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Décentralisation et réduction
de la pauvreté
par Johannes Jütting, Elena Corsi et Albrecht Stockmayer
CENTRE DE DÉVELOPPEMENT DE L’OCDE
Les opinions exprimées dans cet exposé sont celles des auteurs et ne reflètent pas nécessairement celles de l’OCDE,
du Centre de développement ou de leurs pays membres
www.oecd.org/dev/reperes
n°4
Repères n° 5
La décentralisation occupe depuis ces 20 dernières années une place centrale dans les politiques de
développement. Si l’on discute depuis quelque temps déjà des avantages et des risques du transfert
du pouvoir et des ressources à des échelons locaux de gouvernement, on commence tout juste à
s’intéresser au rapport entre la décentralisation et la réduction de la pauvreté. Cette édition des
Repères met en évidence les principaux déterminants d’un processus de décentralisation favorable
aux pauvres et discute des grandes leçons tirées par les bailleurs de fonds.
Alors que la concrétisation des objectifs de
développement du millénaire (ODM) progresse
lentement et suscite des réflexions parallèles quant à
l’augmentation éventuelle de l’aide financière, la
question de l’instauration d’institutions favorables aux
pauvres prend une importance capitale. La décision de
décentraliser ne sera pas uniquement prise dans
l’objectif immédiat de réduire la pauvreté – mais les
changements d’architecture institutionnelle qui en
découleront devraient très probablement avoir des
conséquences sur la gouvernance, la participation et
l’efficience de l’offre de services publics, toutes variables
essentielles pour une lutte efficace contre la pauvreté.
Les rapports d’évaluation des CSRP préparés par le FMI
et la Banque mondiale soulignent la nécessité de
renforcer les capacités institutionnelles pour une mise
en œuvre réussie de politiques favorables aux pauvres.
Introduction
L’application d’une stratégie cohérente de décentralisation
– et, parallèlement, d’indicateurs de suivi des progrès
réalisés – apparaît comme un instrument prometteur
susceptible d’améliorer les capacités et la qualité des
institutions locales.
Alors que pratiquement tous les pays en développement
expérimentent une forme ou une autre de décentralisation,
le degré réel d’application reste extrêmement variable.
D’après des recherches menées par la Banque mondiale sur
l’expérience de décentralisation de 30 pays africains, seule
une poignée d’entre eux – dont l’Afrique du Sud et l’Ouganda –
ont opté pour une délégation significative de pouvoirs et
de ressources aux autorités locales. Dans la majorité des
cas, le processus de décentralisation n’en est qu’au tout
début et s’apparente davantage à une déconcentration
Encadré 1. Qu’est-ce que la décentralisation ?
La décentralisation consiste à transférer des prérogatives
publiques des niveaux supérieurs de gouvernance aux niveaux
inférieurs. Il peut s’agir de pouvoirs administratifs (transfert
de fonctionnaires et de missions publiques au niveau local),
budgétaires (délégation des ressources et des capacités à
exercer des activités rémunératrices), politiques (délégation
du pouvoir de prise de décisions), ou encore d’un mélange
entre ces différentes prérogatives.
* Johannes Jütting, Économiste principal, Centre de
développement de l’OCDE
Elena Corsi, Consultant, Centre de développement de l’OCDE
Albrecht Stockmayer, Responsable, Questions de
gouvernance et de genre, GTZ
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Tableau 1. La décentralisation réduit-elle
la pauvreté ?
Impact positif attesté sur la
pauvreté
Impact négatif/pas d’impact attesté
sur la pauvreté
Bolivie
Chine
Ghana
Inde (Bengale
occidental)
Mexique
Philippines
Afrique du Sud
Brésil
Burkina Faso
Égypte
Éthiopie
Guinée
Inde (Andhra Pradesh)
Malawi
Mozambique
Népal
Paraguay
Sri Lanka
Ouganda
Vietnam
Source : D’après Jütting et al., 2004
qu’à une véritable délégation (figure 1). Le classement
des pays est fonction d’un indice gradué (allant de
0 = pas de décentralisation à 4 = décentralisation
maximale) qui mesure le niveau de décentralisation
atteint. Cet indice est construit à partir des résultats
moyens d’un pays en termes de progression de la
décentralisation politique, administrative et budgétaire.
En théorie, la décentralisation devrait avoir un impact
positif sur la pauvreté, dans la mesure où elle devrait
i) permettre aux pauvres de mieux se faire entendre ;
ii) améliorer leur accès à des services publics de meilleure
qualité ; et iii) réduire leur fragilité. Une véritable
délégation des pouvoirs ouvre la voie à l’instauration
d’institutions démocratiques au sein desquelles les
pauvres pourront participer activement, prendre des
décisions et défendre leurs intérêts. Une meilleure
connaissance du milieu et une concurrence plus ouverte
conduisent à une meilleure adéquation aux besoins locaux
et à de meilleures politiques. Ces améliorations
engendrent des gains d’efficacité – en termes d’accès,
de qualité et de ciblage – au niveau de la prestation de
services notamment. Tout système décentralisé renforçant
la capacité de contrôle des citoyens sur les responsables
et les hommes politiques locaux, les occasions de parvenir
à une meilleure transparence et, partant, de réduire la
corruption et d’optimiser globalement la gouvernance
locale, se multiplient. Cette amélioration de la
gouvernance locale devrait contribuer à réduire la fragilité
des pauvres.
Si, en théorie, la décentralisation peut provoquer une
optimisation des instruments et des politiques destinés
aux pauvres, la réalité est moins séduisante. A partir d’une
étude approfondie d’expériences menées dans 19 pays,
le Centre de développement de l’OCDE a pu constater
que la décentralisation n’avait effectivement provoqué des
améliorations en termes de réduction de la pauvreté que
dans un tiers des cas. Dans la majorité des pays, la
décentralisation n’avait eu aucun impact (tableau 1).
Rapport entre décentralisation et pauvreté :
la théorie à l’épreuve des faits
Source : Ndegwa, N. (2002).
Figure 1. Étendue de la décentralisation en Afrique
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0.5
1
1.5
2
2.5
3
3.5
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Mais les chercheurs sont parvenus à un constat encore
plus inquiétant : dans les pays où l’État est incapable de
remplir ses missions de base et où, au départ, les
inégalités sont très marquées, il existe un risque réel de
voir la décentralisation aggraver la pauvreté au lieu de la
réduire. Ces données contradictoires montrent bien que
le rapport entre la décentralisation et la réduction de la
pauvreté est loin d’être évident et que le résultat de la
décentralisation est fortement tributaire des spécificités
de chaque pays mais aussi de la manière dont le processus
a été conçu.
Si des caractéristiques telles que la taille d’un pays ou les
niveaux de revenu ont moins d’importance que l’on aurait
pu le penser, les facteurs liés à la conception et à la mise
en œuvre de la réforme de décentralisation (engagement
des élites, pouvoirs et ressources délégués, informations
sur les institutions locales, mécanismes participatifs, etc.)
sont essentiels pour la réussite d’une décentralisation
favorable aux pauvres. L’importance relative de ces
facteurs est discutée dans les paragraphes qui suivent.
Nous les avons regroupés en quatre groupes, chacun
reflétant le champ d’intervention publique correspondant.
♦ Fonction politique : l’engagement des élites/
du gouvernement central, mais aussi la mise en place
d’un processus transparent et participatif, sont essentiels.
Une décentralisation favorable aux pauvres exige des
autorités centrales qu’elles soient capables de mener à
bien les réformes – et qu’elles soient disposées à le faire.
Ce constat a plusieurs implications : les gouvernements
locaux reçoivent des ressources stables, fiables et en
quantité suffisante ; des investissements dans les
capacités humaines locales sont réalisés ; le gouvernement
national poursuit des politiques rationnelles ; l’appui des
bailleurs est lui aussi cohérent et substantiel.
Une bonne circulation des informations entre les
gouvernements locaux et la population permet aux
citoyens de participer aux prises de décision (ainsi en
Inde, toutes les institutions des Panchayati Raj ont mis
en place des quotas pour les groupes marginalisés). Ce
système favorise ainsi la responsabilisation des pauvres,
l’efficacité et l’amélioration de la gouvernance. Une société
civile forte et l’adoption de mesures visant à l’intégrer
dans le processus de décentralisation pourraient venir
conforter un peu plus ces résultats favorables aux pauvres.
Pourtant, tout dépendra de la structure organisationnelle
de la société civile, de sa composition et de ses capacités
à représenter et à défendre les intérêts des pauvres. Il
convient de surveil ler les comportements des
administrations en instaurant par exemple des comités de
vigilance (Bolivie), des commissions d’investigation
(Afrique du Sud) ou des systèmes d’inspection et d’audits
sociaux (Inde).
♦ Fonction administrative : il faut une répartition claire des
fonctions entre les différents acteurs ; et consacrer du temps
au renforcement des capacités locales et régionales.
La plupart des pays en voie de décentralisation sont
confrontés à une interférence plus ou moins marquée de
la part du gouvernement central. Elle sera directe (comme
en Guinée, dans la politique locale) ou indirecte,
conséquence dans ce cas-là de l’incohérence des
politiques. Ainsi au Nicaragua, alors que la décentralisation
déléguait officiellement de larges fonctions aux autorités
locales pour assurer le développement local, l’Assemblée
nationale restait responsable de l’approbation des budgets
municipaux, réduisant de ce fait fortement les pouvoirs
politiques et les ressources des échelons locaux. Faute
de ressources et de pouvoirs ad hoc, les autorités locales
doivent souvent cantonner leurs interventions aux activités
municipales – comme le revêtement des routes.
Les gouvernements centraux tendent à justifier leur
ingérence dans la politique locale en insistant sur le
manque de capacités locales. Pourtant, cet argument
masque en général une vraie réticence à déléguer les
pouvoirs. L’expérience de pays comme l’Indonésie, le
Maroc, le Pakistan ou la Thaïlande montre que, dans les
années qui suivent la décentralisation, les gouvernements
locaux arrivent à augmenter – faiblement, il est vrai –
leurs capacités. La délégation des pouvoirs peut engendrer
des processus « d’apprentissage par la pratique » qui,
grâce aux initiatives prises par les autorités locales, les
aident à consolider leurs capacités. En Indonésie, le choix
de procéder à une décentralisation radicale et rapide
(approche dite du « big bang ») a contribué à accroître
les capacités locales même si le niveau atteint n’est pas
encore suffisant. Dans les pays caractérisés par de fortes
inégalités, de faibles taux d’alphabétisation et une société
civile et politique encore embryonnaire, une approche
plus progressive et à l’initiative du gouvernement central
semble plus appropriée. Ainsi au Madhya Pradesh, l’État
central a graduellement délégué des fonctions aux
autorités locales tout en créant des structures
administratives parallèles visant à renforcer les capacités
humaines locales. La décentralisation conduit à une
redistribution du pouvoir – elle implique de ce fait de
délicats arbitrages et des luttes de pouvoir.
♦ Fonction budgétaire : l’octroi aux autorités locales
de ressources garanties est vital.
Lorsque les gouvernements locaux devaient se contenter
de financer leurs politiques par les impôts locaux, la
décentralisation a accru les inégalités inter-régionales,
notamment en présence – comme en Chine – de fortes
variations des taux de croissance d’une région à l’autre.
Parallèlement, le financement des politiques locales qui
Déterminants d’une décentralisation
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passe surtout par des transferts du gouvernement central
est typique d’États qui cherchent à saper la réforme. La
dépendance à l’égard de ces transferts réduit l’autorité
et la légitimité des autorités locales. Les ressources
doivent donc provenir à la fois des gouvernements
centraux et des impôts locaux. Les autorités locales
peuvent aussi rechercher l’appui du secteur privé (à but
lucratif et ONG) pour la prestation de services publics, en
déléguant totalement les responsabilités et fonctions à
des prestataires privés (privatisations) ou en adoptant
des formes institutionnalisées de collaboration qui
prévoient un partage des risques et des dépenses entre
tous les acteurs (partenariats publics/privés). Pourtant,
et c’est surtout vrai des partenariats publics/privés, nous
manquons encore de connaissances approfondies sur le
fonctionnement de ces formes de collaboration lorsque
les limites respectives du secteur privé et du secteur public
sont mal définies et que les institutions publiques n’ont
guère de pouvoir.
♦ Le rôle des autorités locales : elles servent de point
d’entrée pour l’instauration et l’amélioration des politiques
favorables aux pauvres ; mais le gouvernement central
continue de jouer un rôle important.
L’intervention des autorités locales dans l’instauration de
politiques favorables aux pauvres au niveau local et
régional est cruciale. Une fois la décentralisation réalisée,
il convient de prendre des mesures qui permettent de
suivre les progrès réalisés en termes d’amélioration du
ciblage, de la participation, de la prestation de services
et des procédures administratives. Parmi les instruments
de pilotage disponibles figurent les enquêtes de suivi
des dépenses publiques (ESDP) et les enquêtes
quantitatives sur la prestation de services.
La responsabilité globale de l’adoption de politiques
favorables aux pauvres relève cependant toujours de l’État
central. Ce sera d’autant plus vrai dans les environnements
marqués par de fortes inégalités reposant sur des
institutions sociales traditionnelles – comme les castes
ou le genre. Des recherches récentes conduites en Inde
indiquent que l’octroi du pouvoir aux échelons locaux de
gouvernement ne suffit pas pour augmenter la
participation des groupes marginalisés. L’État central doit
garantir que les inégalités sociales sur le terrain soient
prises en compte, et que, une fois enclenché, le processus
de décentralisation ne vienne pas les aggraver. Tel a été
le cas en Ouganda, où la réforme judiciaire a favorisé les
conseils locaux qui ont souvent une attitude discriminatoire
à l’encontre des femmes. Pour avoir un impact réel sur
les pauvres, la décentralisation doit aller de pair avec des
mesures complémentaires comme des investissements
éducatifs ou la promotion d’une réforme agraire.
Si personne ne conteste le rôle moteur que l’État central
doit continuer d’assumer dans la prestation de biens publics
ayant des retombées sur plusieurs domaines de compétence
(comme dans le cas de la vaccination, par exemple), les
autorités locales ne jouant alors qu’un rôle subsidiaire, les
opinions divergent encore quant aux biens qui ne sont pas
exclusivement publics – à l’instar de la santé, de l’éducation,
de l’adduction d’eau et de l’assainissement.
En septembre 2004, le Centre de développement et le réseau
du CAD sur la gouvernance des pays de l’OCDE (DCD/
GOVNET) ont organisé à Paris un atelier sur le thème : « La
décentralisation et la réduction de la pauvreté : des leçons
à l’action ». Cet atelier, qui a réuni plus de 70 décideurs
et experts, entendait évaluer les stratégies de réduction
de la pauvreté liées à la décentralisation et discuter des
recommandations pour améliorer le soutien et les
initiatives des bailleurs. Il est ressorti de ces travaux que
les bailleurs devaient optimiser leur coordination,
s’engager à long terme en faveur d’une décentralisation
favorable aux pauvres et analyser en profondeur le
contexte local. Les points suivants sont apparus comme
des facteurs essentiels pour l’implication des bailleurs dans
les processus de décentralisation susceptibles d’améliorer
le sort des populations pauvres :
♦ Les politiques des bailleurs doivent faire preuve
de davantage de cohérence et d’une coordination accrue.
Les bailleurs ont prôné en même temps la décentralisation
et les approches sectorielles (SWAP), lesquelles viennent
plutôt re-centraliser l’autorité. En outre, la place privilégiée
accordée par les politiques d’aide aux projets initiés par
les communautés a souvent amené les bailleurs à appuyer
des structures administratives parallèles qui, dans certains
cas, ont sapé l’autorité et les capacités des gouvernements
locaux élus. Seule une cohérence accrue des politiques
permettra de remédier à ce problème, avec consultation
systématique des gouvernements locaux avant d’approuver
des projets communautaires de développement. De la
même manière, les bailleurs devront mieux coordonner
leurs interventions dans un souci de rationalité et en
s’appuyant sur leurs propres expériences. Une coordination
renforcée entre la décentralisation et d’autres réformes/
politiques importantes (comme les CSRP) est indispensable.
♦ Les bailleurs doivent avoir davantage conscience de
l’économie politique de la décentralisation en tant que
processus de changement.
La décentralisation est un processus politique qui ne peut
produire des bénéficies pour toutes les parties ; comme
avec toutes les réformes, certains y gagneront quand
d’autres y perdront. Il sera donc essentiel de s’assurer
que les gagnants deviennent de fervents avocats de la
réforme et que les perdants aient accès à un interlocuteur
chargé de traiter leurs doléances. Il convient également
de réfléchir aux différentes formes de compensation.
Leçons des bailleurs de fonds
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Les bailleurs devront donc promouvoir des réformes à
plusieurs échelons de gouvernement – y compris aux
niveaux intermédiaires qui ont un rôle administratif et
politique ; faute de quoi, les réformes n’auront pas d’effets
durables. Si les services chargés de la planification sont
probablement assez favorables à la décentralisation, les
ministères des Finances ou de l’Intérieur pourraient bien
être plus réticents, surtout lorsqu’il leur s’agira de gérer
le processus.
♦ Les bailleurs doivent souligner le caractère instrumental
de la décentralisation pour la création d’un environnement
propice à la réduction de la pauvreté au niveau local.
La décentralisation doit être promue en tant qu’instrument
efficace de la lutte contre la pauvreté, et non comme une
fin en soi. Dans la mesure où le rapport entre
décentralisation et pauvreté n’est pas clairement établi,
les bailleurs devraient s’efforcer de le consolider en faisant
pression sur les gouvernements pour obtenir des résultats
favorables aux pauvres, en pilotant en permanence le
processus et en adoptant des politiques souples, centrées
sur l’impact (apprentissage par la pratique) et propres à
chaque pays. Pour assurer un pilotage efficace, l’adoption
de normes de prestations de services et de cibles de
résultats favorables aux pauvres est nécessaire.
♦ Les bailleurs doivent encourager les systèmes de transfert
doublés d’incitations à améliorer l’efficacité ; ils doivent aussi
contribuer à l’instauration de capacités locales susceptibles de
générer sur place des ressources durables.
Ces systèmes de transfert aideront à trouver un équilibre
entre la responsabilité (descendante) des autorités locales
vis-à-vis des citoyens et leur responsabilité (ascendante)
vis-à-vis des institutions centrales. Une claire répartition
des fonctions, la formation des autorités locales et la
transparence sont les pierres angulaires de ce processus
de construction de capacités budgétaires locales fiables.
L’importance du rôle des bailleurs pour la promotion de
résultats favorables aux pauvres ressort clairement de
ces recommandations. Pourtant, les gouvernements
nationaux doivent aussi s’approprier les réformes. Il leur
incombe de décider du moment, de l’objet et de la
profondeur de la décentralisation. Pour réaliser une
décentralisation favorable aux pauvres, l’engagement des
élites nationales et l’appui de la population sont
fondamentaux – tandis qu’un soutien solide de la part
des bailleurs pourrait nettement contribuer à mener cette
tâche à bien.
Encadré 2. Règles de conduite à l’attention des bailleurs
Ce que les bailleurs doivent faire :
♦ coordonner leurs interventions et s’engager en faveur d’une décentralisation propice aux pauvres ;
♦ insister sur les relations entre décentralisation et pauvreté ;
♦ instaurer des systèmes d’incitation pour une saine gouvernance et des résultats favorables aux pauvres ;
♦ vérifier que l’État central n’intervienne ni directement ni indirectement dans les politiques et les décisions locales ;
♦ surveiller la corruption et les déséquilibres budgétaires ;
♦ soutenir les politiques de renforcement des gouvernements locaux, leur indépendance et leurs capacités fiscales
(privilégier la coordination entre autorités locales ; créer des fonds régionaux) ;
♦ être flexibles (et avoir ainsi une influence sur le pilotage et l’apprentissage par la pratique) ;
♦ comprendre, avant d’appuyer un processus de décentralisation, comment leur aide s’inscrit dans le système et quels
sont les obstacles formels et institutionnels.
Ce que les bailleurs doivent éviter :
♦ créer des structures parallèles ;
♦ considérer la décentralisation comme une panacée applicable à toutes les situations ;
♦ percevoir la décentralisation comme une réforme « taille unique » – cela ne marchera pas.
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Pour consulter les Repères du Centre de développement
www.oecd.org/dev/reperes
les Cahiers de politique économique
www.oecd.org/dev/cahiers
ou les nouveaux Documents de travail
www.oecd.org/dev/dt
Les lecteurs sont invités à citer ou reproduire les informations des
Repères du Centre de développement de l’OCDE dans leurs propres
publications. En échange, le Centre demande les remerciements de
rigueur ainsi qu’un exemplaire de la publication. Le texte intégral
des Repères et d’autres informations sur le Centre de développement
et ses travaux sont disponibles sur : www.oecd.org/dev.
Centre de développement de l’OCDE
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Tél : 33 (0)1 45.24.82.00
Fax : 33 (0)1 44.30.61.49
mél : cendev.contact@oecd.org
Bibliographie choisie
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Brief, No.12, ECDPM, Maastricht, http://www.oneworld.org/ecdpm/pmb/b12_gb.htm
Jütting, J., C. Kauffmann, I. Mc Donnell, H. Osterrieder, N. Pinaud et L. Wegner (2004), “Decentralisation and Poverty in
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