valeur de quasi-option. Elle
se calcule en
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Incert i tudes
faisant la différence entre le gain de la politique de précaution et celui de la préservation :
( ) ( ){ }[ ]( ) ( )( )VQO max ;= ′ − ′∞ ∞V G E u C W G V G u C0 0, , , ,τ δ θ δ , (5.7)
où
θ désigne l’instant où la trajectoire de préservation atteint l’équilibre stationnaire
G ,
τ est l’instant où l’incertitude sur l’ampleur de la catastrophe disparaît.
La relation (5.8) se comprend de la façon suivante. Si les progrès scientifiques n’apparaissent
jamais, ou si le planificateur ignore simplement la faculté d’apprentissage qui lui est offerte,
le gain de la préservation de l’environnement est ( )( )V G u C0 , ,θ ′∞ δ . Si les découvertes
scientifiques lèvent toute incertitude sur l’ampleur de la catastrophe à une date τ , le gain de
la préservation jusqu’à cet instant, assortie de l’opportunité de provoquer la catastrophe
ensuite, devient égal à ( ) ( ){ }[(V G E u C W G0 , ,τ δ max ;′∞ ]) ; il correspond, en fait, au bénéfice
de la stratégie de précaution. Lorsque la différence entre la seconde et la première est
positive, la valeur de quasi-option est positive.
Théorème 5.2 : Si les hypothèses (H1), (H2) et (H3) sont satisfaites, la valeur de quasi-option
est toujours strictement positive.
Preuve : voir l’annexe 5.1.
Le théorème 5.2 prouve que le planificateur commet une erreur lorsqu’il décide la stratégie à
suivre en comparant le gain certain de la préservation et l’espérance du gain de la trajectoire
de passage. En effet, ce faisant, il sous-estime le gain de la préservation, car il omet d’y
associer le bénéfice attendu de l’information à venir, représenté par la valeur de quasi-option.
5.2 - Incertitude sur l’échéance de la catastrophe
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Incert i tudes
Imaginons maintenant que la valeur du seuil critique G soit une variable aléatoire dont
la densité de probabilité est connue, avec ( )h G ( )′ ≥h G 0. Ce cas de figure se rencontre
lorsque
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Incert i tudes
l’échéance de la catastrophe est incertaine, autrement dit lorsqu’on ne connaît pas
précisément la valeur du seuil critique.
Pour résoudre ce problème, il faut distinguer deux périodes successives, l’une avant, et l’autre
après la catastrophe, comme dans le problème n°3. Par contre, la date de transition T à
laquelle la catastrophe se produit devient une variable aléatoire. Sa distribution de probabilité
se déduit de celle de G . Soit ( )ω t la densité de probabilité de T et la
probabilité que la catastrophe ait lieu après l’instant inclus. La probabilité que la
catastrophe soit imminente, sachant qu’elle n’a pas encore été subie, s’écrit
( ) ( )Ω t d
t
=
∞
∫ω τ τ
t
( ) ( ) ( )(ω t t h G tΩ = ) (Clarke & Reed, 1994 ; Roe & alli, 1994). Le fait d’exprimer la
probabilité de catastrophe en fonction du temps donne un problème formellement identique à
celui de Dasgupta & Heal (1974). Ceci permet de tirer profit d’une méthode de résolution
ingénieuse qu’ils suggèrent dans leur proposition 9. Nous reprenons leur démarche ci-
dessous.
Nous supposons que le planificateur politique cherche à maximiser l'espérance mathématique
du bien-être intertemporel :
( )( ) ( )max
g t
tT TE e u C t dt e W G
( )
. .. .− −∫ +⎡⎣⎢
⎤
⎦⎥
⎧⎨⎩
⎫⎬⎭
δ δ
0
. (5.8)
En utilisant la densité de probabilité ( )ω t , on peut écrire :
( )
( ) ( )( ) ( )(5.8) max ⇔ +⎡⎣⎢
⎤
⎦⎥
− −∞ ∫∫g t
tT TT e u C t dt e W G dω δ δ. . .. .
00
T . (5.9)
En intégrant par partie l’expression (5.9), on trouve (voir l’annexe 5.2) :
( )
( ) ( )( ) ( ) ( )[ ](5.8) max ⇔ +−∞∫g t
te t u C t t W Gδ ω. . . .Ω
0
dt
t
. (5.10)
Comme ( ) ( )′ = −Ω t ω et ( ) ( ) ( )( )ω t t h G tΩ = , on a . En posant
et en remplaçant
( ) ( )( )Ω t e h G d
t
= −∫ τ τ0
( ) ( )( )Ψ t h G dt= ∫ τ τ0 ( )Ω t par ( )e t−Ψ dans (5.11), on obtient :
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Incert i tudes
( )
( ) ( )( ) ( )( ) ( )[(5.8) max ⇔ +− −∞∫g t
t te u C t h G t W Gδ . .Ψ
0
]dt . (5.11)
Ainsi, la méthode inspirée par Dasgupta & Heal conduit finalement à traiter le risque de
catastrophe comme un facteur d’actualisation. Elle oblige à introduire une variable d’état
supplémentaire, i.e. ( )Ψ t . On en vient à formuler le programme (5.8) de la manière suivante :
Problème n°6 :
( ) ( )( ) ( )( ) ( )[ ]max
g t
t te u C t h G t W G
( )
. . .− −
∞
+∫ δ Ψ0 dt
)
)
(5.12)
sous les contraintes
( ) ( ) ( )& .G t g t G t= − β , (5.12a)
, (5.12b)
, (5.12c)
( ) ( )(&Ψ t h G t=
( ) ( ) ( ) ( )(C t Q t f g t G t≡ = ,
G G0 0bg= , (5.12d)
g tbg≥ 0 , ∀ . (5.12e)
t
5.2.1 - Résolution
Les conditions d’optimalité sont déduites du Hamiltonien :
( ) ( )( ) ( ) ( )[ ] ( ) ( )~H , , , , , . , . . . .G y g P t e u f g G h G W G P g G h GΦ ΦΨ= + − − +− β . (5.13)
( ) ( ) ( )$ ,$ , $G t y t g t désignant la solution du problème posé, il existe ( )P t et continues et
dérivables telles que :
( )Φ t
( ) ( )( )e f g G u f g G Pg− ′ =$ . $ , $ . $ , $Ψ , (5.14)
( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )( )& . . $ , $ . $ , $ $ . .$ $P P e f g G u f g G h G e W GG= + + ′ + ′ +− −δ β Ψ Ψ Φ , (5.15)
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Incert i tudes
( )( ) ( ) ( )[ ]& . . $ , $ $ .$Φ Φ Ψ= + +−δ e u f g G h G W G . (5.16)
En procédant aux changements de variables et , les conditions
d’optimalité (5.14) à (5.16) deviennent :
p e P= Ψ . φ = eΨ Φ.
( ) ( )( )f g G u f g G pg $ , $ . $ , $′ = , (5.14’)
( )( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )( )& $ . $ , $ . $ , $ $ .p h G p f g G u f g G h G W GG= + + + ′ + ′ +δ β φ , (5.15’)
( )( ) ( )( ) ( ) ( )& $ . $ , $ $ .φ δ φ= + + +h G u f g G h G W G . (5.16’)
Les conditions de transversalité sont :
( ) ( )lim
t
te P t G t
→∞
− =δ . $ . $ 0 , (5.17)
. (5.18)
( ) ( )lim
t
te t t
→∞
− =δ . $ . $Φ Ψ 0
5.2.2 - Effet de l’incertitude sur l’équilibre stationnaire
La comparaison des équilibres stationnaires du système, pour différents cas de figure,
donne une idée de l’effet de l’incertitude sur la trajectoire optimale. La situation où il n’y a
aucun risque de catastrophe, i.e. ( )h G = 0, ∀G , a déjà été amplement analysée dans le
chapitre 1. La relation suivante caractérise alors l’équilibre stationnaire (elle s’obtient en
combinant les relations (1.11) à (1.13)) :
( ) ( ) ( )δ β β β+ +∞ ∞ ∞ ∞. . * , * . * , *f G G f G Gg G 0=
=
. (5.19)
Dans l’hypothèse générale, où il existe un risque de catastrophe positif et croissant avec le
stock de pollution, l’équilibre stationnaire du problème n°6 est caractérisé par :
( ) ( ) ( )δ β β β+ +∞ ∞ ∞ ∞. . $ , $ . $ , $f G G f G Gg G Λ , (5.20)
avec
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Incert i tudes
( ) ( ) ( ) ( )( ) ( )( )( ) ( )( )
Λ = − + ′
−
+ ′
∞ ∞ ∞ ∞
∞ ∞
∞ ∞
h G f G G h G
u f G G W G
h G u f G G
g
$ . . $ , $ $ .
. $ , $ .
$ . . $ , $
β
β δ
δ β ∞
.
Puisque le terme de gauche de (5.19) et (5.20) est décroissant avec G , la pollution
stationnaire en présence d’un risque de catastrophe positif sera plus ou moins grande que
selon que est négatif ou positif respectivement.
$G∞
G∞ * Λ
Remarque 5.1 : L’équilibre stationnaire du problème n°6 renseigne uniquement sur la
direction du système. Si la catastrophe survient à une date finie, il ne sera en effet jamais
rejoint.
Supposons, dans un premier temps, que ( )h G x= 1. Dans ce cas, le risque de catastrophe ne
dépend pas de la pollution mais augmente de manière autonome avec le temps. On a alors
et . Le théorème 5.2 détermine la dynamique de
transition vers cet équilibre stationnaire.
( ) ( )Λ = − <∞ ∞ ∞h G f G Gg$ . . $ , $β 0 $ *G G∞ ∞>
Théorème 5.2 : La dynamique optimale sous la menace d’une catastrophe dont la probabilité
de réalisation instantanée est autonome et égale à x par unité de temps est confondue avec
celle du problème n°1 lorsque le taux d’actualisation est égal à δ + x .
Preuve : l’équation différentielle de la variable d’état (5.12b) s’écrit , ce qui
implique que , sachant que
( )&Ψ t = x
t( )Ψ t x= . ( )Ψ 0 0= . Le problème devient donc :
( ) ( )( ) ( )[ ] ( ) ( )( ) ( )max max
g t
x t
g t
x te u C t x W G dt e u C t dt
x W G
x( )
.
( )
.. . .
.− +∞ − +∞+ ⇔ +
+∫ ∫
δ δ
δ0 0
.
La second terme est constant quelle que soit la trajectoire suivie, ce qui prouve le théorème.
1 - Dans ce cas, les distributions de probabilité de T et de G suivent une loi exponentielle de paramètre −x
(Kiefer, 1988).
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Incert i tudes
La trajectoire optimale associée au cas ( )h G x= est donc plus laxiste en matière de gestion du
climat. Le fait que la probabilité de catastrophe soit autonome, donc fonction du temps
uniquement, pousse à émettre plus de gaz à effet de serre à court terme, le risque de ne pas
pouvoir tirer les bénéfices futurs escomptés agissant comme un facteur d’actualisation. La
gravité de la catastrophe n’intervient pas dans le choix optimal et la même trajectoire est
suivie quelle que soit la valeur de ( )W G .
Supposons maintenant que l’accumulation des gaz à effet de serre augmente les chances
d’apparition de la catastrophe, i.e. ( )′ >h G 0 . L’émission de gaz à effet de serre influence
alors le risque de catastrophe, ce qui incite à la réduire par rapport au cas précédent. Le terme
est positif si est grand et/ou si Λ (′ ∞h G$ ) ( )W G est petit. Ainsi, le planificateur, confronté à
un risque de catastrophe majeur très sensible à l’accumulation supplémentaire de polluants,
réduira plus fortement l’émission de gaz à effet de serre que dans le cas du problème n°1.
5.3 - Conclusion
Deux sujets sont abordés dans ce chapitre. Le premier reformule le problème des
catastrophes de la manière suivante : l’échéance de la catastrophe est connue, pas sa gravité ;
des progrès scientifiques sur la connaissance du système climatique arrivent après un délai
donné ; l’incertitude sur l’ampleur de la catastrophe disparaît à ce moment. Cette séquence
d’événements est, à notre avis, tout à fait représentative des mécanismes de décision par
étapes dans les problèmes globaux d’environnement (Protocole de Montréal, négociations sur
le climat). Elle éclaire un autre aspect de la politique du climat.
Nos résultats prouvent que le planificateur sous-estime la stratégie de préservation s’il néglige
les perspectives d’apprentissage future. En fait, pour évaluer correctement cette option, le
décideur doit y associer une valeur de quasi-option, qui reflète l’avantage procuré par
l’information scientifique et par l’opportunité d’un choix non risqué à l’avenir grâce à cette
découverte. Ce résultat a un corollaire : le fait de négliger les progrès dans la connaissance
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Incert i tudes
des catastrophes introduit un biais dans le sens d’un choix plus systématique de la stratégie de
passage.
Il est tentant d’exploiter ces conclusions pour étudier l’attitude des décideurs politiques.
Notamment, Kolstad (1994) rapporte le débat opposant le Président Bush et le Vice-président
Al Gore sur la politique climatique à entreprendre. Le premier justifiait l’inaction et
l’attentisme par la densité des incertitudes dans la connaissance des phénomènes climatiques.
Le Congrès américain, lui aussi réticent vis-à-vis d’une limitation immédiate des émissions, a
finalement retenu cette position (aujourd’hui encore, elle reflète bien l’attitude des Etats-
Unis). Il l’a assortie, par contre, d’un programme de recherche scientifique dynamique. Ainsi,
le ‘‘Global Change Research Program’’ s’est vu attribué un financement en forte croissance,
de 659 à 955 millions de dollars entre 1990 et 1991 (Brunner, 1991). A l’inverse, le sentiment
de Al Gore, inspiré par l’irréversibilité de l’accumulation des gaz à effet de serre et par le
risque d’une confirmation scientifique des dangers climatiques, suggérait de mettre en place
une mesure de limitation immédiate des émissions de carbone.
En fait, les deux attitudes relèvent d’un même raisonnement, qui se comprend par l’existence
d’une valeur de quasi-option positive. Pour ‘‘capter’’ les gains potentiels de l’amélioration
des connaissances, qui sont mesurés par la valeur de quasi-option, l’important est de s’assurer
que les éclaircissements scientifiques précèdent les premiers risques tangibles de catastrophes
climatiques irréversibles. Or, de ce point de vue, les deux options susdites aboutissent, par des
biais différents, au même résultat : la première politique vise à accélérer les progrès de la
connaissance, tandis que la seconde repousse les risques en limitant les émissions de carbone
2.
Le second cas de figure analysé dans ce chapitre s’énonce comme suit : l’ampleur de la
catastrophe est connue, pas son échéance. Il est analysé plus brièvement car nous
2 - Cette équivalence du point de vue des résultats est en partie inexacte. En effet, compte tenu de l’inertie
climatique des océans, estimée entre 20 et 30 ans, notre capacité de réaction est limitée et il faudrait être capable
d’anticiper les risques majeurs sur un horizon très long.
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Incert i tudes
n’introduisons rien de nouveau par rapport à la littérature (Clarke & Reed, 1994 ; Roe & alli,
1994). Deux résultats ressortent de cette synthèse :
• lorsque le risque de catastrophe croît de façon autonome avec le temps, la crainte de la
catastrophe et la conscience de ne pas pouvoir influencer sa réalisation incitent à polluer
plus ;
• lorsque le risque de catastrophe croît avec la pollution et lorsque le dommage qui lui est
associé est grand, la réaction optimale consiste à limiter les émissions plus fortement.
Ces discussions concluent cette seconde partie et mettent un point final à la description
du programme mondial de gestion du climat. A partir de maintenant, nous changeons
radicalement d’optique puisque nous quittons la question normative de la meilleure réaction
collective pour d’étudier ce que les pays pourraient accepter de faire de leur propre initiative.
Dans la troisième partie, nous mettons donc l’accent sur les composantes stratégiques de la
gestion du climat.
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Annexes / Chapitre 5
Annexe 5.1 : Démonstration du théorème 5.2
Lorsque τ θ≥ , les trajectoires de préservation et de précaution sont confondues. Il
s’ensuit que ( ) ( )( ) ( ){ }V G W V G u C e W u C0 2 0 2, , , , ..τ θ δ δ τ− ′ = − ′∞ − ∞ δ . Si les hypothèses (H1) et
(H2) sont satisfaites, on en déduit que la valeur de quasi-option est strictement positive quelle
que soit τ θ≥ .
Il suffit alors de prouver que est une fonction décroissante de (V G W0 2, ,τ ) τ pour déduire que
la valeur de quasi-option est toujours strictement positive. Or, en adaptant le résultat de
l’appendice 2, on sait que :
( ) ( )( )[ ]∂ τ∂τ τ δδ τ
V G W
e G p0 2 0 2
, ,
.
~
H , ..= ′′′ −− W .
Sachant que :
• la trajectoire de passage optimale vérifie la condition de transversalité ( )~H , .0 1G p WT′′ = δ
(voir le lemme 4.2) ;
• (~H ,0 G p) est une fonction décroissante de p ;
• ( )′′′ > ′′p Tpτ si (H3) est vérifiée ;
• si (H2) est satisfaite ; W W1 < 2
on démontre que :
( )( ) ( )~H , ~H , . .0 0 1 2G p G p W WT′′′ < ′′ = <τ δ δ
)
.
Il s’ensuit que décroît avec (V G W0 2, ,τ τ et que la valeur de quasi-option est toujours
positive.
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Annexes / Chapitre 5
Annexe 5.2 : Démonstration de (5.11)
On part de :
( ) ( )( ) ( ) ( )ω ωδ δT e u C t dt dT e T W G dtT T. . . .. .−∞ −∞∫∫ ∫⎡⎣⎢
⎤
⎦⎥
+
00 0
T
d
.
( ) ( )Ω t
t
=
∞
∫ω τ τ mesure la probabilité que la catastrophe se produise après l’instant . La
probabilité complémentaire est donnée par l’expression suivante :
t
( ) ( ) ( ) ( )Ω ΩC
t
T d T d= − =
∞
∫ ∫ω τ τ ω τ τ0 0 .
En intégrant par partie le premier terme de l’expression de départ, on obtient
( ) ( )( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )Ω ΩC tT T C TT e u C t dt e T u C T dT e T W G dT. . . . . .. . .−
∞
−∞ −∞∫ ∫ ∫⎡⎣⎢
⎤
⎦⎥
− +δ δ δ ω
0 0 0 0
,
ce qui donne
( ) ( )( ) ( ) ( )[ ]e T u C T T W GT−∞ +∫ δ ω. . . .Ω0 dT .
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Partie III
Composantes stratégiques
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
Chapitre 6
Jeux dynamiques de l’effet de serre
Les discussions des chapitres précédents postulent qu’une instance internationale, que
nous avons baptisée ‘‘planificateur’’, anticipe la meilleure réponse de l’Humanité au
renforcement constaté de l’effet de serre, puis prend les mesures nécessaires pour la faire
appliquer par tous. Ce scénario est une abstraction puisqu’aucun organisme ne peut tenir ce
rôle. Dans la réalité, la décision d’appliquer une telle politique reste la prérogative des
gouvernements nationaux. Si ceux-ci sont animés par des intentions différentes, alors les
politiques climatiques nationales différeront de la proposition du planificateur imaginaire.
De fait, si elles se mesurent en termes de bénéfice net et si l’on en croît les évaluations
économiques disponibles, les motivations nationales pour atténuer l’effet de serre s’avèrent
très hétérogènes. D’une part, les dommages climatiques se répartissent de façon très
inégalitaire entre les différentes régions du monde. Selon les estimations de Tol (1994), les
pays en développement seraient les plus vulnérables et pourraient subir un coût équivalent à
8,6 pour-cent de leur P.I.B., dans l’hypothèse d’un doublement de la concentration
d’équivalent dioxyde de carbone. A l’autre extrémité, l’ex-U.R.S.S., les pays d’Europe
centrale et le Canada n’endureraient qu’une perte limitée, voire négative, si un réchauffement
de cette amplitude se produisait. De toute évidence, les intérêts de ces régions divergent et il
sera difficile de trouver un terrain d’entente.
D’autre part, les coûts de la réduction des émissions de carbone varient sensiblement d’une
région à l’autre. Par exemple, la Chine, l’Inde, l’Ex-U.R.S.S. et d’autres pays subventionnent
fortement la consommation d’énergies fossiles. De ce fait, ils disposent de gisements
d’économies d’énergie inexploités, ce qui laisse entrevoir des possibilités de réduction des
émissions de gaz carbonique à moindre coût. La situation est totalement différente au Japon et
dans les pays d’Europe occidentale, où les énergies fossiles sont déjà fortement taxées et où
toute économie supplémentaire impliquerait, a priori, un coût élevé.
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
Du fait que les conséquences climatiques seront partagées, les émissions d’un pays
quelconque concernent pourtant les pays étrangers. Cette interaction, caractéristique des
pollutions transfrontières globales, complique singulièrement le problème, mais la théorie des
jeux fournit le cadre approprié pour l’analyser.
La répétition des situations d’interdépendance et la persistance du polluant nécessitent de
représenter ce problème sous la forme d’un jeu différentiel 1. Basar & Olsder (1982, p. 210)
définissent les jeux différentiels comme « des jeux dynamiques en temps continu, dans
lesquels l’évolution de l’état du système est décrit par une équation différentielle » 2. Dans les
jeux répétés, cette construction s’impose chaque fois que l’état de l’environnement influence
les décisions courantes (Fudenberg & Tirole, 1991). Ainsi, dans l’exemple de l’effet de serre,
les décisions passées se ressentent dans l’état du système climatique et influencent, à travers
ce dernier, les décisions à prendre aujourd’hui.
Cette théorie est appliquée à l’effet de serre par Cesar (1994), Gottinger (1991), Hoel
(1991b), Mäler (1991) et van der Ploeg & de Zeeuw (1992). Il est difficile de dégager une
vision unifiée à la lecture de ces articles, du fait des hypothèses spécifiques posées par chaque
auteur. Hoel (1991b) et Mäler (1991) concluent à une pollution stationnaire identique, que les
pays coopèrent ou non. Ce résultat étonnant découle entièrement de la dynamique du stock de
polluant qu’ils retiennent : pour le premier, le gaz à effet de serre est persistant, i.e. jamais
recyclés ; pour le second, le stock de gaz à effet de serre se régénère d’une quantité constante
à toute date. A long terme, l’issue du jeu passant forcément par une stabilisation de la
pollution, ces hypothèses ont des conséquences fortes sur le résultat. Dans ces circonstances,
la seule différence entre les stratégies coopérative et non coopérative se trouve dans le temps
mis par le système pour atteindre les pollutions stationnaires, i.e. plus rapide si les pays
agissent unilatéralement. Gottinger (1991) parvient au même résultat d’une pollution
stationnaire invariable quelle que soit la stratégie, rejointe toutefois plus rapidement lorsque
les pays adoptent un comportement non coopératif. Là encore, cette conclusion paraît très
sensible aux hypothèses du modèle, principalement à l’existence d’un seuil critique de
1 - Une modélisation analogue pourrait être formulée sous la forme d’un jeu dynamique en temps discret.
2 - « Continuous time dynamic games wherein the state is described by a differential equation. »
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
pollution au-delà duquel la production devient nulle. En effet, dans ce cas, nul pays n’a intérêt
à ce que cette limite environnementale soit dépassée, quelle que soit la stratégie adoptée.
Cesar (1994) et van der Ploeg & de Zeeuw (1992) adoptent les hypothèses standards du
modèle de pollution cumulative, celles d’un taux de recyclage constant du polluant et de
dommages augmentant graduellement avec la pollution. Avec ce jeu d’hypothèses, il n’y a
donc plus un équilibre stationnaire contraint, mais une infinité d’équilibres possibles. Ceci
explique qu’ils aboutissent à des conclusions totalement différentes et qu’ils démontrent que
la pollution stationnaire coopérative est plus faible que la pollution stationnaire non
coopérative. Le seul résultat commun à tous ces travaux pose que la coopération répartit
l’émission globale entre les pays de manière à uniformiser l’utilité marginale des émissions.
Ce chapitre sera découpé en trois sections. Dans la première, le problème n°1 sera récrit
sous la forme d’un jeu différentiel de l’effet de serre. La solution coopérative sera étudiée en
premier lieu. Nous dégagerons deux conditions, l’une concernant l’agrégation des demandes
d’émission et l’autre l’agrégation des dommages marginaux nationaux, telles que la
trajectoire obtenue coïncide avec la solution optimale du problème n°1. Nous verrons que la
deuxième condition ne fonctionne correctement que si le dommage de l’effet de serre ne
dépend pas de la production, si bien qu’une étude spécifique du sentier coopératif s’impose
malgré tout. Nous étudierons ensuite les stratégies non coopératives. Compte tenu des
caractéristiques du modèle, nous confirmerons les conclusions de Cesar (1994) et van der
Ploeg & de Zeeuw (1992), selon lesquels la pollution stationnaire non coopérative est plus
forte que la pollution stationnaire coopérative.
La seconde section présentera une description comparative des résultats des deux seuls jeux
dynamiques appliqués consacrés à l’effet de serre (Tahvonen, 1994 ; Nordhaus & Yang,
1996). Les désaccords entre ces deux études sont nombreux et significatifs, au point de
justifier une certaine méfiance vis-à-vis des résultats. La collation proposée dans cette
seconde section et les tentatives d’harmonisation suggérées montreront les causes principales
de ces divergences (le paramétrages et les méthodes d’analyse). Elles prouveront la plus
grande fiabilité des résultats de Nordhaus & Yang.
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
A chaque étape du jeu dynamique de l’effet de serre, le décideur national retrouve toujours la
même situation. Schématiquement, il arbitre entre la coopération et son équilibre de Nash. La
première solution est collectivement préférée mais l’issue dominante est l’équilibre de Nash.
Constatant la similitude avec la configuration classique du dilemme du prisonnier, nous
évoquerons, dans la dernière section, les difficultés de l’application de la politique
coopérative. Nous indiquerons des stratégies de menaces qui rendent la coopération possible
sur des critères purement individualistes.
6.1 - Production - Pollution avec plusieurs pays
Le jeu différentiel de l’effet de serre se construit en ‘‘désagrégeant’’ le problème n°1.
Chaque pays se conçoit comme une unité de décision indépendante, incarnée par un décideur
politique national. Par hypothèse, son rôle se limite à la défense des intérêts de ses citoyens. Il
prend ses décisions à la lumière d’une fonction de bien-être social, qui mesure l’utilité des
agents économiques sous son autorité. Son souci est d’assurer le niveau de bien-être
intertemporel le plus grand possible à l’ensemble des générations de citoyens qu’il représente.
Problème n°6 :
( )
( )( )max
gi t
t
i ie u C t d
−∞∫ δ . .0 t . (6.1)
sous les contraintes
( ) ( ) ( )& .G t g t G ti
i
= −∑ β , (6.1a)
, (6.1b)
, (6.1c)
, , . (6.1d)
( ) ( ) ( ) ( )( )C t Q t f g t G ti i i i≡ = ,
( )G G0 0=
( )g ti ≥ 0 ∀ i ∀t
Les fonctions que nous utilisons ont les mêmes propriétés que pour le problème n°1. Nous ne
les rappelons donc pas.
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
La relation (6.1a) est le cœur du problème. Le planificateur ne décide pas seul de l’avenir de
ses concitoyens car il partage avec d’autres la gestion du climat. Les décisions étrangères
influencent, en partie, l’évolution de la pollution et conditionnent, en retour, les possibilités
de production du pays. Cette interdépendance implique que le planificateur choisisse sa
trajectoire d’émission nationale en fonction des décisions prises hors de ses frontières
. Ainsi, nous noterons le bien-être intertemporel
du pays lorsqu’il émet , sachant que ses partenaires rejettent
( )g ti
( )g ti− ( ) ( )( )v G g g e u C t dti i i t i i0 0, , .
.
−
−∞= ∫ δ
i ( )g ti ( )g ti− .
6.1.1 - Structures d’information
Puisque les décisions des joueurs sont interdépendantes, la structure d’information du
jeu influence directement les choix stratégiques en renseignant les joueurs sur les stratégies
des autres. La théorie des jeux différentiels impose la restriction Markovienne, selon laquelle
les stratégies des joueurs dépendent seulement de l’état du système et du temps. Dans le jeu
différentiel de l’effet de serre, les stratégies dépendent du stock de gaz à effet de serre, mais
pas du temps, car le jeu est stationnaire 3. La justification de la restriction Markovienne part
du principe que la connaissance de l’état suffit pour informer pleinement les joueurs sur
l’histoire du jeu depuis l’origine. D’autre part, la restriction Markovienne garantit la
cohérence des choix puisque les joueurs, confrontés à une même situation, en l’occurrence, à
un état donné du système, conduiront toujours le même raisonnement.
Dans le jeu différentiel de l’effet de serre, la structure d’information dépendra de la capacité
des joueurs à surveiller l’évolution de la pollution. A l'instant t , l'information détenue par le
joueur i se résume ainsi au dernier relevé de pollution qu’il ait fait : ( ) ( ) [ ][ ]I t G T T ti = ∈, ,0 .
3 - Fudenberg & Tirole (1991, p.521) définissent les jeux stationnaires comme « des jeux dans lesquels [les
équations différentielles des variables d’état] ne dépendent pas de t [le temps] et les [les fonctions d’utilité]
prennent la forme . »
ht
j
gi
t
g ei
r t. .−
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
Parmi l’infinité d’hypothèses possibles, la littérature retient deux cas. La structure
d’information est dite en ‘‘boucle ouverte’’ lorsque chaque joueur ne connaît que la pollution
au commencement du jeu : ( ) [ ]I t Gi = 0 , ∀t , ∀i . La structure d’information est dite en
‘‘boucle fermée’’ lorsque chaque joueur observe l’évolution de la variable d’état à chaque
instant : , ∀ , . ( ) ( )[ ]I t G ti = t ∀i
La stratégie du joueur i consiste à choisir son émission de gaz à effet de serre compte
tenu de la connaissance qu’il a de la pollution : ( ) ( )( )g t A I t ti i i= , , avec . Avec la
structure d’information en boucle ouverte, le joueur se contente de connaître la pollution à
l’origine du jeu pour conduire ses choix :
Ai ≥ 0
( ) ( )g t A G ti i= 0 , . Il élabore sa stratégie, à toute
date, en conjecturant que ses partenaires adopteront leur stratégie optimale et en anticipant,
dès l’instant initial, le sentier de pollution correspondant. Sa stratégie optimale consiste alors
à rechercher la meilleure réponse aux stratégies des autres joueurs. Cette anticipation garantit
la cohérence temporelle faible des choix : quelle que soit la date intermédiaire à laquelle le
jeu serait stoppé, le long de la trajectoire optimale, puis recommencé, les pays redéfiniraient
leur stratégie de telle manière que la trajectoire poursuivie coïnciderait avec la trajectoire
originelle (Cesar, 1994 ; Hoel, 1992). Par contre, il n’y a pas cohérence forte car, si le jeu
s’écarte de la trajectoire anticipée, l’action de le stopper, donc d’informer les joueurs sur
l’état avéré du système, les conduirait à ajuster leur stratégie à la nouvelle donnée et à faire
des choix différents.
Avec la structure d’information en boucle fermée, le joueur redéfinit instantanément sa
stratégie en fonction de l’évolution de la pollution : ( ) ( )( )g t A G t ti i= , . Sa stratégie optimale
est déterminée ‘‘au jour le jour’’, puisqu’on a ( )( ) ( )∂A G t t dG ti , ≠ 0 . Cette structure
d’information assure la cohérence stricte des choix : quel que soit le point à partir duquel le
jeu reprendrait, qu’il soit ou non sur la trajectoire optimale, les stratégies optimales des
joueurs restent inchangées et prolongent toujours la même trajectoire optimale (Cesar, 1994).
Bien que l’information en boucle ouverte soit peu réaliste, Cesar (1994) défend cette
hypothèse car l’observation de l’atmosphère est difficile ; la coopération internationale
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
devrait reposer, selon lui, sur la confiance. Pourtant, la Convention-cadre sur les changements
climatiques (15 mai 1992) met au premier plan l’obligation d’information de chaque partie
contractante sur ses émissions de gaz à effet de serre et sur les mesures de dépollution qu’elle
engage (Article 4, paragraphe 1, alinéas a et b). Le traité va plutôt dans le sens d’une
surveillance mutuelle et contredit les arguments de Cesar. De plus, la surveillance des
comportements étrangers n’est pas forcément très coûteuse car beaucoup d’indices, autres que
l’évolution de l’atmosphère, peuvent renseigner sur les actions entreprises à l’étranger : la
fiscalité énergétique, les importations d’énergies primaires, le reboisement... Ces éléments
incitent à préférer une modélisation basée sur une information en boucle fermée.
6.1.2 - Stratégies coopératives
Le scénario envisagé dans cette section reprend l’hypothèse de Cesar (1994). Il suppose
que les pays se mettent d’accord pour agir conjointement. Préalablement, ils ont négocié un
traité mondial de coopération, qui stipule qu’ils chercheront à maximiser la fonction de bien-
être intertemporel collective suivante :
( )max rg i i i i
i
v G g gϖ . , ,0 −∑ , (6.2)
où ( )rg g g g N= 1 2, ,..., représente le vecteur des émissions.
Nous laissons de côté l’analyse de la procédure de négociation qui conduit à la définition
d’une telle fonction. Disons simplement que les coefficients ϖ i mesurent les poids des pays
dans le traité de coopération et qu’ils dépendent de leur pouvoir de négociation relatif.
6.1.2.1 - Résolution 4
Le problème (6.2) associé aux contraintes (6.1a) à (6.1d) perd sa spécificité de jeu
différentiel et se résout exactement de la même façon que dans les chapitres précédents 5.
4 - Voir l’appendice 1.
5 - La seule différence est qu’il n’y a plus une mais plusieurs variables de contrôle.
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
On commence par écrire la fonction Hamiltonienne courante :
( ) ( )( )~ , , . , . .H G g p u f g G p g Gi i i i
i
i
i
r
= −
⎡
⎣
⎢
⎤
⎦
⎥∑ ∑ω β− . (6.3)
( )p t étant la variable adjointe associée à G , la solution optimale ( ) ( )rg t G t* , * vérifie les
conditions d’optimalité du premier ordre suivantes :
( ) ( )( )f g G u f g G pgi i i i i ii * , * . * , *′ = ϖ , ∀i , (6.4)
( ) ( ) ( )( )& . . * , * . * , *p p f g G u f g Gi Gi i i i i
i
= δ β ϖ+ + ′∑ , (6.5)
( ) ( )lim
t
te p t G t
→∞
− =δ . . * . * 0 . (6.6)
Puisque chaque fonction est concave (voir l’annexe 1.1) et puisque est
linéaire, le Hamiltonien
((u f g Gi i i , ))
)
&G
(~ , ,H G g pr est concave en ( )G g, r , quelle que soit , et les conditions
nécessaires (6.4) à (6.6) sont également conditions suffisantes d’optimalité (voir l’appendice
1, théorème 2 et son corollaire).
t
La condition (6.4) implique que la productivité marginale de l’émission du pays i est égale
au rapport du prix de la pollution et du poids du pays dans l’accord de coopération.
Implicitement, elle définit la demande d’émission de chaque pays :
( )g g G pi i* ,= ϖ i . (6.7)
Puisque les fonctions ont les mêmes propriétés que dans le chapitre 1, le lemme 1.1
s’applique. On sait donc que l’émission optimale décroît avec la pollution et avec son prix. En
outre, plus le poids du pays dans le traité est grand, plus son émission est importante.
Désignons par le dommage intertemporel encouru par le pays i lorsque l’émission
mondiale augmente d’une unité à la date . On démontre que :
( )p ti
t
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231 231 |
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
( ) ( ) ( ) ( ) ( )( )p t e f g G u f g G di t Gi i i i it=− ′
− + −∞∫ δ β τ τ. . , . , . (6.8)
Les coefficients de pondération du traité de coopération n’apparaissent pas dans la relation
(6.8). De ce fait, quel que soit l’accord, cette valeur est invariante.
Propriété 6.1 : le prix de la pollution est égal à la somme des dommages marginaux
intertemporels de chaque pays, pondérés par les coefficients de négociation du traité de
coopération.
( ) ( )p t p ti i
i
= ϖ .∑ . (6.9)
Preuve : voir l’annexe 6.1.
Dans le cas particulier où le coefficient de pondération attribué à chaque joueur est unitaire, le
prix de la pollution est la somme des dommages marginaux intertemporels nationaux. Il
s’interprète donc comme le prix implicite mondial de l’accumulation du gaz à effet de serre.
Sinon, la taxe sur les émissions reflète à la fois le prix implicite mondial des émissions et le
pouvoir de négociation des pays signataires de l’accord de coopération.
L’émission optimale égalise l’utilité marginale de la pollution à son prix implicite lorsque les
coefficients sont unitaires, au prix négocié dans le cas contraire. Là encore, le rôle des
coefficients de négociation est intéressant à observer :
( ) ( )( )f g G u f g G p pgi i i i i i j
ij i
ji
* , * . * , * .′ = +
=−
∑
ϖ
ϖ
. (6.10)
Cette relation montre que les pays internalisent toujours la totalité des dommages subis sur
leur territoire. Par contre, du fait des coefficients de négociation, ils internalisent des
dommages étrangers plus grands ou moins grands que leur valeur réelle selon leur poids
relatif par rapport à leurs partenaires.
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
6.1.2.2 - Agrégation et politique coopérative du climat
Le problème n°1 du chapitre 1 s’interprète de la manière suivante : la fonction de
production mondiale calcule la quantité de biens de consommation produite lorsque
l’émission mondiale est égale à
(f g G, )
g et lorsque la pollution est égale à G ; le planificateur,
identifiable au traité de coopération défini dans ce chapitre pour le cas où tous les pays ont le
même poids dans l’accord, utilise une fonction d’utilité collective pour mesurer le bien-être
mondial ; la solution obtenue détermine le sentier d’émission qui permet le plus grand bien-
être intertemporel global.
En principe, la solution du problème n°1 et la solution coopérative étudiée dans ce chapitre
sont confondues. Si tel est le cas, à quelques détails près, les résultats du chapitre 1 suffisent
pour décrire la solution recherchée ici. Les deux conditions suivantes sont nécessaires pour
que l’on vérifie effectivement cette propriété :
( ) (g G p g G pi
i
, ,≡∑ ) , (6.11)
( ) ( )( ) ( ) ( )( )f g G u f g G f g G u f g GG Gi i i i i
i
, . , , . ,′ ≡ ′∑ , avec g i= g∑ . (6.12)
La restriction (6.11) implique que l’émission mondiale est toujours égale à la somme des
émissions nationales, quels que soient la pollution et son prix implicite 6. La condition (6.12)
pose que le dommage marginal mondial égale la somme des dommages marginaux nationaux
en toutes circonstances, i.e. quelles que soient la pollution et les émissions nationales.
Dans le graphique 6.1, nous représentons les demandes d’émission dans un monde coupé en
deux régions. La fonction de demande agrégée additionne horizontalement les demandes
régionales. Ainsi, pour un prix donné du facteur, l’égalisation des productivités marginales à
ce prix dans les régions 1 et 2 explique une demande égale à et respectivement ; g1 g2
6 - La condition (6.11) est équivalente à l’implication suivante :
( ) ( )( ) ( ) ( )( )f g G u f g G p i f g G u f g G pgi i i i i gi , . , , , . ,′ = ∀ ⇒ ′ = , avec . g gi= ∑
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
l’égalisation de la productivité marginale agrégée à ce même prix implique une demande
mondiale égale à . g g g= +1 2
Graphique 6.1 : Agrégation des demandes d’émission
Emissions
Pr
od
uc
tiv
ité
s m
ar
gi
na
le
s
g 1 gg 2
Région 1 Région 2
Monde
Prouvons maintenant que la trajectoire du jeu différentiel coopératif calquée sur la
solution du problème n°1 est optimale lorsque les conditions (6.11) et (6.12) sont satisfaites
par les fonctions agrégées. Commençons par supposer que l’émission mondiale coopérative
suit la même trajectoire que l’émission optimale du problème n°1, i.e. ( ) ( )g t g ti∑ = * ,
quelle que soit , sans nous intéresser à sa répartition régionale. Le stock de gaz à effet de
serre suit alors la même progression dans les deux modèles. Du fait de (6.12), il s’ensuit que
le dommage marginal mondial est identique à chaque instant. En appliquant les relations (1.8)
et (6.9), on prouve alors que le prix implicite de la pollution suit le même sentier dans les
deux modèles. Dès lors, en vertu de (6.11), les émissions régionales sont telles que
. Ceci démontre que la solution du problème n°1 est une trajectoire faisable
du présent modèle. Il reste à remarquer que cette trajectoire converge vers un équilibre
stationnaire vérifiant la condition de transversalité (6.6) pour prouver qu’elle est une solution
du présent problème.
t
( ) ( )g t g ti * *∑ =
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
Donc, si l’on accepte les restrictions (6.11) et (6.12), la solution du problème n°1 décrit la
politique coopérative du climat. Malheureusement, la condition (6.12) paraît assez forte. Par
contre, elle s’appliquera à coup sûr dans les modèles spécifiant que les dommages marginaux
dépendent de la pollution uniquement, i.e. lorsque ( )( )[ ]∂ ∂u f g G G gi i i , 2 0=∂ i . Ainsi,
compte tenu de cette limite, nous consacrerons la section prochaine à la description de la
solution coopérative dans le cas où les pays sont identiques.
6.1.2.3 - Dynamique optimale du climat dans le jeu coopératif
Analysons le cas de N pays identiques :
• la fonction de production individuelle est ( )f g G, ;
• l’utilité individuelle est . ( )u C
Dans ce cas, les relations (6.1a) et (6.5) s’écrivent :
( )& . , .G N g G p G= − β , (6.13)
( ) ( )( ) ( )( )( )& . . , , . , ,p p N f g G p G u f g G p GG= + + ′δ β , (6.14)
où est la demande d’émission individuelle. (g G p, )
≥
Les ensembles et ( ){ }P = = ≥G p p p G, / & ;0 0, 0 ( ){ }G= = ≥G p G p G, / & ;0 0, 0≥ vérifient
le lemme 1.2. En supposant que le point ( )G p∞ ∞ ∈ ∩* , * P G existe, on peut donc construire
le diagramme des phases associé au jeu coopératif. Les propriétés de l’équilibre stationnaire
sont données par les relations suivantes :
( ) ( )& . * , * .G N g G p∞ = ⇔ =∞ ∞ ∞0 β *G , (6.15)
( )
( )( ) ( )( )( )
& *
. * , * , * . * , * , *
p p
N f g G p G u f g G p GG
∞ ⇔ = −
′
+∞
∞ ∞ ∞ ∞ ∞ ∞=0
δ β
. (6.16)
La solution coopérative du jeu différentiel possède les mêmes propriétés que la trajectoire
optimale du problème n°1. Elle conduit l’économie de l’état initial à l’état stationnaire. On
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
vérifie que cette solution est optimale en confirmant qu’elle respecte la condition de
transversalité (6.6). Les propositions (1.3), (1.4) et (1.5) s’appliquent.
Graphique 6.2 : Solution coopérative
G
p
Go
P
G
I (G ∞ *,p∞ * )
<G*,p* >
G∞ *
p∞ *
La seule différence qualitative avec la solution du problème n°1 provient de la
signification de ce sentier. Il représente l’évolution de l’économie résultant de l’action
combinée de N pays. La répartition des émissions entre ceux-ci est telle que l’utilité
marginale de l’input est uniforme. La raison de cette distribution est la recherche de
l’efficience économique. Si tel n’était pas le cas, il serait toujours possible d’accroître le bien-
être global en diminuant les émissions dans les régions où leur utilité marginale est faible,
pour les augmenter ailleurs, et ce jusqu’à l’égalisation en tout lieu.
6.1.3 - Stratégies non coopératives
Si un pays agit en fonction de son propre intérêt, il est conscient des effets
transfrontières de son émission mais ne s’en préoccupe pas. Son comportement est dit non
coopératif. Il va alors chercher à maximiser son bien-être intertemporel en tenant compte des
stratégies adoptées par ses partenaires :
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
( )
( )max
gi t
i iv G g g0 , , −i . (6.17)
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
Si les décisions individuelles sont simultanées, la résolution du jeu utilise le concept
d’équilibre de Nash : les stratégies des autres sont considérées données. L’équilibre de Nash
du joueur i se définit alors comme sa meilleure réponse gi aux stratégies de Nash g i− de ses
partenaires :
( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )( ) ( )g t v G g t g t v G g t g t g ti i i i i i i i , 0 0 0, , , ,− −≥ ∀ ≥ . (6.18)
6.1.3.1 - Structure d’information en boucle ouverte
Dans l’hypothèse d’une structure d’information en boucle ouverte, chaque pays connaît
uniquement la pollution à l’origine. Il anticipe les stratégies optimales ( ) (g t A G ti i− = 0 , ) de
ses partenaires et l’évolution correspondante de la pollution. Ces informations l’aident ensuite
à établir son propre programme. Formellement, nous résolvons ce problème en utilisant le
Hamiltonien courant associé au programme du joueur : i
( ) ( )( ) ( )~ , , , , . , .H i G g p t u f g G p g A G t Gi i i i i i i j
j i
= − + −
⎡
⎣
⎢
⎤
⎦
⎥
=−
∑ 0 β . (6.19)
Soit ( ) ( )g t G ti , l’équilibre optimal de ce jeu dynamique et ( )p ti la variable adjointe à l’état
G . La solution optimale remplit les conditions d’optimalité subséquentes :
( ) ( )( )f g G u f g G pgi i i i i ii , . ,′ = , (6.20)
( ) ( ) ( )( )& . , .p p f g G u f gi i Gi i i i i= δ β+ + ′ ,G , (6.21)
( ) ( )lim
t
t
ie p t G t→∞
− =δ . . . 0. (6.22)
La relation (6.20) montre que le pays égalise l’utilité marginale de son émission au prix
implicite de la pollution. Sa fonction de demande d’émission reste identique et est donnée par
la relation (6.7). Désormais, son évaluation du prix implicite de la pollution ne comptabilise
que le dommage ressenti sur son territoire. Il s’obtient en utilisant la relation (6.8). Cette
évaluation différente du coût d’usage de l’émission résume toute la différence entre le
comportement non coopératif et le comportement coopératif. Alors que, lorsque les pays
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
coopèrent, chacun met au passif de son émission les nuisances domestiques et étrangères (voir
les relations (6.4) et (6.9)), la stratégie non coopérative fait que chaque pays se contente
d’internaliser les conséquences nationales de la pollution et fait fi des effets transfrontières.
L’hypothèse d’un monde symétrique, déjà utilisée précédemment, facilite la
comparaison des solutions coopérative et non coopérative. Les relations (6.1a) et (6.21)
s’écrivent alors :
( )& . , .G N g G p G= − β , (6.23)
( ) ( )( ) ( )( )( )& . , , . ,p p f g G p G u f g G pG= + + ′δ β ,G
)
, (6.24)
où est la demande d’émission individuelle. (g G p,
Appelons P le lieu des points où &p = 0 : ( ) ( ){ }P = = + + ′ =G p p p f uG, / & . .δ β 0 . Il se
trouve au-dessous de son homologue du cas coopératif dans le diagramme des phases.
Preuve : en tout point ( )G p, P∈ , on a ( )δ β+ = − ′ < − ′. . .p f u N f uG G . si N > 1. Puisque
décroît avec f uG . ′ p , le prix implicite tel que ( )δ β+ = ′. . .p N f uG est nécessairement
supérieur à la valeur de départ, le stock étant fixé.
De plus, on vérifie facilement que le lieu des points tel que G &G = 0 n’est pas modifié en
comparant (6.13) et (6.23). Les ensembles P et vérifient le lemme 1.2. G
L’équilibre stationnaire non coopératif ( )G p∞ ∞ ∈ ∩, P G, s’il existe, est tel que :
( ) ( )& . , .G N g G p∞ = ⇔ =∞ ∞ ∞0 β G , (6.25)
( )
( )( ) ( )( )( )
&
, , . , ,
p p
f g G p G u f g G p GG
∞ ⇔ = −
′
+∞
∞ ∞ ∞ ∞ ∞ ∞
=0
δ β
. (6.26)
212
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
Théorème 6.1 (Information en boucle ouverte) : La pollution et l’émission stationnaires du jeu
non coopératif sont plus grandes qu’à l’équilibre stationnaire coopératif. Le prix implicite
stationnaire du jeu non coopératif est plus petit qu’à l’équilibre stationnaire coopératif.
Preuve : voir l’annexe 6.2
L’ensemble des résultats obtenus ci-dessus permet de construire le diagramme des phases et
de comparer les trajectoires coopérative et non coopérative.
Graphique 6.3 : Trajectoire de Nash en boucle ouverte
G
p
Go
G
P
P<G*,p* >
<G,p >
G
p∞
6.1.3.2 - Stratégie de Nash et information en boucle fermée
Lorsque les pays observent l’évolution de la pollution en temps réel, ils acquièrent la
possibilité d’ajuster leur stratégie instantanément à toute modification de l’état du système.
Ce fait complique la procédure de décision, puisque chaque pays doit désormais tenir compte
de la réaction immédiate de ses partenaires à la stratégie qu’il adopte. Ce problème se résout
en utilisant le Hamiltonien associé au programme du joueur : i
( ) ( )( ) ( )( )~ , , , . .H i G g p u f g G p g A G t Gi i i i i i i j
j i
= − + −
⎡
⎣
⎢
⎤
⎦
⎥
=−
∑ β . (6.27)
Ceci modifie uniquement l’équation différentielle (6.21) :
213
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
( ) ( ) (( )& . $ , $ . $ , $p A G p f g G u fi j
j i
i G
i
i i
i
i= δ β+ − ′
⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟ + ′
=−
∑ )g G . (6.28)
La solution s’obtient en trouvant les propriétés de la fonction inconnue ( )′A G . Sauf dans le
cas particulier des jeux linéaires-quadratiques, la détermination de cette fonction n’est
généralement pas possible (Fundenberg & Tirole, 1991). C’est précisément cette solution que
retiennent Van der Ploeg & de Zeeuw (1992) et Cesar (1994). Du fait de la spécification
linéaire-quadratique, la stratégie optimale devient une fonction linéaire de la pollution. Grâce
à ces hypothèses, ils démontrent que la pollution et l’émission stationnaires sont plus grandes
en information en boucle fermée qu’en information en boucle ouverte. Ainsi, si les pays
disposent des moyens techniques et économiques pour surveiller l’évolution de l’atmosphère,
la pollution devient plus importante.
La possibilité d’observer l’état du système à tout moment est donc une ‘‘arme à double
tranchant’’. L’interprétation de l’équation différentielle (6.28) permet de comprendre les
motivations économiques sous-jacentes. Lorsqu’un pays réduit son émission de dg unités,
la concentration de gaz à effet de serre diminue de
i i
dG dgi= unités. Dans la structure
d’information en boucle fermée, les autres pays sont immédiatement informés de cet effort
supplémentaire et modifient leur dépollution en conséquence. Chacun augmente son émission
de ( )′A Gi unités, ce qui représente un coût pour le pays initiateur. Comme ce dernier anticipe
la réponse des autres, il préfère polluer plus pour éviter ce coût. Ce raisonnement étant tenu
par tous les pays, l’information instantanée des joueurs sur l’évolution de la concentration en
gaz à effet de serre incite à polluer plus.
Van der Ploeg & de Zeeuw (1992) suggèrent ainsi d’évaluer les gains de la coopération en la
comparant avec la stratégie de Nash en boucle fermée. Leur argument consiste à mettre en
garde contre le risque de sous-estimation de ces avantages en comparant avec les résultats de
la structure d’information en boucle ouverte.
6.1.4 - Coopération et bien-être
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
Par définition, la coopération garantit le plus grand bien-être collectif. Sa supériorité par
rapport aux stratégies de Nash a deux sources.
En premier lieu, l’allocation optimale d’un facteur de production entre plusieurs producteurs
s’obtient quand la productivité marginale de l’intrant est uniforme. Si cette condition n’est
pas satisfaite, l’action de transférer le facteur des entreprises où sa productivité est faible vers
les autres accroît la production globale, donc le bien-être. Or, avec les stratégies de Nash et à
condition que les pays soient différents, la productivité marginale des émissions varie d’un
pays à l’autre, car les pays n’ont pas la même évaluation du coût intertemporel de la pollution.
A émission égale, il existe donc une autre répartition régionale qui permet d’accroître le bien-
être mondial.
En plus de la raison évoquée précédemment, les stratégies de Nash réduisent le bien-être
global par rapport à la coopération car la pollution est excessive. Le coût d’usage réel de
l’émission de gaz à effet de serre additionne les dommages marginaux futurs encourus dans
tous les pays. Or, à l’équilibre de Nash, les pays sous-estiment ce coût puisqu’ils ne prennent
en compte que les dommages domestiques. Ils égalisent donc la productivité marginale de
leur émission à cette valeur, créant ainsi unités de bien-être, mais génèrent un coût futur
plus important, égal au prix implicite coopératif de la pollution
pi
p .
6.1.5 - Application numérique
A part quelques adaptations mineures, l’application numérique subséquente utilise la
même spécification et le même paramétrage que dans la section 1.3 du premier chapitre. Nous
gardons l’hypothèse simplificatrice d’un monde symétrique composé de N pays. La
spécification est la suivante :
( ) ( )f g G g a G, . .= −ρ 1 2 , (6.29)
( )u C C
N
=
−
−1
1
1
σ
σ
. . (6.30)
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
Les conditions d’optimalité sont :
( ) ( )ρ ρ σ σN g a G. . .
. 1 1 2 11− −
−
− p= , (6.31)
( )
( )
( )& . . .
.
. .p p a G
a G
g= + −
−
−δ β σ
ρ σ2
1 2
1 , (6.32a)
( )
( )
( )
& . . .
.
.
.
p p a G
a G
g
N
= + −
−
−
δ β σ
ρ σ2
1 2
1
. (6.32b)
Remarque 6.1 : La relation (6.32a) s’applique lorsque les pays coopèrent. La relation (6.32b)
s’utilise lorsque les pays adoptent des mesures unilatérales. La différence entre les deux vient
du fait que le dommage marginal coopératif vaut N fois les dommages domestiques.
En transformant la relation (6.31), on détermine la fonction de demande d’intrant :
( )
( )
( )
g G p N p
a G
, .
. .
.
=
−
⎡
⎣
⎢
⎢
⎤
⎦
⎥
⎥−
− −
ρ
σ
ρ σ
1 2
1
1
1 1
. (6.33)
Nous utilisons la propriété (1.14) pour trouver l’équilibre stationnaire du système. On
détermine les expressions suivantes pour le stock de pollution stationnaire de la politique
coopérative et de la politique de Nash respectivement :
( )
G a∞
−
= +
+
⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟
⎡
⎣
⎢
⎢
⎤
⎦
⎥
⎥
* . .
.
1 2
1
2β
ρ δ β
, (6.34a)
( )
G a
N∞
−
= +
+
⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟
⎡
⎣
⎢
⎢
⎤
⎦
⎥
⎥
. .
. .
1 2
1
2β
ρ δ β
. (6.34b)
L’expression de la pollution stationnaire coopérative est identique à celle du modèle agrégé
(voir la section 1.3) et ne dépend pas du nombre de pays. Par contre, le stock de pollution
stationnaire issu de l’équilibre de Nash croît asymptotiquement avec le nombre de pays ; on
démontre que lim
N
G
→∞ ∞
= 1 a . Cette valeur limite diminue avec les dommages climatiques.
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
Tableau 6.1 : Pollution stationnaire et nombre de pays
N Nash Coopération
1 14,362 14,362
2 19,339 14,362
5 27,021 14,362
10 32,707 14,362
infini 44,721 14,362
Nous étudions maintenant les trajectoires de transition vers l’équilibre stationnaire pour
le cas où il y a deux pays et où le stock de gaz à effet de serre d’origine est égal à 5 unités. Le
choix d’un plus grand nombre de pays n’a pas d’influence qualitative sur les résultats.
Le graphique 6.4 représente les trajectoires coopérative et non coopérative dans le diagramme
des phases. Le stock de gaz à effet de serre et le prix implicite de l’émission augmentent à
travers le temps dans les deux cas. Les marques représentées sur les trajectoires sont
équidistantes en termes de temps. Le stock de gaz à effet de serre augmente donc beaucoup
plus vite lorsque les pays adoptent leur stratégie de Nash.
Graphique 6.4 : Trajectoires optimales coopérative et non coopérative
5 10 15 20 25
0.2
0.3
0.4
0.5
Stock de gaz à effet de serre
Pr
ix
im
pl
ic
ite
× : Stratégie coopérative + : Stratégie de Nash
Le graphique 6.5 indique que la pollution est sensiblement plus élevée lorsque les pays ne
coopèrent pas. La différence serait encore accentuée avec un nombre de pays plus grand.
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
Graphique 6.5 : Stock de gaz à effet de serre et stratégies nationales
0 200 400 600
5
10
15
20
Périodes
St
oc
k
de
g
az
à
e
ff
et
d
e
se
rr
e
× : Stratégie coopérative + : Stratégie de Nash
6.2 - Résultats des jeux dynamiques appliqués
A notre connaissance, il n’existe que deux études consacrées à la quantification des
avantages régionaux de la coopération dans le cadre d’une politique climatique (Nordhaus &
Yang, 1996 ; Tahvonen, 1994). Tahvonen construit un jeu différentiel appliqué étalonné sur
les résultats du modèle d’équilibre général de Manne (1993) en ce qui concerne la croissance
économique, les émissions de dioxyde de carbone et les coûts de leur limitation. De ce fait, il
considère 5 régions différentes : les Etats-Unis, le reste de l’O.C.D.E., l’Ex-U.R.S.S., la Chine
et le reste du monde. Il suppose que les dommages climatiques croissent linéairement avec
l’élévation de la température moyenne.
Le modèle RICE de Nordhaus & Yang (1996) ‘‘désagrège’’ le modèle DICE (Nordhaus,
1992a et 1993) en 10 régions : les Etats-Unis, le Japon, l’Union européenne, l’Ex-U.R.S.S., la
Chine et 5 autres régions hétérogènes. En dehors d’un facteur de progrès technique autonome,
RICE modélise explicitement la croissance économique, puisque l’accumulation du capital
est décrite sous la forme d’un arbitrage intertemporel identique à celui du modèle de Ramsey
(1928). Les émissions de gaz à effet de serre sont supposées proportionnelles à la
production
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
globale et les coûts de leur réduction sont calibrés sur les résultats de plusieurs modèles
d’équilibre général. Nordhaus & Yang supposent que les dommages sont proportionnels au
carré de l’accroissement de la température.
Ces modèles sont conçus pour étudier trois scénarios différents (la politique inchangée,
la non-coopération et la coopération) puis pour les comparer entre eux. L’innovation majeure,
par rapport aux modèles mondiaux, provient du scénario non coopératif. D’abord, la
détermination de cette trajectoire a l’avantage de montrer ce que les pays devraient ou
pourraient entreprendre de leur propre initiative pour limiter le réchauffement planétaire.
Ensuite, le sentier d’équilibre de Nash semble plus pertinent que la trajectoire de politique
inchangée pour apprécier les gains potentiels de la lutte contre l’effet de serre. Enfin, il nous
renseigne explicitement sur les éventuels perdants et gagnants de la coopération.
Bien entendu, les résultats doivent être interprétés avec prudence. Nordhaus & Yang
(1996, p. 761) soulignent d’eux-mêmes que « ces résultats sont provisoires et susceptibles
d’être revus. De plus amples recherches seront nécessaires pour tester leur robustesse... et
pour comparer les résultats avec d’autres modèles » 7.
L’objectif de cette section est précisément d’aller dans le sens indiqué par ces auteurs. Bien
sûr, l’échantillon, constitué de deux études seulement, est insuffisant pour dégager des
certitudes. Toutefois, l’étude fouillée des nombreux désaccords entre les deux modèles et de
leurs causes permettra de valider certains résultats.
6.2.1 - Les déterminants des taxes domestiques
La variable clé des modèles de Nordhaus & Yang et de Tahvonen est la taxe
domestique sur les émissions de dioxyde de carbone. Avant de débuter l’étude comparative
proposée ci-dessus, mieux vaut se munir d’un outil d’analyse capable d’isoler les
7 - « These results are tentative and subject to revision. Further work will be necessary to test their robustness
against alternative assumptions ... and to compare the results against different models. »
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
déterminants de cette variable. La relation (3.4) fournit ce cadre de réflexion. La taxe
domestique sur les émissions de dioxyde de carbone s’écrit :
( )p t r f
n
a
r n
Y ei
i
i
i
i
ni=
+ − + −
. . . . . .ω
δ β δ
τ , (6.35)
où
β ω, , et f r sont des paramètres climatologiques,
ai mesure la sensibilité nationale à l’accroissement de la température (le dommage
est égal à ai 2 5, % du P.I.B. par degré Celsius supplémentaire),
Yi correspond au P.I.B. du pays,
ni est le taux de croissance du pays.
La diversité des taxes nationales proviendrait donc des inégalités de développement, des
perspectives de croissance économique et de la sensibilité aux changements climatiques. Plus
précisément, la taxe non coopérative d’un pays donné est d’autant plus élevée que son P.I.B.
est grand, qu’il connaît une forte croissance et qu’il est vulnérable à l’effet de serre.
Les estimations de Nordhaus & Yang confirment ces propriétés. Ils déterminent, en effet, que
les taxes domestiques en 2000 ne sont significatives que dans les pays de l’O.C.D.E.
Nordhaus et Yang (1996, p. 753) ajoutent qu’ « en dehors des Etats-Unis, de l’Europe et du
Japon, la stratégie non coopérative rationnelle consisterait simplement à ignorer le
réchauffement climatique dans un premier temps. » 8. Par contre, à mesure que des pays
comme la Chine, l’Inde et l’ex-U.R.S.S. se développent, ces régions participent plus
activement à la réduction des émissions de carbone (les taxes non coopératives de ces régions
sont multipliées par 5 entre 2000 et 2040, pendant qu’elles doublent dans les pays de
l’O.C.D.E.).
8 - « Outside the United-States, Europe, and Japan, the rational noncooperative strategy would be simply to
ignore global warming at the present time. ».
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
6.2.2 - Politiques unilatérales optimales
Les taxes domestiques non coopératives maximisent le bien-être intertemporel
individuel des pays. Ainsi, leur valeur et leur diversité attestent les motivations relatives des
pays à lutter contre l’effet de serre. De par leur implication pratique, elles constituent donc
une information particulièrement significative.
Malheureusement, les estimations de Tahvonen et de Nordhaus & Yang diffèrent
sensiblement. Pour le premier, les taxes non coopératives varient entre 0,8 dollar par tonne de
carbone, pour les Etats-Unis, et 7,1 dollars par tonne de carbone, pour la région ‘‘reste du
monde’’, en 2040. Les estimations de Nordhaus & Yang sont nettement inférieures et, ce qui
est plus gênant, aboutissent à un classement inverse des pays : en 2040, les pays de
l’O.C.D.E. imposent des taxes nationales allant de 0,7 dollar par tonne de carbone, pour le
Japon, à 1,5 dollar par tonne de carbone, pour l’Union européenne, alors qu’elles oscillent
entre 0,01 et 0,4 dollar par tonne de carbone pour les autres régions du monde (0,4 dollar pour
la Chine et l’ex-U.R.S.S.). Un profond désaccord oppose donc les deux études. La première
fait des pays en développement les principaux acteurs de la lutte non coopérative contre
l’effet de serre. La seconde laisse à penser, au contraire, que ces pays ne feront rien pour
l’atténuer de leur propre initiative.
Les discussions subséquentes, se rapportant au paramétrage des modèles et à la méthode
d’analyse utilisée, vont atténuer ces désaccords pour déboucher sur un relatif consensus. En
dehors des modules climatologiques différents utilisés dans les deux modèles 9, deux causes
expliquent les différences constatées.
9 - Sur ce point, il convient de noter que Tahvonen retient l’hypothèse simplificatrice d’une élévation de la
température croissant linéairement avec la concentration en carbone. De ce fait, l’accumulation du gaz
carbonique a toujours le même effet sur le climat. En fait, comme le posent Nordhaus & Yang, la relation entre
l’accroissement de la température et la concentration atmosphérique est logarithmique, si bien que l’effet sur le
climat décroît à mesure que la pollution augmente. La modélisation du système climatique par Tahvonen conduit
donc à surestimer les taxes par rapport à RICE. Par contre, cette différence est sans effet sur le classement des
pays en fonction des taxes domestiques qu’ils appliquent.
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
Le calibrage des paramètres de sensibilité régionale au réchauffement diffère notablement
entre les deux modèles (voir le paramètre a dans le tableau 6.2). Pour Tahvonen, les Etats-
Unis souffrent très peu de l’effet de serre, les pays en développement sont très vulnérables et
l’ex-U.R.S.S. a une position intermédiaire. Pour Nordhaus & Yang, l’ex-U.R.S.S. est la
région la plus épargnée, le ‘‘reste du monde’’ perd le plus et les autres régions oscillent entre
ces deux extrêmes. D’une manière générale, Tahvonen suppose des pertes plus importantes.
Le tableau 6.2 permet d’apprécier l’influence du calibrage de ces paramètres sur les taxes
domestiques. Nous l’avons construit en appliquant la relation (6.35) et les prévisions macro-
économiques de l’E.M.F. n°12 (qui servent aussi d’étalonnage aux deux modèles étudiés).
L’utilisation des paramètres de Nordhaus & Yang, plutôt que ceux de Tahvonen, conduit à
déterminer des taxes régionales plus importantes pour les pays de l’O.C.D.E. et plus faibles
pour les régions en développement. Ce test de sensibilité prouve donc que les différences
entre les deux modèles viennent, en partie, du calibrage des fonctions de dommage.
Tableau 6.2 : Influence des dommages régionaux sur les taxes unilatérales (en 2000)
PIB 1990 Taux de Nordhaus Tahvonen
Région
(milliards
de $)
croissance
1990-2100 a
Taxe
($/tC) a
Taxe
($/tC)
Etats-Unis 5600 1,53% 1,10% 1,79 0,70% 0,95
OCDE (hors E-U) 10200 1,55% 1,17% 3,50 1,00% 2,49
Ex-URSS 2680 2,46% 0,86% 1,16 1,50% 1,69
Chine 1100 3,53% 1,52% 2,05 3,00% 3,36
Reste du monde 3340 2,83% 2,09% 4,60 3,00% 5,49
Notes :
Le taux de croissance moyen sur la période 1990-2100 est prolongé infiniment ;
Le paramètre a donne le dommage climatique, en pourcentage du P.I.B., d’un
doublement de la concentration en carbone.
Sources :
E.M.F. n°12 pour les données macro-économiques ;
Les constantes climatologiques de la relation (6.35) sont présentées dans l’encadré 1
du chapitre préliminaire.
Malgré l’harmonisation des paramètres de sensibilité climatique, la taxe non coopérative
appliquée par la région ‘‘reste du monde’’ reste la plus élevée dans tous les cas, ce qui
contredit la proposition de Nordhaus & Yang. En fait, de même que Tahvonen, les calculs du
tableau 6.2 supposent, implicitement, que cette région forme une unité de décision solidaire.
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
Ceci n’est pas approprié si l’on veut prévoir les mesures qu’entreprendraient ces pays de leur
propre initiative. Nordhaus & Yang considèrent pour leur part, ce qui plus approprié, que
cette région se constitue de 189 pays décidant leur politique isolément. Pour corriger cette
erreur, en supposant que les pays de cette région sont identiques, il convient donc de diviser
la taxe régionale du tableau 6.2 par le nombre de pays, afin d’obtenir les taxes nationales de la
région ‘‘reste du monde’’. On trouve alors, de même que Nordhaus & Yang, une taxe
négligeable (de l’ordre 0,03 dollar par tonne).
Remarque 6.2 : Le même problème se pose pour l’O.C.D.E. (hors Etats-Unis). Tahvonen
traite ce groupe comme s’il formait un seul pays et obtient, de ce fait, une taxe trop grande.
Nordhaus & Yang découpent cette région en trois ensembles : l’Union européenne, supposée
agir dans l’intérêt agrégé des pays membres ; le Japon ; les autres pays sont intégrés dans la
région ‘‘reste du monde’’ et décident leur politique nationale de façon indépendante. Compte
tenu des parts respectives dans les dommages ressentis individuellement, la taxe de
l’O.C.D.E. (hors Etats-Unis) du tableau 6.2 se décompose, grossièrement, en deux tiers pour
l’Europe et un tiers pour le Japon.
Le cumul de deux causes de divergence entre les résultats des deux modèles confirme le
classement des régions de Nordhaus & Yang en fonction des taxes non coopératives
appliquées : par ordre décroissant, l’O.C.D.E. (hors Etats-Unis), les Etats-Unis, la Chine,
l’ex-U.R.S.S. et le ‘‘reste du monde’’, vu comme N pays indépendants. Sachant, de plus, que
la relation (6.35), qui nous a servi à faire ces tests, est semblable à celle qu’utilise Tahvonen,
on conclut que les deux modèles donneraient des résultats comparables, à condition
d’harmoniser les fonctions de dommage et la méthode.
6.2.3 - Comparaison des politiques unilatérales à la politique coopérative
Le modèle RICE détermine une taxe coopérative allant de 6 à 27 dollars par tonne de
carbone entre 2000 et 2100. Cette estimation est très proche des valeurs obtenues avec les
modèles mondiaux (Nordhaus, 1992b et 1993 ; Peck & Teisberg, 1992). Tahvonen ne fournit
aucune information sur ce point.
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
Les émissions de dioxyde de carbone de la trajectoire coopérative sont sensiblement plus
faibles que les émissions non coopératives. Tahvonen prévoit un taux de dépollution non
coopératif de seulement 2,5 pour-cent en 2040 par rapport à la trajectoire de référence, contre
plus de 6 pour-cent dans le cas coopératif. Le modèle RICE détermine une baisse des
émissions en 2000 de 2,3 pour-cent lorsque les pays appliquent des politiques unilatérales et
de 9,7 pour-cent dans l’hypothèse d’un accord optimal sur le climat.
La comparaison des efforts de dépollution régionaux montre, à nouveau, des différences
importantes entre les deux modèles (voir le tableau 6.3). Les estimations de Nordhaus &
Yang prévoient que les pays non-membres de l’O.C.D.E. assumeront la plus grande partie des
efforts de réduction des émissions de carbone si une politique coopérative voit le jour. En
effet, puisque tous les pays appliquent la même taxe, ceux qui peuvent dépolluer à moindre
coût, i.e. les pays en développement et l’ex-U.R.S.S., consentent un effort plus grand.
Tahvonen obtient un résultat qualitativement comparable sur la première moitié du XXIème
siècle, mais ses estimations divergent totalement ensuite. Cette proposition semble peu
crédible. Elle découle des fonctions de coût de réduction des émissions utilisées, qui intègrent
de manière exogène des ajustements économiques décrits par le modèle d’équilibre général de
Manne (1993).
Tableau 6.3 : Taux de dépollution régionaux par rapport au scénario de référence
(politique optimale)
Date Etats-Unis OCDE (hors E-U) Ex-URSS Chine
Reste du
monde
Nordhaus 2030 11% 9% 15% 19% 12%
& Yang 2090 15% 13% 17% 20% 15%
Tahvonen 2030 4% 2% 7% 7% 11%
2090 95% 95% 20% 0% 0%
Sources : Nordhaus & Yang (1996) et Tahvonen (1994).
La conclusion de cette synthèse consiste logiquement à découvrir les gains régionaux de
la coopération par rapport aux stratégies individuelles estimés par les deux modèles. Ces
informations, proposées dans le tableau 6.4, classent les pays selon l’intérêt qu’ils trouvent à
coopérer.
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
Tableau 6.4 : Gains coopératifs par rapport à Nash (en milliards de $, valeur présente)
Etats-Unis OCDE (hors E-U) Ex-URSS Chine
Reste du
monde Monde
Nordhaus & Yang -2,1 63,3 1,4 30,7 208,3 301,6
Tahvonen -100 20 -13 82 45 34
(a) : le découpage régional par Nordhaus & Yang diffère légèrement de celui utilisé
habituellement dans la littérature : l’OCDE (hors Etats-Unis) = CEE et Japon ; le ‘‘reste du
monde’’ intègre donc les membres suivants de l’OCDE : l’Australie, le Canada, la Norvège, la
Nouvelle-Zélande, la Suisse et la Turquie.
Les simulations de Tahvonen déterminent un avantage mondial de la coopération plus faible.
Là encore, le traitement de la région ‘‘reste du monde’’, en tant qu’entité solidaire, déforme
nécessairement les résultats. Les simulations de Tahvonen reviennent à considérer que les
pays de cette région coopèrent entre eux, même dans le cas de la politique non coopérative. Il
s’ensuit qu’elles surévaluent les gains du scénario non coopératif par rapport à la situation de
politique inchangée : 111 milliards de dollars contre 42,5 milliards de dollars pour Nordhaus
& Yang. L’équilibre de Nash sert ensuite d’étalon de mesure pour évaluer les gains de la
coopération, qui capte seulement le complément des gains de la coopération.
Les Etats-Unis et l’ex-U.R.S.S. seraient les perdants de la coopération. Deux caractéristiques
communes à ces deux pays expliquent ce résultat. D’abord, ils sont relativement peu sensibles
aux changements climatiques. En coopérant, ils accepteraient donc de se préoccuper des
dommages extérieurs mais tireraient un profit relativement faible des mesures engagées. De
plus, l’ex-U.R.S.S. (les Etats-Unis dans une moindre mesure) peut réduire son émission de
carbone à un coût marginal faible. Cette facilité relative à dépolluer lui impute une part assez
importante de l’effort global de limitation des émissions.
Le ‘‘reste du monde’’, la Chine et l’O.C.D.E. (hors Etats-Unis) gagnent à coopérer pour des
raisons variées. Les deux premières régions seraient assez vulnérables aux changements
climatiques. Ainsi, bien qu’elles supportent une grosse partie de la dépollution globale, les
dommages évités grâce à la coopération mondiale leur garantissent un gain net substantiel. De
son côté, l’O.C.D.E. (hors Etats-Unis) gagne relativement peu car elle n’endure pas de
dommages très importants mais investit également peu dans la lutte contre l’effet de serre, car
toute baisse des émissions de carbone dans cette région est obtenue à un coût marginal élevé.
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
6.3 - Dilemme du prisonnier et stratégies punitives
La coopération s’imposera à condition que les incitations à resquiller soit éliminées. A
tout moment, les pays sont tentés d’augmenter leurs émissions de gaz à effet de serre pour
profiter des efforts étrangers, sans supporter les coûts de la stratégie commune. A moins
qu’un système efficace de sanctions ou d’incitations ne soit inventé, le problème du dilemme
du prisonnier s’applique au jeu mondial de l’effet de serre et complique sérieusement la
marche vers la coopération. Ce paradoxe classique en économie publique se comprend mieux
à l’aide de l’exemple suivant.
Jeu 8.1 : Jeu à un coup avec information complète et connaissance commune
Pays 1
NC C
Pays 2
NC (0;0) (-1;4)
C (4;-1) (2;2)
Notes :
C = coopération NC = non-coopération
Lire (Gain du pays 1 ; Gain du pays 2)
L’analyse du jeu 8.1 montre que :
• si le pays 1 décide de coopérer, il s’expose à une perte égale à -1, car l’autre pays a intérêt
choisir sa stratégie non coopérative ;
• par contre, s’il choisit d’emblée sa stratégie de Nash, il s’assure un gain nul, supérieur au
précédent.
Le raisonnement rationnel des joueurs les conduit donc à préférer leur stratégie non
coopérative. Même si les joueurs s’entendent, sachant qu’ils sont conscients de leur intérêt
commun, ils savent également qu’il est dans l’intérêt de l’autre de tricher au dernier moment.
Le résultat tiré de l’analyse de l’exemple 8.1 est sans appel. La coopération entre des
dirigeants rationnels est impensable. Pourtant, l’observation des pratiques internationales
contredit régulièrement cette conclusion. On en vient à penser que ce jeu ne représente pas
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
convenablement les relations entre les Etats. Par exemple, l’impossibilité de se proférer des
menaces mutuelles (aussi bien des sanctions que des récompenses), pratique pourtant
courante dans la vie diplomatique mondiale, prouve que l’exemple 8.1 n’est pas approprié. En
fait, le jeu 8.1 est atemporel, puisqu’il n’est précédé d’aucune histoire et puisque son résultat
est sans effet sur l’avenir. Ce défaut doit être corrigé, d’autant plus dans le cas d’une politique
mondiale du climat, où il s’agit de prendre une séquence infinie de décisions. De plus, si le
jeu est répété plusieurs fois, des mesures de rétorsions deviennent possibles 10.
Jeu 8.2 : Super-jeu constitué de la répétition infinie du jeu 8.1
Le jeu 8.2 offre la possibilité de définir des stratégies plus élaborées si les pays peuvent
informer leurs partenaires sur leurs intentions. La stratégie du Talion est un exemple classique
de stratégie basée sur la menace. Elle consiste à annoncer que l’on choisit de coopérer tant
que les autres coopèrent et que l’on cesse de le faire dès qu’un joueur fait cavalier seul et ce,
tant qu’il ne revient pas sur cette décision.
Ainsi, supposons que les pays aient adopté cette stratégie et que la coopération se soit
maintenue jusqu’à une date donnée. A cette étape du jeu, un pays peut décider soit de
continuer à coopérer, soit de faire cavalier seul pendant T tours, avant de revenir. Dans la
première hypothèse, il gagne 2 δ (en supposant que la coopération perdure indéfiniment).
Dans l’autre cas, il gagne . Le
premier terme correspond au gain provisoire du resquillage. Pendant les périodes suivantes, la
stratégie de Nash n’est plus payante car les autres pays sanctionnent cette action en adoptant
eux aussi cette stratégie. Cette situation cesse lorsque le pays coopère à nouveau et l’équilibre
coopératif s’installe en deux temps : le pays responsable de cette séquence prend l’initiative
(troisième terme) ; les autres le constatent et adoptent leur stratégie coopérative (dernier
terme).
( ) ( ) ( ) ( ) ( )4 1 0 1 1 1 2 11
2
1
2
. . . .+ + + − + + +− −
=
− + −
= +
∞
∑ ∑δ δ δt
t
T
T t
t T
δ
10 - La théorie des jeux propose d’autres moyens pour résoudre le dilemme du prisonnier qui ne seront pas
abordés ici : voir Barrett (1990) et Blackhurst & Subramanian (1992).
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
Théorème 6.2 : Lorsque les pays adoptent explicitement la stratégie du Talion, la coopération,
une fois en place, se maintient indéfiniment si le facteur d’actualisation n’est pas trop grand.
En effet, à cette condition, la déviation de la coopération n’est jamais payante.
Preuve : Considérons une ‘‘déviance’’ d’une durée de 1 tour. Le pays fautif en tire un gain
( ) ( ) ( )4 1 1 1 2 11 2. . .+ − + + +− −δ δ δ 2−δ , qui doit être comparé au gain 2 δ qu’il obtiendrait s’il
avait sagement continué à coopérer. On démontre facilement que le premier est supérieur au
second, à condition que le facteur d’actualisation soit supérieur à 1/2. Le graphique ci-dessous
généralise ce résultat pour d’autres cas.
0.2 0.4 0.6 0.8 1
1.5
1
0.5
0
0.5
Taux d'actualisation
G
ai
n
de
la
d
év
ia
nc
e
x : T=1 + : T=2 o : T=3
Quand le jeu est répété un nombre infini de fois, l’adoption collective d’une stratégie de
rétorsion comme la précédente engendre donc une coopération implicite entre les joueurs.
L’issue coopérative est préférée sur des critères strictement individuels, i.e. non coopératifs.
Ceci découle directement du Folk Theorem. En outre, la tactique ‘‘donnant, donnant’’
constitue un système de menaces crédible. En effet, lorsqu’un joueur met en oeuvre la
sanction prévue, il se contente de suivre ce que lui dicte son intérêt, si bien que l’autre n’a
aucune chance d’y échapper. On dit que la stratégie ‘‘donnant, donnant’’ est un équilibre
parfait en sous-jeu.
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
Cesar (1994) adapte le raisonnement du Folk Theorem pour l’appliquer au jeu
différentiel de l’effet de serre. La différence essentielle, par rapport aux jeux 8.1 et 8.2, est
que la matrice des gains évolue en fonction de l’histoire du jeu, puisque les décisions passées
agissent sur le stock de gaz à effet de serre atmosphérique présent. Cesar analyse deux
stratégies punitives différentes.
Dans le premier cas, les pays lésés par un resquilleur menacent d’adopter leur stratégie de
Nash pour toutes les périodes qui suivent. Cesar montre qu’une telle punition dissuade toute
tricherie et maintient indéfiniment l’équilibre coopératif. Seulement, cette menace n’est pas
crédible car elle lèse autant les sanctionneurs que le sanctionné. La stratégie punitive est donc
renégociable et le resquilleur peut espérer, à juste titre, ne pas la subir s’il propose de revenir
rapidement à la coopération. L’issue coopérative ne peut donc pas être maintenue par un tel
système de sanctions.
Cesar tente alors d’adapter la stratégie du Talion au jeu différentiel. Il ne parvient pas à
proposer une démonstration analytique de la non-négociabilité de cette stratégie mais le
prouve à l’aide d’une application numérique. Une fois en place, l’équilibre coopératif du jeu
différentiel de l’effet de serre pourrait donc se maintenir indéfiniment si les pays appliquent
des mesures de rétorsion appropriées à l’encontre des tricheurs potentiels.
En théorie, la stratégie du Talion possède ainsi de nombreuses qualités, dont la
principale est de soutenir la coopération. Dans la pratique, Dixit & Nalebuff (1991) notent
qu’elle comporte des risques si la frontière entre la coopération et la non-coopération est floue
et soumise aux interprétations des joueurs. Ainsi, dans le jeu de l’effet de serre, si un pays
sélectionne un niveau de dépollution qu’il estime coopératif mais que son partenaire
‘‘diagnostique’’, par erreur, un acte non coopératif, le dernier infligera une sanction au
premier. De bonne fois, le pays floué analysera à son tour cette action comme une déviance et
répondra par sa stratégie de Nash. Le jeu rentre alors dans un cercle vicieux. Pour parer une
telle escalade, Dixit & Nalebuff redéfinissent la stratégie ‘‘donnant, donnant’’ en limitant
l’aléa lié à l’appréciation des joueurs : la sanction ne s’applique que lorsque le nombre
d’écarts par rapport à la coopération dépassent une proportion donnée au cours des tours
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
passés du jeu. Cette condition supprime les erreurs d’interprétation tout en préservant l’esprit
de la stratégie du Talion.
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
6.4 - Conclusion
La construction du jeu différentiel de l’effet de serre rend compte des choix stratégiques
nationaux dans l’élaboration d’une politique mondiale du climat. Le comportement coopératif
est celui où les pays agissent de concert afin d’assurer le plus grand bien-être collectif à tous
les participants. La trajectoire correspondante coïncide avec la politique climatique mondiale,
telle que nous la décrivons dans la première partie de cette thèse.
Comme les pays anticipent les tentations de leurs partenaires, qui les poussent à laisser les
étrangers agir contre l’effet de serre sans rien tenter d’exagérer, l’issue coopérative est, a
priori, peu probable. Ainsi, les pays adoptent plus naturellement une stratégie non coopérative
de Nash. Si tel est le cas, l’émission mondiale de gaz à effet de serre est plus importante,
comparée à l’issue coopérative, en raison du fait que chaque pays internalise seulement la
partie des dommages climatiques mondiaux qu’il subit sur son territoire.
Cet écart par rapport à l’optimum social dépend de la faculté des joueurs à observer l’état du
système climatique : il est plus important en information en boucle fermée, soit quand les
pays observent instantanément la pollution, qu’en boucle ouverte, soit lorsqu’ils connaissent
seulement l’état du climat à l’origine du jeu. En fait, l’information en boucle fermée, situation
certainement plus représentative de la réalité, annihile les vélléités de dépollution, car tout
effort unilatérale supplémentaire est partiellement compensé par un laxisme plus grand à
l’étranger, motivé par l’observation de l’évolution résultante du système climatique.
Les modèles appliqués, au nombre de deux seulement, fournissent des évaluations
incompatibles, ce qui invite à la prudence quant à leur exploitation. Nous atténuons toutefois
cette impression en montrant que les désaccords résultent principalement du calibrage des
dommages et d’une erreur méthodologique dans la résolution de l’un d’entre eux. En retenant
l’étude la plus crédible, on en vient à énoncer les résultats suivants :
• les politiques domestiques non coopératives sont très insuffisantes, au regard de l’optimum
social. Par exemple, en 2000, elles impliqueraient de taxer les émissions de carbone de
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Jeux dynamiques de l’effet de serre
0,27 dollars par tonne en moyenne seulement, contre environ 6 dollars par tonne dans le
cas coopératif ;
• à court terme, seuls les grands pays industrialisés trouveraient justifier d’agir pour ralentir
l’accroissement de l’effet de serre. A l’inverse, les autres pays anticipent un gain
individuel de la lutte contre l’effet de serre trop faible pour justifier des mesures de
dépollution coûteuses 11.
La préférence des joueurs pour la non-coopération n’est pas inéluctable. En effet, la
définition de stratégie de rétorsion punissant les déviants, comme par exemple la menace
‘‘donnnant, donnant’’, peut maintenir l’équilibre coopératif indéfiniment. Ce résultat
classique en théorie des jeux répétés, quoique rassurant, n’a aucune utilité pratique. S’il
prouve la persistance possible de l’issue coopérative, il n’explique pas la transition entre les
deux situations.
Le septième et le huitième chapitres tentent d’éclaircir cette question. Le chapitre 7 fait
d’abord le bilan sur l’état actuel des négociations internationales, en prenant soin de mettre en
évidence les sources de blocages. En nous appuyant sur un jeu statique calibré, nous
recherchons ensuite les raisons économiques ralentissant les progrès des négociations, que
nous imputons principalement à une trop grande rigidité de la Convention-cadre sur les
changements climatiques. Dans le chapitre 8, nous passons à une réflexion plus théorique,
dont le nœud est le concept de coalition auto-réalisatrice. Nous identifions les pays signataires
type pour différentes hypothèses sur les règles de fonctionnement des coalitions.
11 - Ce résultat est conforme aux engagements souscrits dans la Convention-cadre sur les changements
climatiques (15 mai 1992).
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Annexes / Chapitre 6
Annexe 6.1 : Démonstration de la propriété 6.1
En résolvant l’équation différentielle (6.5), on démontre que :
( ) ( ) ( ) ( ) ( )( )p t e f g G u f g G dt i Gi i i i i
i
N
t
= − ′
⎡
⎣
⎢
⎤
⎦
⎥
− + −
=
∞
∑∫ δ β τ ω τ. . . , . ,
1
,
( ) ( ) ( ) ( ) ( )p t e f u d e f u dt Gt
t
N G
N
Nt
= − ′ − − ′− + −
∞ − + −∞∫ ∫δ β τ δ β τω τ ω. .. . . ... . . .1 1 1 τ ,
et, si les coefficients de négociation sont constants,
( ) ( ) ( ) ( ) ( )( )p t e f g G u f g G di t Gi i i i it
i
N
= ω τδ β τ. . , . ,.− ′⎡
⎣⎢
⎤
⎦⎥
− + −∞
=
∫∑
1
Ceci démontre le résultat recherché.
Annexe 6.2 : Démonstration du théorème 6.1
Commençons par définir les deux fonctions suivantes :
( ) ( )A G f G N Gg= ≥β . , 0 ,
( ) ( ) ( )B G f G N GG= − + ≥β δ β. , 0 .
En utilisant les relations (6.4), (6.15) et (6.16), d’une part, et (6.20), (6.25) et (6.26), d’autre
part, on vérifie que :
• le point stationnaire coopératif est tel que ( ) ( )A G N B G∞ ∞=* . * .
• le point stationnaire non coopératif est tel que ( ) ( )A G B G∞ ∞= .
La suite de la démonstration nécessite les relations suivantes :
( )′ = +⎡
⎣⎢
⎤
⎦⎥
≤A G
N
f fgg gG
β . 0,
( )′ = −
+
+⎡
⎣⎢
⎤
⎦⎥
≥B G
N
f fGg GG
1 0
δ β
β. . .
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Annexes / Chapitre 6
Compte tenu des propriétés des fonctions ( )A G et ( )B G , quelle que soit G G≥ ∞ , on a
( ) (A G A G≤ ∞ ) et ( ) (B G B G≥ ∞ ) . On peut donc établir la relation d’ordre suivante :
( ) ( ) ( ) ( )∀ ≥ ≤ = ≤∞ ∞ ∞G G A G B G B G, A G .
De plus, si N > 1, pour tout ( ) ( )N B G B G. > G . En associant ce résultat à la relation
précédente, on montre finalement que :
( ) (∀ ≥ <∞G G N B G, A G . ) .
Ceci implique que, si l’équilibre stationnaire coopératif G existe, il sera nécessairement
strictement plus petit que l’équilibre stationnaire non coopératif
∞ *
G∞ , puisque est tel que
.
G∞ *
( ) ( )A G N B G∞ ∞=* . *
Il s’ensuit que :
• l’émission stationnaire non-coopérative est plus grande que l’émission stationnaire
coopérative, puisque g G N g G∞ ∞ ∞ ∞= > =β β. * . N* ;
• le prix implicite stationnaire non-coopératif est supérieur au prix implicite stationnaire
coopératif, puisque ( ) ( )p B G p N B G∞ ∞ ∞ ∞= < =* . * .
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Négociations internationales
Chapitre 7
Négociations internationales
A ce jour, l’O.N.U. et quelques autres O.N.G. ont organisé de très nombreuses
rencontres internationales portant, spécifiquement ou non, sur les changements climatiques ;
les dernières en date sont les conférences de Rio de Janeiro en 1992, de Berlin en 1995 et de
New York en 1997. Des accords de principe en sont ressortis, sans qu’ils soient assortis
d’engagements quantifiés et contraignants. Les discussions reprendront à Kyoto, en décembre
1997, et pourraient aboutir à des résultats plus probants, le Président Clinton ayant affirmé
qu’il s’y rendrait avec « un engagement américain ‘‘réaliste, sur des limites contraignantes
afin de réduire sensiblement les émissions de gaz à effet de serre’’ » (Le Monde, 28 juin
1997) 1.
Cette succession de conférences internationales prouve la bonne volonté de la communauté
internationale dans son ensemble. Par contre, la lenteur des négociations témoigne de
l’ampleur des difficultés à surmonter avant tout règlement définitif 2. Les pays industrialisés
sont historiquement responsables de la situation présente mais ne pourront pas régler seuls le
problème, vu la croissance rapide des rejets de gaz à effet de serre par les pays en
développement ; il faudrait donc, à terme, obtenir leur participation. Avant cela, les pays du
tiers monde revendiquent un droit au développement, sous-entendu gourmand en énergie, et
demandent aux pays du Nord de prendre l’initiative. La Convention-cadre sur les
changements climatiques (15 mai 1992) va clairement dans ce sens. Cependant, bien que les
pays de l’O.C.D.E. aient ratifié ce traité, dans lequel ils s’engagent à stabiliser leurs émissions
de gaz à effet de serre, sa mise en oeuvre tarde et fait toujours l’objet d’âpres négociations.
1 - Les Etats-Unis représentaient jusqu’ici une des causes de blocage des négociations.
2 - A titre de comparaison, il a suffi de cinq ans pour régler le problème de l’appauvrissement de la couche
d’ozone.
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Négociations internationales
Les pays de l’O.C.D.E. avancent deux objections, toutes deux en rapport avec le
manque de flexibilité de l’accord. L’Australie, le Canada, les Etats-Unis et le Japon plaident
pour une flexibilité assise sur un système de permis de polluer négociables. Besset (Le
Monde, 24 juin 1997) estime que « le bras de fer qui s’est engagé autour de la question des
droits à émettre par pays ... devrait trouver sa conclusion » lors de la réunion internationale de
Kyoto, fin 1997. L’autre critique concerne la lenteur de la mise en route du système d’
« application conjointe », par lequel tout pays aurait la possibilité d’honorer ses engagements
en finançant des projets écologiques à l’étranger. Sur ce terrain, les désaccords portent moins
sur l’existence que sur le fonctionnement de ce mécanisme ; mais ils ont gelé son institution.
La répartition des crédits de dépollution entre les deux partenaires d’un projet d’application
conjointe est particulièrement controversée. En apparence, la logique voudrait que
l’investisseur comptabilise comme sienne toute unité de dépollution qu’il aura financée à
l’étranger et qu’il réduise son effort national d’autant. En fait, ce point de vue est inacceptable
pour le pays hôte car l’aide étrangère augmente son coût de dépollution futur, puisqu’a priori
les investissements valoriseront avant tout les projets les moins coûteux. Ce coût
d’opportunité justifierait de dédommager le pays hôte, sous la forme d’un partage des crédits
de dépollution par exemple. Un équilibre devra être trouvé entre ces deux points de vue pour
que l’application conjointe voit le jour.
Dans ce chapitre, après avoir dressé un bilan précis des négociations internationales (les
engagements, les réalisations et les sources de blocage) dans une première section, nous
construirons un jeu statique à partir des travaux de Nordhaus & Yang (1996), de Oliveira-
Martins & alli (1993) et de Manne (1993). Nous étudierons les conséquences régionales de
l’application stricte des engagements souscrits, à savoir la réduction unilatérale des émissions
de dioxyde de carbone par les pays de l’O.C.D.E. Nous montrerons que, en l’état actuel des
choses, la Convention serait coûteuse pour les pays développés, avantageuse pour les autres.
Tour à tour, nous traiterons des améliorations potentielles du traité, c’est-à-dire
l’établissement d’un marché des permis d’émission et d’un système d’application conjointe,
dans l’idée d’illustrer l’enjeu des négociations courantes du point de vue de l’O.C.D.E. Nous
établirons que l’aménagement de la Convention dans ces directions réduirait les coûts
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Négociations internationales
supportés par les pays de l’O.C.D.E., sans que cela suffise nécessairement pour qu’ils cessent
d’être pénalisés.
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Négociations internationales
7.1 - Droit international de l’environnement
Il n’est pas inutile de rappeler que la Convention-cadre sur les changements climatiques
s’insère dans un contexte plus large de prolifération des traités sur l’environnement. Les
aménagements du droit international de l’environnement traditionnel, intervenus depuis une
quarantaine d’années, démontrent la volonté des Etats de gouverner leur environnement
conjointement. Le protocole de Montréal, accord contraignant sur la couche d’ozone, illustre
bien cette tendance.
Après avoir effectué ce cadrage dans une première sous-section, nous nous attacherons à
‘‘décortiquer’’ la Convention-cadre sur les changements climatiques et les aménagements
intervenus depuis sa ratification. Nous verrons à quoi elle engage les Etats signataires,
comment ces derniers ont interprété leur participation et nous approfondirons la notion
d’application conjointe.
7.1.1 - Expériences de coopération internationale
Les espaces internationaux se définissent par la négative : relève de l'espace
international tout ce qui ne fait pas partie du territoire d'un Etat, entendu au sens juridique,
c'est-à-dire comme le lieu d'exercice des compétences souveraines et exclusives d'un pays.
Les espaces internationaux sont donc la haute mer, les régions polaires, les espaces aérien et
extra-atmosphérique.
Le régime juridique des espaces internationaux repose traditionnellement sur les principes de
liberté d'accès et de gratuité. La base de ce régime est la non-appropriation des ressources
internationales et l'égalité des pays devant celles-ci. Ce statut confère aux pays le droit
d'exploiter toutes les ressources internationales selon leurs besoins. La seule contrainte à
laquelle ils soient astreints est le principe de respect des autres utilisateurs. Dès lors, il n’est
pas étonnant que la gestion des ressources internationales (dites aussi ‘‘ressources
communes’’) ou de celles qui relèvent de la juridiction de plusieurs Etats génère des conflits
internationaux.
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Négociations internationales
Le droit international de l’environnement traditionnel a prévalu longtemps mais il est
devenu obsolète à mesure que les contraintes environnementales se sont durcies et
diversifiées. Le vide juridique a dû être comblé et l’Institut Français des Relations
Internationales (1991) note, à ce propos, que « les conventions et les traités en matière
d’environnement ne cessent de se multiplier, surtout depuis les années 60 ». Le droit
international de l’environnement a subi de nombreuses modifications suite à la ratification
d’une multitude de conventions sectorielles, comme l’atteste le tableau 7.1. Toutes ces
conventions internationales définissent des règles de coopération entre les Etats dans chaque
domaine couvert.
Tableau 7.1 : Accords multilatéraux sur l’environnement (1933-90)
Thème Nombre d'accords
Pollution marine 41
Pêche en mer et chasse à la baleine 25
Protection de la faune et de la flore 19
Pollution nucléaire et pollution atmosphérique 13
Antarctique 6
Règlements phytosanitaires 5
Lutte antiacridienne 4
Eaux limitrophes 4
Actes de cruauté envers les animaux 3
Déchets dangereux 1
Autres 6
Total 127
Source : G.A.T.T. (1992)
L’issue des négociations sur les émissions des chlorofluorocarbures et des halons,
responsables de l’appauvrissement de la couche d’ozone, est exemplaire. Elle a été
étonnamment rapide et s’est faite en trois étapes. En 1985, les Etats se réunirent à Vienne
pour dresser un bilan scientifique, après la première observation par satellite du trou dans la
couche d’ozone. En réponse, un protocole fut ratifié en 1987 à Montréal. Il prévoyait que les
émissions de chlorofluorocarbures et de halons seraient ramenées au niveau de 1986 dès
1989, réduites de 20 pour-cent en 1993, puis de 50 pour-cent en 2000. A partir du protocole
de Montréal, les négociations devinrent quasi permanentes et l’amendement de Londres, en
1990, devrait conduire à l’élimination complète des émissions d’ici à la fin du siècle.
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Négociations internationales
I.F.R.I. (1991) estime que quatre conditions favorables ont aidé ce succès :
1. un diagnostic scientifique des risques incontesté ;
2. la maturation d’un consensus facilitée par des actions unilatérales (interdiction des
chlorofluorocarbures et des halons en R.F.A., aux Etats-Unis et en Suède à partir du milieu
des années 70) ;
3. un nombre limité de pollueurs ;
4. l’établissement de mécanismes financiers et de transferts technologiques pour inciter les
pays en développement à adhérer à l’accord.
Il convient de noter que la situation est exactement inverse dans le cas de l’effet de serre.
Pour autant, faut-il en conclure que les négociations sont condamnées à l’échec ?
7.1.2 - La Convention-cadre sur les changements climatiques
La Conférence de Rio de Janeiro, qui s’est tenue du 3 au 14 juin 1992, proposait aux
pays et aux O.N.G. de réfléchir sur le développement et l’environnement, et surtout sur les
liens qui les unissent. Deux textes sont nés de cette rencontre multilatérale, l’un s’occupant de
la diversité génétique, l’autre de l’atmosphère et du climat. La Convention des Nations unies
sur les changements climatiques a reçu 165 signatures et est entrée en vigueur le 21 mars
1994, 90 jours après la cinquantième ratification. Les parties qui l’ont ratifiée doivent s’y
conformer. La Convention fait désormais partie de l’ensemble des règles légales qui
gouvernent les relations entre les Etats et les organisations internationales.
7.1.2.1 - Contenu et engagements
L’article 2 précise clairement l’objectif de la Convention, qui est de « stabiliser ... les
concentrations de gaz à effet de serre dans l’atmosphère à un niveau qui empêche toute
perturbation anthropique dangereuse du système climatique ... dans un délai suffisant pour
que les écosystèmes puissent s’adapter naturellement aux changements climatiques, que la
production alimentaire ne soit pas menacée et que le développement économique puisse se
poursuivre d’une manière durable. »
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Négociations internationales
Aveu partiel de l’échec des négociations en 1992, le texte ajoute qu’il s’agit là d’un objectif
ultime que les négociations et les instruments futurs devraient poursuivre. Les dispositions de
la Convention ne prévoient pas de réel calendrier d’exécution des engagements pris, ni ne
quantifient vraiment les contributions de chacun. Les engagements auxquels souscrivent les
parties ne sont définis que qualitativement.
L’article 4 de la Convention distingue trois catégories de signataires, différenciés
d’après les engagements souscrits. Kiss (1993) insiste sur le caractère inhabituel de ce texte
dans le droit international traditionnel qui, « en proclamant les responsabilités communes
mais différenciées des parties contractantes, va à l’encontre des principes d’égalité des Etats
et de réciprocité ».
Le paragraphe 1 de l’article 4 définit le tronc commun des engagements applicables à toutes
les parties du traité. Au titre de ce paragraphe, tous les pays s’engagent pour l’essentiel : à
publier et diffuser des informations sur leurs émissions de gaz à effet de serre ; à mettre en
oeuvre des programmes nationaux pour atténuer les changements climatiques ; à développer
et partager les technologies de dépollution ; à maintenir et développer les puits de gaz à effet
de serre ; à encourager la recherche sur les changements climatiques...
Dans le paragraphe 2 de l’article 4, les « pays développés parties et les autres parties figurant
à l’annexe I » (voir le tableau 7.2) endossent des engagements plus spécifiques. Notamment,
ils limitent leurs émissions anthropiques ; ils renforcent leurs puits et leurs réservoirs de gaz à
effet de serre. Sur ce point, le traité suggère que « le retour, d’ici à la fin de la décennie, aux
niveaux antérieurs d’émissions anthropiques de dioxyde de carbone et d’autres gaz à effet de
serre » constituerait un objectif raisonnable, celui-ci pouvant être atteint individuellement ou
conjointement. Le paragraphe 7 du même article exempte provisoirement les « pays en
transition vers une économie de marché » de l’annexe I de s’acquitter de cette obligation pour
« les mettre mieux à même de faire face aux changements climatiques » ; si bien que le
paragraphe 2 ne concerne, en fait, que les pays de l’O.C.D.E.
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Négociations internationales
L’annexe II de la Convention liste les pays qui font partie de la dernière catégorie (voir le
tableau 7.2). Leurs engagements sont énumérés dans les paragraphes 3, 4 et 5 de l’article 4.
Pour la plupart membres de l’O.C.D.E., ces pays promettent des « ressources financières
nouvelles et additionnelles pour couvrir la totalité des coûts convenus encourus par les pays
en développement du fait de ... l’application des mesures visées au paragraphe 1 » (§3) ; ils
aident les pays en développement particulièrement vulnérables (§4) ; ils facilitent « l’accès de
technologies et de savoir-faire écologiquement rationnels aux autres parties ».
Le paragraphe 7 de l’article 2 entérine l’inégalité des parties, en rendant l’application des
engagements des pays en développement conditionnelle à l’exécution par les pays développés
de leurs propres promesses (celles-ci sont rapportés ci-dessus).
Tableau 7.2 : Annexes de la Convention-cadre sur le climat
Annexe I Annexe II
Allemagne
Australie
Autriche
Bélarus
Belgique
Bulgarie
Canada
Communauté
européenne
Danemark
Espagne
Estonie
Etats-Unis
d’Amérique
Fédération de
Russie
Finlande
France
Grèce
Hongrie
Irlande
Islande
Italie
Japon
Lettonie
Lituanie
Luxembourg
Norvège
Nouvelle-
Zélande
Pays-Bas
Pologne
Portugal
Roumanie
Royaume-Uni
Suède
Suisse
Tchécoslovaquie
Turquie
Ukraine
Allemagne
Australie
Autriche
Belgique
Canada
Communauté européenne
Danemark
Espagne
Etats-Unis d’Amérique
Finlande
France
Grèce
Irlande
Islande
Italie
Japon
Luxembourg
Norvège
Nouvelle-Zélande
Pays-Bas
Portugal
Royaume-Uni
Suède
Suisse
7.1.2.2 - Des interprétations nationales diverses
L’interprétation de la Convention par les pays ne figurant pas aux annexes I et II est
contenue entièrement dans le paragraphe 7 de l’article 2 (voir ci-dessus). Ces derniers ne
participeront pas à la lutte contre l’effet de serre avant d’avoir observé un premier pas de la
part des pays développés. Le signal attendu concerne les mesures de dépollution prises et
l’approvisionnement d’un Fonds mondial pour l’environnement, destiné à aider les pays en
développement à remplir leurs obligations.
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Négociations internationales
Concernant les pays de l’annexe I (en fait l’O.C.D.E.), la Convention suggère de
prendre des mesures pour que leurs émissions, individuelles ou collectives, retrouvent le
niveau de 1990 en l’an 2000. Cet objectif est indicatif, si bien que les engagements réels
s’avèrent en fait très variés.
Tableau 7.3 : Engagements des pays de l’annexe I :
Réduction des émissions par rapport à l’année de référence
2000 2005 Gaz ciblés Année de référence
Allemagne 25 à 30% CO2 1987
Australie 0% (+2%) 20% (+2%) tous 1988
Autriche 20% (+2%) CO2 1988
Belgique 5% CO2 1990
Canada 0% tous 1990
Danemark 20% (+2%) CO2 1988
Espagne -25% CO2 1990
Etats-Unis 0% tous 1990
Finlande 0% CO2
France -4% CO2
Grèce Engagement CEE
Irlande -20% CO2 1990
Islande 0% tous 1990
Italie 0% CO2 1990
Japon -3% CO2 1990
Luxembourg 0% 20% CO2 1990
Norvège 0% (+1%) CO2 1989
Nouvelle-Zélande 0% CO2 1990
Pays-Bas 4% CO2 1990
Portugal Engagement CEE
Royaume-uni 0% principaux 1990
Suède 0% CO2 1990
Suisse 0% CO2 1990
Turquie Aucun engagement
Source : A.I.E. (1994)
Notes : nous avons pris l’initiative de normaliser les données. Lorsque
l’année de référence n’est pas 1990, nous corrigeons l’objectif de
l’évolution des émissions entre les deux dates (valeur entre
parenthèses). Pour la France et le Japon, qui souhaitent stabiliser leurs
émissions par habitant, l’engagement dépend de l’évolution
démographique de 1990 à 2000 (Source : Banque Mondiale, 1992).
Parmi les pays de l’O.C.D.E., la moitié s’est fixée l’objectif de stabiliser son émission de
dioxyde de carbone au niveau de 1990 d’ici à la fin du siècle. Six pays s’engagent à agir
également sur les autres gaz à effet de serre : l’Australie, le Canada, les Etats-Unis, l’Islande,
les Pays-Bas et le Royaume-Uni. Par rapport à la position moyenne, quelques pays affichent
des objectifs plus ambitieux et/ou de plus long terme : l’Allemagne, l’ Australie,l’Autriche, la
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Négociations internationales
Belgique, le Danemark, le Luxembourg et les Pays Bas. Au contraire, l’Espagne, la Grèce,
l’Irlande, le Portugal et la Turquie s’annoncent plus réticents. Ils défendent leur position en
invoquant leur retard de développement par rapport au reste de l’O.C.D.E. Malgré cela, il est
à noter que l’Union européenne s’est engagée à stabiliser les émissions cumulées des pays
membres, si bien que l’inaction des pays susdits devrait être compensée par les autres pays
européens.
Les engagements ne sont pas toujours comparables : certains pays considèrent les émissions
brutes, d’autres les émissions nettes (en comptabilisant le renforcement des puits) ; les Etats
ayant pris des engagements sur plusieurs gaz à effet de serre se donnent la possibilité de
stabiliser le potentiel de réchauffement global de leurs émissions (cas des Etats-Unis).
7.1.2.3 - Politiques nationales
Kiss (1996) dresse un bilan des suites constatées de la Convention. Il note que
« l’engagement des Etats ... a été diversement respecté, tout comme la tâche des Etats
développés de s’efforcer de revenir, en 2000, aux niveaux d’émissions de 1990 » (Kiss, 1996,
p. 111). La première Conférence des parties 3, réunie à Berlin en avril 1995, consciente du
peu de progrès réalisés, a décidé la rédaction d’un protocole additionnel réaffirmant les
obligations des pays développés.
Le bilan ne s’est guère amélioré depuis la Conférence des parties de Berlin. Réunis à
nouveaux à New York en 1997, les pays signataires et les O.N.G. n’ont pu que déplorer
l’attentisme général. Les émissions de gaz carbonique ont augmenté, entre 1992 et 1996, de
28 pour-cent en Inde, 27 pour-cent en Chine ; cette tendance est générale dans les pays en
développement. L’évolution des émissions des pays de l’O.C.D.E. n’est guère plus
3 - La Conférence des parties est « l’organe suprême de la Convention ». Elle « fait régulièrement le point de
l’application de la Convention et de tous autres instruments juridiques connexes qu’elle pourrait adopter et
prend, dans les limites de son mandat, les décisions nécessaires pour favoriser l’application effective de la
Convention. » : Convention-cadre sur les changements climatiques (1992, Article 7, paragraphe 1)
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Négociations internationales
encourageante. Entre 1992 et 1996, elles ont augmenté de 8 pour-cent aux Etats-Unis et au
Japon. Seuls quelques pays de l’Union européenne sont parvenus à maîtriser leurs rejets.
Ces chiffres montrent que, dans l’ensemble, les membres de l’O.C.D.E. ne tentent rien pour
respecter leurs engagements, puisque les taux de croissance de leurs rejets avant et après la
ratification de la Convention sont comparables. Il existe malgré tout quelques exceptions.
Notamment, les pays nordiques montrent l’exemple en ayant instauré très tôt de nouvelles
taxes visant expressément à réduire les émissions de carbone. En 1992, la Suède et la
Norvège appliquaient des taxes supplémentaires sur les carburants atteignant l’équivalent de 1
à 2 dollars par tonne de carbone (Haugland & alli, 1992).
7.1.2.4 - Aménagements de la Convention
Dans sa première version, la Convention ne définissait pas la notion essentielle
d’application conjointe. Elle se contentait de proposer que les pays de l’annexe I puissent
« appliquer de telles politiques et mesures [la stabilisation des émissions] en association avec
d’autres parties et aider d’autres parties à contribuer à l’objectif de la Convention ».
L’approfondissement de ce système était renvoyé à la première session de la Conférence des
parties (Article 4, paragraphe 2, alinéa d).
La première réunion de Berlin (1995) a « fait un pas vers l’extension du système des ‘‘permis
négociables’’ au plan international » (Kiss, 1996, p. 111) mais n’a pas fait progresser la
définition de l’application conjointe. Le débat n’est pas encore clos à ce jour puisqu’il a été
repoussé, lors de la récente rencontre internationale de New York, pour la fin 1997.
Les attitudes vis-à-vis de l’application conjointe sont fort variées. Globalement, on peut
opposer deux camps. Les pays de l’O.C.D.E. y sont favorables à condition que des critères
précis soient définis après négociation. Au sein de ce groupe, une divergence de vue existe
quant au moment adéquat de l’entrée en vigueur d’un tel système (voir le tableau 7.4). Les
pays en développement y sont majoritairement opposés pour diverses raisons. D’abord, ils
craignent que les activités d’application conjointe réduisent les efforts de dépollution des pays
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Négociations internationales
développés. De plus, ils redoutent que les échanges financiers afférents aux activités
d’application conjointe détournent les pays développés de leurs autres engagements financiers
: le Fonds pour l’environnement mondial et l’aide au développement.
Tableau 7.4 : Avis des pays de l’O.C.D.E. sur la mise en place de l’application conjointe
Application immédiate
Avis Avis Ne l'utiliseront pas
Application future
favorable défavorable pour l'instant
Avis favorable sous
certaines conditions
Autriche Finlande
Islande
Danemark Union eur.
Suisse Belgique
Avis favorable Australie Italie Etats-Unis
Allemagne Pays-Bas
Nouvelle-Zélande
Royaume-Uni
Japon Norvège
Aucune position déclarée France Espagne
Source : A.I.E. (1994)
La réunion de ces oppositions a abouti, après de difficiles négociations, à un certain nombre
de pistes de réflexion qui préfigurent les règles de fonctionnement de l’application conjointe.
Il a été reconnu que :
• l’application conjointe devrait être dissociée des autres engagements financiers des pays
développés ;
• les réalisations d’application conjointe devraient être mutuellement bénéfiques (aussi bien
du point de vue environnemental, qu’économique et social) et que les crédits de
dépollution pourraient être partagés.
7.2 - Respect strict des engagements de la Convention
La littérature économique fournit un certain nombre d’évaluations des coûts et des
avantages régionaux de la réduction des émissions de gaz à effet de serre. A moins que les
gouvernants ne fassent intervenir des critères extra-économiques dans leur décision, ou bien
que les évaluations disponibles ne soient pas fiables, ces données renseignent sur leur
intention en matière de lutte contre le renforcement de l’effet de serre et sur leur point de vue
quant à l’accord scellé par la Convention-cadre sur les changements climatiques. La question
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Négociations internationales
que nous posons est donc la suivante : une analyse basée sur ces évaluations apporte-t-elle un
éclairage constructif sur l’état actuel des négociations et des réalisations ?
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Négociations internationales
Synthétiquement, trois constats résument la situation présente :
• les pays de l’O.C.D.E. doivent réduire unilatéralement leurs émissions ;
• la Convention ne définit pas suffisamment l’interprétation à donner à cet engagement :
individuel ou collectif, strictement régional ou en suscitant la participation des autres pays
;
• les promesses n’ont pas été tenues sous le prétexte d’un manque de flexibilité de l’accord.
L’objet des discussions à venir sera d’illustrer chacun de ces points sur la base des
estimations économiques réunies dans les chapitres 2, 3 et 6. Nous chercherons donc à
apporter quelques éléments de réponse aux interrogations suivantes :
• la stabilisation des émissions par les pays de l’O.C.D.E. est-elle un objectif provisoire
raisonnable ?
• des protocoles additionnels, qui énonceraient des règles opérationnelles concernant un
système de permis échangeables et l’application conjointe, sont-ils nécessaires ?
• les pays en développement devraient-ils participer dès maintenant à la politique climatique
et à quelles conditions ?
A notre avis, les pourparlers actuels ne visent pas la résolution définitive du problème, à
savoir la stabilisation des concentrations atmosphériques de gaz à effet de serre. L’accord
obtenu n’est qu’une étape intermédiaire au terme de laquelle la question d’une participation
active des pays non-membres de l’O.C.D.E. se posera inévitablement. Le jeu que nous
emploierons sera donc statique. Il simulera les intérêts régionaux à un instant donné (l’année
de calibrage) indépendamment des retombées futures des décisions.
7.2.1 - Modèle et calibrages
Par nécessité, compte tenu des données disponibles, mais aussi parce que ce découpage
décrit correctement les forces en présence et les coalitions de fait apparues dans le traité, nous
considérons les six régions suivantes : les Etats-Unis, le Japon, l’Union européenne, l’ex-
U.R.S.S., la Chine et le reste du monde. Chaque pays est souverain.
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Négociations internationales
Les pays choisissent leur politique climatique en comparant le coût économique de la
réduction des émissions de dioxyde de carbone au bénéfice intertemporel associé.
Formellement, nous supposons que le bénéfice et le coût de la réduction des émissions de gaz
carbonique d’un pays quelconque sont donnés respectivement par :
( )B q b Qi i i= . , (7.1)
, (7.2)
où
( )C q c qi i i idi= .
bi est le bénéfice intertemporel d’une réduction des émissions de 1 GtC,
ci est le coût de la réduction des émissions de 1 GtC,
di est l’élasticité du coût de dépollution par rapport aux émissions,
qi est la réduction des émissions de carbone,
Q i
i
=∑ q est la dépollution mondiale.
La spécification choisie pour la fonction de bénéfice est courante dans la littérature sur
les pollutions transfrontières (Barrett, 1992 et 1994 ; Botteon & Cararro, 1994). Le calibrage
de ces fonctions s’appuie sur les résultats de Nordhaus & Yang (1996). Les taxes non
coopératives qu’ils calculent mesurent les bénéfices intertemporels nationaux de la réduction
d’une tonne de l’émission mondiale de dioxyde de carbone ; elles fournissent donc une
évaluation appropriée des paramètres . Les valeurs retenues pour le bénéfice marginal des
différents pays sont données dans le tableau 7.5.
bi
Une spécification alternative, également fréquente dans la littérature, implique un bénéfice
marginal décroissant avec l’effort de dépollution (Barrett, 1992 et 1994). Nous l’avons
écartée en raison du caractère particulier de l’externalité climatique. Puisque le dommage est
proportionnel au stock de gaz à effet de serre, une action ponctuelle sur le flux d’émission a
un effet négligeable sur les dommages futurs. Ainsi, seule une réduction forte et répétée des
émissions aurait pour effet de réduire les bénéfices marginaux. Ceci justifie notre choix.
Afin d’assurer nos résultats, nous utiliserons trois calibrages différents des fonctions de
coût de réduction des émissions (voir l’annexe 7.1) : le premier sera déduit des résultats de
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Négociations internationales
Oliveira-Martins & alli (modèle GREEN, 1993) ; le second des évaluations de Manne
(modèle MR, 1993) ; le troisième reprend les fonctions de Nordhaus & Yang (modèle RICE,
1996). Cependant, pour ne pas surcharger la discussion, nous privilégierons le calibrage tiré
de GREEN, en reléguant les autres résultats en annexe (voir l’annexe 7.2 pour MR et
l’annexe 7.3 pour RICE). Une section récapitulative viendra conclure la simulation
principale, basée sur le modèle GREEN, en faisant ressortir les différences les plus
marquantes.
Tableau 7.5 : Calibrage des fonctions à partir de trois modèles (année 2000)
b c d
Pays RICE RICE GREEN MR RICE GREEN MR
Etats-Unis 0,65 98,26 855,21 425,05 2,89 3,29 2,52
Europe 0,87 368,17 2292,96 279,80 2,89 2,85 2,28
Japon 0,33 1941,24 3313,29 2,89 2,56
Ex-URSS 0,10 64,37 95,98 267,23 2,89 2,49 1,35
Chine 0,07 79,89 139,84 292,72 2,89 2,76 1,31
Reste du monde 0,02 27,48 214,18 386,05 2,89 3,03 1,90
Remarque 7.1 : le paramètre de la fonction de coût du ‘‘reste du monde’’ décrit le coût agrégé
de la région. La fonction individuelle se déduit de la première en formulant l’hypothèse
d’identité des pays, puis en remplaçant le paramètre c par , où i c Ni
di. −1 N est le nombre de
pays de la région.
Remarque 7.2 : les fonctions de coût utilisées proviennent de modèles d’équilibre général
appliqué. Ce calibrage sous-entend donc que les politiques nationales sont réalisées au
moindre coût, au moyen d’une taxe sur les émissions ou d’un système de permis
échangeables. Dans le cas contraire, les fonctions sous-estimeraient les coûts supportés par
les pays. Cette remarque s’applique particulièrement à l’Union européenne, traitée comme un
centre de décision unique, alors que l’harmonisation des politiques environnementales
nationales n’est pas une chose acquise d’avance.
Remarque 7.3 : le bénéfice marginal mondial de la réduction des émissions est égal à la taxe
coopérative du modèle Nordhaus & Yang (1996), i.e. 6,19 dollars par tonne.
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Négociations internationales
Avant de poursuivre en présentant nos simulations, quelques mises en garde et quelques
éclaircissements méthodologiques s’imposent. Le principal point faible de ce travail provient
de l’idée selon laquelle les avantages de la réduction des émissions de dioxyde de carbone,
calculés par Nordhaus & Yang (1996), représenteraient correctement les évaluations
personnelles des décideurs politiques.
En fait, le processus par lequel les gouvernants établissent leur appréciation ne coïncide pas
nécessairement pleinement avec la méthode qui conduit aux données du tableau 7.5. En
premier lieu, les objectifs électoraux peuvent faire diverger leur position de l’intérêt collectif,
pour s’attirer le soutien de groupes de pression (il est difficile d’apprécier dans quel sens ce
mécanisme agirait sachant l’action opposée des mouvements écologistes et des lobbies
industriels). En second lieu, si certains pays se montrent altruistes, hypothèse non explorée
par Nordhaus & Yang, leur évaluation du bénéfice de la lutte contre l’effet de serre risque
d’être plus grande. En troisième lieu, dans le contexte d’incertitude scientifique actuel, les
décideurs peuvent avoir une perception surtout subjective des dommages. Si tel est le cas, leur
appréciation tiendrait compte d’effets non comptabilisés par les évaluations économiques des
dommages : des risques de catastrophes écologiques, des effets secondaires imprévisibles
comme, par exemple, un durcissement des relations Nord-Sud... La liste des raisons d’une
divergence possible entre les estimations ‘‘scientifiques’’ des avantages et les valeurs
implicites utilisées par les décideurs pour mener leurs négociations pourrait sûrement être
allongée.
Dans ces conditions, quel crédit doit-on accorder à nos simulations ? Pour notre part, nous les
concevons comme un support de réflexion. L’important est de décrire, dans les grandes
lignes, les insuffisances du traité dans sa forme actuelle et de montrer comment il pourrait être
amélioré. Autrement dit, les valeurs ne nous intéressent pas en tant que telles ; elles servent
seulement à faire des comparaisons.
Au-delà de cet aspect, qui est déjà présent dans d’autres études techniquement plus
performantes (Martin & alli, 1992 ; Nicoletti & Oliveira-Martins, 1994), notre analyse a deux
qualités. Premièrement, l’introduction des avantages, bien que sujette à controverse, est
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Négociations internationales
préférable à l’hypothèse sous-jacentes ‘‘avantages = 0’’ des analyses susdites.
Deuxièmement, nous prenons acte du fait que la Convention est une première étape provisoire
avant le règlement définitif des négociations, alors que ces mêmes études prolongent
l’équilibre actuel des négociations dans le temps.
7.2.2 - Situations de référence
Les deux points de repère du jeu sont l’équilibre de Nash et l’équilibre coopératif. Le
premier figure la situation de statu quo ; tout pays accepte de participer à un accord
international à condition que cela lui procure un avantage net par rapport au statu quo. Le
second définit l’accord le plus efficace, tant du point de vue de la dépollution globale que de
celui de la répartition de cette dernière entre les régions du monde (indépendamment de toute
considération éthique).
On détermine très simplement l’équilibre de Nash et l’équilibre coopératif du jeu :
• le bien-être d’un pays quelconque est maximum lorsque son coût marginal de dépollution
égale son bénéfice marginal national : ( ) ( )′ = ≡ = ′−C q d c q b B Qi i i i i d i ii. . 1 ;
• à l’équilibre coopératif, le pays internalise en plus les bénéfices marginaux ressentis à
l’étranger : ( ) ( )′ = ≡ = ′− ∑ ∑C q d c q b B Qi i i i i d i
i
i
i
i. . 1 .
Les dépollutions de Nash et coopérative du pays sont donc égales, respectivement, à : i
q
b
d ci
i
i i
di
=
⎡
⎣
⎢
⎤
⎦
⎥
−
.
1
1
, (7.3)
q
b
d ci
i
i i
di
*
.
=
⎡
⎣
⎢
⎢
⎤
⎦
⎥
⎥
∑ −
1
1
. (7.4)
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Négociations internationales
Tableau 7.6 : Equilibre coopératif et équilibre de Nash (année 2000)
Nash Coopération
Pays
Dépollution
(GtC)
Gain
(milliards de
dollars)
Dépollution
(GtC)
Gain
(milliards de
dollars)
Etats-Unis 0,026 0,030 0,069 0,120
Europe 0,008 0,045 0,023 0,284
Japon 0,002 0,018 0,010 0,103
Ex-URSS 0,005 0,005 0,086 -0,175
Chine 0,007 0,004 0,095 -0,187
Reste du monde 0,006 0,228 0,101 1,397
Total 0,055 0,330 0,384 1,542
Note : les gains correspondent à une amélioration du bien-être par rapport à
la solution de marché (le scénario de politique inchangée).
7.2.3 - Politiques unilatérales de la région O.C.D.E.
Nous souhaitons analyser les conséquences de l’application stricte par les pays de
l’O.C.D.E. des engagements auxquels ils ont souscrit en ratifiant la Convention. L’objectif est
la stabilisation de leur émission de dioxyde de carbone. Il correspond approximativement aux
programmes qu’ils ont annoncés. Cet objectif peut se décliner en une multitude d’actions
différentes, que nous étudierons dans les sous-sections prochaines : il peut être atteint
individuellement, sans compensations possibles ; il peut être conjoint, à l’aide d’un système
de permis négociables ; pour finir, les pays de l’O.C.D.E. peuvent souhaiter associer les
autres régions du monde à leur politique en y finançant des projets de dépollution.
7.2.3.1 - La stabilisation des émissions de l’O.C.D.E.
Actuellement, l’action unilatérale des pays de l’O.C.D.E. est l’issue la plus probable : la
Convention n’impose aucune mesure de dépollution aux pays en développement ; le flou qui
entoure l’application conjointe limite fortement leur participation indirecte sous l’impulsion
d’un financement des pays du Nord. Ces raisons nous incitent à étudier les conséquences
d’une stabilisation des émissions des pays de l’O.C.D.E. sans contribution des autres régions.
Par contre, deux possibilités sont envisageables. Le scénario n°1 sera celui où chaque pays de
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Négociations internationales
l’O.C.D.E. limite individuellement son émission de carbone 4. Le scénario n°2 décrira le cas
où l’O.C.D.E. stabilise conjointement ses émissions et crée un marché de permis de polluer
pour répartir efficacement les efforts nationaux 5.
Dans le scénario n°1, les parties de l’annexe I reçoivent des quotas d’émission Ei donnés
(l’indice désignera toujours un membre de l’O.C.D.E.). Chaque pays va donc chercher à
maximiser son bien-être
i
( ) ( )Π i i i iB Q C q= − en respectant ses obligations internationales. Ce
programme se resout en écrivant le Lagrangien et en définissant par le multiplicateur de
Lagrange associé à la contrainte d’émission :
pi
( ) ( ) ( )[ ]L .i i i i i i i iB Q C q p E E q= − + − − , (7.5)
avec ( )E E qi i i− − ≥ 0 , et pi ≥ 0 ( )[ ]p E E qi i i i. − − = 0 ,
où mesure les émissions du pays lorsqu’il ne prend aucune mesure. Ei
Le quota attribué n’est pas contraignant lorsque l’émission de Nash du pays lui est inférieure,
i.e. lorsque ( )E E qi i i− − ≥ 0 . Dans ce cas, le multiplicateur de Kuhn et Tucker est nul et le
pays se contente d’appliquer sa stratégie de Nash. Dans le cas contraire, la contrainte est
serrée, le multiplicateur de Kuhn et Tucker est positif et la dépollution du pays satisfait juste
son engagement, i.e. q E Ei i= − i . Le pays applique alors une taxe supplémentaire pour
respecter sa promesse :
pi
( )p d c E E bi i i i i d ii= − −. 1 −
. (7.6)
4 - A l’exception du Japon, qui a adopté l’objectif d’une stabilisation de ses émissions de carbone par habitant.
5 - Sous certaines hypothèses, i.e. lorsque les fonctions de bénéfice et de coût sont connues avec certitude, le
système de permis de polluer échangeables et la taxe régionale sur les émissions sont équivalents du point de
vue du résultat. Pour décrire les négociation internationales, le système de permis de polluer a l’avantage
d’introduire simplement des compensations entre les pays. La même étude pourrait être menée avec une taxe
régionale, à condition de redistribuer les recettes fiscales de manière à reproduire les transferts latéraux
implicites des échanges de permis.
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Négociations internationales
Avec le scénario n°2, les quotas d’émission Ei attribués sont échangeables sur un marché de
concurrence pure et parfaite au prix p . Le bien-être du pays s’écrit : i
( ) ( ) ( )[ ]Π i i i i i i iB Q C q p E E q= − + − −. . (7.7)
Le terme entre crochets détermine l’offre nette de permis d’émission du pays : lorsque son
émission est inférieure à sa dotation E qi − i Ei , il cherche à vendre ses permis excédentaires
sur le marché ; dans le cas contraire, il se porte acquéreur de permis d’émission sur le marché.
Son émission optimale dépend du prix d’échange des quotas puisqu’à l’optimum :
q
b p
d ci
i
i i
di
=
+⎡
⎣
⎢
⎤
⎦
⎥
−
.
1
1
. (7.8)
Le prix des permis négociables équilibre l’offre et la demande de permis sur le marché :
[ ]p q E Ei
i
i i
i
∑ ∑≡ − ≡ Q , (7.9)
où Q est l’objectif de dépollution visé par l’O.C.D.E.
Tableau 7.7 : Stabilisation des émissions de l’O.C.D.E.
Répartition Gains (milliards de $) (c)
Pays
Projection des
émissions en
2000 (GtC) (a)
Quota
d'émission
1990 (GtC)
optimale des
émissions
dans l'OCDE
(GtC) (b)
scén. n°1
Quotas non
négociables
scén. n°2
Permis
négociables
Etats-Unis 1,497 1,339 1,306 -1,775 -1,405
Europe 0,884 0,813 0,802 -0,960 -0,883
Japon 0,417 0,329 0,373 -6,442 -3,781
Ex-URSS 1,221 Nash Nash 0,028 0,028
Chine 0,875 Nash Nash 0,020 0,020
Reste du Monde 2,177 Nash Nash 1,174 1,174
Total 7,071 6,735 6,735 -7,955 -4,847
Notes :
(a) : Projections de Oliveira-Martins & alli (1993), correspondant au scénario de politique
inchangée. La mention ‘‘Nash’’ signifie que les émissions effectives sont égales à la quantité
projetée moins la dépollution de Nash ;
(b) : Le prix des permis d’émission serait de 62,8 dollars par tonne.
(c) : Gains par rapport à l’équilibre de Nash (une valeur négative correspond à une perte).
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Négociations internationales
Au vu du tableau 7.7, il apparaît que la Convention profite aux pays non-membres de
l’O.C.D.E. Les pays de l’O.C.D.E. subissent des pertes 6. Le Japon perd plus car, selon les
projections de GREEN, ses émissions devraient augmenter fortement ; la stabilisation des
émissions par habitant serait une mesure particulièrement contraignante pour ce pays,
synonyme d’une baisse d’environ un cinquième de ses émissions en 2000, trois fois plus
importante qu’en Europe.
La possibilité d’échanger les permis d’émission réduirait les pertes au sein de l’O.C.D.E. d’un
tiers environ. La répartition de ce gain entre les membres de l’O.C.D.E. dépend de la
distribution primaire des permis d’émission. Ici, nous avons supposé qu’elle coïncide avec les
engagements souscrits par chacun d’entre eux, i.e. la stabilisation individuelle. Dans cette
hypothèse, les Etats-Unis seraient le principal exportateur de permis de polluer (les trois
quarts du volume total) tandis que le Japon serait l’unique importateur. La création du marché
des permis de polluer profiterait à tous (principalement au Japon).
L’inconvénient d’un système de permis négociables est qu’il n’existe, a priori, aucune règle
pour répartir les quotas d’émission entre les pays, alors que ce choix conditionne les gains de
chacun. Les critères d’attribution les plus fréquemment avancés sont : le P.I.B., la population,
les émissions par unité de P.I.B. ou par tête, les émissions cumulées du pays comme mesure
de sa responsabilité passée dans le renforcement de l’effet de serre... On comprend sans
difficulté que le choix d’un critère (ou d’une combinaison de critères) peut donner lieu à des
négociations inextricables.
Pour conclure les commentaires sur ces premières simulations, notons que la
stabilisation des émissions de l’O.C.D.E. au niveau de 1990 réduirait les émissions de l’an
2000 de 336 millions de tonnes, ce qui serait assez proche de la dépollution optimale de 384
millions de tonnes pour cette date. Ainsi, à condition que le bénéfice mondial de la réduction
des émissions de carbone soit de 6,19 dollars par tonne et à condition que les estimations de
Oliveira-Martins & alli reflètent correctement les coûts de la réduction des émissions de
6 - Elles resteraient modérées, comprises entre 0,03 pour-cent du P.I.B. pour les Etats-Unis et 0,19 pour-cent du
P.I.B. pour le Japon (Calculs faits à partir des projections des P.I.B. données par Oliveira-Martins & alli (1993)).
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Négociations internationales
dioxyde de carbone, la Convention-cadre sur les changements climatiques aurait adopté un
objectif provisoire de dépollution globale relativement raisonnable.
Par contre, la répartition des obligations entre les différentes régions du monde est inefficace.
En effet, alors que la politique optimale dégagerait un gain collectif de 1,2 milliards de dollars
environ par rapport à la non-coopération, la politique préconisée par le traité réduit le produit
mondial de 8 milliards de dollars ; ce coût serait ramené à 5 milliards de dollars si un marché
de permis de polluer était institué. Les inconvénients de cette inefficacité seraient supportés
intégralement par les pays de l’O.C.D.E. Dès lors, doit-on s’étonner qu’ils n’aient pas tenu
leurs promesses ?
7.2.3.2 - L’application conjointe au secours de l’O.C.D.E.
La situation de blocage décrite par la première simulation n’est peut être pas fatale. En
principe, la Convention-cadre sur les changements climatiques offre à tout pays la possibilité
de remplir ses engagements en finançant des projets de dépollution étrangers.
Malheureusement, les pays ne donnent pas tous le même sens à l’application conjointe, ce qui
a nui à la définition des critères nécessaires à son application et fait que les expériences sont
restées très peu nombreuses. Dans cette section, nous montrons l’intérêt du projet
d’application conjointe.
Nous restons dans l’hypothèse d’une politique unilatérale de stabilisation des émissions de
l’O.C.D.E. Mais, à la différence du problème précédent, chaque membre de l’O.C.D.E. est
autorisé à financer des projets de dépollution dans les autres régions du monde.
Ainsi, le pays peut offrir de subventionner à hauteur de i τ i dollars chaque tonne de rejet
évité par les pays hors O.C.D.E. (au-delà de leur équilibre de Nash). En contrepartie de la
dépollution financée, la Convention lui octroie droits d’émission supplémentaires Ai Ai 7.
7 - La répartition des droits entre l’investisseur et le pays hôte pourrait faire l’objet d’une négociation. Dans
notre exemple, l’investisseur reçoit tous les crédits de dépollution mais l’autre pays pourrait souhaiter en
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Négociations internationales
Sa dotation en permis est E Ai + i et son bien-être devient :
( ) ( ) ( )[ ]Π i i i i i i i i iB Q C q p E A E q A= − + + − − −. .τ i . (7.10)
On démontre sans difficulté que la subvention optimale des applications conjointes est égale
au prix des permis négociables puisque 8 :
∂
∂
τ
Π i
i
iA
p= − = 0 . (7.11)
Ce résultat est évident. L’achat de droits d’émission et le financement de projets d’application
conjointe sont deux actions concurrentes. Si la subvention est supérieure au prix des permis
d’émission, mieux vaut se procurer des permis sur le marché que financer une application
conjointe. Inversement, si la subvention est inférieure au prix des permis d’émission, le pays
préférera financer un projet étranger plutôt qu’acquérir des permis d’émission.
Jones (1994) entrevoit trois façons différentes d’organiser l’application conjointe pour
faire se rencontrer les demandes d’investissements de la part des pays développés et les offres
de projets de la part des autres pays. La première voie consisterait à alimenter le Fonds pour
l’environnement mondial géré par la Banque Mondiale. L’organisme aurait pour mission de
recenser les projets les moins coûteux, de financer leur réalisation, puis de répartir les crédits
d’émission au prorata des sommes investies. L’application conjointe pourrait aussi
s’organiser sur la base d’accords bilatéraux et multilatéraux de coopération. C’est de cette
manière que la Norvège l’envisageait en lançant deux projets pilotes d’application conjointe
en Pologne (la substitution du gaz naturel au charbon pour le chauffage des locaux
résidentiels) et au Mexique (des éclairages économes en énergie). La dernière approche
impliquerait directement des entreprises privées dans les investissements d’application
recevoir une partie par anticipation sur ses engagements futurs. La justification économique de ce partage se
trouverait dans le fait que le pays de l’O.C.D.E. capte les projets de dépollution peu coûteux.
8 - Par hypothèse, puisque les pays de l’O.C.D.E. n’utilisent l’application conjointe que pour réaliser un objectif
donné de dépollution collective, tout accroissement de la dépollution global par l’application conjointe est
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Négociations internationales
conjointe. Coppel défend plutôt l’approche institutionnelle. A son avis, elle réduirait les coûts
de transaction et, en développant une perspective mondiale plutôt que nationale, augmenterait
l’efficacité des investissements. En outre, la neutralité de cette « tierce partie » conférerait
une plus grande légitimité au système d’application conjointe et amoindrirait les réticences
nationales.
Quel que soit le vecteur par lequel un pays hôte reçoit les propositions d’application
conjointe, il détermine son offre de projet de manière à maximiser son bien-être, somme du
bénéfice net de la dépollution et des subventions reçues 9 :
( ) ( ) (Π j j j j j jB Q C q p q q= − + −. ) . (7.12)
Il exprime donc une offre d’application conjointe égale à :
q q
b p
d c
qj j
j
j j
d
j
j
− =
+⎡
⎣
⎢
⎢
⎤
⎦
⎥
⎥
−
−
.
1
1
. (7.13)
L’application conjointe augmente la dotation en permis d’émission des pays de l’O.C.D.E.
Ainsi, l’offre potentielle de permis d’émission augmente. Dans le même temps, la demande se
raréfie car elle est en partie captée par les investissements d’application conjointe. Le prix
d’équilibre des permis doit donc diminuer (la dépollution optimale d’un pays de l’O.C.D.E.
est déterminée par l’expression (7.8)) 10 :
[ ]p q E E A Qi
i
i i
i
i
i
i
i
∑ ∑ ∑ A∑≡ − − ≡ − . (7.14)
immédiatement suivi d’une baisse de la dépollution de l’O.C.D.E. (voir la relation (7.14)). On a donc
∂ ∂Q A ≡ 0.
9 - Formellement, l’application conjointe telle que nous l’envisageons produit le même résultat qu’un marché
mondial des permis d’émission ouvert à tous et où chaque pays non-membre de l’O.C.D.E. reçevrait une
dotation égale à son émission de Nash. Cette proposition est évidente si l’on compare les relations (7.7) et
(7.12).
10 - Par hypothèse, seuls les pays de l’O.C.D.E. ont accès au marché des permis d’émission.
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Négociations internationales
Le tableau 7.8 synthétise les résultats de deux simulations associées, respectivement,
aux scénarios n°3 et n°4. La première suppose que la zone géographique concernée par les
projets d’application conjointe est limitée à l’ex-U.R.S.S. Elle s’inspire de l’annexe I de la
Convention, qui associe l’O.C.D.E., les pays d’Europe centrale et orientale et la Fédération de
Russie dans le projet de stabilisation des émissions. Cette communauté d’action est en fait
fictive car les pays en transition vers l’économie de marché ont négocié un report de leurs
obligations.
Tableau 7.8 : Stabilisation des émissions de l’O.C.D.E. et application conjointe
Répart. opt. des émiss° Gains (milliards de $) (c)
Pays
Projection des
émissions en
2000 (GtC) (a)
Quota
d'émission
1990 (GtC)
scén. n°3
Ex-URSS
(GtC) (b)
scén. n°4
Monde
(GtC) (b)
scén. n°3
Ex-URSS
scén. n°4
Monde
Etats-Unis 1,497 1,339 1,392 1,432 -1,144 -0,348
Europe 0,884 0,813 0,845 0,862 -0,467 -0,022
Japon 0,417 0,329 0,399 0,408 -1,105 -0,293
Ex-URSS 1,221 Nash 1,061 1,149 1,419 0,200
Chine 0,875 Nash Nash 0,794 0,020 0,224
Reste du monde 2,177 Nash Nash 2,089 1,174 1,417
Total 7,071 6,735 6,735 6,735 -0,104 1,177
Notes :
(a) : Projections de Oliveira-Martins & alli (1993), correspondant au scénario de politique
inchangée. La mention ‘‘Nash’’ signifie que les émissions effectives sont égales à la quantité
projetée moins la dépollution de Nash ;
(b) : Le prix des permis d’émission et la subvention seraient de : 15,5 dollars par tonne dans le
scénario n°3 ; 4,6 dollars par tonne dans le scénario n°4.
(c) : Gains par rapport à l’équilibre de Nash (une valeur négative correspond à une perte)
Plusieurs raisons poussent à interpréter ces dispositions particulières comme un appel à la
collaboration avec les pays de l’O.C.D.E. En premier lieu, il est paradoxal que les pays
d’Europe de l’est et la Fédération de Russie aient adhéré aux engagements spécifiques de
l’annexe I pour, finalement, réclamer une clause qui les en exempte (d’autant plus que
l’accession à ce statut est possible à tout moment et à n’importe quel pays). En second lieu,
l’application conjointe semble, dans un premier temps, concerner plutôt les Parties de
l’annexe I, certains pays en développement y étant farouchement opposés. Pour finir, la
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Négociations internationales
coopération dans le domaine de l’environnement entre les pays occidentaux et les anciens
pays socialistes est d’ores et déjà engagée 11.
La simulation associée au scénario n°3 montre l’intérêt d’une collaboration avec l’ex-
U.R.S.S. L’exploitation de toutes les possibilités d’application conjointe avec l’ex-U.R.S.S.,
situation caractérisée par l’égalisation des coûts marginaux de dépollution dans toute la zone,
rendrait la contrainte de stabilisation des émissions beaucoup moins lourde à supporter : les
coûts diminueraient de 20 pour-cent aux Etats-Unis, 50 pour-cent en Europe et 70 pour-cent
au Japon. A volume constant, l’O.C.D.E. se chargerait de la moitié de la réduction mondiale
des émissions de carbone, contre 95 pour-cent en l’absence d’application conjointe. En
contrepartie, l’ex-U.R.S.S. produirait presque 50 pour-cent de la dépollution mondiale. Elle
aurait intérêt à accepter cette situation car les subventions reçues excéderaient largement les
coûts supplémentaires encourus. Cependant, malgré l’amélioration nette de la situation des
pays de l’O.C.D.E., la région subirait toujours une perte nette et, compte tenu du calibrage
que nous utilisons et des conditions que nous avons posées, pourrait refuser de respecter ses
engagements.
Le scénario n°4 élargit le système d’application conjointe à l’échelle du monde. Notre
simulation fait état d’un déplacement massif des efforts de dépollution. Les pays hors
O.C.D.E. assureraient alors plus de 70 pour-cent de la réduction des émissions, à parts égales
entre l’ex-U.R.S.S., la Chine et le reste du monde. L’extension de l’application conjointe à
toutes les régions serait acceptable du point de vue des pays en développement et réduirait
fortement les coûts supportés par l’O.C.D.E. Ce système serait efficace à la condition que les
coûts de transaction soient faibles. Il permettrait d’égaliser les coûts marginaux de réduction
des émissions partout. Ceci se traduirait par un gain mondial proche de celui qui serait obtenu
en régime de coopération totale. La différence essentielle entre la politique optimale et la
stabilisation des émissions de l’O.C.D.E. assortie d’un système d’application conjointe
11 - Une étude de l’O.C.D.E. (1995a) indique que « les fonds polyvalents pour l’environnement sont des
mécanismes de plus en plus souvent utilisés pour financer les dépenses liées à l’environnement dans bon nombre
de pays d’Europe centrale et orientale, y compris les nouveaux Etats indépendants de l’ex-Union Soviétique »
(1995, p.7). Par exemple, en 1993, les aides accordées s’élèvent à 198,5 millions de dollars pour la Pologne, 107
millions de dollars pour la République Tchèque, 35 millions de dollars pour la République Slovaque...
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Négociations internationales
exhaustif résiderait alors dans l’affectation finale des gains. Dans le premier cas, l’ex-
U.R.S.S. et la Chine sont les perdants. Dans l’autre cas, l’O.C.D.E. finance implicitement la
participation de ces régions et subit des pertes.
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Négociations internationales
7.2.3.3 - Résultats obtenus avec les autres calibrages
Les fonctions de coût calibrées sur le modèle de Manne (1993) (voir l’annexe 7.2)
impliquent une plus grande difficulté à réduire les émissions de dioxyde de carbone. Ainsi,
l’application uniforme de la taxe coopérative de 6,19 dollars par tonne dans toutes les régions
réduirait les émissions de l’année 2000 de moins de 1 pour-cent. Il s’ensuit que la politique
unilatérale de l’O.C.D.E., qui réduit l’émission mondiale de presque 7 pour-cent, serait une
mesure exagérée à ce niveau de bénéfice par tonne. Elle impliquerait des pertes importantes
pour l’O.C.D.E. (au moins 2 à 3 fois supérieures à celles que l’on calculait précédemment
avec les fonctions tirées de GREEN). En outre, la flexibilité permise par un marché de permis
de polluer et par l’application conjointe n’abaisserait que modérément les coûts par rapport
aux simulations précédentes. Cette moindre efficacité provient d’une plus grande
homogénéité des coûts régionaux dans le modèle MR (au moins pour l’année 2000). Par
exemple, l’échange de permis d’émission entre les pays de l’O.C.D.E. diminuerait le coût
collectif de la stabilisation de seulement 0,2 pour-cent environ, par rapport à la situation où
chaque pays de l’O.C.D.E. tiendrait individuellement son engagement (avec le calibrage tiré
de GREEN, le gain entre le scénario n°1 et le scénario n°2 avoisinait 30 pour-cent). Dans
l’hypothèse d’un système d’application conjointe global, le transfert de la dépollution vers les
pays non-membres de l’O.C.D.E. équivaudrait à 22 pour-cent de la dépollution mondiale
seulement, contre presque 70 pour-cent dans les simulations précédentes. L’enseignement
principal à tirer de cette spécification est qu’elle rend encore plus improbable la mise oeuvre
effective des engagements de l’O.C.D.E.
A l’inverse, les fonctions de coût déduites de Nordhaus & Yang (1996) (voir l’annexe
7.3) font état d’une facilité relative à réduire les émissions. Ainsi, la politique coopérative,
consistant en une taxe globale de 6,19 dollars par tonne, réduirait l’émission mondiale de plus
de 11 pour-cent en 2000. Avec cette configuration, l’initiative de l’O.C.D.E. pour stabiliser
ses émissions serait donc insuffisante, puisque le taux de dépollution serait d’environ 5 pour-
cent seulement. Le coût économique de la stabilisation serait plus faible que dans le cas des
fonctions calibrées sur GREEN (4 à 5 fois moindre pour le scénario n°1). L’instauration d’un
marché des permis d’émission et de l’application conjointe permettrait des gains d’efficacité
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Négociations internationales
conséquents. Dans le scénario n°4, les efforts de réduction des émissions seraient
massivement transférés vers les pays non-membres de l’O.C.D.E. (principalement vers le
‘‘reste du monde’’). Ces derniers produiraient alors les deux tiers de la dépollution mondiale.
L’O.C.D.E. dans son ensemble gagnerait à appliquer cette politique, tandis que le gain
mondial serait proche de celui que l’on déterminait ci-dessus.
7.3 - Conclusion
Les négociations sur le climat s’insèrent dans un contexte historique plus large de
prolifération des traités multilatéraux sur l’environnement. Pour autant, ce climat favorable
n’est pas un gage de réussite ! D’ailleurs, depuis le Sommet de la Terre, qui s’est tenu à Rio
de Janeiro en 1992, les négociations piétinent et les progrès sont infimes. A l’issue de cette
Conférence internationale, marquée par la ratification de la Convention-cadre sur les
changements climatiques, deux catégories de pays, différenciées par les engagements
souscrits, se sont faites jour. D’un côté, il y a les pays de l’O.C.D.E., historiquement
responsables de la majeure partie de l’effet de serre additionnel, à qui la Convention assigne
de stabiliser leurs rejets de gaz à effet de serre et d’aider les pays en développement. De
l’autre, le reste du monde, qui revendique son droit au développement, adopte une attitude
passive, en attendant d’observer les efforts consentis par les pays riches.
Bien que ce traité ait valeur légale (mais, cela a-t-il un sens, sachant qu’il reste tributaire de la
bonne volonté des pays signataires ?), on doit déplorer qu’il n’ait pas été suivi d’effets. Dans
leur ensemble, les pays développés n’ont rien tenté pour infléchir leurs émissions de gaz à
effet de serre, alors qu’ils s’y étaient engagés, sous le prétexte d’un manque de flexibilité de
l’accord. Leurs revendications concernent l’aménagement d’un marché de permis d’émission
négociables et celui d’un système d’application conjointe, leur permettant de financer à
l’étranger des projets de dépollution peu coûteux et d’en garder le bénéfice, sous la forme
d’un assouplissement de leurs engagements.
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Négociations internationales
Ces critiques, formulées par quelques pays de l’O.C.D.E., sont-elles fondées ? Telle est
la question que nous posons et à laquelle nous répondons, au moyen d’une application
numérique calibrée sur les résultats des chapitres 2, 3 et 7. Nos calculs établissent clairement
que, bien que l’effort de dépollution mondial réclamé collectivement par l’ensemble des
signataires de la Convention soit raisonnable, sa répartition, sous la forme de quotas
d’émission individuels, laisse à désirer. Dès lors, vu la faible place réservée aux instruments
économiques dans le traité, ce défaut devient un argument parfaitement recevable, que
certains pays développés n’hésitent d’ailleurs pas à brandir. De fait, en l’état actuel, le respect
stricto sensu des engagements souscrits serait inefficace et les pays développés en
supporteraient tous les inconvénients.
Par contre, les aménagements du traité réclamés par ces pays, sans lèser a priori les pays en
développement, redistribueraient les efforts de dépollution de manière plus rationnelle. Il
semblerait même, à en croire les estimations de GREEN (Oliveira-Martins & alli, 1993), à
partir desquelles nous paramètrons nos fonctions de coût, et les résultats de Nordhaus & Yang
(1996), selon lesquels le bénéfice mondial de la lutte contre l’effet de serre serait de 6,19
dollars par tonne de carbone en 2000, que l’application de la Convention ainsi redéfinie serait
une mesure proche de l’optimum, mais impliquant une forte redistribution des bénéfices vers
les pays en développement.
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Annexes / Chapitre 7
Annexe 7.1 - Calibrage des fonction de coût : un exemple
Le calibrage des fonctions de coût utilise les résultats des modèles d’équilibre général
pour l’année 2000. La méthode est la même que celle employée par Tahvonen (1994),
Nordhaus (1992b) et (1993), et Nordhaus & Yang (1996). L’exemple suivant illustre la
démarche suivie et conduit au paramétrage de la fonction de coût de la Communauté
européenne à partir des données de GREEN.
Par hypothèse, la fonction de coût est de la forme ( )C q c q d= . . Le coût marginal est donc
. Comme les taxes sur les émissions de carbone de GREEN expriment les
coûts marginaux de dépollution, cette relation peut être estimée par la méthode des moindres
carrés ordinaires, en remarquant que
( )′ = −C q c d q d. . 1
( )( ) ( ) ( ) ( )ln ln ln′ = + −C q c d d q. .1 . Nous utilisons les
quatre points correspondant aux quatre scénarios étudiés par le modèle
Tableau 1 : Ajustement de la fonction de coût de la C.E. à partir de GREEN
Emission
(tC)
Taxe T
($/tC)
Dépollution q
(tC) ln (T) ln (q) ln (T)² ln (q)² ln (T).ln (q)
Stabilisation 8,13E+08 59 7,10E+07 4,08 18,08 16,63 326,82 73,71
Scénario 1% 8,00E+08 56 8,40E+07 4,03 18,25 16,20 332,93 73,45
Scénario 2% 7,24E+08 186 1,60E+08 5,23 18,89 27,31 356,86 98,72
Scénario 3% 6,54E+08 492 2,30E+08 6,20 19,25 38,42 370,70 119,34
Pol. inchangée 8,84E+08 Moyenne : 4,88 18,62 24,64 346,83 91,31
d-1 =( 91,31 - 4,88.18,6 ) / ( 346,83 - (18,62)² ) = 1,854 d = 2,853939
ln (c.d) = 4,88 - ( d - 1 ) .18,62 = -29,633 R² = 0,97 c = 4,731E-14
Si l’on exprime la dépollution en GtC et le coût en milliards de dollars, le paramètre c doit
être multiplié par . On obtient alors c( )109 1d − = 2292 96, .
La fonction de coût s’écrit donc . ( )C q qi= 2292 96 2 85, . ,
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Annexes / Chapitre 7
Annexe 7.2 - Calibrage du jeu à partir de MR (1993)
Tableau 1 : Equilibre coopératif et équilibre de Nash en 2000
Nash Coopération
Pays
Dépollution
(GtC)
Gain
(milliards de
dollars)
Dépollution
(GtC)
Gain
(milliards de
dollars)
Etats-Unis 0,008 0,008 0,033 -0,040
Autres OCDE 0,007 0,014 0,027 0,005
Ex-URSS 0,000 0,002 0,000 0,006
Chine 0,000 0,001 0,000 0,005
Reste du monde 0,000 0,063 0,005 0,256
Total 0,015 0,087 0,065 0,232
Note : Amélioration du bien-être par rapport à la solution de marché.
Tableau 2 : Stabilisation des émissions de l’O.C.D.E.
Répartition Gains (milliards de $) (c)
Pays
Projection des
émissions en
2000 (GtC) (a)
Quota
d'émission
1990 (GtC)
optimale des
émissions
dans l'OCDE
(GtC) (b)
scén. n°1
Quotas non
négociables
scén. n°2
Permis
négociables
Etats-Unis 1,649 1,430 1,423 -9,014 -9,002
Autres OCDE 1,640 1,375 1,381 -12,957 -12,936
Ex-URSS 1,184 Nash Nash 0,047 0,047
Chine 0,754 Nash Nash 0,033 0,033
Reste du Monde 1,743 Nash Nash 1,956 1,956
Total 6,970 6,486 6,485 -19,935 -19,902
(a) : Manne (1993) (projections des émissions de dioxyde de carbone) ;
(b) : Le prix des permis d’émission serait de 111,4 dollars par tonne ;
(c) : Gains par rapport à l’équilibre de Nash.
Tableau 3 : Stabilisation des émissions de l’O.C.D.E. et application conjointe
Répart. opt. des émiss° Gains (milliards de $) (c)
Pays
Projection des
émissions en
2000 (GtC) (a)
Quota
d'émission
1990 (GtC)
scén. n°3
Ex-URSS
(GtC) (b)
scén. n°4
Monde
(GtC) (b)
scén. n°3 Ex-
URSS
scén. n°4
Monde
Etats-Unis 1,649 1,430 1,435 1,468 -9,000 -8,478
Autres OCDE 1,640 1,375 1,398 1,441 -12,783 -11,702
Ex-URSS 1,184 Nash 1,156 1,170 0,804 0,331
Chine 0,754 Nash Nash 0,748 0,033 0,150
Reste du monde 1,743 Nash Nash 1,658 1,956 5,137
Total 6,970 6,486 6,486 6,486 -18,991 -14,563
(a) : Manne (1993) (projections des émissions de dioxyde de carbone) ;
(b) : Le prix des permis d’émission et la subvention seraient de : 102,4 dollars par tonne dans le cas
scénario n°3 ; 79,3 dollars par tonne dans le scénario n°4.
(c) : Gains par rapport à l’équilibre de Nash.
Annexe 7.3 - Calibrage du jeu à partir de RICE (1996)
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Annexes / Chapitre 7
Tableau 1 : Equilibre coopératif et équilibre de Nash en 2000
Nash Coopération
Pays
Dépollution
(GtC)
Gain
(milliards de
dollars)
Dépollution
(GtC)
Gain
(milliards de
dollars)
Etats-Unis 0,040 0,065 0,132 0,234
Europe 0,023 0,092 0,065 0,551
Japon 0,006 0,037 0,027 0,204
Ex-URSS 0,019 0,011 0,165 -0,274
Chine 0,014 0,008 0,147 -0,260
Reste du monde 0,013 0,475 0,259 2,760
Total 0,114 0,688 0,795 3,216
Note : Améliorations du bien être par rapport à la solution de marché.
Tableau 2 : Stabilisation des émissions de l’O.C.D.E.
Répartition Gains (milliards de $) (c)
Pays
Projection des
émissions en
2000 (GtC) (a)
Quota
d'émission
1990 (GtC)
optimale des
émissions
dans l'OCDE
(GtC) (b)
scén. n°1
Quotas non
négociables
scén. n°2
Permis
négociables
Etats-Unis 1,497 1,339 1,311 -0,307 -0,280
Europe 0,884 0,813 0,791 0,045 0,083
Japon 0,417 0,329 0,379 -1,667 -0,635
Ex-URSS 1,221 Nash Nash 0,025 0,025
Chine 0,875 Nash Nash 0,017 0,017
Reste du Monde 2,177 Nash Nash 1,036 1,036
Total 7,071 6,709 6,709 -0,851 0,246
(a) : Oliveira-Martins & alli (1993) (projections des émissions de dioxyde de carbone) ;
(b) : Le prix des permis d’émission serait de 11,2 dollars par tonne ;
(c) : Gains par rapport à l’équilibre de Nash.
Tableau 3 : Stabilisation des émissions de l’O.C.D.E. et application conjointe
Répart. opt. des émiss° Gains (milliards de $) (c)
Pays
Projection des
émissions en
2000 (GtC) (a)
Quota
d'émission
1990 (GtC)
scén. n°3
Ex-URSS
(GtC) (b)
scén. n°4
Monde
(GtC) (b)
scén. n°3 Ex-
URSS
scén. n°4
Monde
Etats-Unis 1,497 1,339 1,381 1,428 -0,204 0,021
Europe 0,884 0,813 0,825 0,848 0,068 0,156
Japon 0,417 0,329 0,394 0,404 -0,231 -0,014
Ex-URSS 1,221 Nash 1,084 1,149 0,323 0,057
Chine 0,875 Nash Nash 0,812 0,017 0,049
Reste du monde 2,177 Nash Nash 2,068 1,036 1,104
Total 7,071 6,709 6,709 6,709 1,008 1,373
(a) : Oliveira-Martins & alli (1993) (projections des émissions de dioxyde de carbone) ;
(b) : Le prix des permis d’émission et la subvention seraient de : 4,3 dollars par tonne dans le scénario
n°3 ; 1,2 dollars par tonne dans le scénario n°4.
(c) : Gains par rapport à l’équilibre de Nash.
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Coali t ions
Chapitre 8
Coalitions
En schématisant, la Convention-cadre sur les changements climatiques oppose deux
camps. D’un côté, les pays de l’O.C.D.E. promettent de réduire leurs émissions (même s’ils
tardent à mettre ce plan à exécution, cet engagement est réel). De l’autre, le reste du monde se
donne un délai avant d’agir ou, dans le meilleur des cas, dépollue à condition de recevoir une
aide des pays développés.
Pour partie, des raisons extra-économiques ont très certainement guidé les négociations et
expliquent l’équilibre actuel du traité. Par exemple, la responsabilité historique des pays
développés dans le renforcement de l’effet de serre pèse lourdement dans l’attitude des pays
du tiers monde. De même, les inégalités de développement entre les deux régions orientent de
façon non négligeable les négociations. Le poids de ces arguments est évident ; il ne sera
donc pas analysé dans ce chapitre.
Notre préoccupation présente est ailleurs. Outre les raisons historique et éthique
susdites, il semble raisonnable de penser que des déterminants économiques interviennent en
parallèle et renforcent la configuration bipartite de la Convention. La question que nous
posons ici s’énonce ainsi de la façon suivante : de quelle manière les différences régionales
face aux bouleversements climatiques, d’une part, et en matière de coût de la limitation des
émissions de carbone, d’autre part, organisent-elles les tractactions internationales ?
La notion de coalition spontanée (‘‘self-enforced’’ en anglais) 1, appliquée par d’Aspremont
et Gabszewics (1986) à la formation de cartels, puis adaptée par Barrett (1990), (1991),
(1992) et (1994) à l’analyse des négociations internationales sur l’environnement, propose
une piste de recherche fructuceuse. L’idée commune à cette littérature est d’isoler des
1 - Nous traduirons aussi par ‘‘auto-réalisatrice’’.
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Coali t ions
ententes entre des joueurs qui se forment d’elles-mêmes, par le truchement des intérêts
individuels des participants. Appliquée aux négociations sur le climat, elle pourrait nous aider
à comprendre pourquoi les pays de l’O.C.D.E. acceptent d’endosser seuls la lutte contre
l’effet de serre et tolèrent, parallèlement à leurs engagements, que le reste du monde se
comporte en passager clandestin.
Dans la première section, nous définirons plus précisément la notion de coalition
spontanée. Nous verrons que deux conditions suffisent à les identifier. Nous discuterons
ensuite des règles de fonctionnement interne de la coalition : définition de la dépollution cible
et des objectifs individuels, répartition des gains et conditions d’accès d’un nouveau candidat.
Dans la section suivante, nous proposerons une synthèse courte des deux études qui nous ont
inspiré ce chapitre. La première est le fait de Barrett (1994). Elle postule une absence de
redistribution des gains entre les membres de la coalition et un grand nombre de pays
identiques. La seconde est le fait de Botteon & Carraro (1995). Cette étude s’applique au
contraire à un petit nombre de pays différents avec redistribution des gains de l’accord.
Dans la troisième section, nous remarquerons l’inconvénient majeur de l’hypothèse d’identité
des pays posée par Barrett. Nous prolongerons son travail en proposant une réflexion sur les
coalitions spontanées dans un monde composé d’un grand nombre de pays différents.
L’avantage de ce nouveau jeu d’hypothèses réside dans la possibilité d’identifier les pays
susceptibles de s’entendre. Ainsi, nous montrerons que, si les transferts latéraux ne sont pas
autorisés et si l’entrée dans l’accord est libre, les membres de la coalition seront des pays
définis par un grand dommage marginal de la pollution et par un coût marginal de réduction
des émissions fortement croissant. Nous remarquerons que ce profil dépeint assez bien
certains pays de l’O.C.D.E.
Pour finir, nous reprendrons le travail de Botteon & Carraro (1995) en utilisant un calibrage
moins critiquable des fonctions de dommage. Nous étudierons les coalitions auto-réalisables
avec redistribution des gains entre les membres selon le vecteur de Shapley (1974). Cette
simulation mettra en évidence les possibilités d’ententes mutuellement bénéfiques et stables
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Coali t ions
entre des pays soucieux d’environnement (ceux dont le dommage marginal est fort) et des
pays capables de réduire leur émission sans accroître sensiblement leur coût marginal de
dépollution (ceux dont le coût marginal est relativement plat). La condition pour que de tels
accords se concrétisent est que les premiers offrent une aide financière aux seconds.
8.1 - Coalition : définition et fonctionnement
Le concept de coalition regroupe toutes les formes possibles d’entente entre des agents
économiques. A partir d’un ensemble de N joueurs, il y a 2 N 1− coalitions possibles, en
incluant les coalitions réduites à un seul joueur. Deux règles simples permettent d’éliminer les
ententes qui n’ont aucune chance de se former.
La règle de profitabilité (Carraro et Siniscalco, 1995) prend acte du fait que l’adhésion des
pays à une coalition repose sur le volontariat. D’un point de vue économique, un pays décide
de participer à une entente si son bien-être au sein de celle-ci dépasse son paiement non
coopératif.
Cependant, beaucoup de coalitions vérifient cette propriété sans avoir un réel intérêt pratique,
à commencer par la coopération universelle : le bien-être collectif est maximum si tous les
joueurs coopèrent ; il existe donc toujours une imputation 2 telle que chacun voit sa situation
s’améliorer par rapport à l’équilibre de Nash. La coopération totale remplit donc la condition
de profitabilité. Mais, comme les pays sont inciter à resquiller, donc à quitter cet état, la
coalition totale n’existera pas dans les faits.
La règle de stabilité élimine la tentation du resquillage (D’Aspremont et Gabszewics, 1986 ;
Barrett, 1994 ; Botteon et Carraro, 1995). Elle est remplie lorsque les membres de la coalition
gagnent plus à rester qu’à quitter l’entente (condition de stabilité interne) et lorsque les non-
membres ne désirent pas adhérer (condition de stabilité externe).
2 - « Une imputation est une répartition du bénéfice total ... que la coalition de tous les agents peut obtenir »,
Moulin (1981, p. 179)
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Coali t ions
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Coali t ions
Les conditions précédentes sont reprises formellement dans la définition des coalitions
spontanées suivante.
Définition 8.1 : Soit I une coalition quelconque,
Π i désignant le bien-être du joueur lorsqu’il est membre de la coalition et , son bien-
être dans le cas contraire, la coalition
i /Π i
I est spontanée si :
( ) ( )Π Πi iI ≥ / ∅ , ∀ ∈i I , (Profitabilité)
, { }( ) ( )/ − ≤Π Πi iI i I ∀ ∈i I , (Stabilité interne)
, ∀ ∉ . (Stabilité externe)
{ }( ) ( )Π Πi iI i I+ ≤ / i I
La définition 8.1 sert à isoler des coalitions qui ont la propriété intéressante de se
constituer ‘‘naturellement’’, par interaction entre les intérêts des pays. Mais, elle ne donne
pas d’informations sur leur fonctionnement interne.
Les membres d’une coalition adhèrent à des principes et adoptent « des stratégies jointes afin
de partager un paiement commun » (Cochinard, 1995, p. 636). Dans le jeu de l’effet de serre,
le groupe décide l’émission cible, la part de chacun dans cet effort collectif et la redistribution
des bénéfices. Eventuellement, les parties fixent une règle régissant les conditions d’adhésion
d’un nouveau membre.
D’un point de vue normatif, la dépollution globale et les contributions individuelles reposent
sur la recherche de l’optimum collectif :
• la dépollution globale maximise le bien-être des signataires de l’accord, la réaction des
autres pays étant donné;
• la répartition des efforts entre les membres égalise les coûts marginaux de dépollution.
Pour ce qui est de la distribution des gains, un découpage logique s’inspire de la dichotomie
entre les jeux avec et sans transferts latéraux. Dans le premier cas, les pays signataires
perçoivent le paiement primaire de leur adhésion, proportionnel à leurs fonctions de bénéfice
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Coali t ions
et de coût uniquement. Dans l’autre cas, la somme des paiements primaires est mise en
commun, puis redistribuée. La théorie des jeux met à notre disposition plusieurs règles de
répartition des gains : la valeur de Shapley, le nucleolus, le coeur...
La procédure d’adhésion se résume, pour nous, à deux extrêmes : l’entrée dans la coalition est
libre ou ne l’est pas. La condition de stabilité externe, qui implique que les coalitions
attractives ne sont pas solutions du jeu, s’interprète comme une règle de libre adhésion :
partant d’une coalition quelconque, vérifiant uniquement les conditions de profitabilité et de
stabilité interne, certains pays se déclarent candidats ; pour s’approcher de la solution, il faut
les laisser entrer, même si leur adhésion porte atteinte à un ou plusieurs membres originels (il
y a donc bien libre entrée puisque le nouvel arrivant se joint au groupe en dépit de sa volonté)
; pour finir, les pays lésés par cette intrusion renient l’accord et une nouvelle coalition
apparaît.
Lorsque les pays sont identiques, la règle de libre entrée s’applique de plein droit. D’une part,
l’exercice de son droit d’entrée par un candidat ne porte jamais préjudice aux signataires
originels (sinon, par symétrie, le pays se lèse lui-même). D’autre part, la stabilité externe de
l’accord signifie, dans ce cas, qu’il a atteint sa taille maximale. Par contre, on peut
s’interroger sur la pertinence de la condition de stabilité externe en conditions asymétriques.
En effet, dans ce cas, les joueurs peuvent ressentir le désir de former des coalitions regroupant
des participants aux caractéristiques proches et d’interdire l’entrée aux autres pays.
8.2 - Accords Internationaux sur l’Environnement
Barrett (1990), (1991) et (1994) fut l’un des premiers à aborder le sujet de la formation
endogène d’Accords Internationaux sur l’Environnement (International Environmental
Agreements). L’A.I.E. est spontané. Il définit un niveau de dépollution maximisant le bien-
être commun des signataires, sachant la réaction des free riders. Ceux-ci maximisent leur
bénéfice net individuel en fonction de la dépollution de la coalition.
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Coali t ions
L’analyse de Barrett (1994) repose sur les hypothèses suivantes : les pays sont identiques ;
l'information est complète et savoir commun ; les efforts de dépollution sont observables sans
coût et instantanément ; le polluant n'est pas cumulatif ; la structure de coalition retenue
oppose une coalition à des free riders (autrement dit, les pays non-membres sont censés ne
pas s’organiser en coalition concurrente) ; aucun transfert n'est offert.
L’hypothèse d’identité des pays facilite l’étude des négociations multinationales à
grande échelle (Protocole de Montréal ; Conférence de Rio). En utilisant différentes
spécifications des fonctions de bénéfice ( )B Q et de coût ( )C q de la dépollution, Barrett
(1994) parvient aux résultats suivants :
• Lorsque le bénéfice marginal et le coût marginal sont linéaires, l’A.I.E. existe toujours. Le
nombre des signataires est grand quand le rapport des pentes des courbes de coût marginal
et de bénéfice marginal est petit (voir le tableau 8.1). Or, quand ce rapport est petit, la
différence entre l’équilibre de Nash et la coopération totale est ténue. Selon Barrett, ce
résultat rend compte du fait que les pays harmonisent plus volontiers leur politique quand
cela modifie peu leur comportement ;
• Lorsque le bénéfice marginal est constant et le coût marginal linéaire, l’A.I.E. rassemble 2
pays quand le monde n'en comporte que 2, 3 sinon 3 ;
• Lorsque le bénéfice marginal est constant et le coût marginal logarithmique, l’A.I.E. réunit
2 pays dans tous les cas ;
• Lorsque le bénéfice marginal est linéaire et le coût marginal constant, aucun A.I.E.
n'existe.
Tableau 8.1 : Nombre de membres de l’A.I.E.
c 0,01 0,1 1 10 100
b
0,01 3 3 2 2 2
0,1 11 3 3 2 2
1 51 11 3 3 2
10 92 51 11 3 3
100 100 92 51 11 3
3 - Il s’agit d’un cas particulier de la pécification utilisée dans le chapitre 7 (lorsque est égale à 2). di
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Coali t ions
Notes :
Il y a 100 pays au total.
La spécification est :
( ) ( )B Q b Q Q= −. . /100 2 2 et ( )C cq q= . /2 2 .
Source : Barrett (1994)
Botteon & Carraro (1995) analysent la formation des coalitions spontanées dans le cas
asymétrique et introduisent des transferts latéraux entre les pays signataires de l’A.I.E. 4. La
distribution des gains résulte soit d’une procédure de négociation ‘‘à la Nash’’, soit d’un
partage du pouvoir inspiré de la valeur de Shapley. Leur modèle traite des négociations
internationales sur le climat. Leur spécification pose un dommage marginal constant et un
coût marginal linéaire. Botteon & Carraro considèrent 5 pays ou régions : le Japon, les Etats-
Unis et le Canada, la Communauté européenne, l’Europe de l’est et la Russie, la Chine et
l’Inde. Ils calibrent leur modèle sur des données tirées de Musgrave (1994) Ils montrent que :
les coalitions stables ne réunissent jamais plus de 3 membres, quelle que soit la méthode de
partage des gains ; le pays le plus vulnérable au réchauffement climatique participe à toutes
les coalitions.
8.3 - Profil des signataires
8.3.1 - Aucuns transferts latéraux
Avec l’hypothèse d’identité des pays énoncée par Barrett (1994), la question du profil
des signataires de l’A.I.E. n’a pas de sens. De ce fait, l’intérêt pratique de son étude se limite
à la détermination de la taille d’un accord stable entre des individus moyens représentatifs
d’une réalité économique donnée.
Plusieurs raisons portent à croire qu’il serait plus utile de connaître le profil type des pays
susceptibles de former de tels accords. D’une part, la taille de la coalition stable est très
sensible à la spécification (voir ci-dessus), si bien qu’il est difficile de tirer des implications
4 - Lorsque tous les pays sont identiques, les transferts sont nuls. Il est donc nécessaire de lever l’hypothèse de
symétrie pour analyser la question de la redistribution des gains.
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Coali t ions
générales du travail de Barrett. D’autre part, dans un monde asymétrique, l’efficacité d’une
coalition dépendra, certes, de sa dimension mais plus encore de l’identité des pays qui la
composent.
Ainsi, Blackhurst & Subramanian (1992) sont enclins à croire que l’asymétrie améliore les
chances de résolution du problème des ressources communes. Olson (1971) va dans le même
sens en constatant que, dans des conditions très asymétriques, les pays les plus importants
peuvent conclure un accord qui résout l’essentiel du problème.
8.3.1.1 - Argumentation
La Convention-cadre sur les changements climatiques a vocation à devenir universelle.
De ce fait, l’adhésion au traité et le passage d’un statut à l’autre, au sein de ce dernier, doivent
être libres. Notamment, un pays non tenu de réduire ses émissions doit pouvoir rejoindre le
groupe des annexes I et II à tout moment ; cette possibilité est prévue par la Convention
(Article 4, paragraphe 2, alinéa g). Ceci justifie que nous étudiions un A.I.E. dont l’adhésion
est libre.
La condition de libre entrée a une influence déterminante dans la sélection des participants
d’une coalition. Au titre de l’effort de dépollution supplémentaire qui accompagne son entrée
dans l’entente, tout arrivant se trouve légitimement investi d’un certain pouvoir, qu’il exerce
pour influencer les décisions de ses partenaires. Principalement, il revendique un
renforcement de leurs politiques d’environnement et justifie ce geste en arguant la perte qu’il
subit en acceptant de coopérer et le profit qu’ils en tirent.
L’adhésion d’un nouveau pays à un A.I.E. se traduit donc par une réciprocité : l’entrant
internalise les dommages des membres originels ; en contrepartie, chacun d’entre eux
internalise le dommage de leur nouveau partenaire. Cet échange, s’il est équitable, renforce
l’A.I.E. et lui permet de croître. Par contre, lorsque les pays sont trop différents, la réciprocité
devient inéquitable, au point de susciter le départ des membres originels ou d’empêcher
l’entrée du pays candidat.
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Coali t ions
Les deux exemples suivants, bien que caricaturaux, montrent de quelle manière cette
réciprocité inégale annihile les désirs de participation à l’A.I.E.de certains types de pays.
Exemple 8.1 :
Supposons que :
• les membres de l’A.I.E. soient en mesure de dépolluer à un coût marginal constant ou
faiblement croissant ;
• les pays non-membres aient, au contraire, un coût marginal infiniment pentu ou très pentu.
Dans ces circonstances, les pays extérieurs souhaitent intégrer l’entente, puisqu’ils
bénéficient d’une forte baisse de la pollution de la part de l’A.I.E., sans rien faire de plus (ou
presque). Evidemment, puisqu’il n’y a aucune réciprocité, ceci n’est pas du goût des membres
originels, qui choisissent soit de partir, soit d’empêcher les pays en question d’adhérer, ce qui
est exclu par hypothèse. En conclusion, et en élargissant à des oppositions moins extrêmes,
cet exemple suggère que les pays les plus aptes à dépolluer éviteront d’adhérer à l’A.I.E., de
peur qu’on leur réclame un effort démesuré, car assortie d’une compensation insuffisante.
Exemple 8.2 :
Supposons que :
• les membres de l’A.I.E. soient peu sensibles à la pollution ;
• les pays non-membres soient, au contraire, très vulnérables.
Là encore, les pays extérieurs choisissent d’adhérer car ils obligent les autres à internaliser un
dommage très important, donc à accroître fortement leur dépollution, en modifiant leur propre
politique dans des proportions bien moindres. Les autres pays sont, à nouveau, les perdants.
En conséquence, les pays les moins soucieux de préserver l’environnement, c’est-à-dire ceux
qui sont le plus épargnés par la pollution, ne participeront pas à un A.I.E. Ce résultat semble
beaucoup moins étonnant que le précédent.
8.3.1.2 - Vérification
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Coali t ions
Les arguments présentés ci-dessus sont surtout intuitifs et une démonstration plus
rigoureuse serait souhaitable. Nous ne sommes malheureusement pas parvenus à la construire.
Pour pallier cette lacune, les allégations précédentes ont été testées au moyen d’un algorithme
de résolution simple 5. Nous le décrivons dans le schéma 8.1.
Schéma 8.1 : Algorithme de résolution
Boucle conditionnelle : Cpt1<Khi
Tirage aléatoire : {i} ( Entrée de i ? )
Boucle conditionnelle : Cpt2<Khi
( Sortie de i ? )
Coalition = Coalition + {i]
Coalition = Coalition - {i}
←
↑
↑
→
←
↓
↓
→
↑
↓
↓
←
←
←
↑
Cpt1=Cpt1+1
Cpt2=Cpt2+1
Cpt1=0
Cpt2=0↔
↔
↔
↔
↓
Cpt2=0 ↔
non
Fin ←
non
↓
DébutInput
Output
→
↓
{ }( ) ( )Π Πi iI i I+ ≥ /
{ }( ) ( )/ − >Π Πi iI i ITirage aléatoire : {i}
oui
oui
oui
oui
non
non
L'input de cet algorithme est une coalition quelconque, les fonctions de bénéfice et de
coût des pays et un paramètre noté Khi. L'output de cet algorithme est une coalition
spontanée.
L'algorithme utilise deux boucles conditionnelles. La première gère l'entrée des pays dans la
coalition, l'autre leur départ. Les pays proposés à l'entrée ou à la sortie font l'objet d'un tirage
aléatoire, une file d’attente dont l’ordre serait exogène et immuable risquant d'influencer le
résultat final.
Le déroulement concret de l'algorithme est le suivant. Initialement quelconque, la coalition se
remplit au fur et à mesure que des pays sont simultanément proposés à l’entrée par le tirage
5 - Le programme Basic conçu pour ‘‘faire tourner’’ cet algorithme est fourni et expliqué dans l’appendice 4.
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Coali t ions
aléatoire et candidats à l'adhésion si la condition { }( ) ( )Π Πi I i I+ ≥ / i est satisfaite. Ceci est le
résultat de la première boucle conditionnelle.
A chaque nouvelle adhésion, l'équilibre interne des intérêts des signataires est potentiellement
bouleversé. La boucle conditionnelle des sorties prend alors le relais. Elle recherche les
candidats au départ selon une méthode identique. Cette boucle est stoppée lorsque les pays
tirés au hasard ne sont pas candidats au départ pendant Khi tirages successifs. Alors, les
sorties sont stabilisées et on retourne dans la boucle des entrées.
A nouveau, si les pays proposés de manière aléatoire sont candidats à l'adhésion, l'opération
précédente est répétée. Dans le cas contraire, l’algorithme est stoppé lorsque les pays tirés
refusent d'entrer pendant Khi tirages successifs. A condition que Khi soit suffisamment grand,
on obtient une coalition stable puisque plus aucun pays ne souhaite entrer ni sortir.
Nous avons employé cet algorithme pour plusieurs spécifications utilisées dans la
littérature (bénéfice et coût marginaux linéaires ; bénéfice marginal constant et coût marginal
linéaire ; bénéfice marginal constant et coût marginal logarithmique). D’une manière
générale, nous supposions que le monde comportait 5 régions différentes, composées de N
pays identiques chacune, et que les paramètres régionaux se distribuaient conformément au
tableau 8.2 : une région moyenne, c’est-à-dire la région n°3, autour de laquelle gravitent les
quatre autres régions.
Tableau 8.2 : Paramètres des fonctions de bénéfice et de coût
ci
(1-t).c c (1+t).c
(1-t).b région n°1 région n°2
b région n°3
(1+t).b région n°4 région n°5
bi
i[ ]t ∈ 01,
Notes : les spécifications testées sont (Barrett, 1994) :
( ) ( )B Qi iQ b aQ= −. /2 2 et ( )C q qi i i ic= . /2 2 ;
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Coali t ions
( )Bi iQ b Q= . et ( )C q qi i i ic= . /2 2 ;
( )Bi iQ b Q= . et ( ) ( ) ( )[ ]C qi i ic qi qi qi= − − +. .ln1 1 .
Nous n’allons évidemment pas reproduire ici le détail des résultats obtenus. D’une part, cela
n’enrichirait en rien la discussion. D’autre part, les possibilités, i.e. le choix des paramètres et
le nombre de pays par région, sont infinies et il est impossible d’étudier tous les cas de figure.
Néanmoins, nous avons réalisé un très grand nombre de tests. Il semble acquis que,
quelle que soit la spécification, la coalition stable regroupe systématiquement des pays de la
région n°5. Or, cette région est celle où la pente du coût marginal est la plus forte et où le
bénéfice marginal est le plus grand. Ceci corrobore donc l’argumentation générale de la sous-
section 8.3.1.1.
En outre, nos simulations généralisent certains résultats de Barrett : lorsque le bénéfice
marginal est constant et le coût marginal est linéaire, l’A.I.E. rassemble 2 pays quand le
monde n'en comporte que 2, 3 sinon ; lorsque le bénéfice marginal est constant et le coût
marginal logarithmique, l’A.I.E. possède 2 membres dans tous les cas. Par contre, le tableau
8.1 est modifié par l’asymétrie.
8.3.1.3- Réglementation des adhésions
La libre entrée n’est pas toujours de rigueur dans les organisations internationales. De
fait, si une coalition préexiste à l’intention d’adhésion d’un pays donné, il semble impensable
de soutenir que les signataires originels toléreront son entrée effective si elle va à l'encontre
de leur intérêt 6.
6 - Ce paradoxe n’est qu’apparent : si la règle d’adhésion libre est clairement fixée dès le début, la coalition
considérée n’existera jamais puisque les pays mènent un raisonnement prospectif : « Mon adhésion,
apparemment rentable, ne l'est plus si je tiens compte des candidatures qu'elle suscite. Donc, je m'abstiens. ».
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Coali t ions
L’inconvénient de l’abandon de la condition de stabilité externe est la multiplication du
nombre de solutions, sans qu’il soit possible d’en privilégier une parmi elles. Sans transferts
latéraux, nous savons seulement que la cohésion du groupe nécessite une relative
homogénéité des participants, sans quoi certains risquent de perdre. Il s’ensuit qu’il existe au
moins autant de coalitions auto-réalisables que de communautés d’intérêts.
Toutefois, bien que toutes puissent se concrétiser, il semblerait naturel que ce soit la plus
efficace d’entre elles qui émerge finalement. En effet, en information complète, les autres
pays prévoient sa formation et anticipent les gains qu’ils en retireront en tant que free riders.
Dans cette perspective, ces pays préfèrent s’abstenir de participer à une coalition et attendent
que la première se constitue.
Or, à nombre de signataires identiques, la coalition homogène la plus efficace réunit
nécessairement les pays les plus vulnérables à la pollution, i.e. ceux dont le bénéfice marginal
de la dépollution est le plus élevé, et les pays qui sont en mesure de renforcer fortement leur
politique environnementale sans accroître trop fortement leur coût marginal de dépollution,
i.e. ceux dont la courbe de coût marginal est peu pentue. Avec la configuration décrite dans le
tableau 8.2, l’A.I.E. en question émanerait de la région n°4.
8.3.1.4 - Parallèle avec les négociations sur le climat
La Convention-cadre sur les changements climatiques a été signée par 165 Etats. Mais,
le large consensus international obtenu reflète un accord de principe uniquement. Concernant
les engagements, le traité, dans sa forme actuelle, oppose une coalition formée par les pays
des annexes I et II, qui annoncent explicitement leur intention de réduire leurs rejets de gaz à
effet de serre, aux pays en développement, qui attendent des premiers une action vigoureuse
et une aide financière suffisante pour couvrir les coûts qu’ils encourraient en réduisant leurs
propres émissions. Sans tirer de conclusions hâtives, il est intéressant de confronter cette
configuration aux résultats précédents.
En l’absence de transferts et en régime de libre adhésion, les pays de l’annexe I et II ont un
profil qui fait d’eux, selon nos conclusions, les candidats naturels à former une coalition : à
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court terme, le bénéfice par tonne de carbone évitée est plus grand pour ces pays (Nordhaus &
Yang, 1996) ; certains d’entre eux ont déjà exploité l’essentiel de leurs gisements d’économie
d’énergie (du fait des politiques visant à réduire leur dépendance énergétique, menées après
les chocs pétroliers), si bien que toute limitation supplémentaire de leurs émissions accroît
sensiblement leur coût marginal de dépollution (voir le chapitre 2).
Parmi les autres signataires de l’accord, non listés dans les annexes I et II, quelques-uns
pourraient réduire beaucoup plus facilement leurs émissions. Cependant, un geste dans ce
sens, même s’il est dans leur intérêt d’atténuer les bouleversements climatiques prévus,
risquerait de les placer dans une situation délicate. Inévitablement, les autres pays exigeraient
de leur part une action vigoureuse, en mettant en avant précisément l’inégalité des coûts de
dépollution. Ainsi, quelle parade certains pays pourraient-ils trouver à l’argument confrontant
les lourdes taxes sur l’énergie, imposées par certains pays développés, aux subventions
énergétiques importantes qu’ils appliquent ?
8.3.2 - Partage des gains
La sous-section précédente était consacrée à l’identification des signataires d’un A.I.E.
en l’absence de transferts latéraux. La coalition obtenue peut être vue comme une première
étape non contraignante vers la coopération. Cependant, à terme, l’efficacité de l’action
internationale ne s’améliorera que si des transferts latéraux sont offerts. Un système de
redistribution permet, en effet, d’attirer les pays capables de réduire leurs émissions à
moindre coût.
Dans cette section, nous étudions les coalitions auto-réalisables avec transferts en reprenant
Botteon & Carraro (1995). L’amélioration que nous apportons à leur travail se limite au choix
d’un calibrage plus représentatif de la position moyenne de la littérature. Tant du point de vue
des bénéfices par tonne de carbone évitée que de celui du classement des régions en fonction
de ces données, leur calibrage, tiré de Musgrave (1994), diffère de la plupart des évaluations
disponibles et s’appuie sur un raisonnement contestable : le dommage climatique provient
d’un accroissement uniforme du taux de mortalité de 0,2 individu par million d’habitants ; le
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Coali t ions
dommage monétaire est le produit du nombre de décès supplémentaires de l’année, par tonne
émise, et de la valeur d’une vie statistique.
Ce calcul est critiquable à bien des égards. Premièrement, il néglige la persistance des
dommages. Deuxièmement, les changements climatiques auront de nombreux autres effets
qui ne sont pas comptabilisés. Troisièmement, malgré cela, Botteon & Carraro déterminent un
bénéfice mondial de 208,29 dollars par tonne de carbone, valeur très élevée, qui correspond
au sommet des intervalles habituellement proposés. Enfin, en vertu de ce raisonnement, la
population des pays devient le principal déterminant du dommage subi. Les valeurs utilisées
par Botteon & Carraro sont reprises dans le tableau 8.3.
Tableau 8.3 : Bénéfice de la réduction des émissions dans Botteon & Carraro (1995)
Pays b ($/tC)
Etats-Unis et Canada 8,51
Europe 18,83
Japon 26,01
Europe de l'est et Russie 25,10
Chine et Inde 129,84
Somme 208,29
Botteon & Carraro supposent que les signataires de l’accord de coopération
redistribuent les gains de l’entente conformément au vecteur de Shapley (1974). Nous
garderons cette hypothèse, ce qui justifie que nous apportions quelques explications sur cette
règle de partage. La valeur de Shapley du joueur , au sein de la coalition i I , dépend de sa
contribution au bien-être de toutes les coalitions intermédiaires S qu’il peut former avec les
joueurs de I :
( ) ( )
( ) { }([ ]x S I SI v S v S ii S I=
− −
− −
⊂
∑
1 ! !
!
.
. ) , (8.1)
où est le bien-être collectif de la coalition ( )v S S .
Le partage des gains conformément au vecteur de Shapley ‘‘rémunère’’ les signataires à la
hauteur de leur capacité à augmenter le bien-être des autres. Cette règle de répartition trouve
sa légitimité dans la reconnaissance réciproque du pouvoir de chacun, i.e. de sa capacité à
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Coali t ions
exercer un chantage. Par exemple, si un joueur n’apporte rien à la collectivité, il ne recevra
rien, car il n’est pas en mesure d’inquiéter ses partenaires. A contrario, si le départ d’un
joueur pénalise fortement les autres signataires, la menace de mettre ce plan à exécution incite
les autres à lui verser une prime.
Pour étudier ces questions, nous reprenons le modèle calibré du chapitre 7 réduit aux
plus gros pollueurs : les Etats-Unis, l’Union européenne, le Japon, l’ex-U.R.S.S. et la Chine.
Le calibrage des fonctions de coût est celui que nous déduisions de GREEN. La région ‘‘reste
du monde’’ est éliminée car le nombre de coalitions possibles serait trop grand dans le cas
contraire, rendant quasi impossible le calcul du vecteur de Shapley.
Les vecteurs de gains et de dépollutions pour toutes les coalitions possibles sont présentés
dans l’annexe 8.1 (voir l’appendice 4 pour le calcul de ces derniers), sous la forme de deux
tableaux. Pour savoir si une coalition est tributaire du resquillage, i.e. si elle vérifie la
condition de stabilité interne ou non, il suffit de comparer le gain des signataires au sein de la
coalition avec celui qu’ils obtiendraient en la quittant. Cet exercice fastidieux permet de
remplir la première ligne du tableau 8.4, où sont recensées toutes les coalitions dont les
signataires ne sont pas tentés de resquiller. Les coalitions retenues dans la seconde ligne du
tableau vérifient, en plus, la condition de stabilité externe. Pour les isoler, on compare le
bénéfice des pays étrangers à la coalition à celui qu’ils obtiennent s’ils la rejoignent.
Tableau 8.4 : Coalitions spontanées
Conditions Coalitions
Profitabilité et
stabilité interne
Toutes les coalitions de 2 pays
{1,4,5} {2,4,5} {3,4,5}
Profitabilité,
stabilités interne et
externe
{1,4,5} {2,4,5} {3,4,5}
Notes : les conventions utilisées sont les suivantes :
1 = Etats-Unis 2 = Japon 3 = Union européenne
4 = Ex-URSS 5 = Chine
La première chose à noter est que les coalitions de quatre pays et plus sont toutes
tributaires du resquillage. Leurs signataires obtiennent des paiements supérieurs à leur
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Coali t ions
équilibre de Nash mais ils gagnent plus s’ils quittent l’entente. Ce premier résultat confirme à
nouveau une conclusion courante de la littérature, selon laquelle les coalitions de plus de trois
joueurs ne sont jamais stables (la spécification utilisée par Barrett (1994) est une exception :
voir le tableau 8.1).
L’autre résultat général de cette simulation est que l’offre de transferts rend possible des
ententes mutuellement bénéfiques et stables entre des pays très différents, alors qu’elles
n’étaient pas envisageables en l’absence de redistribution des gains : dans ce cas, les pays de
l’annexe I et II tirent le plus grand avantage de la coopération, mais ce sont l’ex-U.R.S.S. et la
Chine qui supportent la plus grande partie de l’effort de dépollution ; une coopération entre
ces régions impliquait donc une répartition inéquitable des gains.
Au contraire, lorsque les pays sont rémunérés à la hauteur de leur contribution au bien-être
collectif, l’ex-U.R.S.S. et la Chine participent systématiquement aux coalitions qui vérifient
les trois conditions de profitabilité, de stabilités interne et externe. A chaque fois, ils sont
associés à un pays qui attache une plus grande valeur à la réduction des émissions de dioxyde
de carbone, à savoir les Etats-Unis, l’Union européenne ou le Japon. Sur ce point, cette
simulation approuve Botteon & Carraro (1995, p. 10) lorsqu’ils affirment que « la conclusion,
selon laquelle le pays montrant le plus grand dommage marginal est le pivot autour duquel les
coalitions environnementales peuvent être formées, est assez robuste » 7.
Pour terminer cette description des résultats, nous isolons la coalition stable qui
regroupe l’Union européenne, l’ex-U.R.S.S. et la Chine. Ce choix est arbitraire mais les
commentaires afférents s’appliquent aussi bien aux autres coalitions, qui sont qualitativement
identiques.
Tableau 8.5 : Redistribution entre les signataires de la coalition {245}
7 - « The conclusion that the country with the highest marginal damage is the pivot around which environmental
coalitions can be formed is quite robust ».
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Coali t ions
Pays
Paiement
primaire (a)
Valeur de
Shapley (a)
Transfert
versé (a)
Baisse des
émissions (en
GtC) (b)
Europe 0,080 0,051 0,029 0,001
Ex-URSS -0,002 0,010 -0,012 0,021
Chine -0,007 0,010 -0,017 0,027
Somme 0,071 0,071 0 0,049
Notes :
(a) : Milliards de dollars ;
(b) : par rapport aux émissions de Nash.
Le tableau 8.5 met en évidence la répartition très inégalitaire de l’effort de dépollution entre
les signataires d’un accord qui réunirait l’Union européenne, l’ex-U.R.S.S. et la Chine. En
l’absence de redistribution des gains, seule l’Europe tirerait avantage de cette coopération, au
dépend des deux autres régions qui seraient perdantes. Le partage des gains rééquilibre les
positions. L’Europe reste le principal bénéficiaire de l’entente mais offre des
dédommagements à l’ex-U.R.S.S. et à la Chine. L’accord ainsi obtenu est stable : tous les
signataires jouissent d’une amélioration de leur situation par rapport à l’équilibre de Nash ; ils
ne désirent pas quitter cette entente car les gains qu’ils obtiendraient en le faisant seraient
inférieurs.
A nouveau, il est délicat de tirer des conséquences pratiques de ces simulations car elles
dépendent trop directement d’un calibrage qui, même s’il reflète d’assez près le sentiment
général, reste assez incertain. Un constat se dégage toutefois. L’association des pays soucieux
de la préservation de l’environnement et des pays capables de réduire facilement leurs rejets
est mutuellement bénéfique et donne lieu à des accords stables. Les rôles de chacun au sein
d’une telle entente sont clairement définis. Les pays pour qui la réduction des émissions est
très bénéfique offrent une aide sans laquelle l’accord ne verrait pas le jour. Ce transfert
rémunère le service de dépollution des autres pays. Ces derniers gagnent à devenir des
‘‘exportateurs de services environnementaux’’.
8.4 - Conclusion
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Coali t ions
Dans ce chapitre, nous dépassons l’étude positive des négociations pour tenter de
comprendre, en utilisant la théorie des coalitions, la configuration bipartite de la Convention-
cadre sur les changements climatiques. Plus exactement, nous retenons des coalitions dites
‘‘spontanées’’, c’est-à-dire qui se constituent automatiquement, du fait des intérêts des pays,
et qui durent.
Nous étudions d’abord des accords internationaux sur l’environnement ouverts à tous et sans
système de redistribution des gains. Grâce à un algorithme de résolution informatique venant
à l’appui du raisonnement, nous généralisons la littérature sur les coalitions spontanées, qui
étudie habituellement soit une multitude de pays identiques, soit deux à trois pays différents,
en décrivant le cas d’un grand nombre de pays différents. Nous montrons que la coalition
regroupe les pays les plus soucieux de préserver l’environnement, mais les moins à même de
le faire. Réciproquement, nos résultats suggèrent que l’absence de transferts décourage
l’adhésion des pays capables de réduire leurs émissions à peu cher, de crainte d’assumer
l’essentiel de l’effort collectif de l’entente. Sans présumer de la pertinence de ce parallèle, il
est tentant de confronter ces résultats à la réalité des négociations sur le climat : d’un côté, les
pays développés listés dans les annexes I et II, a priori désireux d’atténuer l’effet de serre
mais dont les gisements de réduction d’émissions sont saturées, et, de l’autre, les pays en
développement, qui adoptent provisoirement un comportement attentiste alors qu’ils
pourraient réduire leurs émissions à un coût moindre.
Ce premier résultat repose sur l’hypothèse d’absence de transferts entre les pays membres de
la coalition. Pour finir, nous levons cette hypothèse en rappelant que la Convention incite les
pays de l’O.C.D.E. à aider les pays en développement par des transferts financiers ou
technologiques. Nous étudions des accords internationaux sur l’environnement dans
lesquelles les gains seraient répartis entre les membres conformément à ce que chacun
apporte à l’entente, c’est-à-dire en fonction de leur valeur de Shapley. Avec ce jeu
d’hypothèses et en utilisant le calibrage du chapitre 7, toutes les coalitions spontanées
regroupent trois participants au plus. Plus intéressante est l’identité de ces derniers : à chaque
fois, un pays soucieux d’environnement, mais limité dans sa capacité d’action par des coûts
rapidement prohibitifs, et deux pays capables de réduire fortement leurs émissions
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Coali t ions
(caractérisés par un coût marginal peu pentu) ; les deux derniers assument la plus grande part
de la dépollution collective mais reçoivent, en contrepartie, un dédommagement de la part du
premier.
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Annexes / Chapitre 8
Annexe 8.1 - Vecteurs de Shapley
Tableau 1 : Gains des signataires par rapport à la solution de marché
(en milliards de dollars)
Coalition Etats-Unis Europe Japon Ex-URSS Chine Total
{12345} 0,051 0,069 0,028 0,023 0,025 0,196
{2345} 0,067 0,057 0,023 0,014 0,015 0,176
{1345} 0,038 0,092 0,023 0,012 0,012 0,176
{1245} 0,045 0,063 0,044 0,018 0,020 0,190
{1235} 0,042 0,058 0,024 0,011 0,023 0,158
{1234} 0,040 0,055 0,023 0,020 0,007 0,146
{345} 0,043 0,062 0,018 0,006 0,005 0,135
{245} 0,058 0,052 0,032 0,011 0,011 0,163
{235} 0,049 0,049 0,020 0,008 0,013 0,139
{234} 0,045 0,047 0,019 0,012 0,005 0,128
{145} 0,034 0,076 0,030 0,009 0,008 0,157
{135} 0,033 0,070 0,020 0,008 0,010 0,141
{134} 0,031 0,065 0,019 0,010 0,005 0,130
{125} 0,038 0,054 0,033 0,010 0,018 0,152
{124} 0,036 0,051 0,031 0,016 0,006 0,141
{123} 0,032 0,045 0,019 0,007 0,005 0,108
{45} 0,031 0,046 0,018 0,005 0,003 0,103
{35} 0,035 0,051 0,017 0,006 0,004 0,112
{34} 0,032 0,048 0,017 0,005 0,004 0,105
{25} 0,043 0,046 0,024 0,007 0,010 0,129
{24} 0,039 0,044 0,022 0,009 0,005 0,119
{23} 0,029 0,040 0,016 0,005 0,003 0,093
{15} 0,030 0,058 0,023 0,007 0,007 0,125
{14} 0,029 0,054 0,021 0,007 0,004 0,116
{13} 0,027 0,045 0,016 0,005 0,004 0,097
{12} 0,030 0,043 0,021 0,006 0,004 0,103
{} 0,026 0,040 0,016 0,005 0,003 0,089
Notes : les conventions utilisées sont les suivantes :
1 = Etats-Unis 2 = Japon 3 = Union européenne 4 = Ex-URSS 5 = Chine
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Annexes / Chapitre 8
Tableau 2 : Dépollutions des pays par rapport à la solution de marché
(en milliards de tonnes de carbone)
Coalition Etats-Unis Europe Japon Ex-URSS Chine Total
{12345} 0,043 0,013 0,005 0,040 0,050 0,151
{2345} 0,026 0,010 0,004 0,031 0,040 0,111
{1345} 0,033 0,008 0,003 0,028 0,036 0,109
{1245} 0,039 0,012 0,002 0,036 0,045 0,134
{1235} 0,042 0,012 0,005 0,005 0,049 0,113
{1234} 0,042 0,013 0,005 0,039 0,007 0,106
{345} 0,026 0,008 0,002 0,016 0,023 0,074
{245} 0,026 0,009 0,002 0,026 0,034 0,097
{235} 0,026 0,010 0,004 0,005 0,039 0,083
{234} 0,026 0,010 0,004 0,030 0,007 0,077
{145} 0,029 0,008 0,002 0,022 0,030 0,090
{135} 0,032 0,008 0,003 0,005 0,035 0,083
{134} 0,032 0,008 0,003 0,027 0,007 0,078
{125} 0,038 0,011 0,002 0,005 0,044 0,100
{124} 0,039 0,011 0,002 0,035 0,007 0,094
{123} 0,041 0,012 0,005 0,005 0,007 0,070
{45} 0,026 0,008 0,002 0,008 0,012 0,055
{35} 0,026 0,008 0,002 0,005 0,020 0,061
{34} 0,026 0,008 0,002 0,014 0,007 0,057
{25} 0,026 0,008 0,002 0,005 0,033 0,074
{24} 0,026 0,009 0,002 0,025 0,007 0,068
{23} 0,026 0,010 0,003 0,005 0,007 0,052
{15} 0,027 0,008 0,002 0,005 0,028 0,070
{14} 0,028 0,008 0,002 0,021 0,007 0,065
{13} 0,031 0,008 0,003 0,005 0,007 0,055
{12} 0,038 0,011 0,002 0,005 0,007 0,063
{} 0,026 0,008 0,002 0,005 0,007 0,048
Notes : les conventions utilisées sont les suivantes :
1 = Etats-Unis 2 = Japon 3 = Union européenne 4 = Ex-URSS 5 = Chine
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Conclusion générale
Conclusion Générale
La croissance économique, en raison principalement de la combustion des énergies
fossiles qui l’accompagne, renforce l’effet de serre. Les climatologues mettent en garde
l’Humanité contre les effets néfastes de cette tendance qui, selon leurs simulations,
provoquera un réchauffement planétaire notable au cours du prochain siècle. Les
bouleversements climatiques prévus auront des conséquences néfastes sur le fonctionnement
des économies au travers de l’agriculture, de la santé, de l’élévation des océans... D’un point
de vue économique, l’effet de serre additionnel définit une externalité négative.
La politique du climat met en balance le développement économique et le climat de la
planète ; plus précisément, elle atténue le plus possible les dommages climatiques futurs tout
en préservant au mieux le bien-être économique présent. Le fondement de cette stratégie
participe du même raisonnement que celui de l’analyse Coût-Avantage traditionnel.
Cependant, l’analogie avec ce critère de décision, parfaitement fondée pour définir le
programme économique de la politique du climat, ne fonctionne plus en ce qui concerne la
méthode. Compte tenu de la persistance des dommages dans le temps, la détermination de la
politique optimale du climat nécessite la construction d’un modèle de pollution cumulative
approprié. On montre alors que la réaction optimale consiste à égaliser le coût marginal de
dépollution (de réduction des émissions) au dommage marginal intertemporel de l’effet de
serre additionnel. Compte tenu des propriétés des fonctions utilisées ici, la dynamique de
transition consiste à rejoindre asymptotiquement un équilibre stationnaire défini par une
stabilisation du climat. La pollution augmente continûment le long de ce sentier.
Le coût d’une politique climatique est fonction de la dépendance des économies vis-à-
vis des énergies fossiles et de leur faculté à les éliminer au profit d’autres énergies ou d’autres
techniques de production. A moyen et à long terme, l’élasticité de substitution entre l’énergie
finale et les autres facteurs, d’une part, et l’élasticité de substitution entre les énergies riches
en carbone et les autres, d’autre part, influencent de manière déterminante le coût de la lutte
contre l’effet de serre. Les possibilités de substitution ne sont pas figées mais, au contraire,
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Conclusion générale
évoluent au cours du temps grâce, notamment, à l’émergence de technologies énergétiques de
remplacement sans carbone, qui inventent de nouveaux moyens d’action.
Les modèles d’équilibre général appliqué suggèrent que le prix à payer pour lutter contre
l’effet de serre serait plus lourd pour les pays développés car : l’énergie est généralement plus
chère dans ces pays qu’ailleurs ; l’émission de carbone par unité de P.I.B. est moindre dans
ces économies que dans les autres. La France et le Japon constituent un exemple
particulièrement parlant. Depuis les chocs pétroliers, ces deux pays ont fait le choix du
nucléaire et de l’hydraulique pour subvenir à leurs besoins d’électricité, dans l’idée de réduire
leur dépendance vis-à-vis des énergies fossiles. Le résultat de cette stratégie se traduit
aujourd’hui par une émission de carbone par unité de P.I.B. parmi les plus faibles du monde.
En contrepartie, les gisements d’économie de carbone dans ces deux pays sont presque
saturés (excepté dans le domaine des transports) et toute mesure de limitation des émissions
sera synonyme de pertes conséquentes. Cependant, cette situation est provisoire. Compte tenu
du prix élevé des énergies fossiles, les technologies de remplacement sans carbone seront plus
rapidement rentables dans ces deux pays. Dans l’hypothèse d’une politique internationale
vigoureuse contre l’effet de serre, les pays où l’énergie est chère pourraient donc très vite
remplir leurs obligations de dépollution à un coût marginal constant.
Il n’existe pas de profils caractéristiques aussi systématiques pour classer les pays en
fonction de leur sensibilité aux bouleversements climatiques. Malgré cela, deux éléments
seront déterminants : le poids du secteur primaire dans l’économie et la faculté du pays à
s’adapter aux conséquences de l’effet de serre (les technologies, les savoir-faire...). A part
cela, la sensibilité des pays au réchauffement climatique dépend de facteurs très divers : la
situation géographique, la longueur et la densité de population des zones côtières, le climat
d’origine... Les évaluations disponibles suggèrent que les pays en développement cumulent
beaucoup d’inconvénients et concluent à leur plus grande vulnérabilité, en pourcentage du
P.I.B.
En calibrant un modèle de pollution cumulative à l’aide des évaluations des coûts et des
dommages, certains auteurs évaluent la politique optimale du climat. En résumé, elle
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Conclusion générale
nécessiterait une taxe pigovienne sur les émissions de carbone allant progressivement de 5 /
10 à 20 / 30 dollars par tonne entre 2000 et 2100. Les émissions de carbone seraient ainsi
réduites de 10 à 15 pour-cent sur la période.
En fait, dans leur grande majorité, les économistes pensent, à l’appui des résultats
susmentionnés, qu’il n’y a aucune urgence et que, de toute façon, la réaction optimale de
l’Humanité aux changements climatiques passe par une politique modeste.
En forçant le trait, on peut prétendre qu’un tel consensus mettrait la planète en danger s’il
était adopté sans discernement. D’une part, l’évaluation des dommages à la base du jugement
des économistes repose sur une base scientifique peu assurée. Outre cela, pour les besoins de
l’analyse, les estimations extrapolent les résultats des modèles climatologiques dans toutes les
dimensions, pour retenir, finalement, un dommage continu et proportionnel à l’élévation de la
température moyenne à la surface de la Terre. Ainsi :
• l’incertitude sur la relation entre l’accumulation des gaz à effet de serre et les changements
climatiques est éliminée en utilisant l’estimation médiane des modèles climatologiques ;
• les risques de catastrophes climatiques irréversibles, sources potentielles de discontinuité
dans la fonction de dommage, sont négligés .
Toutes ces hypothèses ad hoc nous renvoient, tout compte fait, une image ‘‘lissée’’ de
l’incidence des bouleversements climatiques sans réel fondement scientifique.
* *
*
La perspective d’une catastrophe climatique irréversible, si tant est que ce risque soit
réel, oblige à repenser en profondeur la gestion temporelle de l’effet de serre. Dans ce
schéma, le choix est essentiellement binaire : par l’intermédiaire de son émission de gaz à
effet de serre, l’Humanité décide, ou non, de provoquer une catastrophe climatique en
dépassant, ou non, un seuil critique de pollution atmosphérique (ou de température). Le
critère de décision rationnel pour arbitrer cette alternative consiste à comparer les gains de la
‘‘stratégie de préservation’’ et de la ‘‘stratégie de passage’’.
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Conclusion générale
Le choix dépend de la proximité et de la gravité de la catastrophe. Si l’échéance de la
catastrophe est imminente, dans le sens où le seuil critique de pollution est proche de la
pollution d’origine, la préservation exige une norme d’émission maximale très contraignante
et très coûteuse. Dans ce cas, la stratégie d’évitement est dominée par sa concurrente, d’autant
plus si le dommage irréversible est modéré. La politique de passage consiste alors à trouver le
moment optimal pour subir la catastrophe, sachant que, en vertu de l’actualisation, son
incidence est moindre lorsqu’elle est éloignée dans le temps. Au contraire, dans l’hypothèse
d’un seuil critique éloigné et voisin de la pollution stationnaire du modèle équivalent sans
catastrophe, la préservation surpasse l’autre option, surtout dans le cas d’une irréversibilité
majeure.
Replacés dans le contexte de la littérature économique, ces résultats appellent deux
commentaires. D’abord, notons que les instruments économiques de la lutte contre l’effet de
serre diffèrent éventuellement selon que l’on prévoit, ou non, une catastrophe climatique. La
proposition de fond du modèle de pollution cumulative traditionnel suggère de règler
l’externalité dynamique en internalisant les coûts sociaux futurs au moyen d’une taxe
pigovienne, égale à la somme actualisée des flux de dommages marginaux. En pratique,
l’évaluation des dommages forme donc le maillon essentiel de cette politique. Devant une
catastrophe climatique que l’on veut éviter, l’étape de l’évaluation prend une importance
moindre, en dehors de sa faculté à nous renseigner sur la gravité de l’événement. Désormais,
l’instrument économique principal devient une norme d’émission maximale décentralisée au
moyen d’une taxe sur les émissions. La dynamique de cette dernière résulte moins de
l’internalisation des dommages climatiques que de la contrainte d’émission.
Ensuite, au-delà de cette différence instrumentale, une représentation moins lissée des
dommages climatiques modifie quantitativement la réaction optimale. Pour comprendre cela,
comparons deux situations apparemment proches. Pour commencer, pensons l’externalité
climatique comme un dommage augmentant graduellement de 1/2 pour-cent du P.I.B.
mondial par degré Celsius de température supplémentaire ; cette description coïncide, à peu
près, avec celle de la littérature économique. Partant de cette hypothèse, les modèles
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Conclusion générale
appliqués évaluent l’équilibre stationnaire optimal du climat aux alentours de 6 à 7 degrés
Celsius au-dessus de la température naturelle. Imaginons maintenant que les dommages soient
négligeables avant l’élévation plancher de la température de 3 degrés Celsius (correspondant
au doublement de la concentration en équivalent carbone) et identiques aux précédents
ensuite de façon permanente. S’il demeure préférable de passer cette borne naturelle,
l’équilibre stationnaire de long terme se confond avec le premier cas. Mais, de toute évidence,
le franchissement de la température critique pose un ‘‘cas de conscience’’ et motive une
inclination réelle pour la préservation. Le choix s’opère entre, d’un côté, le coût économique
de la norme d’émission maximale et, de l’autre, un dommage irréversible qui peut être évité.
Ces fictions illustrent bien l’importance de la représentation mentale des dommages
climatiques sous-jacente aux évaluations disponibles dans la littérature. Cependant, vu notre
compréhension des mécanismes climatiques à l’heure actuelle, nous ignorons tout des risques
catastrophiques, au point que l’analyse précédente n’a aucune utilité pour l’instant. Cela
implique-t-il qu’il faille écarter purement et simplement ces événements du domaine du
possible pour se concentrer exclusivement sur ce qui est prévisible ? La réponse est évidente :
les catastrophes doivent être incorporées à la planification comme faisant partie du domaine
du probable.
Le cas de figure d’une catastrophe incertaine du point de vue de son incidence (l’événement
‘‘aucune conséquence’’ pouvant faire partie de l’ensemble des réalisations) met à jour une
autre dimension de la gestion du climat. Sans progrès scientifiques susceptibles d’améliorer
les prévisions sur sa gravité, ce scénario ne diffère pas fondamentalement de l’analyse ci-
dessus : le planificateur compare le gain attendu de la stratégie de passage à celui de la
préservation et, en fonction de l’ordre obtenu, accepte ou refuse la catastrophe.
Par contre, la révélation au cours du temps de la gravité réelle de la catastrophe, grâce à la
recherche scientifique, modifie la procédure de décision. Dans ces circonstances, la
comparaison des stratégies précédentes, c’est-à-dire la préservation et le passage, ne suffit
plus. En effet, l’attitude consistant à repousser l’action irréversible en attendant les
informations complémentaires (baptisée ‘‘stratégie de précaution’’), donc à préserver
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Conclusion générale
l’éventail des choix, assure un bénéfice attendu plus important que la préservation. Cette
différence provient, selon l’interprétation, de la valeur de l’information ou de la disparition du
risque d’erreur avec l’apprentissage. Elle définit une valeur de quasi-option. Il s’ensuit que le
critère de décision basé sur l’arbitrage entre la préservation et le passage introduit un biais
dans le sens de la destruction de l’environnement. Celui-ci ne peut être corrigé qu’en
réévaluant la stratégie de préservation pour tenir compte de la valeur de quasi-option.
L’implication pratique de cette découverte dépend, avant tout, de la crédibilité des
scénarios catastrophiques imaginés par les scientifiques. Ensuite, elle dépend de l’ordre
chronologique de la séquence catastrophe climatique / découvertes scientifiques. Si les
progrès scientifiques précèdent le moment où les risques de catastrophes deviendront non
négligeables, la valeur de quasi-option est nulle car cette chronologie empêche tout risque
d’erreur irréparable. Dans le cas contraire, on aurait de bonnes raisons de donner une
préférence a priori à la préservation, en attendant les éclaircissements prochains. Par contre,
la question de savoir jusqu’à quel point donner la primauté à la préservation ne pourrait être
tranchée qu’après les progrès scientifiques.
Les incitations répétées de la Convention-cadre sur les changements climatiques en faveur de
la recherche climatologique peuvent s’interpréter à l’aide des discussions précédentes. Dans
la pratique, il existe deux moyens pour s’assurer que les informations scientifiques
surviendront avant les catastrophes climatologiques potentielles. En premier lieu, une
limitation forte des émissions de gaz à effet de serre ralentit les changements climatiques.
Ceci réduit l’exposition aux risques catastrophiques et laisse le temps d’en apprendre plus
long sur le climat. L’inconvénient de cette stratégie est son coût. En second lieu, la
réaffectation des financements de recherche vers la climatologie accélère les découvertes.
Ces deux attitudes procèdent, certes, de la même intention mais diffèrent par leurs résultats.
Compte tenu de l’inertie climatique des océans, la seconde est plus dangereuse. En effet,
même si l’on prenait toutes mesures, aujourd’hui, pour stabiliser les concentrations
atmosphériques de gaz à effet de serre, il faudrait patienter 20 à 30 ans pour observer les
conséquences définitives de la situation présente. Il s’ensuit que, si notre capacité
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Conclusion générale
d’anticipation n’excède pas ce délai, la plupart des risques pourraient être subis sans que l’on
puisse réagir d’aucune façon. Dans ces conditions, il semble étonnant que la réaction
internationale tarde à venir ; mais, s’inquiéter de cela revient à négliger la question délicate
des interdépendances stratégiques entre les pays.
* *
*
La politique mondiale du climat s’applique si les pays s’engagent fermement à tenir
compte du bien-être collectif de l’Humanité. Sinon, issue plus probable et, en tout cas, plus
représentative de l’état actuel des négociations, les Etats adoptent un comportement non
coopératif et définissent leur stratégie de lutte contre l’effet de serre en internalisant leurs
dommages domestiques uniquement. Un excès de pollution, par rapport à l’optimum mondial,
découle logiquement de cette attitude.
La littérature économique fournit quelques évaluations des stratégies nationales de lutte
contre l’effet de serre. Les études en question établissent que les taxes non coopératives ne
dépassent pas, au mieux, 1 dollar par tonne de carbone et qu’elles sont négligeables pour la
plupart des pays en développement. En conséquence, les taux de dépollution unilatéraux,
évalués par rapport à la tendance, sont très faibles et inférieurs à 3 pour-cent. Tout compte
fait, ces analyses suggèrent que les pays n’entreprendront presque rien individuellement.
De fait, le règlement du problème passe nécessairement par un accord de coopération.
Mais, les négociations internationales s’avèrent délicates. ‘‘Sur le papier’’, la Convention-
cadre sur les changements climatiques opposent deux camps. D’un côté, les pays de
l’O.C.D.E. acceptent, en la ratifiant, de ramener leurs émissions de carbone au niveau de 1990
d’ici à la fin du siècle. De l’autre, les pays en développement, arguant la responsabilité
historique des pays du Nord dans l’état actuel du climat, annoncent qu’ils n’entreprendront
rien pour l’instant. Ils reverront éventuellement leur position sous condition de bonne
conduite des pays développés, appréciée à l’aune d’initiatives tangibles de limitation des
émissions et de propositions de transferts financiers et technologiques.
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Conclusion générale
Dans les faits, les progrès en matière de réduction effective des émissions tardent à venir. Les
pays de l’O.C.D.E. justifient leur attentisme en prétextant le manque de flexibilité du traité de
coopération. Leurs suggestions d’amélioration de la Convention mettent en avant tantôt
l’institution d’un marché des droits de polluer à l’échelle internationale, tantôt la définition de
critères précis régissant le système d’application conjointe (ou les deux).
Quoique dommageables pour la gestion internationale du climat, les arguments invoqués par
les pays développés ne semblent pas fallacieux. De fait, l’objectif de dépollution défini par la
Convention paraît raisonnable (selon nos calculs, il ne s’éloigne pas sensiblement de
l’optimum collectif), mais sa répartition présente, sous la forme de quotas d’émission
individuels, pénalise ces pays. Pour l’essentiel, cette situation négative serait imputable,
effectivement, à l’inefficacité du traité. Un recours plus systématique à des instruments
économiques, comme un marché de permis d’émission et un système d’application conjointe,
atténuerait notablement cet état de fait, à condition que les coûts de transaction accompagnant
leur création et leur fonctionnement restent limités. Tout en conservant l’équilibre actuel des
engagements, l’effort de dépollution de l’O.C.D.E. serait alors redistribué plus efficacement
entre les pays du monde, moyennant des transferts financiers ou technologiques venant
dédommager la participation des pays en développement. Si de tels aménagements voyaient le
jour, l’équilibre stratégique des négociations sur le climat s’établirait donc de la manière
suivante :
• les pays développés endosseraient seuls la gestion du climat (au moins provisoirement) ;
• ils susciteraient la participation du reste du monde en subventionnant son action.
Des raisons historique (les émissions cumulées de gaz à effet de serre de part et d’autre)
et morale (les inégalités de niveau de vie) contribuent sûrement pour une part importante à
cette configuration bipartite des négociations. Mais, à côté de ces arguments, l’étude des
coalitions spontanées apporte un éclairage complémentaire et dévoile certains déterminants
économiques sous-jacents à l’organisation actuelle de la Convention. Dans le cas d’accords
sur l’environnement ouverts à tous sans système de redistribution des profits de la
coopération :
• ce sont les pays montrant le plus grand bénéfice marginal de la dépollution et un coût
marginal de dépollution fortement croissant qui forment une entente stable ;
294
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326 326 |
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Conclusion générale
• les autres s’excluent d’eux-mêmes, par crainte de devoir supporter, en raison d’un coût
marginal de dépollution peu pentu, la plus grande part de la dépollution collective.
Cette configuration dépeint assez bien la forme et l’équilibre actuels du traité international sur
le climat, tant du point de vue des hypothèses que des résultats. D’un côté, la Convention a
vocation à devenir universelle et l’aide internationale, aussi bien financière que
technologique, tarde à se mettre en place. De l’autre, les pays de l’O.C.D.E., seuls membres
actifs du traité, possèdent bien les caractérisques décrites ci-dessus (à en croire les évaluations
de la littérature).
Le corollaire du résultat précédent est que la recherche d’un accord de coopération large sans
transferts multilatéraux nuit à l’efficacité. En effet, les pays ayant un coût marginal de
dépollution très pentu sont les moins aptes à réduire leurs émissions de gaz à effet de serre.
L’introduction d’un système de redistribution entre les participants de l’entente renverse cette
situation. Alors, la coalition spontanée réunit systématiquement :
• un pays soucieux d’environnement, c’est-à-dire évaluant un bénéfice par tonne d’émission
évitée élevé, mais limité dans sa capacité d’action ;
• deux pays capables de réduire leurs émissions relativement plus facilement, caractérisés
par un coût marginal peu pentu.
La stabilité d’une telle coopération nécessite un mécanisme d’aide, sous forme de transferts
du premier vers les seconds. Là encore, le parallèle avec les négociations sur le climat
fonctionne bien, puisqu’il semble que la Convention s’achemine lentement vers une telle
solution.
295
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327 327 |
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Glossaire
Glossaire
La variable d'état indique la position du système à chaque instant du temps. La dérivée par
rapport au temps de la variable d'état donne l’évolution du système à chaque instant.
La variable de contrôle (ou de commande) est une variable endogène avec laquelle on
influence la trajectoire du système dans un certain but.
Le vecteur de contrôle est dit admissible s'il respecte les conditions suivantes :
• il est défini sur un intervalle de temps donné ;
• ses valeurs appartiennent au domaine de définition du problème ;
• il doit être continu par morceaux.
Par extension, la trajectoire associée à un contrôle admissible est dite admissible.
Le vecteur de contrôle est choisi de manière à maximiser (ou minimiser) une fonction
d'objectif.
Le principe du maximum énonce l'ensemble des conditions d'optimalité et de
transversalité nécessaires pour parvenir à ce résultat.
Nous appellerons faisable tout vecteur de contrôle admissible conforme aux conditions
d'optimalité du principe du maximum. Par extension, la trajectoire qui lui est associée sera
dite faisable.
Tout vecteur de contrôle faisable respectant les conditions de transversalité est optimal.
Le principe du maximum utilise des variables adjointes (ou co-état). Chacune est couplée à
une variable d’état donnée. Des similitudes permettent de comparer ces variables adjointes à
des multiplicateurs de Lagrange.
Une isocline est la représentation graphique d'un ensemble de points tels que la dérivée d'une
variable par rapport à une autre est constante.
L'état stationnaire est un état particulier où le système se maintient infiniment.
296
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328 328 |
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Appendices
Appendice 1 : Principe du Maximum
Soit le problème de contrôle optimal général :
( ) ( )( ) ( )( )max V v s t c t t dt s T T
T
= +∫ , , ,0 φ ,
sous les contraintes
( ) ( )( )& , ,s f s t c t t= ,
( ) ( )( )g s t c t t, , ≥ 0 ,
( )s s0 0= ,
où
( )s t est la variable d’état,
( )c t est la variable de contrôle,
( )(φ s T T, )
]
est la fonction d’héritage,
[0,T est l’horizon de planification,
s0 est la valeur de l’état à la borne inférieure de l’intervalle de planification,
T et sont libres. ( )s T
En définissant la variable adjointe (ou co-état) ( )π t associée à l’état, le Hamiltonien s’écrit :
( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )( ) ( ) ( ) ( )( )H , , , , , . , ,s t c t t t v s t c t t t f s t c t tπ π= + .
En appelant ( )λ t le multiplicateur de Lagrange associé à ( ) ( )( )g s t c t t, , ≥ 0 , le Lagrangien
s’écrit :
( ) ( ) ( ) ( )( ) ( ) ( ) ( )( ) ( ) ( ) ( )( )L , , , , H , , , . , ,s t c t t t t s t c t t t t g s t c t tπ λ π λ= + .
297
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329 329 |
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Appendices
298
UThéorème 1U (Léonard & Long, 1992, théorème 6.5.1, p. 211) : Principe du maximum.
Soit ( )c t* la solution optimale de ce problème et ( )s t* la trajectoire correspondante de la
variable d’état. Alors, il existe ( )π t et ( )λ t tels que :
(i) ( )c t* maximise ( ) ( ) ( ) ( )( )L * , , , ,s t c t t t tπ λ , avec ( ) ( )( )g s t c t t* , * , ≥ 0 . Il s’ensuit que
( ) ( ) ( ) ( )( )
( )
∂ π λ
∂
L * , * , , ,s t c t t t t
c t
= 0,
avec ( )λ t ≥ 0 , ( ) ( )( )g s t c t t* , * , ≥ 0 et ( ) ( ) ( )( )λ t g s t c t t. * , * , = 0 .
(ii) ( )π t est continue et dérivable par morceaux. Elle vérifie l’équation différentielle
( )
( ) ( ) ( ) ( )( )
( )
&
H * , * , , ,
π
∂ π λ
∂
t
s t c t t t t
s t
= − .
(iii) ( )
( ) ( ) ( ) ( )( )
( )
&
L * , * , , ,
s t
s t c t t t t
t
=
∂ π λ
∂π
.
(iv) Les conditions de transversalité s’écrivent :
( )
( )( )
( )
π
∂φ
∂
*
* ,
T
s T T
s T
= ,
( ) ( ) ( )( ) ( )( )H * * , * * , * , * * * , *s T c T T T s T T
T
π
∂φ
∂
− = 0 .
URemarqueU : dans le modèle que nous utilisons, nous procédons implicitement au changement
de variable ( ) ( )p t t= −π . Ceci implique les modifications suivantes :
( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )( ) ( ) ( ) ( )( )H , , , , , . , ,s t c t p t t v s t c t t p t f s t c t t= − ,
( ) ( ) ( ) ( )( ) ( ) ( ) ( )( ) ( ) ( ) ( )( )L , , , , H , , , . , ,s t c t p t t t s t c t p t t t g s t c t tλ λ= + ,
(ii) ( ) ( )
( ) ( ) ( ) ( )( )
( )
& &
H * , * , , ,
p t t
s t c t p t t t
s t
= − =π
∂ λ
∂
,
(iii) ( )
( ) ( ) ( ) ( )( )
( )
&
L * , * , , ,
s t
s t c t p t t t
p t
= −
∂ λ
∂
.
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330 330 |
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Appendices
299
UThéorème 2U (Léonard & Long, 1992, théorème 6.5.2, p. 213) : Conditions suffisantes.
Si ( ) ( ) ( ) ( )( )L , , , ,s t c t t t tπ λ est concave (strictement concave) en ( )s c, et si ( ) ( )( )s t c t* , *
vérifie le théorème 1, alors ( ) ( )( )s t c t* , * est une (l’unique) solution optimale du problème.
UCorollaire du théorème 2U (Léonard & Long, 1992, corollaire 6.5.1, p. 214) :
( ) ( ) ( ) ( )( )L , , , ,s t c t t t tπ λ est concave en ( )s c, si :
(i) ( )v s c t, , est concave en ( )s c, , ∀t ,
(ii) soit π ≥ 0 et ( )f s c t, , est concave en ( )s c, , soit π ≤ 0 et ( )f s c t, , est convexe en ( )s c, ,
(iii) soit λ ≥ 0 et ( )g s c t, , est concave en ( )s c, , soit λ ≤ 0 et ( )g s c t, , est convexe en ( )s c, .
UCas particulier :
Les applications économiques du principe du maximum impliquent le plus souvent un
horizon de planification infini et une fonction ( ) ( )( )v s t c t t, , de la forme ( ) ( )( )e u s t c tt−δ . . , .
Dans ce cas, les conditions de transversalité du théorème 1 deviennent :
UCondition de transversalité 1U :
( ) ( )lim
t
p t s t
→∞
=. 0 (Léonard & Long, 1992, Corrolaire 9.3.2, p. 289),
( ) ( ) ( )( )lim
t
s t c t t t
→∞
=H * , * , * ,π 0 (Michel, 1981).
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331 331 |
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Appendices
300
Appendice 2 : Propriétés du Hamiltonien et de la variable adjointe
TF
1
FT
Soit le problème de contrôle optimal :
( ) ( ) ( )( )V s s T v s t c t t dtT
T
* , , , ,0 0= ∫max ,
sous les contraintes
( ) ( )( )& , ,s f s t c t t= ,
( )s s0 0= et ( )s T sT= .
( )π t est la variable adjointe (ou co-état) associée à s et ( ) ( )p t t= −π . Le Hamiltonien
s’écrit:
( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )( ) ( ) ( ) ( )( )H , , , , , . , ,s t c t p t t v s t c t t p t f s t c t t= − .
Soit ( ) ( )( )s t c t* , * la solution optimale du problème ci-dessus. On a donc :
( ) ( ) ( )( )
( ) ( )( )
V s s T v s t c t t dt
v s t c t t dt
T
T
T
* , , , ,
* , * ,
0 0
0
=
=
∫
∫
max
Supposons que ( )p t soit une fonction quelconque du temps. Puisque ( ) ( )( )& , ,s f s t c t t= , on
peut écrire :
( ) ( )[ ] ( )V v s c t p f s c t p s dt s c p t dt p s dtT T T* * , * , . * , * , .&* H *, * , , .&*= − + = +∫ ∫ ∫0 0 0 .
En intégrant par partie la seconde intégrale, on trouve :
( )[ ] ( ) ( )V s c p t p s dt p T s p sT T* H *, * , , & . * . .= − + −∫0 00 .
Pour la suite du raisonnement, nous supposons que la fonction ( )V s s TT* , ,0 est dérivable par
sT et T .
T
1
T - D’après Léonard & Long (1992).
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332 332 |
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Appendices
301
Ces dérivées sont égales à :
( ) ( )∂
∂
V
s
p ds
ds
dc
ds
dp
ds
dt
ds
s dp
ds
dt p T
T
s
T
c
T
p
T
t
T T
T* H & . * H . * H . H . * . &= − + + + −
⎡
⎣
⎢
⎤
⎦
⎥ +∫0 ;
( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )
( ) ( )
∂
∂
V
T
s T c T p T T p T s T
p ds
dT
dc
dT
dp
dT
dt
dT
s dp
dT
dt p T ss c p t
T
T
* H , * , , & .
H & . * H . * H . H . * . & & .
= −
+ − + + + −⎡
⎣⎢
⎤
⎦⎥
+∫0
L’écoulement du temps est un processus autonome, donc dt dsT = 0 et dt dT = 0 . De plus,
puisque ( )p t est, par hypothèse, une fonction quelconque, dp dsT = 0 , dp dsT& = 0 ,
dp dT = 0 , dp dT& = 0 . Les expressions précédentes deviennent
( ) ( )∂
∂
V
s
p ds
ds
dc
ds
dt p T
T
s
T
c
T
T* H & . * H . *= − +
⎡
⎣
⎢
⎤
⎦
⎥ +∫0 ,
( ) ( ) ( )( ) ( )∂
∂
V
T
s T c T p T T p ds
dT
dc
dT
dts c
T* H * , * , , H & . * H . *= + − +⎡
⎣⎢
⎤
⎦⎥∫0 .
Ces relations sont vraies pour toute fonction ( )p t . Supposons maintenant que ( )p t respecte
les conditions du théorème 1 de l’appendice 1. Alors, H &s p− = 0 et H c = 0 . On en déduit que
( )∂
∂
V
s
p T
T
* *= ,
( ) ( ) ( )( )∂
∂
V
T
s T c T p T T* H * , * , * ,= .
Lorsque la fonction ( ) ( )( )v s t c t t, , est de la forme ( ) ( )( )e u s t c tt−δ . . , , on utilisera les relations
( )∂
∂
δV
s
e p T
T
T* .~ *.= − ,
( ) ( ) ( )( )∂
∂
δV
T
e s T c T p TT* .
~
H * , * ,~ *.= − ,
où
( ) ( )~ ..p t e p tt= δ ,
( ) ( ) ( )( ) ( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )( ) ( ) ( ) ( )( )~H , ,~ .H , , , , , ~ . , ,.s t c t p t e s t c t p t t u s t c t t p t f s t c t tt= = +δ .
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333 333 |
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Appendices
302
Appendice 3 - Propriétés du système au voisinage du point
stationnaire
Lorsque la fonction ( ) ( )( )v s t c t t, , est de la forme ( ) ( )( )e u s t c tt−δ . . , , on simplifie la
résolution du système en exprimant le Hamiltonien et la variable adjointe en valeur courante :
( ) ( )~ ..p t e p tt= δ ,
( ) ( ) ( )( ) ( ) ( ) ( )( ) ( ) ( )( ) ( ) ( ) ( )( )~H , ,~ .H , , , , ~ . ,.s t c t p t e s t c t p t t u s t c t p t f s t c tt= = −−δ .
Le Hamiltonien courant devient autonome, puisque le temps n’y entre pas explicitement (Tu,
1992, définition 8.4, p. 170). Les conditions nécessaires du principe du maximum deviennent
:
( ) ( ) ( )[ ] ( ) ( ) ( ) ( )( )~& . . & .~ ~H * , * ,~.p t e p t p t p t s t c t p tt s= + = +δ δ δ ,
( ) ( ) ( ) ( )( )& ~H , ,~~s t s t c t p tp= − .
Au point stationnaire ( )s p*,~ * , ( ) ( )~& &p t s t= = 0 . En linéarisant au voisinage de ce point, on trouve
:
~&
&
~
H
~
H
~
H
~
H
.
~ ~ *
*
~
~~ ~
p
s
p p
s s
sp ss
pp ps
⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟ ≈
+
− −
⎛
⎝
⎜
⎜
⎞
⎠
⎟
⎟
−
−
⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟
δ
.
Le polynôme caractéristique de ce système linéaires est :
( ) ( ) ( )P sp ss
pp ps
sp sp pp ssλ
δ λ
λ
λ δ λ=
+ −
− − −
= − − + +
~
H
~
H
~
H
~
H
~
H .
~
H
~
H .
~
H
~
~~ ~
.
En comparant les deux premiers termes de l’équation caractéristique, on s’aperçoit facilement
que les racines de l’équation caractéristique apparaissent par paires : si ( )P λ 1 0= et si
λ λ δ2 1= − + , alors ( )P λ 2 0= . Il s’ensuit que les parties réelles des racines de l’équation
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Appendices
303
caractéristique ( )P λ = 0 sont soit de signes opposées, soit toutes deux positives, comme
l’indique le tableau de signes ci-dessous :
−∞ − 0 + δ + +∞
+∞ + δ + 0 − −∞( ) ( )Re Reλ λ δ2 1= − +
( )Re λ1
Ceci permet d’énoncer le théorème suivant :
UThéorème 1U (Léonard & Long, 1992, théorème 9.5.1, p. 294) :
Les états stationnaires des problèmes autonomes à horizon infini possèdent soit les propriétés
de nœud instable, soit les propriétés de point-selle.
Appendice 4 - Détermination de la coalition stable et du vecteur de Shapley
Le programme utilise 3 spécifications. Nous commençons par écrire la résolution de
chacune avant de proposer le programme proprement dit.
UNotations U : N : nombre de régions
ni : nombre de pays dans la région i
α i : nombre de signataires de l’A.I.E. issus de la région i : ( )α α α= 1 ,..., N
qi : dépollution du pays i
Q : dépollution mondiale
Qs : dépollution de la coalition
Qns : dépollution agrégée des free riders
USpécification n°1U (SUB Spec1 dans le programme) :
( )B Q b
N
a Q Qi
i= −
⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟. .
2
2
et ( )C q c qi i i i= .
2
2
.
Les free riders égalisent leur bénéfice marginal et leur coût marginal :
( ) ( ) ( ) ( )′ ≡ − = ≡ ′ ⇒ = −B Q b a Q
N
c q C q q
b
c
a Q
Ni i i i i i i
i
i
. . . .
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335 335 |
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Appendices
304
Toutes régions confondues, la dépollution globale des free riders est :
( ) ( )Q z a Q
Nns
=
−
α . avec ( ) ( )z n b
ci i
i
ii
N
α α= −
=
∑ .
1
.
Sachant que Q Q Qs ns= + , la fonction de réaction des free riders s’écrit :
( ) ( )Q P a Qns s= −α . avec ( )
( )
( )
P
z
N z
α
α
α
=
+
< 1.
Il s’ensuit que ( )( ) ( )Q Q P a Ps= − +. .1 α α . Les signataires de l’A.I.E. maximisent leur bien être
collectif sachant la réaction des free riders :
( )( ) ( )( ) ( )( ) ( )( )[ ]max q i i s s
i
N
i
i
i
b
N
a Q P a P Q P a P c
qα
α α α α
.
. . . . . . .1 1 2
2
2
1
2
− + − − + −
⎧
⎨
⎩
⎫
⎬
⎭=
∑
Ils égalisent le bénéfice marginal de la coalition à leur coût marginal individuel :
( )( ) ( ) ( )( )α α α αi i s
i
N
i i i
i
sb P
a Q
N
c q q
y
c
P
a Q
N
. . . . . .1 12
1
2−
−
= ⇒ = −
−
=
∑
avec ( )y bi i
i
N
α α=
=
∑ .
1
.
La dépollution de la coalition est donc :
( )( ) ( )
( )( ) ( )
Q
P a d
N P d
s =
−
+ −
1
1
2
2
α α
α α
. .
.
avec ( )d y
ci ii
N
α α=
=
∑ .
1
.
On en déduit que la dépollution mondiale :
( )( ) ( )
( )( ) ( )
( )Q
P a d
N P d
a P=
−
+ −
+
1
1
3
2
α α
α α
α
. .
.
.
Ce résultat permet de connaître, pour tout vecteur α , les dépollutions et les gains des pays.
USpécification n°2U (SUB Spec2 dans le programme) :
( )B Q b Qi i= . et ( )C q c E
q
E
q
E
q
Ei i i i
i
i
i
i
i
i
= −
⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟ −
⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟ +
⎡
⎣
⎢
⎤
⎦
⎥. . .1 1ln .
Les free riders égalisent leur bénéfice marginal et leur coût marginal :
( ) ( ) ( )′ ≡ = − −⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟ ≡ ′ ⇒ = − −B Q b c
q
E
C q q E ei i i
i
i
i i i i
bi ci. .ln 1 1 .
Toutes régions confondues, la dépollution globale des free riders est :
( ) ( )Q n E ens i i i bi c
i
N
i= − − −
=
∑ α . . 1
1
.
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336 336 |
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Appendices
305
Les signataires égalisent le bénéfice marginal de la coalition à leur coût marginal individuel :
( ) ( ) ( )( )′ ≡ = − −⎛
⎝
⎜
⎞
⎠
⎟ ≡ ′ ⇒ = −
= =
−∑ ∑B Q b c qE C q q E eii
N
i i
i
N
i
i
i
i i i i
y ci
1 1
1 1α α. . .ln
avec ( )y bi i
i
N
α α=
=
∑ .
1
.
La dépollution de la coalition est donc :
( )( )Q E ens i i y c
i
N
i= − −
=
∑α α. . 1
1
.
On en déduit que la dépollution mondiale :
Q Q Qns s= +
USpécification n°3U (SUB Spec3 dans le programme) :
( )B Q b Qi i= . et ( )C q c qi i i i di= . .
Les free riders égalisent leur bénéfice marginal et leur coût marginal :
( ) ( )′ ≡ = ≡ ′ ⇒ = ⎡
⎣
⎢
⎤
⎦
⎥
−
−
B Q b c d q C q q
b
c di i i i i
d
i i i
i
i i
d
i
i
. .
.
1
1
1
.
Toutes régions confondues, la dépollution globale des free riders est :
( )Q n b
c dns i i
i
i i
d
i
N
i
= −
⎡
⎣
⎢
⎤
⎦
⎥
−
=
∑ α . .
1
1
1
.
Les signataires égalisent le bénéfice marginal de la coalition à leur coût marginal individuel :
( ) ( ) ( )′ ≡ = ≡ ′ ⇒ = ⎡
⎣
⎢
⎤
⎦
⎥
=
−
−
∑B Q b c d q C q q yc dii
N
i i i i i
d
i i i
i i
d
i
i
1
1
1
1
α
α
. . .
.
avec ( )y bi i
i
N
α α=
=
∑ .
1
.
La dépollution de la coalition est donc :
( )Q y
c dns i i i
d
i
N
i
=
⎡
⎣
⎢
⎤
⎦
⎥
−
=
∑α α. .
1
1
1
.
On en déduit que la dépollution mondiale :
Q Q Qns s= + .
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337 337 |
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Appendices
306
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338 338 |
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Appendices
' Programme rédigé en Qbasic (Dos 6.22)
' Q : dépollution globale
' q : dépollution individuelle
' Spécification N°1 :
' B(Q)=b.(a.Q-Q²/2)/N et C(q)=c.Q²/2
' Spécification N°2 :
' B(Q)=b.Q et C(q)=c.E.((1-q/E).ln(1-q/E)+q/E)
' Spécification N°3 :
' B(Q)=b.Q et C(q)=c.q^d.
' *** Déclaration des sous-routines ***
DECLARE SUB Boucle () : DECLARE SUB BoucleEntree () : DECLARE SUB BoucleSortie ()
DECLARE SUB Calibrages () : DECLARE SUB ChoixSpec () : DECLARE SUB CoalHomog () : DECLARE SUB Scenario ()
DECLARE SUB Fichier () : DECLARE SUB Fichier1 () : DECLARE SUB Fichier2 () : DECLARE SUB notations ()
DECLARE SUB Imputations () : DECLARE SUB Shapley ()
DECLARE SUB InputManuel () : DECLARE SUB InputParam () : DECLARE SUB ParamDefaut ()
DECLARE SUB MenuManuel () : DECLARE SUB MenuModifGal ()
DECLARE SUB Profits () : DECLARE SUB PaiementsNashCoop ()
DECLARE SUB Spec1 () : DECLARE SUB Spec2 () : DECLARE SUB Spec3 () : DECLARE SUB VersSpec ()
DECLARE SUB StabExterne () : DECLARE SUB StabInterne ()
DECLARE SUB Vecteur () : DECLARE SUB VectCoop () : DECLARE SUB VectNash ()
DECLARE SUB TabGeneral () : DECLARE SUB AffichageResult ()
DECLARE SUB TestStabIteration () : DECLARE SUB TestManuel ()
' *** Définition des paramètres ***
COMMON SHARED a, a$, b, c, choix, d, j, k, Khi, valeur, n, NT, ouvert, P, pi, PIcoop, PInoncoop, precis
COMMON SHARED prog, Q, Qcoop, Qnoncoop, R, spec, t, t1, t2, test1, test2, transfert, w1, w2, y
' $DYNAMIC
DIM SHARED a(5), aa(5, 32), alpha(2, 1), b(1), c(1), coalition(1, 1, 1, 1, 1), d(1)
DIM SHARED Depol(5, 32), e(1), j(5), n(1), nul(5), pi(2, 2), ps(1), pns(1)
DIM SHARED Qs(1), Qns(1), v(1, 10), sh(5, 32)
REDIM SHARED alpha(2, 16), b(16), c(16), d(16), e(16), n(16), pi(2, 16), ps(16), pns(16), Qs(16), Qns(16), v(16, 101)
' alpha : variable de participation de la région i
' a : paramètre de la fonction de bénéfice de la spécification n°1
' b : bénéfice moyen du paramétrage automatique
' c : coût moyen du paramétrage automatique
' choix, choice : variables utilisées pour gérer les menus
' d : somme ( alpha() * ( y / c() ), sert au calcul des dépollutions
' Khi : paramètre de tolérance de stabilité
' NT : nombre total de pays
' ouvert : variable binaire, teste si le fichier de sauvegarde est ouvert
' P : somme ( (n() - alpha()) * b() / c() ), sert au calcul des dépollutions
' pi : profit global pour un vecteur de participation alpha() donné
' PIcoop : profit mondial coopératif
' PInoncoop : profit mondial non coopératif
' precis : pour choisir la précision décimale des résultats
' prog : variable test pour savoir si on étudie un cas particulier ou de base.
' Q : dépollution totale pour un vecteur de participation alpha() donné
' Qcoop : dépollution mondiale coopérative
' Qnoncoop : de dépollution mondiale non coopérative
' R : nombre de régions
' spec : choix de la spécification (1 = Spec1 ; 2 = Spec2 ; 3 = Spec3)
' t : compteur
' t1 : multiplicateur du coût du paramétrage automatique
' t2 : multiplicateur du bénéfice du paramétrage automatique
' test1 et 2 : tests de fin des boucles d'entrée et de sortie
' transfert : = 1 si les transferts sont prohibés et = 2 sinon
' y : somme ( alpha() * b() ), sert au calcul des dépollutions
' alpha() : nombre de signataires issu de la région i
' b() : paramètre du bénéfice de la région i
' c() : paramètre du coût de la région i
' d() : exposant de la fonction de coût de la région i
' n() : nombre de pays dans la région i
' pi() : profit du pays i coopératif ( pi(1,i) ) et non coopératif ( pi(2,i) )
' ps() : bénéfice du pays i lorsqu'il participe à l'AIE
' pns() : " " " " " ne " pas " "
' qs() : dépollution du pays i lorsqu'il participe à l'AIE
' qns() : " " " " " ne " pas " "
' v() : mémoire de l'itération ; sert à comparer deux tours consécutifs
306
![]() |
339 339 |
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Appendices
‘ *** Racine du programme ***
CALL ParamDefaut: CALL ChoixSpec
DO WHILE choix <> 9
CALL TabGeneral: CALL AffichageResult
' Menu principal. Gestion des résultats
LOCATE 20, 1: PRINT "[1] Modifications"
LOCATE 20, 40: PRINT "[2] Lancer ou Relancer une itération"
LOCATE 21, 1: PRINT "[3] Vérifier la stabilité"
LOCATE 21, 40: PRINT "[4] Coal° régionales (stablité interne)"
LOCATE 22, 1: PRINT "[5] Valeurs de Shapley"
LOCATE 22, 40: PRINT "[6] Sauvegarder les résultats"
LOCATE 23, 1: PRINT "[9] Fin"
LOCATE 23, 40: INPUT choix
IF choix = 1 THEN CALL MenuModifGal
IF choix = 2 THEN CALL Boucle
IF choix = 3 THEN CALL TestStabIteration
IF choix = 4 THEN CALL CoalHomog
IF choix = 5 THEN CALL Shapley
IF choix = 6 THEN CALL Fichier
LOOP
' *** JEU DU CHAPITRE 7 ***
' Ordre des valeurs : E , b , c , d , n
' CALIBRAGE GREEN (1993)
1 DATA 1.497,0.65,855.210,3.293,1
DATA 0.884,0.87,2292.961,2.854,1
DATA 0.417,0.33,3313.288,2.565,1
DATA 1.221,0.1,95.978,2.487,1
DATA 0.875,0.07,139.840,2.756,1
DATA 2.177,0.022063,8921071,3.029,189
' CALIBRAGE MR (1993)
2 DATA 1.649,0.65,524.053,2.515,1
DATA 1.640,1.2,279.804,2.281,1
DATA 1.184,0.1,267.226,1.354,1
DATA 0.754,0.07,292.724,1.310,1
DATA 1.743,0.022063,43459.172,1.901,189
DATA 0,0,10E20,10,1
' CALIBRAGE RICE (1993)
3 DATA 1.497,0.65,98.257,2.887,1
DATA 0.884,0.87,368.17,2.887,1
DATA 0.417,0.33,1941.242,2.887,1
DATA 1.221,0.1,64.368,2.887,1
DATA 0.875,0.07,79.894,2.887,1
DATA 2.177,0.022063,542809.253,2.887,189
' *** MATRICE DES COALITIONS DE 5 PAYS ***
' utilisée pour le calcul du vecteur de Shapley
' Coalitions singletons
4 DATA 0,0,0,0,0
DATA 1,0,0,0,0
DATA 0,1,0,0,0
DATA 0,0,1,0,0
DATA 0,0,0,1,0
DATA 0,0,0,0,1
' Coalitions de 2 pays
DATA 1,1,0,0,0
DATA 1,0,1,0,0
DATA 1,0,0,1,0
DATA 1,0,0,0,1
DATA 0,1,1,0,0
DATA 0,1,0,1,0
DATA 0,1,0,0,1
DATA 0,0,1,1,0
DATA 0,0,1,0,1
DATA 0,0,0,1,1
' Coalitions de 3 pays
DATA 1,1,1,0,0
DATA 1,1,0,1,0
DATA 1,1,0,0,1
DATA 1,0,1,1,0
DATA 1,0,1,0,1
DATA 1,0,0,1,1
DATA 0,1,1,1,0
DATA 0,1,1,0,1
DATA 0,1,0,1,1
DATA 0,0,1,1,1
' Coalitions de 4 pays
DATA 1,1,1,1,0
DATA 1,1,1,0,1
DATA 1,1,0,1,1
DATA 1,0,1,1,1
DATA 0,1,1,1,1
' Coalition de 5 pays
DATA 1,1,1,1,1
END
SUB AffichageResult
' Calcul des revenus permis par la coalition stable
IF transfert = 1 THEN
CALL Profits
ELSE
transfert = 1: CALL Profits
transfert = 2: CALL Profits
END IF
' Présentation à l'écran des résultats de l'itération
FOR i = 1 TO R
LOCATE i + 1, 41: PRINT alpha(1, i)
LOCATE i + 1, 46: IF alpha(1, i) > 0 THEN PRINT INT(ps(i) * precis) / precis
LOCATE i + 1, 56: IF alpha(1, i) < n(i) THEN PRINT INT(pns(i) * precis) / precis
LOCATE i + 1, 63: IF alpha(1, i) > 0 THEN PRINT INT(Qs(i) * precis) / precis
LOCATE i + 1, 68: IF alpha(1, i) < n(i) THEN PRINT INT(Qns(i) * precis) / precis
NEXT i
X = 0: IF R < 16 THEN X = 1
307
![]() |
340 340 |
▲back to top |
Appendices
LOCATE R + 2 + X, 41: PRINT INT(pi * precis) / precis
LOCATE R + 3 + X, 41: PRINT INT(Q * precis) / precis
END SUB
308
![]() |
341 341 |
▲back to top |
Appendices
SUB Boucle
CLS
LOCATE 22, 1: PRINT "[1] Sans transferts"
LOCATE 22, 40: PRINT "[2] Avec Transferts"
LOCATE 23, 40: INPUT transfert
t = 1: test1 = 0
FOR i = 1 TO R: alpha(1, i) = alpha(2, i): NEXT i
CALL BoucleEntree
FOR i = 1 TO R: alpha(2, i) = alpha(1, i): NEXT i
END SUB
SUB BoucleEntree
' Procédure de détermination de la coalition stable.
' Boucle principale : entée des pays tirés au sort. L'itération cesse lorsque
' la variable test1 est plus grande que Khi, sachant que test1 est incrémentée
' à chaque fois qu'un pays refuse d'adhérer, et remise à zéro à chaque fois
' qu'un pays entre.
RANDOMIZE TIMER
compteur1 = 0
LOCATE 8, 29: PRINT "Nbre de tours :": LOCATE 10, 25: PRINT "Entrées :": LOCATE 10, 40: PRINT "Sorties :"
DO WHILE test1 < Khi
' Tirage aléatoire de l'entrant j
j = INT(RND * R) + 1: CALL StabExterne
' S'il entre, test des sorties
IF alpha(1, j) <> v(j, t - 1) OR Khi - test1 < 5 THEN CALL BoucleSortie
FOR ii = 1 TO R: v(ii, t) = alpha(1, ii): NEXT ii
' Test de stabilité de la coalition : entrée des pays
' A chaque fois que la coalition à la fin de la boucle présente est
' parfaitement identique à la précédente (tous les alpha(1,i) égaux),
' la variable test1 s'incrémente d'une unité.
FOR iv = 1 TO R
IF v(iv, t - 1) = v(iv, t) THEN indice = indice + 1
NEXT iv
IF indice = R THEN test1 = test1 + 1 ELSE test1 = 0
indice = 0: t = t + 1: compteur1 = compteur1 + 1
IF t = 100 THEN t = 1
LOCATE 12, 27: PRINT compteur1
IF compteur1 > 10 ^ 3 THEN
PRINT "L'itération ne converge pas ! ": test1 = Khi
END IF
LOOP
END SUB
SUB BoucleSortie
' Boucle de sortie des pays membres de l'AIE.
compteur2 = 0
DO WHILE test2 < Khi / 2
CALL StabInterne
FOR iii = 1 TO R: v(iii, t) = alpha(1, iii): NEXT iii
' Test de stabilité de la coalition : sortie des pays
' A chaque fois que la coalition à la fin de la boucle présente est
' parfaitement identique à la précédente (tous les alpha(1,i) égaux),
' la variable test1 s'incrémente d'une unité.
' Appelé dans SUB BoucleSortie
FOR iv = 1 TO R
IF v(iv, t - 1) = v(iv, t) THEN indice = indice + 1
NEXT iv
IF indice = R THEN test2 = test2 + 1 ELSE test2 = 0
indice = 0: t = t + 1: compteur2 = compteur2 + 1
IF t = 100 THEN t = 1
LOCATE 12, 42: PRINT compteur2
IF compteur2 > 10 ^ 2 THEN test2 = Khi
LOOP
test2 = 0
END SUB
SUB Calibrages
' Calibrage du jeu des chapitres 7 et 8
transfert = 1: CALL ParamDefaut: CALL VectNash
nr = 0: prog = 1: numero = 0
DO WHILE nr < 1 OR nr > 2
CLS
LOCATE 8, 20: PRINT "2 possibilités :"
LOCATE 9, 10: INPUT "Avec [1] ou sans [2] la région ''reste du monde'' ?", nr
309
![]() |
342 342 |
▲back to top |
Appendices
LOOP
DO WHILE numero < 1 OR numero > 3
CLS : LOCATE 10, 15
INPUT "Coûts calibrés sur GREEN [1], MR [2] ou RICE [3] "; numero
LOOP
IF nr = 1 THEN R = 6 ELSE R = 5
IF numero = 1 THEN RESTORE 1
IF numero = 2 THEN RESTORE 2
IF numero = 3 THEN RESTORE 3
FOR iv = 1 TO R: READ e(iv), b(iv), c(iv), d(iv), n(iv): NEXT iv
END SUB
SUB ChoixSpec
DO WHILE choice <> 9
CLS
LOCATE 21, 1: PRINT "Choix des options générales :"
LOCATE 22, 1: PRINT "[1] Paramètre de tolérance"
LOCATE 22, 40: PRINT "[2] Choix de la spécification"
LOCATE 23, 1: PRINT "[9] Fin"
LOCATE 23, 40: INPUT choice
IF choice = 1 THEN
CLS : LOCATE 10, 15
INPUT "Quel degré de tolérance désirez-vous ? ", Khi
END IF
IF choice = 2 THEN CALL Scenario
LOOP
CLS : CALL VectNash: CALL PaiementsNashCoop
END SUB
SUB CoalHomog
' Détermination des coalitions stables internes + profitables homogènes
FOR i = 1 TO R
j = i: CALL VectNash: alpha(1, j) = n(j)
FOR ii = 1 TO n(j): CALL StabInterne: NEXT ii
FOR ii = 1 TO n(j): CALL StabExterne: NEXT ii
FOR ii = 1 TO R: alpha(2, ii) = alpha(1, ii): NEXT ii
CALL Fichier1
NEXT i
END SUB
SUB Fichier
' Choix des informations que l'on désire enregistrer
' ouverture du fichier
' ouvert = 1 quand le fichier a bien été ouvert.
IF ouvert <> 1 THEN
CLS :
LOCATE 10, 15: INPUT "Entrez le nom du fichier (*.dat) : ", a$
OPEN a$ FOR OUTPUT AS #1: CLS : ouvert = 1
END IF
DO WHILE choice < 1 OR choice > 3
CLS
LOCATE 20, 1: PRINT "[1] A.I.E."
LOCATE 20, 40: PRINT "[2] Vecteur de Shapley"
LOCATE 21, 1: PRINT "[3] Commentaire"
LOCATE 23, 40: INPUT choice
LOOP
IF choice = 1 THEN CALL Fichier1
IF choice = 2 THEN CALL Fichier2
IF choice = 3 THEN
' Ecriture d'un commentaire dans le fichier de sauvergarde
CLS
LOCATE 10, 15: PRINT "Tapez votre commentaire (max. 256 caractères)"
INPUT a$: PRINT #1, a$: CLS
END IF
END SUB
SUB Fichier1
' Sauvegarde des résultats affichés à l'écran
IF transfert = 1 THEN
CALL Profits
ELSE
transfert = 1: CALL Profits
transfert = 2: CALL Profits
END IF
310
![]() |
343 343 |
▲back to top |
Appendices
PRINT #1, "Nombre de régions : "; R,
PRINT #1, "Nombre de pays : "; NT,
PRINT #1, "Paramètre de tolérance : "; Khi
PRINT #1, "Rég°", "b", "c", "n", "E",
PRINT #1, "R. coop.", "R. Nash", "N", "R. sig.", "R. F.R.", "qs", "qns"
FOR i = 1 TO R
PRINT #1, i, INT(b(i) * 100) / 100, INT(c(i) * 100) / 100, n(i),
PRINT #1, INT(e(i) * 100) / 100,
PRINT #1, INT(pi(1, i) * precis) / precis,
PRINT #1, INT(pi(2, i) * precis) / precis,
PRINT #1, alpha(2, i),
IF alpha(2, i) > 0 THEN
PRINT #1, INT(ps(i) * precis) / precis,
ELSE
PRINT #1, ,
END IF
IF alpha(2, i) < n(i) THEN
PRINT #1, INT(pns(i) * precis) / precis,
ELSE
PRINT #1, ,
END IF
IF alpha(2, i) > 0 THEN
PRINT #1, INT(Qs(i) * precis) / precis,
ELSE
PRINT #1, ,
END IF
IF alpha(2, i) < n(i) THEN
PRINT #1, INT(Qns(i) * precis) / precis
ELSE
PRINT #1,
END IF
NEXT i
PRINT #1, , ,
PRINT #1, , "Revenus mondiaux :", INT(PIcoop * precis) / precis,
PRINT #1, INT(PInoncoop * precis) / precis, INT(pi * precis) / precis
PRINT #1, , ,
PRINT #1, , "Dépollutions mondiales :", INT(Qcoop * precis) / precis,
PRINT #1, INT(Qnoncoop * precis) / precis, INT(Q * precis) / precis,
PRINT #1,
END SUB
SUB Fichier2
' Sauvegarde dans le fichier de données des imputations de Shapley
PRINT #1, "Gains": PRINT #1, ,
FOR i = 1 TO 5
PRINT #1, "Pays"; i,
NEXT i
PRINT #1, "Somme"
FOR i = 1 TO 32
total = 0 : k = i : CALL notations
FOR ii = 1 TO 5
PRINT #1, INT(sh(ii, i) * precis) / precis,
total = total + sh(ii, i)
NEXT ii
PRINT #1, total
NEXT i
PRINT #1, : PRINT #1, "Emissions": PRINT #1, , ""
FOR i = 1 TO 5
PRINT #1, "Pays"; i,
NEXT i
PRINT #1, "Somme"
FOR i = 1 TO 32
total = 0 : k = i : CALL notations
FOR ii = 1 TO 5
PRINT #1, INT(Depol(ii, i) * precis) / precis,
total = total + Depol(ii, i)
NEXT ii
PRINT #1, total
NEXT i
END SUB
SUB Imputations
RESTORE 4
FOR i = 1 TO 32
311
![]() |
344 344 |
▲back to top |
Appendices
somme = 0
FOR iii = 1 TO R
READ j(iii): IF j(iii) = alpha(1, iii) THEN somme = somme + 1
NEXT iii
IF somme = 5 THEN ii = i
NEXT i
ps(j) = sh(j, ii): pns(j) = sh(j, ii)
END SUB
312
![]() |
345 345 |
▲back to top |
Appendices
SUB InputManuel
' Entrée des valeurs dans le tableau de paramétrage manuel...
CLS : NT = 0
LOCATE 17 - R, 12: PRINT "Rég°": LOCATE 17 - R, 22: PRINT "b"
LOCATE 17 - R, 32: PRINT "c": LOCATE 17 - R, 42: PRINT "n"
LOCATE 17 - R, 52: PRINT "E"
FOR i = 1 TO R
LOCATE i + 17 - R, 11: PRINT i: LOCATE i + 17 - R, 21: PRINT b(i)
LOCATE i + 17 - R, 31: PRINT c(i): LOCATE i + 17 - R, 41: PRINT n(i)
LOCATE i + 17 - R, 51: PRINT INT(e(i) * 100) / 100
NEXT i
LOCATE 1, 10: PRINT "Frappez ''Enter'' pour garder une valeur"
FOR i = 1 TO R
IF valeur = 0 OR valeur = 1 THEN
mem = b(i): LOCATE i + 17 - R, 25: INPUT b(i)
IF b(i) = 0 THEN b(i) = mem
END IF
IF valeur = 0 OR valeur = 2 THEN
mem = c(i): LOCATE i + 17 - R, 35: INPUT c(i):
IF c(i) = 0 THEN c(i) = mem
END IF
IF valeur = 0 OR valeur = 3 THEN
mem = n(i): LOCATE i + 17 - R, 45: INPUT n(i):
IF n(i) = 0 THEN n(i) = mem
END IF
IF valeur = 0 OR valeur = 4 THEN
mem = e(i): LOCATE i + 17 - R, 55: INPUT e(i):
IF e(i) = 0 THEN e(i) = mem
END IF
NT = NT + n(i)
NEXT i
PIcoop = 0: PInoncoop = 0: CALL VectNash: CALL PaiementsNashCoop
END SUB
SUB InputParam
' Routine d'entrée des paramètres du paramétrage automatique guidé
' Variables : b ; t2 ; c ; t1.
' Ne fonctionne que pour 5 régions : d'où r = 5 par défaut.
prog = 1: IF R <> 5 THEN R = 5
DO WHILE choice <> 9
CLS
LOCATE 19, 1: PRINT "[1] Modifier le bénéfice moyen"
LOCATE 19, 40: PRINT "[2] Modifier la dispersion du bénéfice"
LOCATE 20, 1: PRINT "[3] Modifier le coût moyen"
LOCATE 20, 40: PRINT "[4] Modifier la dispersion du coût"
LOCATE 21, 1: PRINT "[5] Choisir le nombre de pays"
LOCATE 21, 40: PRINT "[6] Choisir les émissions non contrôlées"
LOCATE 22, 1: PRINT "[7] Aide"
LOCATE 23, 1: PRINT "[9] Fin"
' Présentation de la matrice des régions autour des valeurs centrales b et c.
LOCATE 4, 27: PRINT (1 - t1) * c: LOCATE 4, 37: PRINT c
LOCATE 4, 47: PRINT (1 + t1) * c: LOCATE 6, 15: PRINT (1 - t2) * b
LOCATE 6, 25: PRINT "région 1": LOCATE 6, 45: PRINT "région 2"
LOCATE 7, 15: PRINT b: LOCATE 7, 35: PRINT "région 3"
LOCATE 8, 15: PRINT (1 + t2) * b: LOCATE 8, 25: PRINT "région 4"
LOCATE 8, 45: PRINT "région 5"
LOCATE 23, 40: INPUT choice
IF choice = 1 OR b = 0 THEN
LOCATE 10, 15: INPUT "Entrez b :", b
END IF
IF choice = 2 THEN
LOCATE 10, 15: INPUT "Entrez tx de b :", t2
END IF
IF choice = 3 OR c = 0 THEN
LOCATE 10, 15: INPUT "Entrez c :", c
END IF
IF choice = 4 THEN
LOCATE 10, 15: INPUT "Entrez tx de c :", t1
END IF
IF choice = 5 THEN valeur = 3: CALL InputManuel
IF choice = 6 THEN valeur = 4: CALL InputManuel
IF choice = 7 THEN
CLS
PRINT "Dans ce cas de base, on choisit une valeur centrale pour b et c. On choisit un"
313
![]() |
346 346 |
▲back to top |
Appendices
PRINT "taux de variation autour de cette valeur qui répartit les 5 régions comme suit :"
LOCATE 6, 25: PRINT "(1-t1).c": LOCATE 6, 38: PRINT "c"
LOCATE 6, 45: PRINT "(1+t1).c": LOCATE 8, 15: PRINT "(1-t2).b"
LOCATE 8, 25: PRINT "région 1": LOCATE 8, 45: PRINT "région 2"
LOCATE 9, 18: PRINT "b": LOCATE 9, 35: PRINT "région 3"
LOCATE 10, 15: PRINT "(1+t2).b": LOCATE 10, 25: PRINT "région 4"
LOCATE 10, 45: PRINT "région 5"
SLEEP 20
END IF
' Prise en compte des modification
b(1) = b * (1 - t2): c(1) = c * (1 - t1):
b(2) = b * (1 - t2): c(2) = c * (1 + t1)
b(3) = b: c(3) = c
b(4) = b * (1 + t2): c(4) = c * (1 - t1):
b(5) = b * (1 + t2): c(5) = c * (1 + t1)
LOOP
CLS : CALL PaiementsNashCoop: CALL Profits
END SUB
SUB MenuManuel
' Menu d'entrée manuelle des paramètres
CLS : prog = 2
DO WHILE choice <> 9
LOCATE 19, 1: PRINT "Modifier :":
LOCATE 20, 1: PRINT "[1] tout"
LOCATE 20, 40: PRINT "[2] les fonctions de bénéfice":
LOCATE 21, 1: PRINT "[3] les fonctions de coût"
LOCATE 21, 40: PRINT "[4] le nombre des pays":
LOCATE 22, 1: PRINT "[5] les émissions non contrôlées"
LOCATE 22, 40: PRINT "[9] fin":
LOCATE 23, 40: INPUT choice
valeur = choice - 1: IF valeur < 5 THEN CALL InputManuel
CLS
LOOP
choice = 0: CLS : CALL VectNash: CALL PaiementsNashCoop
END SUB
SUB MenuModifGal
' Sous-menu : modification des paramètres (bénéfice et coûts ; nbre de pays) ;
' choix du vecteur de coopération ; précision des résultats.
DO WHILE choice <> 9
CLS
LOCATE 20, 1: PRINT "[1] Vecteur de coopération"
LOCATE 20, 40: PRINT "[2] Cas de base"
LOCATE 21, 1: PRINT "[3] Modifier les fonctions"
LOCATE 21, 40: PRINT "[4] Options générales"
LOCATE 22, 1: PRINT "[5] Précision des résultats affichés"
LOCATE 23, 1: PRINT "[9] fin"
LOCATE 23, 40: INPUT choice
IF choice = 1 THEN CALL Vecteur
IF choice = 2 THEN CALL InputParam
IF choice = 3 THEN CALL MenuManuel
IF choice = 4 THEN CALL ChoixSpec
IF choice = 5 THEN
CLS : LOCATE 10, 15
INPUT "Entrez le nombre de décimal voulu (0 à 5) : ", precis
precis = 10 ^ precis
END IF
LOOP
END SUB
SUB notations
' Présentation du vecteur de coopération dans les fichiers
total = 0: a$ = "{"
IF aa(1, k) = 1 THEN a$ = a$ + "1"
IF aa(2, k) = 1 THEN a$ = a$ + "2"
IF aa(3, k) = 1 THEN a$ = a$ + "3"
IF aa(4, k) = 1 THEN a$ = a$ + "4"
IF aa(5, k) = 1 THEN a$ = a$ + "5"
a$ = a$ + "}": PRINT #1, a$,
END SUB
SUB PaiementsNashCoop
' Tous les pays coopèrent ...
314
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347 347 |
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Appendices
CALL VectCoop: CALL Profits
FOR i = 1 TO R: pi(1, i) = ps(i): NEXT i
PIcoop = pi: Qcoop = Q
' Aucun pays ne coopère ...
CALL VectNash: CALL Profits
FOR i = 1 TO R: pi(2, i) = pns(i): NEXT i
PInoncoop = pi: Qnoncoop = Q
END SUB
SUB ParamDefaut
' valeurs par défaut des paramètres
R = 5: a = 100: b = 1: c = 1: transfert = 1: NT = 100: Khi = 100: precis = 2
FOR i = 1 TO R: b(i) = 1: c(i) = 1: d(i) = 2: e(i) = 1: n(i) = 20: NEXT i
END SUB
SUB Profits
' Calcul des profits de chaque région en fonction
' du vecteur taux de coop. alpha()
pi = 0
FOR j = 1 TO R
CALL VersSpec
pi = pi + alpha(1, j) * ps(j) + (n(j) - alpha(1, j)) * pns(j)
NEXT j
END SUB
SUB Scenario
spec = 0: question = 0: valeur = 0
DO WHILE spec < 1 OR spec > 3
CLS
LOCATE 19, 1: PRINT "Choix de la spécification :"
LOCATE 20, 1: PRINT "[1] Spécification N°1"
LOCATE 20, 40: PRINT "[2] Spécification N°2 "
LOCATE 21, 1: PRINT "[3] Spécification N°3 "
LOCATE 23, 40: INPUT spec
LOOP
DO WHILE question < 1 OR question > 3
CLS
LOCATE 20, 1: PRINT "Souhaitez-vous analyser :"
LOCATE 21, 1: PRINT "[1] un cas particulier"
LOCATE 21, 40: PRINT "[2] une configuration programmée"
IF spec = 3 THEN LOCATE 22, 1: PRINT "[3] une configuration calibrée"
LOCATE 23, 40: INPUT question
LOOP
IF question = 1 THEN
CLS : LOCATE 10, 15
INPUT "Combien de région considérez-vous (de 1 à 16) ? ", R
CALL InputManuel
END IF
IF question = 2 THEN CALL InputParam
IF question = 3 THEN CALL Calibrages
END SUB
SUB Shapley
' Calcul de la valeur de Shapley du joueur i dans un jeu à 5 joueurs.
transfert = 1
RESTORE 4
' Lecture des 32 coalitions d'un jeu à 5 joueurs : 2 ^ 5.
' Une coalition s'écrit sous forme binaire : 0 1 0 0 1 signifie
' que les joueurs 2 et 5 font parties de la coalition.
' coalition (0 1 0 0 1)= 0.ps1 + 1.ps2 ... mesure le
' bien-être de la coalition {25}.
FOR i = 1 TO 32
FOR ii = 1 TO 5
READ alpha(1, ii): j(ii) = alpha(1, ii)
aa(ii, i) = alpha(1, ii)
sh(ii, i) = 0
NEXT ii
CALL Profits
FOR ii = 1 TO 5
IF alpha(1, ii) = 1 THEN Depol(ii, i) = Qs(ii) ELSE Depol(ii, i) = Qns(ii)
NEXT ii
coalition(j(1), j(2), j(3), j(4), j(5)) = j(1) * ps(1) + j(2) * ps(2) + j(3) * ps(3) + j(4) * ps(4) + j(5) * ps(5)
NEXT i
FOR i = 1 TO 32
AT = 0
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Appendices
' Coalition a() étudiée pendant le tour i.
' Exemple 1 : 0 0 0 0 0
' Exemple 2 : 1 0 1 0 0
' AT mesure le nombre de joueurs dans la coalition I décrite par a()
' Exemple 1 : AT = 0 ; Exemple 2 : AT = 2
FOR ii = 1 TO 5: a(ii) = aa(ii, i): AT = AT + a(ii): NEXT ii
RESTORE 4
FOR ii = 1 TO 32
S = 0: S1 = 1: S2 = 1: S3 = 1: nul = 1
' Entrée d'une coalition j()
FOR iii = 1 TO 5: READ j(iii): S = S + j(iii): NEXT iii
FOR iii = 1 TO S - 1: S1 = S1 * iii: NEXT iii
FOR iii = 1 TO AT - S: S2 = S2 * iii: NEXT iii
FOR iii = 1 TO AT: S3 = S3 * iii: NEXT iii
IF S1 = 0 THEN S1 = 1
IF S2 = 0 THEN S2 = 1
' Dans la Boucle qui suit, à chaque fois qu'un jour appartient
' à la coalition a() (coalition I) mais pas à la coalition j() (coalition S),
' la variable nul prend la valeur 0 et les valeurs de Shapley des joueurs
' ne sont pas incrémentées à ce tour. Ceci implique que la boucle ii
' étudie l'imputation à l'intérieur de la coalition I décrite par a().
' Exemple 1 : 0 0 0 0 0. Puisqu'il n'y a pas de joueur, nul=0 tout le temps.
' La valeur de Shapley n'est donc jamais incrémentée ; quelle que soit la
' coalition S décrite par j() qui est tirée : on obtient donc l'imputation 0.
' Ce résultat est corrigé en fin de SUB par l'imputation de Nash.
' Exemple 2 : 1 0 1 0 0. nul = 0 à chaque fois que la coalition
' S décrite par j() contient les joueurs 2, 4 ou 5. Dans ces cas,
' la valeur de Shapley n'est pas incrémentée. Dans tous les autres,
' les valeurs de Shapley de tous sont incrémentées. Ceci
' revient à obtenir l'imputation au sein de la coalition {13}.
FOR iii = 1 TO 5
IF j(iii) = 1 AND a(iii) = 0 THEN nul(iii) = 0 ELSE nul(iii) = 1
nul = nul * nul(iii)
NEXT iii
sh(1, i) = sh(1, i) + (S1 * S2 / S3) * (coalition(j(1), j(2), j(3), j(4), j(5)) - coalition(0, j(2), j(3), j(4), j(5))) * nul
sh(2, i) = sh(2, i) + (S1 * S2 / S3) * (coalition(j(1), j(2), j(3), j(4), j(5)) - coalition(j(1), 0, j(3), j(4), j(5))) * nul
sh(3, i) = sh(3, i) + (S1 * S2 / S3) * (coalition(j(1), j(2), j(3), j(4), j(5)) - coalition(j(1), j(2), 0, j(4), j(5))) * nul
sh(4, i) = sh(4, i) + (S1 * S2 / S3) * (coalition(j(1), j(2), j(3), j(4), j(5)) - coalition(j(1), j(2), j(3), 0, j(5))) * nul
sh(5, i) = sh(5, i) + (S1 * S2 / S3) * (coalition(j(1), j(2), j(3), j(4), j(5)) - coalition(j(1), j(2), j(3), j(4), 0)) * nul
NEXT ii
' Le profit des pays non-membres de la coalition I décrite par a() est leur profit
' de free riders. Donc :
FOR ii = 1 TO 5
IF a(ii) = 0 THEN alpha(1, ii) = 0 ELSE alpha(1, ii) = 1
NEXT ii
CALL Profits
FOR ii = 1 TO 5
IF sh(ii, i) = 0 THEN sh(ii, i) = pns(ii)
NEXT ii
NEXT i
transfert = 2
END SUB
SUB Spec1
z = 0: d = 0: y = 0
FOR iv = 1 TO R: z = z + (n(iv) - alpha(1, iv)) * b(iv) / c(iv): NEXT iv
P = z / (NT + z)
FOR iv = 1 TO R: y = y + alpha(1, iv) * b(iv): NEXT iv
FOR iv = 1 TO R: d = d + alpha(1, iv) * y / c(iv): NEXT iv
' Calcul de la dépollution globale
Q = (a * d * (1 - P) ^ 3) / (NT + d * (1 - P) ^ 2) + a * P
Qs(j) = (1 - P) * ((a - Q) / NT) * (y / c(j)): Qns(j) = ((a - Q) / NT) * (b(j) / c(j))
' calcul des profits
ps(j) = b(j) / NT * (a * Q - (Q ^ 2) / 2) - c(j) / 2 * (((1 - P) * (a - Q) / NT) * (y / c(j))) ^ 2
pns(j) = b(j) / NT * (a * Q - (Q ^ 2) / 2) - c(j) / 2 * (((a - Q) / NT) * (b(j) / c(j))) ^ 2
END SUB
SUB Spec2
y = 0: Qs = 0: Qns = 0
FOR iv = 1 TO R: y = y + alpha(1, iv) * b(iv): NEXT iv
' Calcul des dépollutions individuelles
Qs(j) = (1 - EXP(-y / c(j))) * e(j): Qns(j) = (1 - EXP(-b(j) / c(j))) * e(j)
' Calcul de la dépollution globale
FOR iv = 1 TO R
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Appendices
Qs = Qs + alpha(1, iv) * (1 - EXP(-y / c(iv))) * e(iv)
Qns = Qns + (n(iv) - alpha(1, iv)) * (1 - EXP(-b(iv) / c(iv))) * e(iv)
NEXT iv
Q = Qs + Qns
' calcul des profits
ps(j) = b(j) * Q - e(j) * c(j) * (1 - (y / c(j) + 1) * EXP(-y / c(j)))
pns(j) = b(j) * Q - e(j) * c(j) * (1 - (b(j) / c(j) + 1) * EXP(-b(j) / c(j)))
END SUB
SUB Spec3
y = 0: Qs = 0: Qns = 0
FOR iv = 1 TO R: y = y + alpha(1, iv) * b(iv): NEXT iv
' Calcul des dépollutions individuelles
Qs(j) = (y / (d(j) * c(j))) ^ (1 / (d(j) - 1)): Qns(j) = (b(j) / (d(j) * c(j))) ^ (1 / (d(j) - 1))
' Calcul de la dépollution mondiale
FOR iv = 1 TO R
Qs = Qs + alpha(1, iv) * (y / (d(iv) * c(iv))) ^ (1 / (d(iv) - 1))
Qns = Qns + (n(iv) - alpha(1, iv)) * (b(iv) / (d(iv) * c(iv))) ^ (1 / (d(iv) - 1))
NEXT iv
Q = Qs + Qns
' Calcul des profits
ps(j) = b(j) * Q - (c(j) * ((y / (d(j) * c(j))) ^ (1 / (d(j) - 1))) ^ d(j))
pns(j) = b(j) * Q - (c(j) * ((b(j) / (d(j) * c(j))) ^ (1 / (d(j) - 1))) ^ d(j))
END SUB
SUB StabExterne
' Test de l'entrée des pays tirés au sort
' w1 est son profit s'il reste free rider
' w2 est sont profit s'il entre
' Si w1 > w2, il reste free rider, et inversement
CALL VersSpec
' Profit de j lorsqu'il ne participe pas à l'AIE
w1 = pns(j)
' Si j décide de coopérer, on a :
alpha(1, j) = alpha(1, j) + 1
' ... et son profit est :
IF alpha(1, j) < n(j) + 1 THEN
CALL VersSpec: w2 = ps(j)
ELSE
w2 = w1
END IF
IF w2 < w1 OR w2 = w1 THEN alpha(1, j) = alpha(1, j) - 1
IF alpha(1, j) > n(j) THEN alpha(1, j) = n(j)
END SUB
SUB StabInterne
' Test de sortie des pays tirés au sort
' w1 est son profit s'il reste signataire
' w2 est sont profit s'il sort
' Si w1 > w2, il reste, et inversement
CALL VersSpec
' Profit de j lorsqu'il participe à l'AIE
w1 = ps(j)
' Si j quitte, on a :
alpha(1, j) = alpha(1, j) - 1
' ... et son profit est :
IF alpha(1, j) > -1 THEN
CALL VersSpec: w2 = pns(j)
ELSE
w2 = w1 - 1
END IF
IF w2 < w1 THEN alpha(1, j) = alpha(1, j) + 1
IF alpha(1, j) < 0 THEN alpha(1, j) = 0
END SUB
SUB TabGeneral
' Tableau récapitulatif des paramètres du scénario
CLS
LOCATE 1, 1: PRINT "Rég°": LOCATE 1, 7: PRINT "b"
LOCATE 1, 12: PRINT "c": LOCATE 1, 17: PRINT "n"
LOCATE 1, 22: PRINT "R.Coop.": LOCATE 1, 32: PRINT "R.Nash"
LOCATE 1, 42: PRINT "N": LOCATE 1, 47: PRINT "R.Sig."
LOCATE 1, 57: PRINT "R.N.S."
LOCATE 1, 64: PRINT "qs": LOCATE 1, 69: PRINT "qns"
317
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350 350 |
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Appendices
LOCATE 1, 74: PRINT "E"
FOR i = 1 TO R
LOCATE i + 1, 1: PRINT i: LOCATE i + 1, 6: PRINT INT(b(i) * 10) / 10
LOCATE i + 1, 11: PRINT INT(c(i) * 10) / 10: LOCATE i + 1, 16: PRINT n(i)
LOCATE i + 1, 21: PRINT INT(pi(1, i) * precis) / precis
LOCATE i + 1, 31: PRINT INT(pi(2, i) * precis) / precis
LOCATE i + 1, 73: PRINT INT(e(i) * 10) / 10
NEXT i
X = 0: IF R < 16 THEN X = 1
LOCATE R + 2 + X, 5: PRINT "Rev. mondiaux :"
LOCATE R + 2 + X, 21: PRINT INT(PIcoop * precis) / precis
LOCATE R + 2 + X, 31: PRINT INT(PInoncoop * precis) / precis
LOCATE R + 3 + X, 5: PRINT "Dépol. mond. :"
LOCATE R + 3 + X, 21: PRINT INT(Qcoop * precis) / precis
LOCATE R + 3 + X, 31: PRINT INT(Qnoncoop * precis) / precis
END SUB
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351 351 |
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Appendices
SUB TestManuel
PRINT "Pour ajouter (enlever) un pays à l'AIE, répondez + (-) à la première question."
PRINT "Donnez ensuite le numéro de la région dont provient le pays."
PRINT "Pour terminer, tapez (F)in"
SLEEP 3
DO WHILE a$ <> "F"
CLS
FOR i = 1 TO R: PRINT "région "; i, alpha(1, i): NEXT i
PRINT "[+] Ajouter [-] Enlever [f] Fin", : nu = 0
DO WHILE nu <> 1
INPUT a$
IF a$ = "f" THEN a$ = "F"
IF a$ = "+" OR a$ = "-" OR a$ = "F" THEN nu = 1
LOOP
PRINT "Indice de la région concernée", : j = 0
IF a$ <> "F" THEN
DO WHILE j < 1 OR j > R: INPUT j: LOOP
END IF
IF a$ = "+" THEN
CALL StabExterne
PRINT "S'il adhère, son profit augmente de "; w2 - w1
IF w2 < w1 OR w2 = w1 THEN
PRINT "Il préfère rester free rider"
ELSE
PRINT "Il a donc intérêt à entrer"
END IF
SLEEP 3
END IF
IF a$ = "-" THEN
CALL StabInterne
PRINT "S'il renonce, son profit augmente de "; w2 - w1
IF w2 < w1 THEN
PRINT "Il préfère rester signataire"
ELSE
PRINT "Il a donc intérêt à quitter"
END IF
SLEEP 3
END IF
LOOP
END SUB
SUB TestStabIteration
' Vérification manuelle de la stabilité du résultat de l'itération
DO WHILE choice <> 9
CLS
LOCATE 21, 1: PRINT "[1] Test des entrées (Automatique)"
LOCATE 21, 40: PRINT "[2] Test des sorties (Automatique)"
LOCATE 22, 1: PRINT "[3] Test manuel"
LOCATE 22, 40: PRINT "[9] Fin"
LOCATE 23, 40: INPUT choice
IF choice = 1 THEN
CLS
FOR i = 1 TO R: LOCATE i, 20: PRINT "région "; i; alpha(1, i): NEXT i
FOR j = 1 TO R: CALL StabExterne: NEXT j
FOR i = 1 TO R: LOCATE i, 33: PRINT alpha(1, i): NEXT i
SLEEP 2
END IF
IF choice = 2 THEN
CLS
FOR i = 1 TO R: LOCATE i, 20: PRINT "région "; i; alpha(1, i): NEXT i
FOR j = 1 TO R: CALL StabInterne: NEXT j
FOR i = 1 TO R: LOCATE i, 33: PRINT alpha(1, i): NEXT i
SLEEP 2
END IF
IF choice = 3 THEN CALL TestManuel
LOOP
CLS : FOR i = 1 TO R: alpha(2, i) = alpha(1, i): NEXT i
END SUB
SUB VectCoop
FOR i = 1 TO R: alpha(1, i) = n(i): alpha(2, i) = n(i): NEXT i
END SUB
319
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352 352 |
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Appendices
SUB Vecteur
' Choix d'un nouveau vecteur de coopération :
' Nash ; total ; aléatoire ; manuel.
DO WHILE choice <> 9
CLS
LOCATE 21, 1: PRINT "[1] Nash"
LOCATE 21, 40: PRINT "[2] Coopération totale"
LOCATE 22, 1: PRINT "[3] Vecteur aléatoire"
LOCATE 22, 40: PRINT "[4] Vecteur manuel"
LOCATE 23, 1: PRINT "[9] Fin"
LOCATE 23, 40: INPUT choice
IF choice = 1 THEN CALL VectNash
IF choice = 2 THEN CALL VectCoop
IF choice = 3 THEN
RANDOMIZE TIMER
FOR i = 1 TO R: alpha = INT(RND * n(i)): alpha(1, i) = alpha: alpha(2, i) = alpha: NEXT i
END IF
IF choice = 4 THEN
CLS
FOR i = 1 TO R
PRINT "Entrez le nombre de signataires de la région "; i;
INPUT alpha: alpha(1, i) = alpha: alpha(2, i) = alpha
NEXT i
END IF
LOOP
END SUB
SUB VectNash
' Pour remettre à zéro le vecteur de coopération ...
FOR i = 1 TO R: alpha(1, i) = 0: alpha(2, i) = 0: NEXT i
END SUB
SUB VersSpec
IF spec = 1 THEN CALL Spec1
IF spec = 2 THEN CALL Spec2
IF spec = 3 THEN CALL Spec3
IF transfert = 2 THEN CALL Imputations
END SUB
320
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353 353 |
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Bibl iographie
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Table des matières
INTRODUCTION GÉNÉRALE 1
CHAPITRE PRÉLIMINAIRE - L’EFFET DE SERRE 16
1 - L’effet de serre naturel 17
2 - L’effet de serre additionnel 18
3 - Les cycles biogéochimiques des gaz à effet de serre 20
4 - Contributions individuelles aux changements climatiques 23
5 - Résultats des modèles de circulation générale 27
6 - Effets du réchauffement sur la planète 29
6.1 - Des nuisances graduelles 29
6.2 - Des effets catastrophiques 30
7 - Conclusion 31
PARTIE I - POLITIQUE MONDIALE DU CLIMAT
CHAPITRE 1 - POLLUTION CUMULATIVE 34
1.1 - Production - Pollution cumulative 36
1.1.1 - Résolution 40
1.1.2 - Propriétés qualitatives de la dynamique optimale 47
1.1.3 - Décentralisation 53
1.2 - Production - Pollution cumulative - Ressource épuisable 54
1.2.1 - Résolution 55
1.2.2 - Trajectoires d’épuisement et rente de rareté 56
1.2.3 - Prix implicite de la pollution 58
1.3 - Application numérique 62
1.3.1 - Spécification du modèle 62
1.3.2 - Résolution 64
1.3.3 - Trajectoire sans contrainte d’épuisement 65
1.3.4 - Prix implicite et contrainte d’épuisement 68
1.3.5 - Prix implicite et progrès technique exogène 69
1.4 - Conclusion 71
Annexes 75
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Table des matières
CHAPITRE 2 - COÛT DE LA LUTTE CONTRE L’EFFET DE SERRE 82
2.1 - Des moyens d’action multiples 83
2.2 - La consommation d’énergie finale 85
2.2.1 - Historique de la consommation d’énergie 85
2.2.2 - Les déterminants de la demande d’énergie 86
2.3 - Les émissions de carbone 92
2.3.1 - De la consommation d’énergie aux émissions de carbone 92
2.3.2 - Projections des modèles mondiaux 93
2.4 - Résultats des modèles mondiaux 98
2.4.1 - Les déterminants du coût de la dépollution 98
2.4.2 - Evaluations par les modèles mondiaux 102
2.4.3 - Critiques des modèles mondiaux 108
2.5 - Conclusion 113
Annexes 117
CHAPITRE 3 - DOMMAGES CLIMATIQUES 118
3.1 - Construction d’une fonction de dommage climatique 119
3.1.1 - Dommages du doublement de la concentration d’équivalent CO2 120
3.1.2 - Fonctions de dommage climatique 128
3.1.3 -Critiques 129
3.2 - Dommage par tonne et taxation optimale 132
3.2.1 - Taxe optimale sur le carbone 134
3.2.2 - Comparaison des gaz à effet de serre 137
3.3 - Conclusion 142
Annexes 145
PARTIE II - DISCONTINUITÉS, IRREVERSIBILITES ET INCERTITUDES
CHAPITRE 4 - CATASTROPHES CLIMATIQUES IRRÉVERSIBLES 148
4.1 - Production - Pollution - Catastrophe irréversible 151
4.2 - Résolution 153
4.2.1 - Deux attitudes concurrentes 154
4.2.2 - La meilleure stratégie de préservation 155
4.2.3 - La meilleure stratégie de passage 157
4.2.4 - Laquelle choisir ? 159
4.3 - Interprétations 160
4.3.1 - Acceptabilité de la catastrophe 161
4.3.2 - Délai d’attente 162
4.3.3 - Variation du seuil critique 164
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Table des matières
4.4 - Fonction d’héritage 165
4.4.1 - Le bien-être après la catastrophe 165
4.4.2 - A l’instant de passage... 166
4.5 - Application numérique 167
4.6 - Conclusion 170
Annexes 172
CHAPITRE 5 - INCERTITUDES 175
5.1 - Incertitude sur la gravité de la catastrophe et progrès scientifiques 177
5.1.1 - Aucun progrès scientifique 177
5.1.2 - Progrès scientifiques dans la prévision de la catastrophe 179
5.1.3 - Valeur de quasi-option 186
5.2 - Incertitude sur l’échéance de la catastrophe 187
5.2.1 - Résolution 189
5.2.2 - Effet de l’incertitude sur l’équilibre stationnaire 190
5.3 - Conclusion 192
Annexes 195
PARTIE 3 - COMPOSANTES STRATEGIQUES
CHAPITRE 6 - JEUX DIFFÉRENTIELS DE L’EFFET DE SERRE 198
6.1 - Production - Pollution avec plusieurs pays 201
6.1.1 - Structures d’information 202
6.1.2 - Stratégies coopératives 204
6.1.3 - Stratégies non coopératives 210
6.1.4 - Coopération et bien-être 214
6.1.5 - Application numérique 215
6.2 - Résultats des jeux dynamiques appliqués 218
6.2.1 - Les déterminants des taxes domestiques 219
6.2.2 - Politiques unilatérales optimales 221
6.2.3 - Comparaison des politiques unilatérales à la politique coopérative 223
6.3 - Dilemme du prisonnier et stratégies punitives 226
6.4 - Conclusion 229
Annexes 232
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Table des matières
CHAPITRE 7 - NEGOCIATIONS INTERNATIONALES 234
7.1 - Droit international de l’environnement 236
7.1.1 - Expériences de coopération internationale 236
7.1.2 - La Convention-cadre sur les changements climatiques 238
7.2 - Respect strict des engagements de la Convention 244
7.2.1 - Modèle et calibrages 245
7.2.2 - Situations de référence 249
7.2.3 - Politiques unilatérles de la région O.C.D.E. 250
7.3 - Conclusion 260
Annexes 262
CHAPITRE 8 - COALITIONS 265
8.1 - Coalition : définition et fonctionnement 267
8.2 - Accords Internationaux sur l’Environnement 269
8.3 - Profil des signataires 271
8.3.1 - Aucuns transferts latéraux 271
8.3.2 - Partage des gains 278
8.4 - Conclusion 282
Annexes 284
CONCLUSION GÉNÉRALE 287
Glossaire 296
Appendice 1 : Principe du maximum 297
Appendice 2 : Propriétés du Hamiltonien et de la variable adjointe 300
Appendice 3 - Propriétés du système au voisinage du point stationnaire 302
Appendice 4 - Détermination de la coalition stable et du vecteur de Shapley 303
BIBLIOGRAPHIE 318
ENCADRÉS
Encadré 1 : Modèle climatique de base 32
Encadré 1.1 : Le développement soutenable 46
Encadré 1.2 : Valeur du taux d’actualisation 52
Encadré 2.1 : Typologie des mesures de lutte contre l’effet de serre 83
Encadré 2.2 : Global 2100 (Manne, 1993) 96
Encadré 2.3 : GREEN (Burniaux & alli, 1992a) 96
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Table des matières
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